Après trente années passées au service de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), où elle a eu comme patrons Alassane Ouattara, actuel chef de l’Etat ivoirien, Charles Konan Banny, ancien premier ministre et aujourd’hui président de la Commission Dialogue, Vérité, Réconciliation, Berthe Ipou Honga, de nationalité ivoirienne, aurait dû utiliser ses petites économies pour assurer ses vieux jours et voir grandir ses petits enfants.
Mais voilà, pendant des décennies, au cours de séminaires, de colloques et autres réunions organisées par la Banque Centrale, elle a entendu ces belles paroles : «Tant que les couches sociales les plus défavorisées n’auront pas accès aux crédits bancaires à travers le système des micro-finances, il sera difficile de faire reculer la pauvreté dans les pays membres de l’UEMOA… »
Ces belles paroles dans la tête, une fois sortie de la Banque Centrale, elle a créé, en association avec quelques anciens cadres ivoiriens de la même banque, un Etablissement financier dénommé « Crédit Solidaire ». Avec pour ambitions de révolutionner l’accès au crédit pour les pauvres.
Elle n’aurait jamais dû…
L’histoire avait pourtant bien commencé
Le 4 février 2004, est parue dans le quotidien gouvernemental Fraternité Matin N°12072, l’annonce légale portant création de la société Anonyme dénommée « Crédit Solidaire », au capital de quatre cents millions de FCFA. Cette structure ayant la forme d’un établissement financier est l’œuvre de Berthe Ipou Honga. Le 9 mars 2005, elle introduit auprès des autorités compétentes, une demande pour « l’exercice des activités d’Etablissement financier du premier groupe en Côte d’Ivoire ».
Sur la base du rapport d’instruction N°5DA17K06 du 7 mars 2006 de la Bceao, la Commission bancaire de l’Uemoa a rendu la décision N°265/CB/C du 20 mars 2006 portant « avis conforme favorable à une demande d’agrément en qualité d’Etablissement financier du premier groupe, introduite par la société Anonyme dénommée Crédit Solidaire. »
A la suite de toutes ces étapes, le 5 juillet 2007, le ministre de l’Economie et des finances, Charles Diby Koffi, a pris l’arrêté N°179/MEF/DGTCP/SDAMB portant agrément de la société anonyme CRDEIT SOLIDAIRE, en qualité d’Etablissement financier.
Dans cet arrêté le ministre écrit : «Considérant que la société anonyme CREDIT SOLIDAIRE, eu égard à son programme d’activités et aux moyens humains, techniques et financiers qu’elle prévoit de mettre en œuvre, est en mesure de réaliser ses objectifs de développement, dans les conditions sécuritaires pour la clientèle et compatibles avec le bon fonctionnement du système bancaire…Arrête : article 1er : Il est accordé un agrément à la société anonyme Crédit Solidaire en qualité d’établissement financier du premier groupe… »
Leur agrément en mains, Berthe Ipou Honga et ses partenaires se mettent au travail. Ils travaillent si bien qu’à partir de 2009, Crédit Solidaire obtient la confiance de plusieurs centaines de petits épargnants.
Audition à Bissau
Courant novembre 2009, dans le cadre de l’augmentation du capital social des structures bancaires de l’espace Uemoa dont la date limite est fixée au 31 décembre 2010, la commission bancaire, comme cela est de son pouvoir, effectue des contrôles dans certaines banques et établissements financiers. Crédit Solidaire est sur la liste des structures à contrôler.
C’est que le 25 octobre 2009, l’ex-gouverneur, Dakoury Tabley avait adressé l’ « Avis N°01/2009/SEC du 15 octobre 2009 aux banques et établissements financiers relatif à la mise en œuvre de la décision de relèvement du capital social minimum des établissements de crédit de l’Union Monétaire Ouest Africaine (Uemoa) ».
Dans cet avis, l’ex-gouverneur avait écrit : « Le délai du 31 décembre 2010, fixé pour la réalisation de la phase qui porte sur le relèvement du capital à 5 milliards pour les banques et à 1 milliard pour les établissements financiers, devra être strictement respecté. Aucune dérogation ne sera accordée ».
Les responsables de Crédit Solidaire, le jour du contrôle, fournissent aux envoyés de la Commission bancaire, tous les documents demandés et se soumettent à toutes les questions. Rien, en effet, n’est opposable à la Commission bancaire, pas même le secret professionnel.
Le 26 mars 2010, les responsables de Crédit Solidaire sont convoqués à la 79ème session de la Commission bancaire tenue en Guinée Bissau. Là, devant l’ancien gouverneur de la Bceao, Dakoury Tabley, ils sont auditionnés. En présence de l’ancien directeur du Trésor public, Faustin Honozon, représentant l’Etat de Côte d’Ivoire à cette réunion, en qualité de Commissaire.
Après l’exposé de Berthe Ipou Honga, c’est l’ex-gouverneur qui prend la parole : « Crédit Solidaire, vraiment nous sommes solidaires avec vous. Nous vous avons laissé suffisamment de temps pour vous exprimer. Nous comprenons vos difficultés. Que voulez-vous qu’on fasse pour vous ? » Interroge-t-il la directrice de Crédit Solidaire. Réponse de cette dernière : « Que la loi bancaire qui dispose que tout le système doit se mobiliser pour aider une banque en difficulté soit mise en œuvre. C’est ce que nous voulons ».
Se tournant alors vers Faustin Honozon, l’ex-gouverneur demande : « Est-ce que l’Etat de Côte d’Ivoire peut faire quelque chose pour Crédit Solidaire ?» La réponse de Faustin Honozon ? Juste un petit sourire. Qui en disait long?
La naissance d’une rumeur
Berthe Ipou Honga et son équipe rentrent à Abidjan après la réunion. En attendant de recevoir les conclusions tirées par la Commission Bancaire, de leur audition.
Dans leur tête, une seule question. Comment procéder pour trouver les 600 millions nécessaires pour faire passer leur capital social, de 400 millions à 1 milliard de FCFA avant le 31 décembre 2010 ?
Pour relever ce défi, la directrice générale et ses collaborateurs élaborent une stratégie de mobilisation de fonds.
Sauf qu’au moment de mettre cette stratégie en marche, une vilaine rumeur savamment orchestrée par la Commission Bancaire va circuler dans le microcosme financier de la Côte d’Ivoire. Selon cette rumeur, la Commission bancaire, après l’audition des responsables de Crédit Solidaire le 26 mars 2010 à Bissau, avait, ce même jour, retiré l’agrément de cette structure.
Ayant passé 30 ans de sa vie au service de la Bceao et connaissant tous les niveaux de sanctions disciplinaires à franchir avant de retirer l’agrément à un établissement financier, Berthe Ipou Honga ne prend pas la rumeur au sérieux. Surtout que deux mois s’étaient écoulés et que la Commission Bancaire ne lui avait rien notifié au sujet de ses conclusions après leur audition du 26 mars 2010.
En effet, selon l’article 28 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «Lorsque la Commission Bancaire constate une infraction à la réglementation bancaire et à toutes autres législations applicables aux établissements de crédit sur le territoire d'un Etat membre, elle en informe le Ministre chargé des Finances de cet Etat et, sans préjudice des sanctions pénales ou autres encourues, prononce une ou plusieurs des sanctions disciplinaires suivantes : 1) l'avertissement ; 2) le blâme ; 3) la suspension ou l'interdiction de tout ou partie des opérations ; 4) toutes autres limitations dans l'exercice de la profession ; 5) la suspension ou la démission d'office des dirigeants responsables ; 6) le retrait d'agrément ou d’autorisation d’installation. »
Le retrait de l’agrément qui est une décision grave signifiant que l’établissement qui en est victime est une vraie menace pour l’ensemble de la zone Uemoa n’intervient qu’en dernier recours. Or, jusqu’à l’audition du 26 mars 2010, Crédit Solidaire n’avait reçu auparavant aucune sanction de quelque nature que ce soit. En tout cas, si des sanctions intermédiaires avaient été prises, elles n’ont jamais été notifiées à ses responsables.
