Nommé le 13 juillet 2011, par ordonnance N°2011 -167 du 13 juillet 2011 et investi le 28 septembre 2011, à la tête de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr), Charles Konan Banny rendra son rapport de mission le 28 septembre 2013, à Alassane Ouattara. Mais en attendant d’éplucher son bilan en long et en large, Ouattara lui, a préféré Mme Mariatou Koné. Dans la pure tradition du rattrapage ethnique. Ce pourquoi M. Ouattara aura «réinventé la roue» qui s’intitule Programme national de cohésion sociale (Pncs). Le frère siamois de la Cdvr a été généreusement doté d’un budget cash-flow de sept milliards de Fcfa. Le message est bien net : on n’arme pas son adversaire. L’homme prudent voit le mal venir de loin, dit un adage populaire. Alassane Ouattara, lui, sait désormais que «le Pdci-Rda aura un candidat en 2015». Et ce candidat pourrait être, si ce n’est déjà acquis, Charles Konan Banny. C’est d’ailleurs une vieille ambition du concerné lui-même. L’idée de trouver un «garage» à l’adversaire le plus coriace que le Pdci pourrait mettre sur la route d’Alassane Ouattara, date de la guerre des nerfs de l’hôtel du Golf. Le candidat du Rhdp reclus à cette époque, dans le bunker du Golf hôtel sait qu’il bénéficie du soutien de «son grand frère» Bédié. Qui, de toutes les façons, est muselé par les parrains occidentaux de Ouattara depuis les tractations du premier tour de l’élection présidentielle de 2010. Le Fpi-Lmp est écarté. Le Sphinx de Daoukro dompté, il fallait annihiler d’éventuelles velléités à la course au fauteuil présidentiel. Banny fait partie des écuelles sur la route de Ouattara. Lequel avait trouvé l’ingénieuse formule de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr) et d’y confiner l’ambitieux Banny. Pour calmer ses ardeurs. Mais, chasser le naturel et il revient au galop. «Le chemin est long du projet à la chose », disait Molière. Et à force d’insister, Banny a fini par faire grandement ombrage à celui qui l’a fait «Réconciliateur». L’ancien Gouverneur de la Bceao et ancien Premier ministre, Charles Konan Banny n’est pas un «assis-toi et boucle-la». Economiste, il a été ainsi Gouverneur de Banque centrale. A la différence qu’il n’a pas bourlingué au sommet du Fmi et n’est pas un abonné aux rituels de la Banque mondiale. Comme Alassane Ouattara. Ce qui n’enlève rien à ses ambitions qui sont à foison, dont celle d’un destin national, pourquoi pas. Officieusement le parti au sein duquel il milite attend le Congrès dont la date n’est pas encore connue, pour désigner son «Candidat du Pdci-Rda». Une chose est sûre, «le Pdci-Rda aura son candidat en 2015», a indiqué le bouillant président des Jeunes, Kouadio Konan Bertin dit Kkb qui prépare ses adieux à la tête de la jeunesse du vieux parti. A diverses occasions, CKB s’était mis dans la peau d’un «Président» et donné des signes d’agacement face l’insécurité rampante provoquée par des «Frci» dont Alassane Ouattara est le chef suprême. Son exacerbation avait porté sur cette phrase «le vainqueur d’aujourd’hui n’est pas forcément celui de demain» désormais considérée par les caciques du régime au pouvoir comme un clin d’œil aux pro-Gbagbo qu’il lorgnerait. Elle résonne aussi, encore, comme une sévère mise en garde. Au sein du Rdr, cette sortie de Banny est plus qu’une menace voilée. A la présidence de la République, on attendait qu’il se dévoile complètement. Une chose est sûre, c’est que l’ancien Premier ministre (2005-2007) du Président Laurent Gbagbo, n’est pas resté inactif ces derniers mois. Il revient d’une longue tournée européenne et américaine. Officiellement, il y était pour «installer les plateformes de la diaspora». Mauvais prétexte à cinq (5) mois de la fin de sa mission. Surtout que des sources officieuses lui ont trouvé des rendez-vous avec les autorités françaises «au plus haut niveau». Le président de la Cvdr profiterait de sa position pour tisser ses propres toiles. Il aurait obtenu de solides garanties au plan international. L’un de ses derniers discours est pris très au sérieux à Abidjan. Dans un hôtel du 1er arrondissement, à Paris, le 15 avril dernier, lors de la cérémonie d’investiture de la plate-forme CDVR-France, Charles Konan Banny a finalement sorti les griffes. L’ancien Premier ministre n’a pas caché sa volonté de voir la justice équitable s’accomplir, et sans complaisance. «28 septembre 2011, disons que le 28 septembre 2013, je souhaite que nous puissions rendre notre rapport», s’est-il empressé d’indiquer à la manière d’un exécutant ne supportant plus d’être incompris par celui quui l’a nommé. Et qui a hâte de se débarrasser d’une tâche qui ressemble plus à un cadeau empoisonné qu’à une promotion. «(…) que reste-t-il à faire ? Le travail de la Commission nationale d’enquête ouvre le grand tribunal où les victimes seront face aux bourreaux (…) Les victimes sont connues. Leur liste est disponible. Certaines victimes connaissent leurs bourreaux. La question est de savoir si ces bourreaux auront le courage de venir devant la nation.» Le mot est lâché. Banny attend Alassane Ouattara au virage du «grand tribunal». Il sait que les crimes qui sont perpétrés sont restés impunis. Et que, si c’est ainsi, les bourreaux doivent certainement jouir d’une certaine protection. Mais de la part de qui ? Rendez-vous à l’issue de l’élection présidentielle de 2015, pour le savoir. Mais en attendant, Alassane Ouattara qui veut se donner les coudées franches pour bien aborder ces échéances, ne s’embarrasse de fioritures. Il a préféré couper l’herbe sous les pieds du candidat putatif du Pdci-Rda. Cdvr, c’est bon. Mais Pncs c’est encore mieux. A la guerre comme à la guerre…
Simplice Allard
Simplice Allard