Le Vice-Président de la République, M. Tiémoko Meyliet Koné a animé, ce mercredi 4 septembre 2024, à Beijing, à l'Université de la Communication de Chine, en marge du Sommet du Forum sur la Coopération sino-africaine. Ci-dessous, l’intégralité de son intervention.
Messieurs les Ministres,
Excellence Monsieur l’Ambassadeur de Côte d’Ivoire en République Populaire de Chine,
Monsieur le Secrétaire du Comité du Parti Communiste de l’Université de Communication de Chine, Professeur Liao Xiangzhong,
Monsieur le Président de l’Université de Communication de Chine, Professeur Zhang Shuting,
Honorables invités, Chers étudiants, Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de prendre la parole dans cette illustre Université de la Communication de Chine, devant un auditoire aussi distingué, composé de sommités académiques et de brillants étudiants, en ce jour où vous avez choisi d’élever Son Excellence Monsieur Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire, au rang prestigieux de Professeur Honoraire.
Il me revient l’insigne honneur de porter sa voix, en cette occasion mémorable. Je tiens à vous exprimer sa profonde gratitude et ses sincères remerciements pour cette belle distinction, qui fait honneur à toute la Côte d’Ivoire.
Je voudrais également, en son nom, adresser nos remerciements chaleureux à Son Excellence Monsieur XI JINPING, Président de la République Populaire de Chine, ainsi qu’au Gouvernement et au peuple chinois pour leur accueil chaleureux et pour toute l’attention dont nous bénéficions, ma délégation et moi-même depuis
notre arrivée à Beijing.
Mes remerciements vont aussi au Secrétaire du Comité du Parti Communiste de l’Université de la Communication de Chine, le Professeur Liao Xiangzhong, et au Président de l’Université, le Professeur Zhang Shuting, ainsi qu’à tout le personnel et à l’ensemble des étudiants de cette Institution.
Je tiens enfin à remercier chacune et chacun d’entre vous pour votre présence (nombreuse) à cette rencontre, qui témoigne de l’excellence des relations que nous entretenons et de l’intérêt que vous portez à la thématique de la présente rencontre.
En cette occasion, il m’a été demandé d’a border un thème d’une grande importance, à savoir « Les échanges humains et culturels dans la coopération sino-africaine ».
C’est donc un thème qui englobe forcément toutes ces multiples interactions et collaborations entre les peuples d'Afrique et de Chine, et qui ont pour but de renforcer notre compréhension mutuelle, de surmonter nos différences culturelles et de promouvoir une coexistence pacifique, tout en soutenant des objectifs
communs de développement, de paix et de solidarité internationale.
La Chine, qui a parfaitement compris ces enjeux, encourage activement les échanges inter-civilisationnels, le partage des connaissances et la coopération multilatérale. C’est un processus de coopération global, qui respecte les spécificités nationales des peuples, dans l'objectif de construire une communauté de destin, consensuelle et partagée, pour l’humanité.
Cette vision trouve un écho particulier en Afrique, notamment en Côte d'Ivoire, qui adhère pleinement à ces principes mis en avant par le Gouvernement Chinois.
Aussi, c’est dans cet esprit de coopération et d'échanges fructueux que je voudrais tout d’abord :
• retracer l’évolution historique des échanges humains et culturels entre la Chine et l’Afrique,
• puis, dresser le bilan des échanges, tant entre la Chine et l’Afrique qu’entre la Chine et la Côte d’Ivoire,
• et enfin présenter les perspectives qu’il est possible d’envisager pour l’avenir.
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Selon les sources universitaires disponibles, notamment celles contenues dans
l’ouvrage "Chine et Afrique, une longue histoire, une nouvelle donne géographique" (du Professeur François BART), l’histoire des échanges humains et culturels entre l'Afrique et la Chine remonte à plusieurs siècles et précède même les premiers contacts entre l'Afrique et l'Europe.
Ces échanges se sont d'abord déroulés par voie maritime, reliant la côte sud de la Chine, aux côtes de l'Afrique orientale. Des preuves archéologiques, telles que des bols en porcelaine et des monnaies chinoises, datant de la période avant le 15ème siècle, ont été découvertes en Tanzanie et au Kenya, témoignant de ces premiers
contacts.
Cependant, à partir du milieu du 15ème siècle, la Chine s'est progressivement retirée de ces échanges maritimes, laissant la place à d'autres puissances, notamment européennes, arabes et indo-pakistanaises.