Mais la rumeur est si persistante que certains partenaires de Crédit Solidaire, sur la pointe des pieds, vont se retirer, effrayés. Certains clients de la structure vont également demander le remboursement immédiat de leurs avoirs.
Devant cette campagne de déstabilisation, la directrice générale sollicite et obtient une audience de clarification avec le ministre de l’Economie et des finances, Charles Diby Koffi.
Les instructions de Charles Diby à Berthe Ipou Honga
Le 29 juin 2010, Charles Diby Koffi accorde donc une audience à la directrice générale de Crédit Solidaire. Là, cette dernière a tenu à savoir si oui ou non, la Commission bancaire avait retiré l’agrément à sa structure. Et si le Ministre en était informé. Réponse de Charles Diby Koffi : « Non, ce ne sont que des rumeurs». Car, selon lui, il n’avait reçu aucune décision de ce genre à notifier à Crédit Solidaire, comme l’exige les textes de la Convention régissant la Commission Bancaire. Et le ministre de demander à la directrice générale de Crédit Solidaire de produire un communiqué dans le journal gouvernemental «Fraternité Matin», pour mettre définitivement fin à cette rumeur. Ce que cette dernière fait les lundi 12 et mercredi 14 juillet 2010 (voir Fac Similé 1). Dans ce communiqué, la directrice écrit : « La Direction générale de Crédit Solidaire, établissement de crédit, agréé en qualité d’établissement financier à caractère bancaire (…) informe son aimable clientèle et l’ensemble des opérateurs économiques que, Crédit Solidaire n’a jamais fait l’objet d’un retrait d’agrément ».
A la suite de ce communiqué, il n’y aura aucune réaction, ni de la Bceao, ni de la Commission Bancaire. Bien au contraire, ces deux entités vont continuer à travailler et à correspondre de façon intense avec Crédit Solidaire.
Le 21 juillet 2010, Berthe Ipou Honga adresse un courrier de remerciement à Diby Koffi Charles pour ses conseils avisés et sa disponibilité vis-à-vis de sa structure. Et en profite pour faire une requête auprès de l’Etat de Côte d’Ivoire: « (…) nous voudrions vous exprimer, écrit-elle, nos sincères remerciements et nos sentiments de profonde gratitude, pour l’attention que vous avez bien voulu accorder aux questions que nous avons évoquées, concernant le fonctionnement de notre Etablissement.
Votre disponibilité et les conseils avisés que vous nous avez prodigués, constituent pour nous, un signe d’encouragement et une source de motivation supplémentaire pour redoubler d’effort, en vue de l’édification d’un instrument utile et efficace de soutien aux efforts de lutte contre la pauvreté.
Comme nous avons eu à l’indiquer au cours de l’audience, et afin de permettre à notre Etablissement de faire face à ses obligations découlant de l’application de la mesure de relèvement du capital social minimum des Etablissements de Crédit de l’UEMOA (capital social minimum des Etablissements Financiers porté de 300 millions de FCFA à 1 milliard de FCFA pour la première phase), nous avons l’honneur de solliciter un appui financier de l’Etat, pour le gap restant à couvrir, qui s’élève à FCFA 300 millions.
Dans le même registre, Crédit Solidaire a pris des contacts avec un certain nombre d’institutions d’aide au développement, dont l’AFD (Agence Française de Développement) auprès de laquelle un appui financier a été sollicité.
Cette institution a marqué un intérêt certain pour notre dossier qui, selon elle, est éligible à l’initiative FISEA (Fonds d’Investissement et de Soutien aux Entreprises en Afrique) du Groupe de l’AFD, Initiative dont l’objectif est de favoriser la croissance des entreprises et institutions financières en Afrique Subsaharienne, notamment dans les régions instables ou en sortie de crise. Une caution morale de la part du Ministre de l’Economie et des Finances à l’égard de notre démarche faciliterait les négociations avec l’AFD ».
A la suite de ce courrier, le Ministre de l’Economie acceptera de parrainer une activité de mobilisation de fonds organisée par Crédit Solidaire.
La caution (im)morale de Diby Koffi ?
La rumeur s’étant quelque peu estompée, Crédit Solidaire va mettre en marche sa stratégie de mobilisation des 300 millions de FCFA nécessaires pour faire passer son capital social minimum, au départ de de 400 millions, puis de 630 millions, à 1 milliard.
Dans le cadre de la mobilisation de ces fonds, les dirigeants de cette structure, en association avec la Confédération Internationale Chrétienne de Développement, vont organiser un « Cocktail de presse » le jeudi 5 août 2010 à l’hôtel Pullman au Plateau.
Placé sous le parrainage de Charles Diby Koffi, cette cérémonie avait connu un franc succès et permis la mobilisation d’importantes ressources.
Entre-temps, depuis le 26 mars 2010, la Commission bancaire, l’Agence nationale de la Bceao et Crédit Solidaire (dont l’agrément aurait été retiré le 26 mars 2010), s’écrivaient régulièrement.
Une intense correspondance avec Crédit Solidaire
Le 27 mai 2010, alors que la rumeur sur le retrait de l’agrément de sa structure se faisait persistante et avant qu’elle n’aille se plaindre auprès de Diby Koffi, la directrice générale de Crédit Solidaire avait adressé un courrier au Président de la Commission bancaire de l’Uemoa, avec pour objet : « Relèvement du capital social des Etablissements de crédit» (voir Fac Similé 2). Dans ce courrier, elle avait écrit : « (…) nous avons l’honneur de venir vous faire tenir ci-joint, le nouveau chronogramme des mesures de relèvement du capital social minimum de Crédit Solidaire, qui prend en compte les libérations enregistrées au cours des deux derniers mois. Il ressort de cette situation qu’à ce jour, la libération du capital est effective à hauteur de 630 millions de FCFA. Aussi, les formalités juridiques d’augmentation du capital social de notre Etablissement, initialement prévues pour fin septembre 2010, peuvent d’ores et déjà intervenir». Et cette lettre adressée au président de la Commission bancaire faisait suite à une note adressée le 21 avril 2010 à tous les Etablissements financiers (y compris Crédit Solidaire), par le directeur national de la Bceao.
Le 1er juin 2010, la directrice de Crédit Solidaire avait adressé un courrier similaire au directeur national de la Bceao.
Le 1er juillet 2010, le directeur national de la Bceao pour la Côte d’Ivoire avait invité toutes les structures y compris Crédit Solidaire, à « la Cérémonie de lancement officiel de la Centrale des Incidents de Paiement (CIP) de l’UEMOA le 8 juillet 2010 à Lomé ».
Le 18 juin 2010, la Bceao (Direction nationale pour la Côte d’Ivoire) avait adressé à la directrice de Crédit Solidaire, un courrier avec pour objet : « Listes additives de signatures autorisées-Exercice 2010 », un document confidentiel. (Voir fac similé 3).
Le 14 juillet 2010, la Bceao avait écrit à toutes les Banques et Etablissements financiers présents en Côte d’Ivoire (y compris Crédit Solidaire), pour les tenir informer d’une « Mission de prospection de la Société de Commercialisation d’Informations d’Entreprise (SCIE-SA)».
Le 2 août 2010, en réponse à une requête de la directrice de Crédit Solidaire, le directeur national de la Bceao avait écrit : «A l’analyse de votre requête, nous vous accordons un délai allant jusqu’au 16 août 2010 pour la transmission des documents concernés. Passé ce délai, votre établissement sera passible des sanctions prévues par la réglementation bancaire en vigueur». Sanctions jamais prises…
Les 4 et 18 octobre 2010, le même directeur national de la Bceao a encore écrit à tous les Etablissements bancaires et financiers de Côte d’Ivoire (y compris Crédit Solidaire) au sujet du lancement de deux « appels d’offres du marché monétaire ».
