Récompensé pour ses efforts dans la lutte contre la faim et la malnutrition en Afrique, le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, reverse l’intégralité des 500 000 dollars du Prix Sunhak de la paix à la World Hunger Fighters Foundation (« Fondation des combattants contre la faim dans le monde »)
Extrait du discours du président Adesina, prononcé à Séoul, Corée du Sud, le 9 février 2019.
C’est un grand honneur que de recevoir aujourd’hui le Prix Sunhak de la paix. J’adresse d’abord mes félicitations les plus chaleureuses à ma co-lauréate, Mme Waris Dirie. Et je salue le combat qu’elle mène dans le monde entier contre les mutilations génitales féminines.
Ce prix ne me revient pas à titre personnel. Personne ne devrait consacrer sa vie à l’objectif de remporter un prix. Je sers Dieu et l’humanité. Car ma vie n’a de sens que dans la mesure où elle aide à sortir des millions de personnes de la pauvreté.
Mais lorsque les efforts que l’on déploie sont reconnus, alors on se sent plein d’émotion. Aussi, je tiens à remercier le président et les membres du Comité de la Fondation du Prix Sunhak de la paix ainsi que toutes les personnes qui ont proposé ma candidature et m’ont accordé ce grand honneur. Le Prix Sunhak de la paix est un appel à redoubler d’efforts pour notre monde – et c’est précisément ce que je me suis toujours engagé à faire et que je continuerai.
Je souhaite aussi féliciter la fondatrice du Prix Sunhak de la paix, Mme HakJa Han Moon, pour avoir créé cette récompense en reconnaissance des initiatives en faveur d’un monde meilleur. Les idéaux que vous défendez, ceux d’un monde dans lequel nous vivons en paix les uns avec les autres, ne sont pas seulement les meilleurs que nous devions poursuivre, ils représentent aussi un impératif moral.
Avec le Prix Sunhak de la paix, vous illustrez la force des liens familiaux.
L’espèce humaine forme une grande famille, sans distinction de nationalité, de religion, de race ou de couleur. Nous avons tous le même sang qui coule dans nos veines. Nous sommes tous des citoyens du monde. Quand quelqu’un souffre, nous souffrons tous !
Notre monde est en proie à de grandes souffrances. Plus de 850 millions de personnes connaissent la faim et plus de 150 millions d’enfants souffrent de malnutrition. Malgré tous les progrès accomplis, nous sommes loin d’avoir gagné la guerre contre la faim dans le monde. Il ne peut y avoir de paix dans un monde qui a faim.
La faim persiste dans les régions et les lieux en proie aux conflits, aux guerres et à la précarité. Ceux qui souffrent le plus sont les femmes et les enfants.
Lorsque l’orgueil des puissants de ce monde s’affronte, les plus faibles d’entre nous, en particulier les enfants, en subissent les conséquences. Ils ne provoquent pas les guerres, mais ce sont eux, les enfants de la planète, qui en souffrent le plus.
Les images de ces enfants décharnés nous fendent le cœur ; avec leurs yeux enfoncés et leurs battements de cœur qui résonnent dans leur ventre affamé, ils semblent demander : « Maman, pourquoi est-ce que je n’ai rien à manger ? ». Mais leurs mères, elles non plus, n’ont rien à manger.
Dieu nous a pourvus d’un estomac pour le remplir et pas pour qu’il reste vide. Aujourd’hui, les budgets consacrés aux dépenses militaires dépassent largement tout ce que nous mettons en œuvre pour améliorer l’agriculture et nous nourrir.
Le monde ne peut pas labourer la terre avec des fusils, et nous avons plus besoin de semences de haricots et de riz que de balles. Les semences donnent la vie. Les balles mettent un terme à la vie.
Dans les années 700 avant Jésus Christ, l’un des prophètes de l’ancien Testament du nom d’Ésaïe appela le monde à transformer ses épées en charrues et ses lances en fourches d’élagage et à apprendre à cesser de faire la guerre.
