Les plaidoiries de la défense ont débuté hier, dans le procès des ex-barons de la filière café-cacao avec des relaxes demandées par deux avocats du Fonds de développement et de promotion des activités des producteurs de café-cacao (FDPCC). Il s'agit de Me Adjé Luc et Me Yao Emmanuel. Le 10 juillet dernier, le Procureur avait requis 20 ans et 10 ans de prison ferme à l'encontre des trois dirigeants (Henri Amouzou, Théophile Kouassi et Mme Obodji) qui répondent devant le Tribunal de première instance d'Abidjan, pour «détournement de fonds, abus de confiance, abus de biens sociaux, escroquerie, faux et usage de faux en écriture privée de banque». Plaidant la relaxe, Me Adjé a estimé qu'on ne peut pas poursuivre ses clients parce que le délai de prescription est éteint. L'avocat révèle, en effet, qu'aucun moyen de preuve ou fait nouveau n'est parvenu depuis leur arrestation. Il précise, par ailleurs, que les faits remontent à plus de 5 ans et sont désormais prescrits. «En matière de délit, après 5 ans, on ne peut plus poursuivre un prévenu. La loi, c'est la loi. Donc mes clients doivent être relaxés », explique-t-il. Lors de sa plaidoirie, Me Adjé a mis en avant la co-gérance de l'Etat dans les structures de la filière café-cacao qui fait que les prévenus ne sont pas seuls responsables des faits reprochés par le Procureur. Le bâtonnier a également souligné l'amalgame qui a été fait lors de la saisine du Procureur par le président de la République d'alors, Laurent Gbagbo. Il a dénoncé le fait que ce soit le Chef de l'Etat lui-même qui ait saisi le Parquet. Pour lui, c'est le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, qui, selon le Procureur devait le faire. Car, explique-t-il, aucune disposition de la loi ne prévoit l'acte du Chef de l'Etat. En somme, Me Adjé invite le président du Tribunal à prendre des décisions courageuses en relaxant tout simplement les responsables du Fonds de développement. «Je ne perds pas espoir pour ces personnes qui doivent vivre librement après avoir été manu militari jetés en prison à la mi-juin 2008 », précise-t-il. L'audience s'est poursuivie avec la plaidoirie du conseil de l'ancien secrétaire exécutif du Fonds de développement, Théophile Kouassi, qui a sollicité également la relaxe pleine et entière au vu des chefs de prévention qui sont reprochés à son client. Le ministère public avait requis il y a moins d'une semaine, 20 ans de prison ferme à l'encontre de M. Kouassi. Me Yao a affirmé que son client n'avait aucune compétence hiérarchique et aucune influence sur le Conseil de gestion du Fonds de développement dont il n'est pas membre. Il a ajouté que la fonction de secrétaire exécutif de son client n'avait pas de participation active dans les chefs d'inculpation qui lui sont reprochés. «Théophile Kouassi n'a fait que se conformer à tout ce que le Conseil de gestion a décidé », indique l'avocat. Alors, pour lui, les chefs d'accusation qui lui sont reprochés sont inexistants. Aussi demande-t-il la relaxe pure et simple de son client. Le ministère public avait reproché à M. Kouassi, sa passivité dans les dons aux autorités, les financements de coopératives, les frais de justice. Ce qu'a réfuté l'avocat en précisant qu'il avait toujours décaissé des montants avec plusieurs justificatifs, notamment plusieurs milliards remis à Jacques Anouma, Hervé Siaba, N'Zi Paul David pour le compte de la présidence. «Tous les représentants dans la filière ont donné à des préfets, à des gendarmes, aux ministères de tutelle et autres, de l'argent. Mieux, les douze membres du Conseil d'administration perçoivent à la fin de chaque année, de l'argent pour distribuer aux autorités. Cela, soit par chèque, soi en espèces », ajoute Me Yao. Les plaidoiries se poursuivent ce mardi avec les avocats de Sifca Coop, Coco services, Forexi et du notaire Diomandé Sindou.
JEA
JEA