Malgré cette période de retrait, plusieurs communautés chinoises ont continué de s’installer sur les littoraux de l'océan Indien occidental au 19ème siècle, notamment à Madagascar et à l'île Maurice. Ces communautés ont ainsi apporté une contribution notable à la diversité culturelle et au métissage des sociétés locales. Par exemple,
à l'île Maurice, un musée a été ouvert en 2008, pour célébrer plus d'un siècle de présence chinoise dans l'île.
L’avènement de la République Populaire de Chine en 1949 a marqué un tournant dans l’histoire des échanges sino-africains, qui a certainement permis à la Chine de relancer ses relations avec l’Afrique, s'appuyant sur des objectifs politiques et économiques communs.
Avec la décolonisation, les relations entre la Chine et l’Afrique se sont intensifiées. En effet, au début des indépendances africaines, l’intérêt de la Chine pour le
Continent s’est accentué, dans un contexte de solidarité tiers-mondiste, anticolonialiste et de non-alignement. La Chine, se positionnant comme un leader des pays du Sud global, a cherché à renforcer ses liens avec l'Afrique, notamment après la conférence de Bandung en 1955, en Indonésie.
Dans ce cadre, la Chine a organisé plusieurs conférences afro-asiatiques, en collaboration avec des pays non-alignés, et elle a reçu sur son sol de nombreux dirigeants politiques africains. Parallèlement, elle s'est lancée dans de grands projets d’infrastructures, axés sur les aspects économiques et commerciaux, marquant ainsi sa volonté d'établir des partenariats stratégiques durables avec l'Afrique.
Un autre volet important de cette coopération a été l'ouverture des universités chinoises aux étudiants africains, contribuant ainsi à un enrichissement mutuel des connaissances et des cultures. En même temps, des entrepreneurs africains ont
renforcé leurs liens avec le marché chinois, certains allant même jusqu'à s'installer en Chine pour exploiter les opportunités économiques croissantes.
Dans la même période, des centaines de milliers de Chinois ont émigré vers l'Afrique, dans diverses villes du continent, favorisant ainsi une meilleure connaissance des produits et services chinois par les consommateurs locaux.
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Ce rappel historique montre que les échanges humains entre la Chine et l’Afrique
n’ont pas cessé de se renforcer, pour devenir un pilier de la coopération sino-africaine, établissant des liens profonds entre les deux régions, pour mieux jeter les bases d'une collaboration plus durable.
Ces relations ont connu un nouvel élan en octobre 2000, avec la création du Forum sur la Coopération sino-africaine, le FOCAC. Ce forum marque la volonté et l’engagement des plus hauts représentants des peuples chinois et africains à poursuivre et approfondir leurs relations, dans un cadre plus formel et mieux
organisé.
Dans ce contexte, les échanges humains et culturels entre l’Afrique et la Chine se sont particulièrement intensifiées, notamment aux niveaux de la diplomatie, de la culture, du tourisme, de l’éducation et de la santé.
Au plan diplomatique, les interactions entre le Président chinois et ses homologues africains se sont multipliées. Ce dynamisme s’observe aussi dans les échanges entre les ministres.
Ainsi, plusieurs Présidents de la République Populaire de Chine ont rendu des
visites à leurs homologues africains et vice-versa. Le Président Xi Jinping détient le record de visites en Afrique avec au moins 11 déplacements, dont le plus récent a eu lieu en août 2023 en Afrique du Sud, où il a présidé un dialogue axé sur l'amitié et la coopération sino-africaine.
La Côte d'Ivoire, pour ce qui la concerne, a reçu en visite officielle en 1992, le Président de la République Populaire de Chine, Son Excellence Monsieur ZHANG Zemin.
En sens inverse, trois (03) Chefs d’Etat ivoiriens, ont effectué des visites officielles en Chine. Le Président Alassane OUATTARA est le Chef de l’Etat ivoirien à avoir effectué le plus de visites en Chine, dont la plus récente s’est déroulée du 28 août au 04 septembre 2018.
Par ailleurs, les deux Chefs d’Etats, le Président Alassane OUATTARA et le
Président XI Jinping ont manifesté la volonté d’entretenir des contacts constants, au-delà des visites officielles. A titre d’exemple, leur entretien téléphonique datant du 20 décembre 2022, au cours duquel ils ont décidé de lancer un appel aux entreprises chinoises pour qu’elle viennent investir massivement en Côte d’Ivoire.
Au niveau des ministres, les interactions se sont également multipliées depuis la création du FOCAC. Cette dynamique s'illustre par la pratique des ministres des Affaires étrangères chinois, qui réservent traditionnellement à un pays africain une de leurs premières visites de chaque année.