Les guerres ne construisent rien. Pour assurer la sécurité dans notre monde, nous devons mettre fin au désir insatiable de rechercher des raisons de se battre. Trouvons plutôt des raisons d’apporter notre soutien à des millions de pauvres pour nourrir notre monde.
Car un monde en paix sera un monde en sécurité alimentaire.
Nous avons des comptes à rendre aux pauvres. Et nous devons réduire les inégalités salariales dans le monde. Réfléchissons à ceci : 1 % des riches de la planète possède près de 50 % des richesses mondiales. Les pauvres n’ont d’autre option que de se retrouver à manger, au mieux, les miettes qui tombent de la table des riches. Certes, nous avons besoin de richesses, mais nous en avons besoin pour tout le monde, pas seulement pour une poignée de personnes. Ce sentiment d’exclusion et le manque d’équité ou de justice sont souvent à l’origine des conflits.
Mais rien ne favorise plus la pauvreté que la corruption. La corruption est comme un feu ardent, elle détruit tout sur son passage. Les enfants ne peuvent pas aller à l’école ou alors ils fréquentent des écoles médiocres. Chaque jour, des centaines de millions de personnes vivent avec la faim au ventre. Certaines personnes vivent sans assurance et, dès les premiers signes d’une maladie, dépensent tout ce qu’elles ont gagné dans leur existence pour assurer leur survie – si toutefois elles en ont les moyens.
Les jeunes, qui représentent l’espoir de notre monde, traînent pourtant désœuvrés dans nos rues. Des millions de personnes n’ont pas d’assurance maladie. Celles qui espéraient survivre dans les villes finissent dans des banlieues tentaculaires et les taudis qui se développent dans le monde entier. Comment envisager l’avenir dans ces conditions ?
Pourtant, les ressources qui leur sont destinées leur échappent en raison d’une corruption croissante. Il est impératif de responsabiliser les États vis-à-vis de leurs populations, notamment des pauvres, dont le seul espoir est que les gouvernements les aident à accéder à un avenir meilleur, pour eux et leurs enfants.
Je me souviens de l’époque où, lorsque j’étais ministre de l’Agriculture au Nigeria, j’avais dû lutter contre la corruption. Nous avons réussi à mettre fin à quarante années de corruption dans le secteur des engrais et des semences, grâce à un simple outil : le téléphone portable. Il nous a permis de fournir des bons électroniques directement aux agriculteurs qui ont pu acheter eux-mêmes des semences et des engrais auprès de fournisseurs du secteur privé. Nous avons éliminé les intermédiaires, ces personnes en quête d’une rente économique qui, depuis des décennies, s’enrichissaient grâce à des contrats publics tandis que les pauvres demeuraient sans ressources. Nous avons mis fin à la distribution directe des semences et des engrais par le gouvernement.
La tâche a été rude, mais nous y sommes parvenus. En l’espace de quatre ans, plus de 15 millions d’agriculteurs ont bénéficié de ce système. Parmi eux, une femme m’a dit, un jour, en brandissant son téléphone pour me montrer qu’elle avait reçu ses bons électroniques : « Maintenant, nous pouvons vivre dans la dignité ».
Ce système de porte-monnaie électronique pour les agriculteurs est en train de se mondialiser et, aujourd’hui, à la Banque africaine de développement, nous contribuons à le généraliser dans plusieurs pays d’Afrique.
Les pauvres n’ont pas besoin d’aide, ils ont besoin de gouvernements responsables. Selon l’ONU, la corruption dans le monde coûterait 3 000 milliards de dollars par an en pots-de-vin et détournements de fonds.
Imaginez ce que tout cet argent permettrait d’accomplir.
