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Société Publié le lundi 3 février 2014 | Le Democrate

Cybercriminalité: Le phénomène des «brouteurs» en expansion

De nombreux Français, selon Rfi, se sont déjà fait escroquer sur Internet par de jeunes internautes, qui leur écrivent depuis des cybercafés africains et mentent sur leur âge, leur sexe, leur lieu de résidence. Pour alpaguer leurs victimes, ils inventent toutes sortes d'histoires plus abracadabrantes les unes que les autres. Ces arnaques dites « à la nigériane » ont essaimé en Afrique de l'Ouest et font aujourd'hui des ravages. Les victimes sont surnommées des « mugu » en argot ivoirien; les auteurs de ces infractions des « brouteurs ». Les explication de Valérie Maldonado, commissaire divisionnaire, chef de l'office cybercriminalité à la Direction centrale de la police judiciaire de Paris.
RFI : On parle beaucoup en France du phénomène des « brouteurs », un drôle de nom pour des escroqueries en expansion. De quoi s’agit-il exactement ?
Valérie Maldonado : En fait, c’est un phénomène qui consiste à rentrer en contact avec une victime au moyen de courriels qui lui sont envoyés, de manière à créer des liens et des conversations avec la victime, qui sont souvent relatifs à ce que l’on appelle des « escroqueries à la romance » en quelque sorte.
Donc, il y a vraiment des étapes, dans un scénario qui est bien préparé à l’avance et qui va permettre de mettre en confiance la victime, persuadée d’avoir finalement un échange, une correspondance parfaitement privée.
Dans le scénario qui est prévu, la plupart du temps des fonds sont demandés, qui sont liés à des situations qui sont inventées de pure pièce, en fonction des circonstances. Et puis des liens, finalement affectifs, sont créés avec la victime, qui sont de plus en plus forts. Et il est très difficile du coup pour elle de faire marche arrière dans un processus dans lequel elle considère, évidemment, que celui qu’elle a en face est parfaitement sincère.
Alors ça peut être de l’amour, ça peut être aussi du chantage à la maladie ; « Aidez-moi, je ne me sens pas bien » ?
Tous les prétextes sont utilisés. La seule limite, la seule condition : c’est que ça marche. En fait, ils vont être trouvés en fonction des circonstances, en fonction des dialogues qui sont entamés et des sujets qui ont été traités et qui vont faire croire à la vraisemblance de toutes ces situations.
La personne qui est en communication derrière va réfléchir à la façon de faire du chantage, de maintenir une pression sur sa victime. Et la finalité, elle est très précise, c’est d’obtenir un maximum de remise d’argent. Tant que ça marche et tant qu’on peut remettre en quelque sorte une pièce dans la machine en quelque sorte, on continue ces conversations-là.

Mais, il faut être quand même assez naïf pour tomber dans ce genre de piège !
Souvent effectivement, la réflexion qui nous est faite est de dire : mais comment on peut arriver à croire à des montages pareils ? Tout simplement parce qu’en fait les conversations et les contacts qui se font sur Internet ou sur les réseaux sociaux, au travers des échanges mails, sont le reflet de notre société.
Vous avez des gens qui sont plus vulnérables, des gens qui sont en attente de quelque chose et qui pensent avoir trouvé un moyen de communication tout à fait opportun.
Il y a aussi des gens qui sont en détresse, qui se sentent seuls, qui ont besoin de converser, de briser un petit peu la sphère dans laquelle ils se retrouvent. Le dialogue et le montage est suffisamment bien fait, suffisamment personnalisé, pour que la victime soit complètement sous la dépendance des messages ou des conversations qui lui sont renvoyées.
Ça peut aller jusqu’au drame ?
Les préjudices moraux, indépendamment du préjudice financier qui existe, sont extrêmement importants ! La personne est brisée, détruite. Oui, ce sont des processus qui sont complètement dévastateurs pour la victime. Ça peut aller jusqu’à des solutions, on va dire irrémédiables pour certaines d’entre elles.
Le suicide ?
Oui. Ça peut arriver, bien sûr, sur des personnes qui sont complètement désespérées.
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