Abidjan, 17 août 2021 (AIP)- Une visite à l’unité d’oncologie pédiatrique du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Treichville à Abidjan a permis à l’AIP de découvrir l’environnement, les difficultés que rencontrent les agents de cette structure qui traite 150 à 200 cas de cancer de l’enfant chaque année.
En Côte d’Ivoire, chaque année, environ 800 nouveaux cas de cancer de l’enfant sont détectés. Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), seulement 30 % des enfants africains atteints de cette pathologie survivent contre 80 % dans les pays à revenu élevé.
Cette pathologie est une tumeur maligne, et cette tumeur est due à une prolifération anormale de cellules, issues d’une même cellule qui échappent au contrôle de l’organisme et les enfants ne sont pas épargnés par cette maladie.
Une visite guidée à l’unité d’oncologie pédiatrique du Centre hospitalier Universitaire (CHU) de Treichville, avec le docteur Akoun Yapi Charles, onco-pédiatre, nous donne donc d’être au cœur des réalités quotidiennes vécues par les usagers (les patients et leurs parents).
La visite débute par les chambres d’hospitalisation qui sont peints de graphisme d’image de dauphin, de poissons en couleur bleue.
Une télévision écran plasma est installée dans chaque chambre. Des clubs de petits essaient d’égayer les petits patients. A l’intérieur de certaines chambres, des enfants sont endormis, d’autres assis ou debout ont l’air craintifs. Les parents assis à côté de leurs enfants sont dans l’angoisse. Dans l’allée de l’hôpital, des dessins avec fleurs, de branches d’arbre et des plantes sont sur le mur. Sur un autre mur on voit trois plants de pieds à couleurs multiples, où sont écrits les mots : « joie, paix et vie ».
Un enfant nouvellement hospitalisé est atteint d’un cancer du lymphome de Burkitt, une tumeur au visage et un autre enfant atteint d’une leucémie qui est une maladie du sang.
Une chambre d’hospitalisation comporte deux lits et la capacité d’accueil des chambres est de 14 lits. Cette capacité d’accueil de l’unité d’oncologie pédiatrique est petite, il y a des gens qui viennent pour leur traitement, mais il n’y a pas suffisamment de places et ils sont obligés d’attendre qu’une place se libère avant de les prendre en charge, affirme le docteur Akoun Yapi Charles, onco-pédiatre.
Les deux salles d’isolement que compte l’unité, comporte chacun un lit. Ces chambres sont stérilisées et filtrées avec des blouses, des surblouses et tout ce qui va avec l’hygiène. Tout le monde n’entre pas dans la salle d’isolement, il faut avoir des blouses jetables, des objets jetables et tout cela a vraiment un coût, explique le docteur Akoun Yapi.
La salle de préparation de la chimiothérapie, la salle des soins et de consultation, sont exigues.
Les médecins quant à eux se partagent un seul bureau et l’on constate une insuffisance de médecins et d’infirmiers.
Dr. Akoun révèle qu’un besoin crucial en médicaments se présente également à eux, surtout que les coûts des soins sont élevés.
Il a souhaité que la prise en charge des enfants atteints de cancer arrive à la gratuité et que l’on dispose de locaux bien adaptés aux réalités de cette unité sanitaire.
« Le cancer de l’enfant tourne autour de 1 à 2 % du cancer général. Et selon les statistiques, nous atteignons 900 à 1400 cas de cancer pédiatrique chaque année en Côte d’Ivoire. Avec ce chiffre, c’est au moins 30% des patients qui fréquentent les services spécialisés. A l’unité oncologique du CHU de Treichville, on est autour 150 à 200 nouveaux cas en 2020 », a déclaré le médecin.
Il a par ailleurs relevé que les moyens financiers sont insuffisants et que l’on constate des retards de consultation. Plus de 50 % des enfants atteints de cancer, viennent à l’unité dans un état très avancé de la maladie, chose qui bien évidemment, selon le médecin, réduit vraiment les chances de guérison.
Une salle d’éveil
Une salle d’éveil est aménagée au sein de l’unité pour égailler et aider les enfants pendant leur période d’hospitalisation.
La responsable de cette salle, Mme Diomandé née Kouakou Eveline explique que les enfants y jouent et apprennent à lire et à écrire. Ils font également du bricolage avec les couleurs, c’est un moyen pour eux de s’évader, souligne-t-elle.
Les enfants hospitalisés sont instruits selon leurs niveaux scolaires et les maîtresses font du préscolaire, du suivi scolaire et un suivi psycho social, affectif et éducatif.
La responsable de la salle d’éveil souligne que l’enfant, à l’hôpital est déjà stressé et angoissé par la maladie, alors qu’il est en âge d’apprentissage. Cette salle lui permet donc d’oublier un peu la douleur et la maladie, souligne la maîtresse.
Des livres bibliques, coraniques et des livres de jeux, de dessins animés, sont à la disposition des tout petits.
Mme Diomandé explique que l’enseignement est basé sur le langage, « Ceux qui sont au préscolaire, on va faire des activités de collage, colorie, la lecture, la musique pour les détendre, car c’est un moyen de supporter la douleur. Quand l’enfant est entrain de peindre, il peut peindre sa douleur, raconter son vécu, dessiner son village, sa maison, pour montrer qu’il veut rentrer à la maison. »
Des activités récréatives et des sorties détentes sont également suggérées aux enfants.
Les préparations des soins et de la chimiothérapie se font par des infirmières.
Les enfants sont souvent préparés à la mort surtout lorsqu’ils entendent les pleurs des parents de l’un des enfants qui est décédé.
Réactions de parents d’enfants malades
Koné Asséttou, sans emploi, mère d’un petit garçon de 7 mois atteint de cancer de leucémie aiguë de lymphome gastrique, ne sait plus à quel saint se vouer. Elle plaide pour que des bonnes volontés, l’aide à faire face aux coûts des analyses et des traitements.
Elle souligne qu’elle a une ordonnance de 600.000 Fcfa et qu’elle ne trouve pas les moyens pour payer. Le mari de cette femme, vu les coûts énormes des soins, a abandonné l’enfant et la mère.
Bongnan Gnaka Constant, père d’un enfant malade du cancer de lymphome de Burkitt stade 3, explique que son enfant a subi trois chimiothérapies et va encore en subir d’autres.
Pour lui, l’annonce du cancer de son fils a été un coup dur pour sa famille, surtout que les traitements sont chers et que les dépenses sont désormais axées sur ce seul enfant.
Ce père, avec d’autres parents ont initié une opération de don de sang au bénéfice des enfants atteints de cancer.
Il a souhaité que les bons de sang de l’unité d’oncologie pour les enfants malades soient prioritaires pour ne pas que les enfants malades de l’unité manquent de sang, surtout que les parents se sont organisés pour faire des dons de sang.
Le père de l’enfant a par ailleurs souhaité que l’état subventionne les médicaments.
Basimon Eugénie, mère d’un petit garçon de 5 ans, atteint de cancer de l’œil, était triste, à l’annonce du diagnostic du médecin. L’enfant va-t-il en mourir ou survivre, s’interroge-t-elle.
La situation est même devenue plus préoccupante pour cette mère, avec l’annonce du médecin de faire l’opération de l’œil. Surtout qu’elle ne dispose pas de moyens financiers conséquents pour y faire face. Elle souhaite donc avoir de l’aide.
Le taux de guérison du cancer de l’enfant est de 35 à 40 %, selon le docteur Akoun qui ajoute, que la guérison est possible si les consultations se font tôt.
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