Selon les estimations du Forum économique mondial, il faudrait 116 milliards de dollars par an pour nourrir la planète entière et éliminer la faim… 8,5 milliards de dollars par an pour éliminer le paludisme. Or, cela ne représente que 0,28 % de ce que la corruption coûte chaque année à l’échelle mondiale. Il faudrait également 26 milliards de dollars par an pour scolariser tous les enfants du monde. Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie atomique, 31 milliards de dollars par an seraient nécessaires pour que la planète entière puisse être pourvue en énergie. Cela ne représente que 1 % de ce que la corruption coûte chaque année à l’échelle mondiale.
La corruption n’investit pas dans l’avenir, elle l’anéantit.
C’est la raison pour laquelle la Banque africaine de développement travaille d’arrache-pied avec les gouvernements pour améliorer la transparence, la gouvernance et l’esprit de responsabilité sur tout le continent. Nous améliorons la transparence dans l’exécution et la mise en œuvre de nos projets. En effet, l’année dernière, le rapport international intitulé « PublishWhat You Fund » (Publiez ce que vous financez) a classé la Banque africaine de développement au quatrième rang des institutions les plus transparentes de la planète.
Nous nous efforçons de bâtir un avenir meilleur pour le continent. Au sein de la Banque africaine de développement, nous investissons 24 milliards de dollars dans le cadre d’une initiative novatrice appelée « Nourrir l’Afrique », dont le but est d’aider le continent à parvenir à assurer sa sécurité alimentaire d’ici à dix ans. Nous avons déjà commencé à aider plusieurs millions d’agriculteurs, notre objectif étant d’en aider plus de 35 millions.
Pour éclairer l’Afrique et lui offrir un accès universel à l’électricité, la Banque africaine de développement investit actuellement 12 milliards de dollars, avec l’objectif de mobiliser 45 à 50 milliards de dollars sur cinq ans. De nombreux progrès ont été accomplis et, ces cinq dernières années, nous avons fourni de l’électricité à plus de 25 millions de personnes.
Pourtant, il reste encore beaucoup à faire avant de parvenir à un monde meilleur pour tous. C’est la raison pour laquelle le Prix Sunhak de la paix est pour moi une source d’inspiration extraordinaire. C’est un appel à faire plus pour les populations les plus démunies, en particulier pour celles d’Afrique.
Rien n’est plus important que de nous assurer de pouvoir nourrir la planète et éliminer la faim et la malnutrition. La faim est une ignominie pour l’espèce humaine. Une économie qui est en croissance sans nourrir sa population est une économie défaillante. Personne ne devrait avoir faim, et ce quelle que soit sa couleur de peau – blanc ou noir, peu importe.
Les politiques doivent assumer leur part de responsabilité en ce qui concerne la faim dans le monde. Une population bien nourrie et en bonne santé sera plus productive. La baisse des prix des aliments augmentera la part des revenus disponibles, ce qui permettra aux ménages d’épargner et d’investir dans l’éducation et la santé de leurs enfants.
Les populations en bonne santé vivront plus longtemps en constituant une réserve d’épargne à long terme. Et, surtout, les enfants bien nourris apprendront efficacement, car un ventre vide affaiblit les capacités intellectuelles d’un enfant. C’est la raison pour laquelle la meilleure infrastructure qu’il nous faut bâtir est l’« infrastructure de la matière grise ». En d’autres termes, une « infrastructure cérébrale ». Et une alimentation nutritive en est le carburant.
Alors, transformons nos épées en charrues et nos lances en fourches d’élagage. Transformons nos fusils en semoirs et remplaçons les balles par des semences pour faire pousser nos aliments. Mettons fin à l’ignominie de la faim dans notre monde, c’est ce que Dieu nous demande.
En effet, même lorsque les disciples de Jésus lui ont demandé de leur apprendre à prier, sa première requête à Dieu a été : « Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien ». Cela signifie bien l’importance primordiale de la nourriture !
Enfin, c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de verser l’intégralité des 500 000 dollars du Prix Sunhak de la paix à ma fondation, la World Hunger Fighters Foundation (« Fondation des combattants contre la faim dans le monde ») afin de répondre à la demande du Seigneur et de faire en sorte que tous les peuples du monde reçoivent leur « pain quotidien ».
