Hier, au Maroc, l’ex-ministre de l’Information de la Côte d’Ivoire, sous Félix Houphouet-Boigny, Thiam Amadou, a rendu l’âme. On ne reverra plus la fine silhouette, d’un noir d’ébène, aux accents venus de son Sénégal natal (il naît le 5 août 1923, à Dakar) de l’ex-ministre ivoirien de l’Information, Thiam Amadou. Hier, au petit matin, à Rabat, au Maroc où il résidait depuis sa retraite de tout, il s’est éteint. Il avait 86 ans… à peine. Ce mercredi matin, à Rabat, ce grand serviteur de la presse ivoirienne, de l’Etat aussi, sera mis en terre. Comme, sans doute, l’avait-il souhaité, même si les obligations liées à sa religion, l’Islam, imposaient qu’on l’enterrât le plus rapidement possible. La sagesse malinké ne l’enseigne-t-elle pas : les plus belles histoires se terminent toujours là où elles ont commencé ? Chez cet homme qui quitte la terre des hommes, tout ou presque commence dans le pays de Hassan II, le Maroc, qu’il a aimé avec un irrésistible amour, pour y avoir été, à deux reprises, par intervalles irréguliers, ambassadeur de la Côte d’Ivoire en 1966, à Rabat. Il occupera ce poste douze ans durant, devenant ainsi le doyen du corps diplomatique ; puis, en 1988. Toujours à Rabat, après son refus poli d’occuper des postes ministériels, à la suite du gouvernement du 10 juillet 1986, où il faisait partie des huit ministres d’Etat sans portefeuille. Mais il était surtout un homme des médias. Ce n’est guère un hasard si cet Ivoirien par choix (il avait épousé une des nièces du premier Président de la République de Côte d’Ivoire, Félix Houphouët-Boigny ; fille aînée de Mamie N’dri, une de ses sœurs), deviendra Directeur de Radio Côte d’Ivoire (1959-63), et ministre de l’Information de 1978 à 1986. On pourrait crier au népotisme de mauvais aloi, que cela ne produirait aucun effet. Il avait, en effet, le profil de l’emploi, dans ce pays qui humait les doux parfums de la liberté à venir, et qui entendait que sa voix portât dans le vaste concert des nations, dans la fusion des intelligences de tous. Sans distinction. Diplômé de l’Institut international de journalisme de Strasbourg et du Studio Ecole de la Société de radiodiffusion d’Outre-Mer de la Maison-Laffite, c’était l’homme à la place qu’il fallait. Et c’est en 1956 que commence son aventure à Radio Côte d’Ivoire, en tant que journaliste d’abord, puis directeur en février 1959. C’est en toute logique qu’il sera nommé ministre de l’Information dans « l’éphémère gouvernement du 15 février 1963 (qui dure sept mois) ». Et, contre toute attente, connaîtra aussi les affres du « complot » de 1963. Comme tant d’autres. Temps de fureur du Sage, Félix Houphouët-Boigny ! Amadou Thiam fera partie de la deuxième vague de personnes qui seront arrêtées en août de la même année. Une parenthèse vite oubliée, avec au point de départ, une nomination au poste d’ambassadeur, en 1966, au Maroc. Le 16 février 1978, il redevient ministre de l’Information dans le gouvernement de la même année. Et directeur général de Fraternité Matin. Pour huit ans. Il y sera remplacé, en 1986, par Laurent Dona-Fologo, actuel président du Conseil économique et social. Une vie bien remplie s’en va. Riche de ses expériences reconnues et de son sens de l’engagement et du dévouement. Il était membre du Bureau politique du Pdci-Rda, depuis octobre 1975, et avait été, entre autres, pendant trente ans, Conseiller municipal d’Abidjan. Membre du Rotary international, depuis 1956, il possède des distinctions nationales comme étrangères : Commandeur de l’Ordre national de Côte d’Ivoire, Commandeur de la légion d’honneur (France), Commandeur des arts et des lettres (France), Commandeur du Mérite (Allemagne), Grand Cordon Ouissam Alaouite (Maroc), etc. Thiam Amadou part aussi avec le mérite d’avoir donné à la Côte d’Ivoire des promesses d’espoir, des fils (7) brillants d’intelligence – dont un, Aboubakar, décédé en avril 1995- et de discrétion mêlés, maternés par une mère qui a su, de son vivant ( paix à cette âme si tôt disparue) leur donner l’essentiel de la vie, le savoir conjugué à l’effort – même quand ramasser devient aisé et que se courber devient difficile- pour qu’ils apportent eux aussi leurs pierres à l’édification d’un pays moderne. Ce fut le combat de leur grand-père, Félix Houphouët-Boigny, dont ils sont les héritiers.
Demain, des témoignages.
Michel Koffi
Demain, des témoignages.
Michel Koffi