Et jusque-là, personne, ni du côté de la Commission Bancaire, ni du côté de la Bceao, n’avait fourni à la directrice de Crédit Solidaire, quelque information que ce soit, concernant le retrait de l’agrément de sa structure. Depuis le 26 mars 2010, comme le disaient les bruits qui couraient dans le secteur et qui avaient fait fuir certains de ses partenaires et autres clients.
Evidemment, « L’Eléphant » détient une copie de toutes ces lettres.
La machination
A force d’ingéniosité et sans l’apport des 300 millions sollicités à l’Etat de Côte d’Ivoire, la directrice générale de Crédit Solidaire réussit à mobiliser les fonds nécessaires pour relever le capital social de 400 millions à 1 milliard. Avant le 31 décembre 2010. La Commission bancaire et la Bceao en sont informées. Le délai imposé a donc été respecté.
Les rapports resteront ainsi normaux entre Crédit Solidaire, la Commission Bancaire et la Bceao, jusqu’à la fermeture de tous les Etablissements financiers et bancaires, en février 2011, à la suite de la crise post-électorale.
A la fin de cette crise, comme toutes les structures financières, Crédit Solidaire reprend ses activités. Dans le ciel des relations avec la Commission bancaire et la Bceao, aucun nuage.
Pour preuve, le 19 juillet 2011, la Bceao (Direction nationale pour la Côte d’Ivoire) a adressé un courrier à la directrice de Crédit Solidaire avec pour objet : « Listes des signatures autorisées-Exercice 2011 », un document ultra-confidentiel auquel n’ont accès que les structures financières dument reconnues comme telles et possédant un agrément. (Voir fac similé 4).
Une semaine plus tôt, c’est la BOAD (Banque Ouest Africaine de Développement), qui avait invité Crédit Solidaire à participer à la « Journée Porte Ouverte de la BOAD en Côte d’Ivoire » (voir fac similé 5).
Est-il possible qu’une structure financière interdite de fonctionnement depuis mars 2010 puisse avoir de telles relations avec les institutions financières de l’espace UEMOA ? Cela est impossible. Et pourtant !
Le 6 septembre 2011, alors qu’elle a réussi à reconquérir la confiance de nombreux partenaires et que des dossiers de demande de financement introduits par sa structure auprès d’institutions de financement internationales sont totalement bouclés, Charles Diby Koffi passe subitement à l’action. Il prend l’arrêté N°251/MEF/DGTCP/DT/SDAMB. Arrêté par lequel il notifie à la directrice de Crédit Solidaire, le retrait de l’agrément de sa structure. Retrait d’agrément qui se fonde sur la décision N°453/CB/C du 26 mars 2010 de la Commission Bancaire.
Ainsi donc, comme la rumeur l’avait annoncé, depuis le 26 mars 2010, la Commission Bancaire avait retiré l’agrément à Crédit Solidaire. Et il a fallu 18 mois à Diby Koffi pour notifier cette décision à la directrice de cette structure.
Mais ce n’est pas le plus grave. Le 17 avril 2010 (voir fac similé 5), le directeur national de la Bceao avait transmis à Diby Koffi, les « Décisions de la 79ème session de la Commission Bancaire de l’UEMOA » sous la désignation « confidentiel (décisions de la 79ème session de la Commission Bancaire de l’UEMOA, tenue le 26 mars 2010) ».
Ainsi donc, lorsque Diby Koffi recevait la directrice de Crédit Solidaire le 29 juin 2010 à son cabinet, il savait depuis 3 mois que cette structure n’avait plus d’agrément et en conséquence, elle ne devrait plus fonctionner. Mais il a nié l’existence de ce retrait d’agrément et lui a demandé de produire un démenti dans la presse. A quoi obéissait une telle attitude ?
Selon l’article 29 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «Les décisions prises en vertu de l'article 28 (retrait d’agrément ou d’autorisation d’installation, ndlr) sont exécutoires dès leur notification aux intéressés. La notification est faite par la Commission Bancaire.
Toutefois, la décision de retrait d'agrément ou de retrait d’autorisation d’installation est communiquée au Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné qui doit, dans le délai de sept (7) jours calendaires à compter de cette communication, notifier la décision à l'intéressé. Cependant, si le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné saisit le Conseil des Ministres de l'Union, ledit délai de sept (7) jours court à partir du jour de la notification de la décision du Conseil des Ministres au Ministre chargé des Finances compétent. »
Diby Koffi disposait donc de sept jours à partir du 17 avril 2010 (date à laquelle il a reçu les décisions de la Commission Bancaire) pour notifier la décision de retrait d’agrément aux dirigeants de Crédit Solidaire. Mais il a pris 18 mois pour le faire. Pourquoi ? Surtout qu’il n’avait pas protesté, en grand protecteur des intérêts des banques ivoiriennes, contre cette décision de la Commission Bancaire en saisissant le Conseil des Ministres de l’UEMOA ?
Et la Commission Bancaire ? Pourquoi n’a-t-elle pas pris des dispositions pour que sa décision soit notifiée aux dirigeants de Crédit Solidaire. S’était-elle entendue avec Diby Koffi pour ne pas le faire ? Car, selon l’article 37 de l’Annexe précité, « Le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné dispose d'un délai de trente (30) jours calendaires pour prendre et notifier aux établissements de crédit, les actes réglementaires requis par les décisions et avis conformes de la Commission Bancaire. Toutefois, les décisions de retrait d'agrément et de retrait d'autorisation d'installation doivent être notifiées aux intéressés dans un délai de sept (7) jours calendaires.
Les délais susvisés courent à compter de la date de réception par le Ministre chargé des Finances desdits décisions et avis conformes.
En l'absence d'actes appropriés pris par le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné au terme des délais impartis aux premier et deuxième alinéas:
1) les décisions de la Commission Bancaire sont exécutoires de plein droit et notifiées par cette dernière ;
2) le contenu des avis conformes est notifié aux intéressés par la Commission Bancaire et devient exécutoire. »
Sauf qu’en « l’absence d’actes appropriés pris par le Ministre… », la Commission Bancaire n’a non seulement pas réagi, mais, en plus, elle a continué à travailler avec Crédit Solidaire pendant plus d’un an, comme si de rien n’était et que la décision de retrait d’agrément prise par elle, n’avait jamais existé. Elle n’a produit aucun communiqué, ni en Côte d’Ivoire, ni dans tout l’espace UEMOA pour informer qui de droit de sa décision. Elle n’a pas réagi quand les dirigeants de Crédit Solidaire ont produit dans la presse officielle un communiqué pour démentir la rumeur (finalement fondée) sur ce retrait d’agrément.
Que dire aussi de l’attitude du directeur national de la Bceao ? Lequel a transmis les décisions de la Commission Bancaire à Diby Koffi et qui a continué à travailler avec Crédit Solidaire pendant plus d’un an, en sachant que cette structure était dans l’illégalité la plus totale depuis mars 2010 ?
Tous ces comportements illogiques (ceux de Diby Koffi Charles, la Commission Bancaire, le directeur national de la Bceao), ne sont-ils pas les éléments constitutifs d’une machination planifiée et savamment exécutée ? Par des institutions qui n’avaient aucun intérêt à ce qu’une ancienne de la Bceao prospère dans le monde de la microfinance en Côte d’Ivoire en démystifiant le système et en offrant un espoir aux exclus du système bancaire classique ?
Entreprise de démolition
Selon l’article 32 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «La Commission Bancaire peut décider la mise en liquidation d'un établissement de crédit en cas de retrait d'agrément ou d'une entreprise exerçant de manière illégale l'activité d'établissement de crédit. Elle notifie sa décision au Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné qui nomme un liquidateur auprès de l'établissement de crédit ou de l'entreprise concerné.