Je vous remercie tous chaleureusement. Que Dieu vous bénisse.
Extrait du discours du président Adesina, prononcé à Séoul, Corée du Sud, le 9 février 2019.
C’est un grand honneur que de recevoir aujourd’hui le Prix Sunhak de la paix. J’adresse d’abord mes félicitations les plus chaleureuses à ma co-lauréate, Mme Waris Dirie. Et je salue le combat qu’elle mène dans le monde entier contre les mutilations génitales féminines.
Ce prix ne me revient pas à titre personnel. Personne ne devrait consacrer sa vie à l’objectif de remporter un prix. Je sers Dieu et l’humanité. Car ma vie n’a de sens que dans la mesure où elle aide à sortir des millions de personnes de la pauvreté.
Mais lorsque les efforts que l’on déploie sont reconnus, alors on se sent plein d’émotion. Aussi, je tiens à remercier le président et les membres du Comité de la Fondation du Prix Sunhak de la paix ainsi que toutes les personnes qui ont proposé ma candidature et m’ont accordé ce grand honneur. Le Prix Sunhak de la paix est un appel à redoubler d’efforts pour notre monde – et c’est précisément ce que je me suis toujours engagé à faire et que je continuerai.
Je souhaite aussi féliciter la fondatrice du Prix Sunhak de la paix, Mme HakJa Han Moon, pour avoir créé cette récompense en reconnaissance des initiatives en faveur d’un monde meilleur. Les idéaux que vous défendez, ceux d’un monde dans lequel nous vivons en paix les uns avec les autres, ne sont pas seulement les meilleurs que nous devions poursuivre, ils représentent aussi un impératif moral.
Avec le Prix Sunhak de la paix, vous illustrez la force des liens familiaux.
L’espèce humaine forme une grande famille, sans distinction de nationalité, de religion, de race ou de couleur. Nous avons tous le même sang qui coule dans nos veines. Nous sommes tous des citoyens du monde. Quand quelqu’un souffre, nous souffrons tous !
Notre monde est en proie à de grandes souffrances. Plus de 850 millions de personnes connaissent la faim et plus de 150 millions d’enfants souffrent de malnutrition. Malgré tous les progrès accomplis, nous sommes loin d’avoir gagné la guerre contre la faim dans le monde. Il ne peut y avoir de paix dans un monde qui a faim.
La faim persiste dans les régions et les lieux en proie aux conflits, aux guerres et à la précarité. Ceux qui souffrent le plus sont les femmes et les enfants.
Lorsque l’orgueil des puissants de ce monde s’affronte, les plus faibles d’entre nous, en particulier les enfants, en subissent les conséquences. Ils ne provoquent pas les guerres, mais ce sont eux, les enfants de la planète, qui en souffrent le plus.
Les images de ces enfants décharnés nous fendent le cœur ; avec leurs yeux enfoncés et leurs battements de cœur qui résonnent dans leur ventre affamé, ils semblent demander : « Maman, pourquoi est-ce que je n’ai rien à manger ? ». Mais leurs mères, elles non plus, n’ont rien à manger.
Dieu nous a pourvus d’un estomac pour le remplir et pas pour qu’il reste vide. Aujourd’hui, les budgets consacrés aux dépenses militaires dépassent largement tout ce que nous mettons en œuvre pour améliorer l’agriculture et nous nourrir.
Le monde ne peut pas labourer la terre avec des fusils, et nous avons plus besoin de semences de haricots et de riz que de balles. Les semences donnent la vie. Les balles mettent un terme à la vie.
Dans les années 700 avant Jésus Christ, l’un des prophètes de l’ancien Testament du nom d’Ésaïe appela le monde à transformer ses épées en charrues et ses lances en fourches d’élagage et à apprendre à cesser de faire la guerre.
