« Pour la vérité et la justice », l’ancien Chef de l’Etat ivoirien, Laurent Gbagbo, poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI), depuis novembre 2011, pour « crimes contre l’humanité », raconte le « coup d’Etat en gants blancs » de la France contre son régime d’alors.
Dans ces extraits de « Pour la vérité et la justice », le livre qu’il a co-signé avec le journaliste François Mattei, Laurent Gbagbo se souvient, entre autres, du coup d’Etat « manqué» du 19 septembre 2002 » qui s’est mué en une rébellion ayant occupé « plus de la moitié du territoire national » jusqu’à sa chute en avril 2011.
Au chapitre 7 de cet ouvrage, l’ex-président ivoirien, alors en voyage en Italie, décrit, avec forces détails les différentes étapes qui ont abouti à son « retour » précipité à Abidjan après « l’attaque de son pays » non sans souligner la « coïncidence curieuse » de la présence de l’avocat franco-libanais Robert Bourgi dans son hôtel.
« (...) Les 18 et 19 septembre 2002, j’étais en voyage officiel à Rome. A peine arrivé, qui est-ce que je vois, à l’hôtel ? Robert Bourgi. Bien sûr, j’ai trouvé́ la coïncidence curieuse, et pour tout dire, ça ne pouvait pas en être une » raconte-t-il, en dépit d’un « diner ensemble ».
Par la suite, Laurent Gbagbo se remémore avoir « rencontré le président de la République, puis Silvio Berlusconi, qui était à l’époque président du Conseil » avec qui, il a parlé de « politique et projets », notamment, la « proposition de collaboration de son pays pour l’informatisation de notre administration ».
« Il m’a dit qu’il avait perdu beaucoup d’argent en France. Il m’a raccompagné à la voiture en me tenant le bras, et quand nous avons été seuls, qu’il a été certain que personne ne l’entendrait, il m’a dit : + tu me plais, toi. Si je peux te donner un conseil : méfie-toi de Chirac. Il est très sympathique, comme ça, mais il poignarde dans le dos », se souvient M. Gbagbo qui devrait rencontrer « le Pape le lendemain ».
« Rentré à l’hôtel vers 3 ou 4 heures du matin, j’ai été informé par un coup de fil de l’attaque militaire massive déclenchée dans tout le pays. Je décide de rentrer immédiatement. Robert Bourgi apparait à ce moment et insiste : + passe à Paris voir ton grand frère [Chirac] +», lui conseille l’avocat.
Sur le moment, Laurent Gbagbo pense à tous « ces chefs d’Etats, en Afrique, qui étaient partis en voyage, et n’avaient jamais pu rentrer... Je n’avais pas vu le pape, je ne suis pas allé à Paris, voir Chirac. Je suis rentré à Abidjan », indique-t-il, regrettant « un problème avec le plan de vol ».
« Je n’ai pas pu quitter Rome le jour même. Je suis rentré le 20 septembre. Le ministre de la Défense (ndlr : Moïse Lida Kouassi) et le Premier ministre (ndlr : Pascal Affi N’guessan) m’attendaient à l’aéroport » et qui lui ont annoncé la « mort d’Émile Boga Doudou, le ministre de l’Intérieur, assassiné » alors qu’il tentait de « fuir son domicile, seul et sans arme », soutient M. Gbagbo.
Arrivé à Abidjan, il fait « une intervention à la télévision ivoirienne, le jour même », appelant au « rassemblement face au coup d’État ».
« J’ai rappelé nos objectifs de progrès. J’ai souligné́ que nous étions passés, du jour où j’avais prêté serment, le 26 octobre 2000, d’un taux de croissance négatif à moins 2,3 % à moins 0,9 % à la fin de 2001, et que nous allions vers les 5 à 6 %, selon les prévisions des experts. Notre place dans les institutions internationales était rétablie » souligne l’ancien chef d’Etat.
Pour M. Gbagbo, Il n’était pas question que « l’on vienne nous voler le fruit de nos efforts, et que l’on remette en cause l’avenir du pays pour le seul bénéfice de quelques-uns. J’ai évidemment condamné l’action des putschistes », ajoute-t-il.
« Chirac m’a téléphoné́ pour me reprocher d’avoir été trop dur dans mes propos : +tu les as traités de terroristes ! +. Mais enfin, lui ai-je dit, si vous vous réveillez et qu’on vous dit que des rebelles viennent d’attaquer la capitale, qu’est-ce que vous dites ? », interroge Laurent Gbagbo qui s’entend dire par Jacques Chirac « il faut négocier avec eux ».
« Je me doutais que les rebelles avaient été entrainés au camp de Pô, au Burkina. Des bruits avaient couru. Mais, le jour où j’en avais parlé́ à Villepin, quelque temps avant le coup d’État, il m’avait répondu : Blaise [Compaoré́, le président du Burkina Faso] ne ferait pas ça ! », écrit M. Gbagbo.
Le coup laisse des « centaines de morts sur le terrain », constate-t-il. « Les rebelles ont occupé́ plus de la moitié du pays. La France a envoyé́ une force d’interposition, et instauré une «zone de confiance . J’ai décrété́ une amnistie générale, c’était un message de paix », rappelle Laurent Gbagbo.
« Je suis historien, je n’ai jamais vu dans l’histoire un dictateur négocier avec ses adversaires, et mieux, leur faire autant de concessions.Dans mon propre camp, tout le monde n’a pas toujours compris que j’aille aussi loin dans le dialogue, après la guerre qu’on nous a faite en 2002 », explique encore l’ex-président ivoirien.