Le liquidateur est désigné, dans un délai maximal de sept (7) jours calendaires à compter de la date de réception par le Ministre chargé des Finances de ladite décision, sur une liste dressée à cet effet par la Commission Bancaire.»
Sauf que Diby Koffi mettra deux ans pour nommer le liquidateur, soit le 21 juin 2012. Un acte d’une méchanceté extrême qui a eu pour conséquence de plonger les dirigeants de Crédit Solidaire et notamment la directrice générale dans la tourmente.
En effet, en l’absence d’un liquidateur, c’est elle qui a dû faire face à la colère des clients de Crédit Solidaire. Lesquels, devant l’impossibilité depuis le 6 septembre 2011 d’avoir accès à leur argent, vont tout de suite saisir la justice et la police.
C’est donc journellement que la directrice générale est convoquée dans les commissariats d’Abidjan pour « escroquerie, abus de confiance… ». Trainée de poste de police en poste de police, c’est chaque fois en remboursant l’avoir du plaignant (après des cotisations levées par ses enfants ou ses proches), qu’elle recouvre la liberté. Toutes les explications qu’elle donne à la police, documents à l’appui, n’émeuvent aucun commissaire de police. En l’absence de liquidateur, c’est elle qui doit assumer tout.
A plusieurs reprises, devant les menaces dont elle est l’objet, ses enfants et ses proches lui conseillent de quitter le pays. Mais elle refuse. Ne se reprochant rien.
Recours en annulation.
Le 20 juin 2012, après avoir obtenu un moment de répit, la directrice de Crédit Solidaire introduit auprès du Conseil des Ministres de l’UEMOA, un recours en annulation de la décision de la Commission Bancaire, prise le 26 mars 2010 et qui ne lui a été signifiée que 18 mois plus tard. Copies du mémoire rédigé à cet effet sont adressées à Diby Koffi Charles et à la Commission Bancaire. Dès réception de cette copie, dans la précipitation, Diby Koffi nomme un liquidateur le lendemain 21 juin 2012. En violant au passage, toutes les règles de l’OHADA.
En effet, il a nommé pour liquidateur de Crédit Solidaire (alors qu’il devait s’abstenir de prendre un tel acte tant que le Conseil des Ministres de l’UEMOA ne s’est pas prononcé sur le recours en annulation introduit par Crédit Solidaire), Edouard Messou, expert-comptable. Or, ce dernier, selon la « Décision N°238/CB/S portant approbation de renouvellement de mandats de Commissaires aux comptes titulaires et suppléant auprès de Crédit Solidaire », prise par la Commission bancaire en date du 16 mars 2010, est l’un des Commissaires aux Comptes de Crédit Solidaire. Comment le commissaire aux comptes d’une structure peut devenir le liquidateur de ladite structure ? Mais le liquidateur a déjà produit un communiqué pour inviter les créanciers de Crédit Solidaire à se faire connaître. C’est que Diby Koffi est pressé d’en finir.
Saisine de la justice ivoirienne
Le 20 juin 2012, la directrice de Crédit Solidaire a dénoncé dans une « requête adressée au Procureur de la République aux fins de faire arrêter les graves injustices subies par l’établissement financier à caractère bancaire Crédit Solidaire et ses dirigeants », tous les exploits réalisés par Diby Koffi et la Commission Bancaire de l’UEMOA.
Dans la même veine, elle a saisi, par son conseil, Me Aboa, le juge des référés (président du Tribunal de Commerce), afin qu’il suspende la procédure de liquidation de Crédit Solidaire engagée par Diby Koffi. Au cours de l’audience qui a suivi, l’avocat choisi par Diby Koffi, induit en erreur par ce dernier, a été pris en flagrant délit de mensonge. En effet, utilisant un document rédigé par les services de Diby Koffi intitulé « recours de Mme Berthe Ipou Honga » et adressé à l’agent judiciaire du Trésor, l’avocat a affirmé devant le juge, que le Conseil des Ministres de L’UEMOA avait statué le 28 septembre 2012 et rejeté le recours en annulation de Crédit Solidaire. Ceci dit, l’avocat de Diby Koffi demandera au juge de débouter simplement Crédit Solidaire de son action en suspension de la procédure de liquidation engagée par Diby Koffi.
C’est que dans le fameux document rédigé par les services de Diby Koffi et dont « L’Eléphant » s’est procuré une copie, il est écrit : « Le 28 septembre 2012, le Conseil des Ministres de l’UEMOA a jugé irrecevable le recours de Mme Berthe Ipou Honga, conformément aux dispositions de l’article 38, alinéa 3 de l’Annexe de la convention régissant la Commission Bancaire ». Faux. A la réunion du 28 septembre 2012, tenue à Cotonou, le Conseil des Ministres de l’UEMOA n’a pris aucune décision concernant le recours de Crédit Solidaire. L’affaire était bien inscrite à l’ordre du jour, mais devant les incroyables exploits de la Commission Bancaire et de Diby Koffi (lesquels ont mis plus d’un an pour signifier une décision), les sages du Conseil des ministres ont décidé de s’accorder un temps de réflexion. « L’Eléphant » a pu se procurer une copie du communiqué final (voir fac similé 6) de cette réunion et nulle part, il n’est fait allusion à l’affaire « Crédit Solidaire » contre la Commission Bancaire. La seule mention à cette Commission dans ce communiqué est : « Le Conseil des Ministres de l’UEMOA a pris connaissance du compte rendu des travaux des 88ème et 89ème sessions de la Commission Bancaire, tenues le 30 juin 2012 à Dakar et le 26 septembre 2012 à Cotonou. »
D’ailleurs, appelé par le juge à produire la décision du Conseil des Ministres de l’UEMOA portant rejet du recours de Crédit Solidaire et dont se prévalent les services de Diby Koffi, l’avocat a plutôt produit les conclusions de la Commission Bancaire sur le recours de Crédit Solidaire et adressées au Conseil des Ministres. Ce qui a eu pour effet de plonger le juge Komoin François (président du tribunal de commerce) dans une colère massacrante. Et l’avocat de Diby Koffi a dû s’excuser pour cette tentative d’induction du Tribunal en erreur. Dans lesdites conclusions que « L’Eléphant » a pu consulter, la Commission Bancaire s’étonnait du fait que la directrice de Crédit Solidaire ait mis plus de deux mois après la notification de la décision de retrait de l’agrément, avant d’exercer un recours devant le Conseil des Ministres. Et la Commission Bancaire et Charles Diby Koffi qui ont mis 18 mois pour signifier une décision alors qu’ils devaient le faire en sept jours ? C’est vrai que le ridicule ne tue pas…
Mais, le jeudi 25 octobre 2012, le Président du Tribunal de Commerce s’est déclaré incompétent pour suspendre la procédure de liquidation de Crédit Solidaire engagée par Diby Koffi, en attendant la décision du Conseil des Ministres de l’UEMOA.
Diby Koffi, qui a déjà pris l’arrêté N°541/MEF/DGTCP/DT du 13 août 2012 portant nomination des membres du Comité de liquidation de Crédit Solidaire peut donc continuer son œuvre. Les membres de ce Comité de liquidation sont : « Yaho-Sahi Kablan, Conseiller spécial du Ministre de l’Economie et des Finances, président ; Dowo Yobouet Richmond, Sous-directeur des Affaires Monétaires et Bancaires, membre ; Guy Koizan, Directeur général de Versus Bank, membre ; Edouard Messou, liquidateur, assure le secrétariat du Comité de Liquidation. » Lequel liquidateur n’est autre que l’un des Commissaires aux Comptes de Crédit Solidaire.
Approchés depuis le mercredi 24 octobre pour expliquer les motivations profondes de leurs agissements vis-à-vis de Crédit Solidaire, Diby Koffi et la Commission Bancaire n’ont pas encore trouvé le temps de répondre aux questions de « L’Eléphant ».