Les guerres ne construisent rien. Pour assurer la sécurité dans notre monde, nous devons mettre fin au désir insatiable de rechercher des raisons de se battre. Trouvons plutôt des raisons d’apporter notre soutien à des millions de pauvres pour nourrir notre monde.
Car un monde en paix sera un monde en sécurité alimentaire.
Nous avons des comptes à rendre aux pauvres. Et nous devons réduire les inégalités salariales dans le monde. Réfléchissons à ceci : 1 % des riches de la planète possède près de 50 % des richesses mondiales. Les pauvres n’ont d’autre option que de se retrouver à manger, au mieux, les miettes qui tombent de la table des riches. Certes, nous avons besoin de richesses, mais nous en avons besoin pour tout le monde, pas seulement pour une poignée de personnes. Ce sentiment d’exclusion et le manque d’équité ou de justice sont souvent à l’origine des conflits.
Mais rien ne favorise plus la pauvreté que la corruption. La corruption est comme un feu ardent, elle détruit tout sur son passage. Les enfants ne peuvent pas aller à l’école ou alors ils fréquentent des écoles médiocres. Chaque jour, des centaines de millions de personnes vivent avec la faim au ventre. Certaines personnes vivent sans assurance et, dès les premiers signes d’une maladie, dépensent tout ce qu’elles ont gagné dans leur existence pour assurer leur survie – si toutefois elles en ont les moyens.
Les jeunes, qui représentent l’espoir de notre monde, traînent pourtant désœuvrés dans nos rues. Des millions de personnes n’ont pas d’assurance maladie. Celles qui espéraient survivre dans les villes finissent dans des banlieues tentaculaires et les taudis qui se développent dans le monde entier. Comment envisager l’avenir dans ces conditions ?
Pourtant, les ressources qui leur sont destinées leur échappent en raison d’une corruption croissante. Il est impératif de responsabiliser les États vis-à-vis de leurs populations, notamment des pauvres, dont le seul espoir est que les gouvernements les aident à accéder à un avenir meilleur, pour eux et leurs enfants.
Je me souviens de l’époque où, lorsque j’étais ministre de l’Agriculture au Nigeria, j’avais dû lutter contre la corruption. Nous avons réussi à mettre fin à quarante années de corruption dans le secteur des engrais et des semences, grâce à un simple outil : le téléphone portable. Il nous a permis de fournir des bons électroniques directement aux agriculteurs qui ont pu acheter eux-mêmes des semences et des engrais auprès de fournisseurs du secteur privé. Nous avons éliminé les intermédiaires, ces personnes en quête d’une rente économique qui, depuis des décennies, s’enrichissaient grâce à des contrats publics tandis que les pauvres demeuraient sans ressources. Nous avons mis fin à la distribution directe des semences et des engrais par le gouvernement.
La tâche a été rude, mais nous y sommes parvenus. En l’espace de quatre ans, plus de 15 millions d’agriculteurs ont bénéficié de ce système. Parmi eux, une femme m’a dit, un jour, en brandissant son téléphone pour me montrer qu’elle avait reçu ses bons électroniques : « Maintenant, nous pouvons vivre dans la dignité ».
Ce système de porte-monnaie électronique pour les agriculteurs est en train de se mondialiser et, aujourd’hui, à la Banque africaine de développement, nous contribuons à le généraliser dans plusieurs pays d’Afrique.
Les pauvres n’ont pas besoin d’aide, ils ont besoin de gouvernements responsables. Selon l’ONU, la corruption dans le monde coûterait 3 000 milliards de dollars par an en pots-de-vin et détournements de fonds.
Imaginez ce que tout cet argent permettrait d’accomplir.
Selon les estimations du Forum économique mondial, il faudrait 116 milliards de dollars par an pour nourrir la planète entière et éliminer la faim… 8,5 milliards de dollars par an pour éliminer le paludisme. Or, cela ne représente que 0,28 % de ce que la corruption coûte chaque année à l’échelle mondiale. Il faudrait également 26 milliards de dollars par an pour scolariser tous les enfants du monde. Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie atomique, 31 milliards de dollars par an seraient nécessaires pour que la planète entière puisse être pourvue en énergie. Cela ne représente que 1 % de ce que la corruption coûte chaque année à l’échelle mondiale.
