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Politique Publié le vendredi 19 juillet 2013 | L’intelligent d’Abidjan

Lu pour vous / Première dame de Côte d’Ivoire: Les trois vies de Dominique Ouattara

© L’intelligent d’Abidjan Par David Zamblé
Lancement officiel du Système d`Observation et de Suivi du Travail des Enfants en présence de la Première Dame
Mardi 25 juin 2013, Abidjan. La Première Dame, Mme Dominique Ouattara préside la cérémonie de lancement du Système d`Observation et de Suivi du Travail des Enfants de Côte d`Ivoire (SOSTECI)
SUCCÈS. Cette Franco-Ivoirienne, qui a créé un groupe immobilier et racheté les salons Jacques Dessange aux États-Unis, est devenue il y a trois ans la Première Dame de Côte d’ivoire. Et se consacre désormais à sa Fondation Children of Africa.

Elle a fait de son sourire, immuable, son arme de prédilection. Et une protection commode, aussi. Bien qu’aujourd’hui Première Dame de Côte d’ivoire, Dominique Ouattara n’a pas toujours vu la vie en rose, comme dans les romans sirupeux de Danielle Steel qu’elle affectionne tant. Avant de devenir l’épouse d’Alassane Ouattara, cette femme blonde, directe et spontanée, a en effet connu des hauts et des bas. D’autres vies, aussi. Au moins trois. Être devenue Première Dame de Côte d’ivoire et «femme de» n’est pas un aboutissement pour elle. Plutôt un pas de côté dans une vie professionnelle qu’elle avait jusqu’alors menée au pas de course. Avec un sens aigu des affaires, un entregent certain et un carnet d’adresses conséquent. Dans le salon de sa résidence d’Abidjan (le couple n’habite pas au palais présidentiel), Dominique Ouattara sourit donc, comme sur tous ses clichés, mais elle est sur ses gardes. Méfiante. La voix douce mais le regard déterminé, elle craint d’être épinglée comme elle l’a été dans le passé. Parce qu’ancienne chef d’entreprise. Parce que française (elle a la double nationalité), blanche et catholique, mais cela elle ne le dit pas. Parce que, surtout, «femme de», dans un monde politique où l’on cherche souvent des noises à celle qui est derrière le «grand homme». Alassane Ouattara serait-il devenu président de la République de Côte d’ivoire sans elle ? «Je crois qu’Alassane a un destin et je l’ai accompagné sur cette route», botte-t-elle en touche. Elle dit ça, mais, au fond, elle le sait bien: son rôle a été fondamental. La preuve ? Lorsqu’on a voulu atteindre son mari, on a cherché à la toucher, elle. «Les adversaires d’Alassane trouvaient que je lui donnais de la force, ils ont donc essayé de me démolir sur le plan moral, de me salir. Ils m’ont fait suivre», relate-t-elle. Dominique Ouattara ne s’étend pas. Elle pourrait pourtant. Lorsqu’elle dit que «la politique est un monde dur», comme l’estiment la plupart de ses «collègues» Premières Dames, elle sait de quoi elle parle. Elle sourit, encore. Sourire mécanique ? Parfois, sûrement. Mais exprimant aussi, derrière une apparence extravertie, une forme de pudeur. «Elle a beaucoup souffert de tout ce qui leur est arrivé, des journalistes aussi», confirme Elisabeth Gandon qui l’a remplacée à la tête de son groupe immobilier AICI et la connaît depuis vingt ans. «Quand elle me dit qu’elle va très, très, très bien, je lui dis qu’il y a en un très de trop». Il faut dire que Dominique Ouattara a connu avec son mari des périodes agitées. En 2010, encore, alors que le Président Gbagbo refusait d’admettre l’élection de son rival, le couple ainsi que le gouvernement ont dû passer sept mois en captivité à l’Hôtel du Golf, à Abidjan. «On était enfermés, avec les orgues de Staline constamment sur nous. On se demandait si on allait en ressortir», se souvient-elle, évoquant cette période de guerre civile. Quelques années plus tôt, en 2002, les Ouattara avaient failli être assassinés et avaient dû quitter leur maison assaillie par les chars des forces de sécurité proches du président Gbagbo. Ils avaient trouvé refuge à la résidence de France, des semaines durant, avant d’être exfiltrés par hélicoptère.

«Une fonceuse»

Le genre d’épreuves qui forgent un caractère. Et un couple. Alors, aujourd’hui, quand on évoque les attaques, les insinuations désobligeantes dont elle est encore parfois l’objet, elle prend sur elle. Et se tient soigneusement à l’écart de tout ce qui est politique. «Alassane connaît mon caractère, il ne m’impose pas de l’accompagner où je n’ai pas ma place». Du caractère, la dame en a, c’est clair. «C’est une fonceuse, elle n’a pas froid aux yeux», souffle admiratif un banquier qui la connaît. Et même si elle évoque souvent «son cher époux», elle n’a vraiment rien d’une potiche. C’est d’ailleurs ce qui a plu à son présidentiel mari. «Quand Alassane m’a rencontrée, il a aimé le côté femmes d’affaires, indépendante». Elle dit femme d’affaires, même on lui a déconseillé d’utiliser ce terme, et elle assume. Oui, c’est une femme d’affaires. Qui a fait de la petite agence immobilière de deux personnes, rachetée à Abidjan, en 1979, un « groupe qui emploie aujourd ’hui deux cents personnes » et est la première agence immobilière d’Afrique, Implantée également à Paris et à Cannes. Elle a également racheté du temps où Alassane Ouattara qu’elle a épousé en 1991 - travaillait à Washington comme directeur adjoint du FMI, le groupe Dessange aux États-Unis, en 1996, puis le groupe Radio Nostalgie, en Afrique. Dominique Ouattara reconnaît que «cela n’a pas été facile d’abandonner ce qu’elle avait construit», même si elle n’a pas vraiment coupé les ponts en plaçant notamment sa fille à la vice-présidence de son groupe immobilier dont elle est toujours actionnaire. Ce n’était pas facile car ce n’était pas rien pour la petite fille née Dominique Nouvian, à Constantine, en Algérie, et qui s’était mariée jeune avec un ingénieur, Jean Follouroux, avec qui elle s’était installée à Abidjan. Aujourd’hui, la Première Dame de Côte d’ivoire a décidé de reporter toute son énergie dans sa fondation Children of Africa, créée en 1998. Une Fondation qui milite pour le bien-être des enfants vulnérables d’Afrique dans les secteurs de l’éducation, de la santé et social. Children of Africa vient ainsi de mettre en œuvre la construction d’un hôpital spécialement dédié à la mère et à l’enfant à Bingerville. La semaine dernière, assistant dans un ensemble en tissu africain, à la cérémonie de la pose de la première pierre de cet hôpital, qui portera son nom, la Première Dame, entourée de des «invités VIP» (parmi lesquels la marraine de la Fondation Ira de Fürstenberg), a écouté les hommages vibrants à « Maman Dominique», comme on l’appelle en Côte d’ivoire, se succéder. Et notamment celui de son mari qui a dit combien il était fier de sa femme. De quoi se convaincre que faire du bien a du bon.
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