Vendredi 12 avril, il était 17h30 quand nous arrivions aux services des urgences de l’Hôpital général de Port-Bouët. Deux ambulances s’apprêtaient à quitter les lieux. A leur bord, des blessés graves. L’une des deux est en partance pour l’hôpital militaire d’Abidjan (HMA), et l’autre pour le centre hospitalier universitaire (CHU) de Cocody. Les secours sortaient des blessés des trois autres ambulances stationnées devant les urgences. Hommes et femmes, adultes et jeunes, civils et hommes en tenues militaires, certains couchés soit sur des lits soit sur des brancards, reçoivent les premiers soins avant d’être admis dans aux chambres d’hospitalisation. D’autres, couchés à même le sol, attendent également d’être pris en charge. Tous portent des blessures ouvertes, des fractures. Dans la salle des urgences, des agents à la tâche font des pieds et des mains pour sauver les vies de ces blessés affaiblis par leur état. On se croirait sur un champ de bataille. A l’origine de ce spectacle sanglant, un litige foncier qui oppose les ’’ayants-droit’’ et les occupants d’un site à Mafiblé, sur la route de Grand-Bassam et des opérateurs économiques, qui ont requis des éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) pour sécuriser les lieux. Des victimes et témoins racontent les faits. «Nous étions au village, lorsqu’on nous a informé qu’environ 300 éléments des FRCI et 50 loubards ont investi le site qui abrite nos plantations et nos biens. Ces derniers nous ont demandé de quitter le site, arguant qu’il est destiné à abriter le projet Abouabou dénommé ’’Djibo Kamon’’, suite à une décision ministérielle», a indiqué une victime. A la suite d’une opposition de ceux qui se réclament ayants-droit à ce site, le tribunal dans sa décision du 1er mars 2013 a ordonné la cessation des travaux sur le terrain, le temps du règlement du litige. «Des opérateurs économiques et des personnes, qui se réclament les ’’nouveaux propriétaires’’ de ces terres, ont fait appel. Mais, cet appel a été rejeté par la cour. Ce vendredi 12 avril, la cour d’appel a rendu une autre décision en notre faveur», a expliqué un des ayants-droit. «C’est dans l’attente de l’exécution de cette décision de justice que ces opérateurs ont fait débarquer sur les lieux, des FRCI et des loubards pour nous pourchasser. Nous nous sommes opposés et nous avons exprimé notre ras-le-bol. Sans sommation, ils ont tiré sur nous, faisant plusieurs blessés», a conté, la mort dans l’âme, une autre victime. Un des éléments des FRCI, très mal en point, a révélé que les habitants, qui étaient déjà sur le pied de guerre, ont été les premiers à les attaquer. «Nous avons riposté», a-t-il défendu. La suite, on la connaît et le bilan est lourd. L’on annonce deux morts dans le camp des villageois. Triste nouvelle confirmée par des éléments de l’ONUCI que nous avons joint tard dans la soirée. Mais d’autres sources font état de plus d’une dizaine de morts. Nous y reviendrons.
Marcelle AKA
Marcelle AKA