La corruption n’investit pas dans l’avenir, elle l’anéantit.
C’est la raison pour laquelle la Banque africaine de développement travaille d’arrache-pied avec les gouvernements pour améliorer la transparence, la gouvernance et l’esprit de responsabilité sur tout le continent. Nous améliorons la transparence dans l’exécution et la mise en œuvre de nos projets. En effet, l’année dernière, le rapport international intitulé « PublishWhat You Fund » (Publiez ce que vous financez) a classé la Banque africaine de développement au quatrième rang des institutions les plus transparentes de la planète.
Nous nous efforçons de bâtir un avenir meilleur pour le continent. Au sein de la Banque africaine de développement, nous investissons 24 milliards de dollars dans le cadre d’une initiative novatrice appelée « Nourrir l’Afrique », dont le but est d’aider le continent à parvenir à assurer sa sécurité alimentaire d’ici à dix ans. Nous avons déjà commencé à aider plusieurs millions d’agriculteurs, notre objectif étant d’en aider plus de 35 millions.
Pour éclairer l’Afrique et lui offrir un accès universel à l’électricité, la Banque africaine de développement investit actuellement 12 milliards de dollars, avec l’objectif de mobiliser 45 à 50 milliards de dollars sur cinq ans. De nombreux progrès ont été accomplis et, ces cinq dernières années, nous avons fourni de l’électricité à plus de 25 millions de personnes.
Pourtant, il reste encore beaucoup à faire avant de parvenir à un monde meilleur pour tous. C’est la raison pour laquelle le Prix Sunhak de la paix est pour moi une source d’inspiration extraordinaire. C’est un appel à faire plus pour les populations les plus démunies, en particulier pour celles d’Afrique.
Rien n’est plus important que de nous assurer de pouvoir nourrir la planète et éliminer la faim et la malnutrition. La faim est une ignominie pour l’espèce humaine. Une économie qui est en croissance sans nourrir sa population est une économie défaillante. Personne ne devrait avoir faim, et ce quelle que soit sa couleur de peau – blanc ou noir, peu importe.
Les politiques doivent assumer leur part de responsabilité en ce qui concerne la faim dans le monde. Une population bien nourrie et en bonne santé sera plus productive. La baisse des prix des aliments augmentera la part des revenus disponibles, ce qui permettra aux ménages d’épargner et d’investir dans l’éducation et la santé de leurs enfants.
Les populations en bonne santé vivront plus longtemps en constituant une réserve d’épargne à long terme. Et, surtout, les enfants bien nourris apprendront efficacement, car un ventre vide affaiblit les capacités intellectuelles d’un enfant. C’est la raison pour laquelle la meilleure infrastructure qu’il nous faut bâtir est l’« infrastructure de la matière grise ». En d’autres termes, une « infrastructure cérébrale ». Et une alimentation nutritive en est le carburant.
Alors, transformons nos épées en charrues et nos lances en fourches d’élagage. Transformons nos fusils en semoirs et remplaçons les balles par des semences pour faire pousser nos aliments. Mettons fin à l’ignominie de la faim dans notre monde, c’est ce que Dieu nous demande.
En effet, même lorsque les disciples de Jésus lui ont demandé de leur apprendre à prier, sa première requête à Dieu a été : « Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien ». Cela signifie bien l’importance primordiale de la nourriture !
Enfin, c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de verser l’intégralité des 500 000 dollars du Prix Sunhak de la paix à ma fondation, la World Hunger Fighters Foundation (« Fondation des combattants contre la faim dans le monde ») afin de répondre à la demande du Seigneur et de faire en sorte que tous les peuples du monde reçoivent leur « pain quotidien ».
Je vous remercie tous chaleureusement. Que Dieu vous bénisse.