Steve Witkoff, l'envoyé du président américain au Moyen-Orient, a visité pour la première fois un site de distribution d'aide soutenu par Israël et les États-Unis à Gaza.
Witkoff a déclaré que le but de la visite de ce site de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) était de donner à Trump "une compréhension claire de la situation humanitaire et d'aider à élaborer un plan de livraison de la nourriture et de l'aide médicale aux habitants de Gaza".
La visite fait suite à des fusillades mortelles quasi quotidiennes autour de la GHF, l'ONU ayant fait état d'au moins 859 Palestiniens tués à proximité des sites - un chiffre que la GHF rejette.
Israël affirme que ses troupes n'ont tiré que des coups de semonce et qu'elles ne tirent pas intentionnellement sur les civils.
Les journalistes, y compris ceux de la BBC, sont bloqués par Israël et ne peuvent pas entrer librement à Gaza, ce qui rend difficile la vérification de ces informations.
La BBC a appris que Witkoff avait visité l'un des sites de la GHF, près de Rafah, dans le sud de Gaza, vendredi 1er août.
Il était accompagné de l'ambassadeur américain en Israël, Mike Huckabee, et des Forces de défense israéliennes (FDI).
Huckabee a déclaré qu'ils avaient reçu "des briefings des FDI et parlé à des gens sur le terrain".
Il a affirmé que les sites de la GHF livraient "plus d'un million de repas par jour".
L'ambassadeur a qualifié cela d'"exploit incroyable".
La GHF a déclaré avoir distribué 1,3 million de repas sur trois sites, jeudi 31 août. Elle n'a pas encore publié les chiffres pour vendredi 1er août. L'ONU affirme que le nombre de repas fournis par la GHF est bien en deçà des besoins nutritionnels globaux.
Les agences de l'ONU ont averti à plusieurs reprises qu'une famine de masse provoquée par l'homme se déroulait dans le territoire.
Des habitants de Gaza interrogés par la BBC ont dénoncé la visite de Witkoff, estimant que c'est un "coup médiatique".
Louay Mahmoud, qui vit à Gaza, a déclaré : "Steve Witkoff ne verra pas la faim, seulement le récit qu'Israël veut qu'il voie. Cette visite est une opération médiatique creuse, pas une mission humanitaire. Il vient sans aucune solution, seulement avec des arguments conçus pour polir l'image d'une administration complice de notre souffrance."
Amer Khayrat, père de deux enfants qui vit à Gaza City, a déclaré : "Ce dont Gaza a besoin, ce n'est pas d'un autre envoyé avec une équipe de presse. Nous avons besoin que le siège soit levé, que les bombardements cessent et que le soutien aveugle des Américains à cette guerre prenne fin."
Le directeur chargé de la paix et de la sécurité pour les Amériques chez Oxfam, Scott Paul, a déclaré que Witkoff et Huckabee, lors de leur visite, auraient été "confrontés à des scènes d'innombrables enfants palestiniens et leurs familles au bord de la famine, déplacés dans des communautés aplaties à l'extérieur des fenêtres de leur convoi".
Il a ajouté : "Cela doit être ce qui pousse enfin les États-Unis à utiliser toute leur influence pour mettre fin à cette catastrophe avant que nous ne dépassions le point de non-retour."
L'ancienne responsable du département d'État américain Annelle Sheline, qui a démissionné de son poste en signe de protestation contre les politiques de Joe Biden envers Gaza, l'année dernière, a déclaré que la visite de Witkoff et de Huckabee était une "séance photo glorifiée, destinée à masquer la réalité d'une grave crise humanitaire que l'Amérique a contribué à créer".
Un officier des forces spéciales américaines à la retraite, qui a travaillé dans les centres de la GHF, a déclaré à la BBC, la semaine dernière, qu'il avait vu des troupes de l'IDF et des entrepreneurs américains tirer sur des foules de Palestiniens, près des sites où il travaillait.
Le lieutenant-colonel Anthony Aguilar, un vétéran des forces spéciales des Bérets verts de l'armée américaine, a déclaré qu'il n'avait jamais été témoin, durant toute sa carrière, d'un tel niveau de "brutalité et d'utilisation de la force aveugle et inutile contre une population civile, une population désarmée et affamée".
La GHF a qualifié les allégations d'Aguilar de "catégoriquement fausses", le décrivant comme un "ancien entrepreneur mécontent, qui a été renvoyé pour faute", ce qu'il nie.