Sans doute réagiront-ils dans 18 mois, après la parution de l’article.
ASSALE TIEMOKO
Mais voilà, pendant des décennies, au cours de séminaires, de colloques et autres réunions organisées par la Banque Centrale, elle a entendu ces belles paroles : «Tant que les couches sociales les plus défavorisées n’auront pas accès aux crédits bancaires à travers le système des micro-finances, il sera difficile de faire reculer la pauvreté dans les pays membres de l’UEMOA… »
Ces belles paroles dans la tête, une fois sortie de la Banque Centrale, elle a créé, en association avec quelques anciens cadres ivoiriens de la même banque, un Etablissement financier dénommé « Crédit Solidaire ». Avec pour ambitions de révolutionner l’accès au crédit pour les pauvres.
Elle n’aurait jamais dû…
L’histoire avait pourtant bien commencé
Le 4 février 2004, est parue dans le quotidien gouvernemental Fraternité Matin N°12072, l’annonce légale portant création de la société Anonyme dénommée « Crédit Solidaire », au capital de quatre cents millions de FCFA. Cette structure ayant la forme d’un établissement financier est l’œuvre de Berthe Ipou Honga. Le 9 mars 2005, elle introduit auprès des autorités compétentes, une demande pour « l’exercice des activités d’Etablissement financier du premier groupe en Côte d’Ivoire ».
Sur la base du rapport d’instruction N°5DA17K06 du 7 mars 2006 de la Bceao, la Commission bancaire de l’Uemoa a rendu la décision N°265/CB/C du 20 mars 2006 portant « avis conforme favorable à une demande d’agrément en qualité d’Etablissement financier du premier groupe, introduite par la société Anonyme dénommée Crédit Solidaire. »
A la suite de toutes ces étapes, le 5 juillet 2007, le ministre de l’Economie et des finances, Charles Diby Koffi, a pris l’arrêté N°179/MEF/DGTCP/SDAMB portant agrément de la société anonyme CRDEIT SOLIDAIRE, en qualité d’Etablissement financier.
Dans cet arrêté le ministre écrit : «Considérant que la société anonyme CREDIT SOLIDAIRE, eu égard à son programme d’activités et aux moyens humains, techniques et financiers qu’elle prévoit de mettre en œuvre, est en mesure de réaliser ses objectifs de développement, dans les conditions sécuritaires pour la clientèle et compatibles avec le bon fonctionnement du système bancaire…Arrête : article 1er : Il est accordé un agrément à la société anonyme Crédit Solidaire en qualité d’établissement financier du premier groupe… »
Leur agrément en mains, Berthe Ipou Honga et ses partenaires se mettent au travail. Ils travaillent si bien qu’à partir de 2009, Crédit Solidaire obtient la confiance de plusieurs centaines de petits épargnants.
Audition à Bissau
Courant novembre 2009, dans le cadre de l’augmentation du capital social des structures bancaires de l’espace Uemoa dont la date limite est fixée au 31 décembre 2010, la commission bancaire, comme cela est de son pouvoir, effectue des contrôles dans certaines banques et établissements financiers. Crédit Solidaire est sur la liste des structures à contrôler.
C’est que le 25 octobre 2009, l’ex-gouverneur, Dakoury Tabley avait adressé l’ « Avis N°01/2009/SEC du 15 octobre 2009 aux banques et établissements financiers relatif à la mise en œuvre de la décision de relèvement du capital social minimum des établissements de crédit de l’Union Monétaire Ouest Africaine (Uemoa) ».
Dans cet avis, l’ex-gouverneur avait écrit : « Le délai du 31 décembre 2010, fixé pour la réalisation de la phase qui porte sur le relèvement du capital à 5 milliards pour les banques et à 1 milliard pour les établissements financiers, devra être strictement respecté. Aucune dérogation ne sera accordée ».
Les responsables de Crédit Solidaire, le jour du contrôle, fournissent aux envoyés de la Commission bancaire, tous les documents demandés et se soumettent à toutes les questions. Rien, en effet, n’est opposable à la Commission bancaire, pas même le secret professionnel.
Le 26 mars 2010, les responsables de Crédit Solidaire sont convoqués à la 79ème session de la Commission bancaire tenue en Guinée Bissau. Là, devant l’ancien gouverneur de la Bceao, Dakoury Tabley, ils sont auditionnés. En présence de l’ancien directeur du Trésor public, Faustin Honozon, représentant l’Etat de Côte d’Ivoire à cette réunion, en qualité de Commissaire.
Après l’exposé de Berthe Ipou Honga, c’est l’ex-gouverneur qui prend la parole : « Crédit Solidaire, vraiment nous sommes solidaires avec vous. Nous vous avons laissé suffisamment de temps pour vous exprimer. Nous comprenons vos difficultés. Que voulez-vous qu’on fasse pour vous ? » Interroge-t-il la directrice de Crédit Solidaire. Réponse de cette dernière : « Que la loi bancaire qui dispose que tout le système doit se mobiliser pour aider une banque en difficulté soit mise en œuvre. C’est ce que nous voulons ».
Se tournant alors vers Faustin Honozon, l’ex-gouverneur demande : « Est-ce que l’Etat de Côte d’Ivoire peut faire quelque chose pour Crédit Solidaire ?» La réponse de Faustin Honozon ? Juste un petit sourire. Qui en disait long?
La naissance d’une rumeur
Berthe Ipou Honga et son équipe rentrent à Abidjan après la réunion. En attendant de recevoir les conclusions tirées par la Commission Bancaire, de leur audition.
Dans leur tête, une seule question. Comment procéder pour trouver les 600 millions nécessaires pour faire passer leur capital social, de 400 millions à 1 milliard de FCFA avant le 31 décembre 2010 ?
Pour relever ce défi, la directrice générale et ses collaborateurs élaborent une stratégie de mobilisation de fonds.
Sauf qu’au moment de mettre cette stratégie en marche, une vilaine rumeur savamment orchestrée par la Commission Bancaire va circuler dans le microcosme financier de la Côte d’Ivoire. Selon cette rumeur, la Commission bancaire, après l’audition des responsables de Crédit Solidaire le 26 mars 2010 à Bissau, avait, ce même jour, retiré l’agrément de cette structure.
Ayant passé 30 ans de sa vie au service de la Bceao et connaissant tous les niveaux de sanctions disciplinaires à franchir avant de retirer l’agrément à un établissement financier, Berthe Ipou Honga ne prend pas la rumeur au sérieux. Surtout que deux mois s’étaient écoulés et que la Commission Bancaire ne lui avait rien notifié au sujet de ses conclusions après leur audition du 26 mars 2010.
En effet, selon l’article 28 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «Lorsque la Commission Bancaire constate une infraction à la réglementation bancaire et à toutes autres législations applicables aux établissements de crédit sur le territoire d'un Etat membre, elle en informe le Ministre chargé des Finances de cet Etat et, sans préjudice des sanctions pénales ou autres encourues, prononce une ou plusieurs des sanctions disciplinaires suivantes : 1) l'avertissement ; 2) le blâme ; 3) la suspension ou l'interdiction de tout ou partie des opérations ; 4) toutes autres limitations dans l'exercice de la profession ; 5) la suspension ou la démission d'office des dirigeants responsables ; 6) le retrait d'agrément ou d’autorisation d’installation. »
Le retrait de l’agrément qui est une décision grave signifiant que l’établissement qui en est victime est une vraie menace pour l’ensemble de la zone Uemoa n’intervient qu’en dernier recours. Or, jusqu’à l’audition du 26 mars 2010, Crédit Solidaire n’avait reçu auparavant aucune sanction de quelque nature que ce soit. En tout cas, si des sanctions intermédiaires avaient été prises, elles n’ont jamais été notifiées à ses responsables.