Pour ce qui concerne la Côte d’Ivoire, sur la période récente, plusieurs ministres
ivoiriens dont le Ministre en charge des Affaires Etrangères, ainsi que de hautes autorités institutionnelles ont effectué des visites en Chine.
Le domaine de la culture est également concerné par cette nouvelle dynamique, avec la création du Forum sur la coopération des médias sino-africains, dont la 5ème édition s’est tenue à Beijing en août 2022.
Des festivals du cinéma chinois ont aussi été organisés dans plusieurs pays africains. Il faut encore mentionner l’établissement de plus de 150 jumelages entre les villes chinoises et africaines, qui permettent de renforcer la coopération culturelle au niveau local.
Dans le domaine du tourisme, le gouvernement chinois a organisé en 2023 l'événement « Here is Africa » qui vise à promouvoir les richesses culturelles et touristiques africaines auprès des voyageurs chinois.
En ce qui concerne l'éducation, le Plan de Coopération sino-africaine pour le Développement des Talents a été lancé par le Président XI Jinping, en août 2023 à
Johannesburg. A cet effet, la Côte d’Ivoire est prête à promouvoir l'établissement et le développement des relations de partenariat entre les établissements de formation des deux pays.
L’appui de la Chine à l’éducation de la jeunesse africaine se manifeste notamment par les milliers de bourses d'études, accordées chaque année aux étudiants africains. Ces programmes ont permis à plus de 2.500 étudiants ivoiriens de se former dans des domaines variés.
La Chine a également créé environ 60 Instituts Confucius, en coopération avec plus de 45 pays africains, dont la Côte d’Ivoire, pour promouvoir la langue et la culture chinoises. Actuellement, plus de 1.500 élèves apprennent le chinois dans les écoles ivoiriennes.
Dans le domaine de la santé, la Chine a envoyé plus de 21.000 professionnels de
santé dans 48 pays africains, prodiguant des soins de santé à environ 220 millions de personnes. Pendant la pandémie de COVID-19, des équipes médicales chinoises ont partagé leur expertise avec leurs homologues ivoiriens, contribuant ainsi à renforcer les capacités sanitaires du pays.
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Dans le but de renforcer la dynamique de coopération, la Chine et l’Afrique travaillent ensemble pour bâtir une communauté d’avenir partagé, en s’appuyant
sur des initiatives telles que "la Ceinture et la Route", l’Agenda 2063 de l’Union Africaine et l’Agenda 2030 des Nations Unies.
Cette collaboration vise à promouvoir un développement économique durable et à consolider les liens entre nos deux régions, tout en mettant en avant des valeurs communes comme la paix durable, la sécurité universelle et la prospérité partagée.
Ainsi, le Plan d’actions 2025-2027, qui sera adopté lors du présent Forum sur la Coopération sino-africaine 2024, permettra de donner un nouvel élan à nos relations pour les trois prochaines années.
En effet, ce plan viendra consolider nos échanges humains et culturels, et mettra l’accent sur des priorités telles que l'industrialisation, la modernisation agricole, l'innovation technologique et le développement vert.
En unissant leurs efforts, la Chine et l’Afrique pourront relever ensemble les défis mondiaux et contribuer à une gouvernance internationale plus juste et équilibrée.
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Tels sont les quelques éléments qu’il m’a paru utile de rappeler dans le cadre de cette communication, sans avoir la prétention, bien sur, d’avoir épuisé totalement le sujet relatif aux échanges humains et culturels dans la coopération sino-africaine.
Je ne saurais terminer mon adresse sans vous renouveler de Son Excellence Monsieur Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d'Ivoire, illustre récipiendaire de la prestigieuse distinction de Professeur honoraire décernée par votre Université. Cette reconnaissance couronne une valeur fondamentale qui a toujours guidé son action politique et sociale, à savoir «l'intégration des peuples et le vivre ensemble, grâce aux échanges humains, source de compréhension mutuelle et de coexistence pacifique ».
Le Président Alassane OUATTARA considère véritablement cette distinction comme un soutien de la communauté académique chinoise, et un encouragement à poursuivre son engagement en faveur de la coopération mutuelle et de la fraternité entre les peuples.
Indéniablement, les échanges humains, en plus de prévenir les conflits liés aux différences culturelles, favorisent le vivre ensemble et permettent à chacun de s'épanouir pleinement dans une communauté d'avenir partagé.
Aussi je souhaite ardemment que ces échanges soient le socle de collaborations futures, dans des domaines variés tels que la formation, la culture et les nouvelles
technologies, assurant ainsi un bel avenir à la coopération sino-africaine.
Je vous remercie pour votre aimable attention.