Les observateurs inquiets ont raison de craindre que le régime en place ne nous conduise vers la déclaration officielle de la deuxième guerre en Côte d’Ivoire. En tous cas, vu ce que laissent entrevoir les positions des uns et autres, les prémisses en disent long sur le climat qui prévaut en Côte d’Ivoire. Et l’on ne manque de s’interroger sur l’intention du régime Ouattara. Face à la vague d’attaques attribuées à un commando au visage encore méconnu, la psychose s’est emparé du coup du camp Ouattara. Des réunions se multiplient et se ressemblent avec leur florilège de mesures prises. Des armes et aéronefs de guerre annoncés pour faire face à l’ennemi invisible. Des langues plus futées font état d’ailleurs de la présence sur le sol ivoirien de cet arsenal de guerre au mépris des réalités quotidiennes. A peine un repas par jour pour un Ivoirien. La paupérisation gagne du terrain. Et pourtant le régime s’adonne à un surarmement. Des sources parlent d’une présence remarquée des autorités actuelles dans le marché noir des marchands d’armes. Conscient donc de l’imminence d’un clash à l’horizon, le régime vient de trouver une issue peu surprenante. Le convoi, dit-on, des armes lourdes vers l’ancien quartier général de l’ex-rébellion. Depuis la mi-août les informations en notre possession font état de ce que des armes seraient évacuées des camps militaires pour se retrouver dans le nord du pays. Notamment les casernes de Bouaké et Korhogo qui en sont les destinations choisies dans ce remue-ménage. «Depuis quelques semaines, nous assistons au convoi des armes de guerre vers Bouaké», nous confie sous le couvert de l’anonymat, un habitué des dossiers militaires à Daloa. Que cache cette intention ? Quel objectif vise l’état-major des armées des Frci. Au moment où les arrestations, les rapts, la torture et les emprisonnements des partisans, militants et proches collaborateurs du président de la République d’alors, Laurent Gbagbo, sont devenus les activités quotidiennes du régime Ouattara. La Commission dialogue et vérité (Cdvr) de Charles Konan Banny a enfoncé le clou à ce sujet, même si elle évite de tirer sur l’ambulance. «La Nation est en danger», a récemment fait savoir Charles Konan Banny. «Certains veulent la paix en associant tous les Ivoiriens, d’autres par contre estiment que la paix peut se faire sans l’implication forcée de tous», dixit-il en substance à l’occasion de «sa journée de purification», tenue au Palais de la culture à Treichville. Une sortie permettant aux Ivoiriens de s’interroger sur l’aboutissement du processus de réconciliation lancé depuis la prise du pouvoir par l’actuel régime. Plus d’un an après la mise sur pied de la Cdvr, la réconciliation a pris du plomb dans l’aile. Des Ivoiriens attendent toujours les résultats des tractations et des méthodes visant à renouer le dialogue entre le pouvoir et l’opposition ivoirienne. Au point mort, le dialogue républicain a fait place à une série de traques sans merci aux partisans de Laurent Gbagbo. Depuis lors, les positions restent figées et le régime s’enlise de plus en plus dans la terreur et dans la course à l’armement. Une attitude qui sape du coup le processus de la réconciliation et augure de lendemains incertains pour Alassane Ouattara. Et comme en septembre 2002 (avec l’avènement de la rébellion), la partie Nord du pays redevient une base arrière d’une éventuelle attaque en Côte d’Ivoire. Il ne faut pas souhaiter qu’un septembre 2002 bis se profile à l’horizon. Mais le convoi des armes lourdes dans l’ex-fief de l’ex-rebellions achève de convaincre de la volonté du régime à «régler tout par la force». Puisqu’il annonce qu’il bénéficie du renfort, apprend-on, des hélicoptères de combat.
Toussaint N’Gotta
Toussaint N’Gotta