Mais la rumeur est si persistante que certains partenaires de Crédit Solidaire, sur la pointe des pieds, vont se retirer, effrayés. Certains clients de la structure vont également demander le remboursement immédiat de leurs avoirs.
Devant cette campagne de déstabilisation, la directrice générale sollicite et obtient une audience de clarification avec le ministre de l’Economie et des finances, Charles Diby Koffi.
Les instructions de Charles Diby à Berthe Ipou Honga
Le 29 juin 2010, Charles Diby Koffi accorde donc une audience à la directrice générale de Crédit Solidaire. Là, cette dernière a tenu à savoir si oui ou non, la Commission bancaire avait retiré l’agrément à sa structure. Et si le Ministre en était informé. Réponse de Charles Diby Koffi : « Non, ce ne sont que des rumeurs». Car, selon lui, il n’avait reçu aucune décision de ce genre à notifier à Crédit Solidaire, comme l’exige les textes de la Convention régissant la Commission Bancaire. Et le ministre de demander à la directrice générale de Crédit Solidaire de produire un communiqué dans le journal gouvernemental «Fraternité Matin», pour mettre définitivement fin à cette rumeur. Ce que cette dernière fait les lundi 12 et mercredi 14 juillet 2010 (voir Fac Similé 1). Dans ce communiqué, la directrice écrit : « La Direction générale de Crédit Solidaire, établissement de crédit, agréé en qualité d’établissement financier à caractère bancaire (…) informe son aimable clientèle et l’ensemble des opérateurs économiques que, Crédit Solidaire n’a jamais fait l’objet d’un retrait d’agrément ».
A la suite de ce communiqué, il n’y aura aucune réaction, ni de la Bceao, ni de la Commission Bancaire. Bien au contraire, ces deux entités vont continuer à travailler et à correspondre de façon intense avec Crédit Solidaire.
Le 21 juillet 2010, Berthe Ipou Honga adresse un courrier de remerciement à Diby Koffi Charles pour ses conseils avisés et sa disponibilité vis-à-vis de sa structure. Et en profite pour faire une requête auprès de l’Etat de Côte d’Ivoire: « (…) nous voudrions vous exprimer, écrit-elle, nos sincères remerciements et nos sentiments de profonde gratitude, pour l’attention que vous avez bien voulu accorder aux questions que nous avons évoquées, concernant le fonctionnement de notre Etablissement.
Votre disponibilité et les conseils avisés que vous nous avez prodigués, constituent pour nous, un signe d’encouragement et une source de motivation supplémentaire pour redoubler d’effort, en vue de l’édification d’un instrument utile et efficace de soutien aux efforts de lutte contre la pauvreté.
Comme nous avons eu à l’indiquer au cours de l’audience, et afin de permettre à notre Etablissement de faire face à ses obligations découlant de l’application de la mesure de relèvement du capital social minimum des Etablissements de Crédit de l’UEMOA (capital social minimum des Etablissements Financiers porté de 300 millions de FCFA à 1 milliard de FCFA pour la première phase), nous avons l’honneur de solliciter un appui financier de l’Etat, pour le gap restant à couvrir, qui s’élève à FCFA 300 millions.
Dans le même registre, Crédit Solidaire a pris des contacts avec un certain nombre d’institutions d’aide au développement, dont l’AFD (Agence Française de Développement) auprès de laquelle un appui financier a été sollicité.
Cette institution a marqué un intérêt certain pour notre dossier qui, selon elle, est éligible à l’initiative FISEA (Fonds d’Investissement et de Soutien aux Entreprises en Afrique) du Groupe de l’AFD, Initiative dont l’objectif est de favoriser la croissance des entreprises et institutions financières en Afrique Subsaharienne, notamment dans les régions instables ou en sortie de crise. Une caution morale de la part du Ministre de l’Economie et des Finances à l’égard de notre démarche faciliterait les négociations avec l’AFD ».
A la suite de ce courrier, le Ministre de l’Economie acceptera de parrainer une activité de mobilisation de fonds organisée par Crédit Solidaire.
La caution (im)morale de Diby Koffi ?
La rumeur s’étant quelque peu estompée, Crédit Solidaire va mettre en marche sa stratégie de mobilisation des 300 millions de FCFA nécessaires pour faire passer son capital social minimum, au départ de de 400 millions, puis de 630 millions, à 1 milliard.
Dans le cadre de la mobilisation de ces fonds, les dirigeants de cette structure, en association avec la Confédération Internationale Chrétienne de Développement, vont organiser un « Cocktail de presse » le jeudi 5 août 2010 à l’hôtel Pullman au Plateau.
Placé sous le parrainage de Charles Diby Koffi, cette cérémonie avait connu un franc succès et permis la mobilisation d’importantes ressources.
Entre-temps, depuis le 26 mars 2010, la Commission bancaire, l’Agence nationale de la Bceao et Crédit Solidaire (dont l’agrément aurait été retiré le 26 mars 2010), s’écrivaient régulièrement.
Une intense correspondance avec Crédit Solidaire
Le 27 mai 2010, alors que la rumeur sur le retrait de l’agrément de sa structure se faisait persistante et avant qu’elle n’aille se plaindre auprès de Diby Koffi, la directrice générale de Crédit Solidaire avait adressé un courrier au Président de la Commission bancaire de l’Uemoa, avec pour objet : « Relèvement du capital social des Etablissements de crédit» (voir Fac Similé 2). Dans ce courrier, elle avait écrit : « (…) nous avons l’honneur de venir vous faire tenir ci-joint, le nouveau chronogramme des mesures de relèvement du capital social minimum de Crédit Solidaire, qui prend en compte les libérations enregistrées au cours des deux derniers mois. Il ressort de cette situation qu’à ce jour, la libération du capital est effective à hauteur de 630 millions de FCFA. Aussi, les formalités juridiques d’augmentation du capital social de notre Etablissement, initialement prévues pour fin septembre 2010, peuvent d’ores et déjà intervenir». Et cette lettre adressée au président de la Commission bancaire faisait suite à une note adressée le 21 avril 2010 à tous les Etablissements financiers (y compris Crédit Solidaire), par le directeur national de la Bceao.
Le 1er juin 2010, la directrice de Crédit Solidaire avait adressé un courrier similaire au directeur national de la Bceao.
Le 1er juillet 2010, le directeur national de la Bceao pour la Côte d’Ivoire avait invité toutes les structures y compris Crédit Solidaire, à « la Cérémonie de lancement officiel de la Centrale des Incidents de Paiement (CIP) de l’UEMOA le 8 juillet 2010 à Lomé ».
Le 18 juin 2010, la Bceao (Direction nationale pour la Côte d’Ivoire) avait adressé à la directrice de Crédit Solidaire, un courrier avec pour objet : « Listes additives de signatures autorisées-Exercice 2010 », un document confidentiel. (Voir fac similé 3).
Le 14 juillet 2010, la Bceao avait écrit à toutes les Banques et Etablissements financiers présents en Côte d’Ivoire (y compris Crédit Solidaire), pour les tenir informer d’une « Mission de prospection de la Société de Commercialisation d’Informations d’Entreprise (SCIE-SA)».
Le 2 août 2010, en réponse à une requête de la directrice de Crédit Solidaire, le directeur national de la Bceao avait écrit : «A l’analyse de votre requête, nous vous accordons un délai allant jusqu’au 16 août 2010 pour la transmission des documents concernés. Passé ce délai, votre établissement sera passible des sanctions prévues par la réglementation bancaire en vigueur». Sanctions jamais prises…
Les 4 et 18 octobre 2010, le même directeur national de la Bceao a encore écrit à tous les Etablissements bancaires et financiers de Côte d’Ivoire (y compris Crédit Solidaire) au sujet du lancement de deux « appels d’offres du marché monétaire ».