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Vendredi, le groupe de campagne Human Right Watch (HRW) a accusé les forces israéliennes et les entrepreneurs soutenus par les États-Unis d'avoir mis en place "un système de distribution d'aide défectueux et militarisé qui a transformé la distribution d'aide en bain de sang régulier".
HRW a appelé les autorités israéliennes "à cesser immédiatement d'utiliser la force létale pour contrôler les foules contre les civils palestiniens" et a appelé les États-Unis et Israël à suspendre l'opération.
Les sites d'aide de GHF ont remplacé le mécanisme de distribution de l'ONU en mai, suscitant une indignation internationale. Israël a accusé le Hamas de piller l'aide de l'ONU, une accusation que le Hamas nie.
Il y a quatre sites GHF, qui sont situés à l'intérieur des zones militaires israéliennes et sont exploités par des entrepreneurs privés de sécurité américains.
Des témoins oculaires et des médecins ont décrit à plusieurs reprises des forces israéliennes ouvrant le feu sur des foules près des points d'aide.
L'armée israélienne a déclaré que 126 colis d'aide ont été largués par voie aérienne à Gaza vendredi par sept pays différents : la Belgique, Bahreïn, les Émirats arabes unis, la Jordanie, la France, l'Espagne et l'Allemagne.
Les agences d'aide humanitaire affirment qu'il faut laisser entrer beaucoup plus d'aide par voie terrestre et ont averti que les largages aériens ne peuvent pas fournir l'aide de qualité nécessaire.
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Le bureau des droits de l'homme de l'ONU (OHCHR) a déclaré jeudi qu'au moins 1 373 Palestiniens avaient été tués en essayant d'obtenir de l'aide alimentaire à Gaza. Parmi ceux-ci, 859 ont été tués près des sites de la GHF, a-t-il dit.
Selon l'OHCHR, la plupart des victimes avaient été tuées par l'armée israélienne et que, bien qu'il soit au courant de la présence d'autres groupes armés dans la même zone, il a ajouté qu'il "ne disposait d'aucune information indiquant leur implication dans ces meurtres".
Le bureau a déclaré qu'il n'avait "aucune information indiquant que ces Palestiniens participaient directement aux hostilités ou représentaient une menace pour les forces de sécurité israéliennes".
Israël a accusé le Hamas d'avoir provoqué le chaos près des sites d'aide. La GHF a rejeté les chiffres de l'ONU lorsqu'elle a été contactée par la BBC pour les commenter.
Pendant ce temps, au moins 10 personnes ont été tuées dans le sud et le centre de Gaza depuis l'aube de vendredi, selon l'agence de défense civile dirigée par le Hamas.
Ce chiffre comprend huit personnes tuées dans deux frappes aériennes israéliennes distinctes visant des tentes abritant des personnes déplacées - à Khan Younès, dans le Sud, et à Deir al-Balah, au centre de la bande, a indiqué l'agence.
Deux autres personnes ont été tuées et au moins 20 autres blessées lorsque les forces israéliennes ont ouvert le feu près d'un point de distribution d'aide le long du corridor de Morag, au nord de Rafah, a ajouté la défense civile.
Les habitants de cette zone ont déclaré que des centaines de personnes s'étaient rassemblées pour obtenir de la nourriture lorsque les tirs ont commencé.
La BBC a contacté l'armée israélienne pour obtenir des commentaires.
Le ministère de la Santé dirigé par le Hamas a déclaré vendredi que 82 personnes avaient été tuées à Gaza au cours des vingt-quatre dernières heures, dont 52 qui auraient cherché de l'aide.
Witkoff a rencontré le Premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou en Israël, jeudi 31 août, pour ce qui a été décrit par un porte-parole américain comme des pourparlers "productifs".
Selon les médias israéliens, il y a eu des discussions sur une reformulation majeure des négociations de cessez-le-feu, qui incluent un "accord global" qui verrait tous les otages détenus par le Hamas libérés en un seul échange, parallèlement au désarmement complet du Hamas. Auparavant, les otages devaient être libérés par groupes.
Le Hamas a déclaré qu'il ne reviendrait pas à la table des négociations tant que plus d'aide ne serait pas autorisée à entrer à Gaza pour lutter contre la famine.
Les États-Unis et Israël se sont retirés des pourparlers de cessez-le-feu la semaine dernière, accusant le Hamas de manque de coordination et de ne pas négocier de bonne foi.
Le Hamas a accusé la partie israélienne d'intransigeance sur les points clés de blocage des négociations.
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