Pour M. Gbagbo, la France lui a « fabriqué une opposition armée »... avec laquelle « on m’a demandé́ de gouverner », assène-t-il.
HS/ls/APA
Dans ces extraits de « Pour la vérité et la justice », le livre qu’il a co-signé avec le journaliste François Mattei, Laurent Gbagbo se souvient, entre autres, du coup d’Etat « manqué» du 19 septembre 2002 » qui s’est mué en une rébellion ayant occupé « plus de la moitié du territoire national » jusqu’à sa chute en avril 2011.
Au chapitre 7 de cet ouvrage, l’ex-président ivoirien, alors en voyage en Italie, décrit, avec forces détails les différentes étapes qui ont abouti à son « retour » précipité à Abidjan après « l’attaque de son pays » non sans souligner la « coïncidence curieuse » de la présence de l’avocat franco-libanais Robert Bourgi dans son hôtel.
« (...) Les 18 et 19 septembre 2002, j’étais en voyage officiel à Rome. A peine arrivé, qui est-ce que je vois, à l’hôtel ? Robert Bourgi. Bien sûr, j’ai trouvé́ la coïncidence curieuse, et pour tout dire, ça ne pouvait pas en être une » raconte-t-il, en dépit d’un « diner ensemble ».
Par la suite, Laurent Gbagbo se remémore avoir « rencontré le président de la République, puis Silvio Berlusconi, qui était à l’époque président du Conseil » avec qui, il a parlé de « politique et projets », notamment, la « proposition de collaboration de son pays pour l’informatisation de notre administration ».
« Il m’a dit qu’il avait perdu beaucoup d’argent en France. Il m’a raccompagné à la voiture en me tenant le bras, et quand nous avons été seuls, qu’il a été certain que personne ne l’entendrait, il m’a dit : + tu me plais, toi. Si je peux te donner un conseil : méfie-toi de Chirac. Il est très sympathique, comme ça, mais il poignarde dans le dos », se souvient M. Gbagbo qui devrait rencontrer « le Pape le lendemain ».
« Rentré à l’hôtel vers 3 ou 4 heures du matin, j’ai été informé par un coup de fil de l’attaque militaire massive déclenchée dans tout le pays. Je décide de rentrer immédiatement. Robert Bourgi apparait à ce moment et insiste : + passe à Paris voir ton grand frère [Chirac] +», lui conseille l’avocat.
Sur le moment, Laurent Gbagbo pense à tous « ces chefs d’Etats, en Afrique, qui étaient partis en voyage, et n’avaient jamais pu rentrer... Je n’avais pas vu le pape, je ne suis pas allé à Paris, voir Chirac. Je suis rentré à Abidjan », indique-t-il, regrettant « un problème avec le plan de vol ».
« Je n’ai pas pu quitter Rome le jour même. Je suis rentré le 20 septembre. Le ministre de la Défense (ndlr : Moïse Lida Kouassi) et le Premier ministre (ndlr : Pascal Affi N’guessan) m’attendaient à l’aéroport » et qui lui ont annoncé la « mort d’Émile Boga Doudou, le ministre de l’Intérieur, assassiné » alors qu’il tentait de « fuir son domicile, seul et sans arme », soutient M. Gbagbo.
Arrivé à Abidjan, il fait « une intervention à la télévision ivoirienne, le jour même », appelant au « rassemblement face au coup d’État ».
« J’ai rappelé nos objectifs de progrès. J’ai souligné́ que nous étions passés, du jour où j’avais prêté serment, le 26 octobre 2000, d’un taux de croissance négatif à moins 2,3 % à moins 0,9 % à la fin de 2001, et que nous allions vers les 5 à 6 %, selon les prévisions des experts. Notre place dans les institutions internationales était rétablie » souligne l’ancien chef d’Etat.
Pour M. Gbagbo, Il n’était pas question que « l’on vienne nous voler le fruit de nos efforts, et que l’on remette en cause l’avenir du pays pour le seul bénéfice de quelques-uns. J’ai évidemment condamné l’action des putschistes », ajoute-t-il.
« Chirac m’a téléphoné́ pour me reprocher d’avoir été trop dur dans mes propos : +tu les as traités de terroristes ! +. Mais enfin, lui ai-je dit, si vous vous réveillez et qu’on vous dit que des rebelles viennent d’attaquer la capitale, qu’est-ce que vous dites ? », interroge Laurent Gbagbo qui s’entend dire par Jacques Chirac « il faut négocier avec eux ».
« Je me doutais que les rebelles avaient été entrainés au camp de Pô, au Burkina. Des bruits avaient couru. Mais, le jour où j’en avais parlé́ à Villepin, quelque temps avant le coup d’État, il m’avait répondu : Blaise [Compaoré́, le président du Burkina Faso] ne ferait pas ça ! », écrit M. Gbagbo.
Le coup laisse des « centaines de morts sur le terrain », constate-t-il. « Les rebelles ont occupé́ plus de la moitié du pays. La France a envoyé́ une force d’interposition, et instauré une «zone de confiance . J’ai décrété́ une amnistie générale, c’était un message de paix », rappelle Laurent Gbagbo.
« Je suis historien, je n’ai jamais vu dans l’histoire un dictateur négocier avec ses adversaires, et mieux, leur faire autant de concessions.Dans mon propre camp, tout le monde n’a pas toujours compris que j’aille aussi loin dans le dialogue, après la guerre qu’on nous a faite en 2002 », explique encore l’ex-président ivoirien.
Pour M. Gbagbo, la France lui a « fabriqué une opposition armée »... avec laquelle « on m’a demandé́ de gouverner », assène-t-il.
HS/ls/APA