Et jusque-là, personne, ni du côté de la Commission Bancaire, ni du côté de la Bceao, n’avait fourni à la directrice de Crédit Solidaire, quelque information que ce soit, concernant le retrait de l’agrément de sa structure. Depuis le 26 mars 2010, comme le disaient les bruits qui couraient dans le secteur et qui avaient fait fuir certains de ses partenaires et autres clients.
Evidemment, « L’Eléphant » détient une copie de toutes ces lettres.
La machination
A force d’ingéniosité et sans l’apport des 300 millions sollicités à l’Etat de Côte d’Ivoire, la directrice générale de Crédit Solidaire réussit à mobiliser les fonds nécessaires pour relever le capital social de 400 millions à 1 milliard. Avant le 31 décembre 2010. La Commission bancaire et la Bceao en sont informées. Le délai imposé a donc été respecté.
Les rapports resteront ainsi normaux entre Crédit Solidaire, la Commission Bancaire et la Bceao, jusqu’à la fermeture de tous les Etablissements financiers et bancaires, en février 2011, à la suite de la crise post-électorale.
A la fin de cette crise, comme toutes les structures financières, Crédit Solidaire reprend ses activités. Dans le ciel des relations avec la Commission bancaire et la Bceao, aucun nuage.
Pour preuve, le 19 juillet 2011, la Bceao (Direction nationale pour la Côte d’Ivoire) a adressé un courrier à la directrice de Crédit Solidaire avec pour objet : « Listes des signatures autorisées-Exercice 2011 », un document ultra-confidentiel auquel n’ont accès que les structures financières dument reconnues comme telles et possédant un agrément. (Voir fac similé 4).
Une semaine plus tôt, c’est la BOAD (Banque Ouest Africaine de Développement), qui avait invité Crédit Solidaire à participer à la « Journée Porte Ouverte de la BOAD en Côte d’Ivoire » (voir fac similé 5).
Est-il possible qu’une structure financière interdite de fonctionnement depuis mars 2010 puisse avoir de telles relations avec les institutions financières de l’espace UEMOA ? Cela est impossible. Et pourtant !
Le 6 septembre 2011, alors qu’elle a réussi à reconquérir la confiance de nombreux partenaires et que des dossiers de demande de financement introduits par sa structure auprès d’institutions de financement internationales sont totalement bouclés, Charles Diby Koffi passe subitement à l’action. Il prend l’arrêté N°251/MEF/DGTCP/DT/SDAMB. Arrêté par lequel il notifie à la directrice de Crédit Solidaire, le retrait de l’agrément de sa structure. Retrait d’agrément qui se fonde sur la décision N°453/CB/C du 26 mars 2010 de la Commission Bancaire.
Ainsi donc, comme la rumeur l’avait annoncé, depuis le 26 mars 2010, la Commission Bancaire avait retiré l’agrément à Crédit Solidaire. Et il a fallu 18 mois à Diby Koffi pour notifier cette décision à la directrice de cette structure.
Mais ce n’est pas le plus grave. Le 17 avril 2010 (voir fac similé 5), le directeur national de la Bceao avait transmis à Diby Koffi, les « Décisions de la 79ème session de la Commission Bancaire de l’UEMOA » sous la désignation « confidentiel (décisions de la 79ème session de la Commission Bancaire de l’UEMOA, tenue le 26 mars 2010) ».
Ainsi donc, lorsque Diby Koffi recevait la directrice de Crédit Solidaire le 29 juin 2010 à son cabinet, il savait depuis 3 mois que cette structure n’avait plus d’agrément et en conséquence, elle ne devrait plus fonctionner. Mais il a nié l’existence de ce retrait d’agrément et lui a demandé de produire un démenti dans la presse. A quoi obéissait une telle attitude ?
Selon l’article 29 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «Les décisions prises en vertu de l'article 28 (retrait d’agrément ou d’autorisation d’installation, ndlr) sont exécutoires dès leur notification aux intéressés. La notification est faite par la Commission Bancaire.
Toutefois, la décision de retrait d'agrément ou de retrait d’autorisation d’installation est communiquée au Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné qui doit, dans le délai de sept (7) jours calendaires à compter de cette communication, notifier la décision à l'intéressé. Cependant, si le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné saisit le Conseil des Ministres de l'Union, ledit délai de sept (7) jours court à partir du jour de la notification de la décision du Conseil des Ministres au Ministre chargé des Finances compétent. »
Diby Koffi disposait donc de sept jours à partir du 17 avril 2010 (date à laquelle il a reçu les décisions de la Commission Bancaire) pour notifier la décision de retrait d’agrément aux dirigeants de Crédit Solidaire. Mais il a pris 18 mois pour le faire. Pourquoi ? Surtout qu’il n’avait pas protesté, en grand protecteur des intérêts des banques ivoiriennes, contre cette décision de la Commission Bancaire en saisissant le Conseil des Ministres de l’UEMOA ?
Et la Commission Bancaire ? Pourquoi n’a-t-elle pas pris des dispositions pour que sa décision soit notifiée aux dirigeants de Crédit Solidaire. S’était-elle entendue avec Diby Koffi pour ne pas le faire ? Car, selon l’article 37 de l’Annexe précité, « Le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné dispose d'un délai de trente (30) jours calendaires pour prendre et notifier aux établissements de crédit, les actes réglementaires requis par les décisions et avis conformes de la Commission Bancaire. Toutefois, les décisions de retrait d'agrément et de retrait d'autorisation d'installation doivent être notifiées aux intéressés dans un délai de sept (7) jours calendaires.
Les délais susvisés courent à compter de la date de réception par le Ministre chargé des Finances desdits décisions et avis conformes.
En l'absence d'actes appropriés pris par le Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné au terme des délais impartis aux premier et deuxième alinéas:
1) les décisions de la Commission Bancaire sont exécutoires de plein droit et notifiées par cette dernière ;
2) le contenu des avis conformes est notifié aux intéressés par la Commission Bancaire et devient exécutoire. »
Sauf qu’en « l’absence d’actes appropriés pris par le Ministre… », la Commission Bancaire n’a non seulement pas réagi, mais, en plus, elle a continué à travailler avec Crédit Solidaire pendant plus d’un an, comme si de rien n’était et que la décision de retrait d’agrément prise par elle, n’avait jamais existé. Elle n’a produit aucun communiqué, ni en Côte d’Ivoire, ni dans tout l’espace UEMOA pour informer qui de droit de sa décision. Elle n’a pas réagi quand les dirigeants de Crédit Solidaire ont produit dans la presse officielle un communiqué pour démentir la rumeur (finalement fondée) sur ce retrait d’agrément.
Que dire aussi de l’attitude du directeur national de la Bceao ? Lequel a transmis les décisions de la Commission Bancaire à Diby Koffi et qui a continué à travailler avec Crédit Solidaire pendant plus d’un an, en sachant que cette structure était dans l’illégalité la plus totale depuis mars 2010 ?
Tous ces comportements illogiques (ceux de Diby Koffi Charles, la Commission Bancaire, le directeur national de la Bceao), ne sont-ils pas les éléments constitutifs d’une machination planifiée et savamment exécutée ? Par des institutions qui n’avaient aucun intérêt à ce qu’une ancienne de la Bceao prospère dans le monde de la microfinance en Côte d’Ivoire en démystifiant le système et en offrant un espoir aux exclus du système bancaire classique ?
Entreprise de démolition
Selon l’article 32 de l’Annexe à la Convention du 3 avril 2007 régissant la Commission Bancaire de l’UEMOA, «La Commission Bancaire peut décider la mise en liquidation d'un établissement de crédit en cas de retrait d'agrément ou d'une entreprise exerçant de manière illégale l'activité d'établissement de crédit. Elle notifie sa décision au Ministre chargé des Finances de l'Etat concerné qui nomme un liquidateur auprès de l'établissement de crédit ou de l'entreprise concerné.
Le liquidateur est désigné, dans un délai maximal de sept (7) jours calendaires à compter de la date de réception par le Ministre chargé des Finances de ladite décision, sur une liste dressée à cet effet par la Commission Bancaire.»
