La salle Kodjo Ebouclé du Palais de la Culture de Treichville a accueilli, ce samedi 6 décembre 2025, la première de “Débat politique”, la nouvelle création du Djeli Théâtre. La troupe dirigée par Gbi de Fer présente ainsi la huitième édition de son rendez-vous annuel, une édition qui dépasse largement le cadre artistique pour s’inscrire comme un acte citoyen, au moment où la Côte d’Ivoire aborde une période électorale sensible.
Depuis huit ans, le Djeli Théâtre s’est fixé pour mission de revigorer le théâtre ivoirien, affaibli par une baisse de visibilité et par l’érosion progressive de ses structures. Avec “Débat politique”, la troupe interroge le fonctionnement du débat public, les dérapages verbaux, les tensions sociales et la responsabilité des acteurs politiques. La pièce rappelle que la politique doit demeurer un espace d’idées plutôt qu’un terrain de confrontation.
Écrite par le Dr Liazéré, ancien directeur du CENAC, l’œuvre met en scène citoyens, leaders politiques, communicants et journalistes. Les comédiens évoluent entre humour mordant, vérités abruptes et scènes de tension, dévoilant les mécanismes qui, parfois, alimentent les crises électorales. La mise en scène est assurée par Gbi de Fer, avec l’appui de Claver Simplice, dit Fléké Fléké.
Placée sous le parrainage de Karim Ouattara, la représentation a rassemblé un public nombreux. Le parrain a salué la démarche de la troupe et souligné le rôle essentiel de l’art dramatique dans la consolidation de la paix et du vivre ensemble.
En marge du spectacle, le comédien Kouya Gbépa a attiré l’attention sur la situation préoccupante du théâtre ivoirien. Il déplore la disparition progressive de cadres comme Vacances Cultures, le théâtre scolaire ou les concours nationaux, qui furent autrefois des incubateurs de talents. Des artistes aujourd’hui reconnus, tels que GBizié, Adama Dahico ou Omega David, y ont pourtant effectué leurs premiers pas. Selon lui, cet affaiblissement résulte aussi de décisions institutionnelles mal orientées.
Kouya Gbépa plaide pour une mobilisation urgente des pouvoirs publics et des partenaires privés. Il recommande le retour d’un concours national de théâtre, une présence plus soutenue des télévisions publiques et privées, une réduction du coût de production pour les jeunes troupes, une restructuration de la Compagnie nationale de théâtre et la création d’un grand festival annuel capable de repositionner l’art dramatique ivoirien.
Dans la salle, le public a alterné rires, silences et applaudissements. Pour certains spectateurs, la pièce dépasse largement le cadre du divertissement. Ce n’est pas une pièce, c’est un miroir de notre société, confie l’un d’eux à la sortie.
Le Djeli Théâtre poursuit sa tournée nationale. La prochaine étape est annoncée à Bouaké, le 19 décembre 2025, à la Salle Jacques Aka.
JB