Sauf que Diby Koffi mettra deux ans pour nommer le liquidateur, soit le 21 juin 2012. Un acte d’une méchanceté extrême qui a eu pour conséquence de plonger les dirigeants de Crédit Solidaire et notamment la directrice générale dans la tourmente.
En effet, en l’absence d’un liquidateur, c’est elle qui a dû faire face à la colère des clients de Crédit Solidaire. Lesquels, devant l’impossibilité depuis le 6 septembre 2011 d’avoir accès à leur argent, vont tout de suite saisir la justice et la police.
C’est donc journellement que la directrice générale est convoquée dans les commissariats d’Abidjan pour « escroquerie, abus de confiance… ». Trainée de poste de police en poste de police, c’est chaque fois en remboursant l’avoir du plaignant (après des cotisations levées par ses enfants ou ses proches), qu’elle recouvre la liberté. Toutes les explications qu’elle donne à la police, documents à l’appui, n’émeuvent aucun commissaire de police. En l’absence de liquidateur, c’est elle qui doit assumer tout.
A plusieurs reprises, devant les menaces dont elle est l’objet, ses enfants et ses proches lui conseillent de quitter le pays. Mais elle refuse. Ne se reprochant rien.
Recours en annulation.
Le 20 juin 2012, après avoir obtenu un moment de répit, la directrice de Crédit Solidaire introduit auprès du Conseil des Ministres de l’UEMOA, un recours en annulation de la décision de la Commission Bancaire, prise le 26 mars 2010 et qui ne lui a été signifiée que 18 mois plus tard. Copies du mémoire rédigé à cet effet sont adressées à Diby Koffi Charles et à la Commission Bancaire. Dès réception de cette copie, dans la précipitation, Diby Koffi nomme un liquidateur le lendemain 21 juin 2012. En violant au passage, toutes les règles de l’OHADA.
En effet, il a nommé pour liquidateur de Crédit Solidaire (alors qu’il devait s’abstenir de prendre un tel acte tant que le Conseil des Ministres de l’UEMOA ne s’est pas prononcé sur le recours en annulation introduit par Crédit Solidaire), Edouard Messou, expert-comptable. Or, ce dernier, selon la « Décision N°238/CB/S portant approbation de renouvellement de mandats de Commissaires aux comptes titulaires et suppléant auprès de Crédit Solidaire », prise par la Commission bancaire en date du 16 mars 2010, est l’un des Commissaires aux Comptes de Crédit Solidaire. Comment le commissaire aux comptes d’une structure peut devenir le liquidateur de ladite structure ? Mais le liquidateur a déjà produit un communiqué pour inviter les créanciers de Crédit Solidaire à se faire connaître. C’est que Diby Koffi est pressé d’en finir.
Saisine de la justice ivoirienne
Le 20 juin 2012, la directrice de Crédit Solidaire a dénoncé dans une « requête adressée au Procureur de la République aux fins de faire arrêter les graves injustices subies par l’établissement financier à caractère bancaire Crédit Solidaire et ses dirigeants », tous les exploits réalisés par Diby Koffi et la Commission Bancaire de l’UEMOA.
Dans la même veine, elle a saisi, par son conseil, Me Aboa, le juge des référés (président du Tribunal de Commerce), afin qu’il suspende la procédure de liquidation de Crédit Solidaire engagée par Diby Koffi. Au cours de l’audience qui a suivi, l’avocat choisi par Diby Koffi, induit en erreur par ce dernier, a été pris en flagrant délit de mensonge. En effet, utilisant un document rédigé par les services de Diby Koffi intitulé « recours de Mme Berthe Ipou Honga » et adressé à l’agent judiciaire du Trésor, l’avocat a affirmé devant le juge, que le Conseil des Ministres de L’UEMOA avait statué le 28 septembre 2012 et rejeté le recours en annulation de Crédit Solidaire. Ceci dit, l’avocat de Diby Koffi demandera au juge de débouter simplement Crédit Solidaire de son action en suspension de la procédure de liquidation engagée par Diby Koffi.
C’est que dans le fameux document rédigé par les services de Diby Koffi et dont « L’Eléphant » s’est procuré une copie, il est écrit : « Le 28 septembre 2012, le Conseil des Ministres de l’UEMOA a jugé irrecevable le recours de Mme Berthe Ipou Honga, conformément aux dispositions de l’article 38, alinéa 3 de l’Annexe de la convention régissant la Commission Bancaire ». Faux. A la réunion du 28 septembre 2012, tenue à Cotonou, le Conseil des Ministres de l’UEMOA n’a pris aucune décision concernant le recours de Crédit Solidaire. L’affaire était bien inscrite à l’ordre du jour, mais devant les incroyables exploits de la Commission Bancaire et de Diby Koffi (lesquels ont mis plus d’un an pour signifier une décision), les sages du Conseil des ministres ont décidé de s’accorder un temps de réflexion. « L’Eléphant » a pu se procurer une copie du communiqué final (voir fac similé 6) de cette réunion et nulle part, il n’est fait allusion à l’affaire « Crédit Solidaire » contre la Commission Bancaire. La seule mention à cette Commission dans ce communiqué est : « Le Conseil des Ministres de l’UEMOA a pris connaissance du compte rendu des travaux des 88ème et 89ème sessions de la Commission Bancaire, tenues le 30 juin 2012 à Dakar et le 26 septembre 2012 à Cotonou. »
D’ailleurs, appelé par le juge à produire la décision du Conseil des Ministres de l’UEMOA portant rejet du recours de Crédit Solidaire et dont se prévalent les services de Diby Koffi, l’avocat a plutôt produit les conclusions de la Commission Bancaire sur le recours de Crédit Solidaire et adressées au Conseil des Ministres. Ce qui a eu pour effet de plonger le juge Komoin François (président du tribunal de commerce) dans une colère massacrante. Et l’avocat de Diby Koffi a dû s’excuser pour cette tentative d’induction du Tribunal en erreur. Dans lesdites conclusions que « L’Eléphant » a pu consulter, la Commission Bancaire s’étonnait du fait que la directrice de Crédit Solidaire ait mis plus de deux mois après la notification de la décision de retrait de l’agrément, avant d’exercer un recours devant le Conseil des Ministres. Et la Commission Bancaire et Charles Diby Koffi qui ont mis 18 mois pour signifier une décision alors qu’ils devaient le faire en sept jours ? C’est vrai que le ridicule ne tue pas…
Mais, le jeudi 25 octobre 2012, le Président du Tribunal de Commerce s’est déclaré incompétent pour suspendre la procédure de liquidation de Crédit Solidaire engagée par Diby Koffi, en attendant la décision du Conseil des Ministres de l’UEMOA.
Diby Koffi, qui a déjà pris l’arrêté N°541/MEF/DGTCP/DT du 13 août 2012 portant nomination des membres du Comité de liquidation de Crédit Solidaire peut donc continuer son œuvre. Les membres de ce Comité de liquidation sont : « Yaho-Sahi Kablan, Conseiller spécial du Ministre de l’Economie et des Finances, président ; Dowo Yobouet Richmond, Sous-directeur des Affaires Monétaires et Bancaires, membre ; Guy Koizan, Directeur général de Versus Bank, membre ; Edouard Messou, liquidateur, assure le secrétariat du Comité de Liquidation. » Lequel liquidateur n’est autre que l’un des Commissaires aux Comptes de Crédit Solidaire.
Approchés depuis le mercredi 24 octobre pour expliquer les motivations profondes de leurs agissements vis-à-vis de Crédit Solidaire, Diby Koffi et la Commission Bancaire n’ont pas encore trouvé le temps de répondre aux questions de « L’Eléphant ».
Sans doute réagiront-ils dans 18 mois, après la parution de l’article.
ASSALE TIEMOKO