Les journalistes du Groupe de presse ont eu, hier, l’occasion de voyager aux états-Unis avec SE Mme Nesbitt, ambassadeur en Côte d’Ivoire.
Le mot de la Pca,
Mme Viviane Zunon-Kipré...
J’étais récemment avec les dames du Bureau national d’études techniques et de développement (Bnetd) pour parler justement de leurs chances. Je disais que les Africains sont fiers de l’élection de Barack Obama, mais il n’a pas été élu parce qu’il est Noir. Il a été élu par sa capacité de convaincre qu’il est un grand homme. ... Directeur général, Jean-Baptiste Akrou...
Excellence, Madame l’Ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique en Côte d’Ivoire, c’est avec une énorme joie et une profonde reconnaissance que le Groupe Fraternité Matin vous accueille ce matin. Une énorme joie, parce que nous considérons la rencontre d’aujourd’hui comme des retrouvailles en famille. En effet, Mme Viviane Zunon-Kipré, présidente du Conseil d’administration de la SNPECI, société éditrice de Fraternité Matin, est la présidente en exercice de l’Association ivoirienne des visiteurs internationaux (AIVI), c’est-à-dire les personnalités qui, à divers titres, ont bénéficié d’un séjour de formation ou de découverte de votre grand et beau pays. Les rédactions de Fraternité Matin ont bénéficié dans un passé récent de ces voyages ; nous attendons que la tradition se perpétue. Une profonde reconnaissance aussi, parce que vous avez choisi de nous accorder l’exclusivité de votre éclairage sur la mémorable cérémonie d’investiture du 44e Président des Etats-Unis, Barack Obama. Merci ! Car, le faisant, vous confortez Fraternité Matin dans sa posture de journal de référence, sérieux, crédible et surtout citoyen ; c’est-à-dire ouvert à tous ceux qui ont un message important à faire savoir. Au nom du Conseil d’administration, des rédactions du Groupe Fraternité Matin et de tous les travailleurs, nous vous présentons nos meilleurs vœux pour 2009 et vous disons Akwaba, chez vous, à Fraternité Matin. Merci des échanges instructifs avec nos journalistes.
Propos liminaires
Lorsque M. Barack Obama prêtera serment, le 20 janvier à midi, pour entamer un mandat de quatre ans, il sera le 44ème président des États-Unis à répéter ces paroles prononcées pour la première fois par George Washington en 1789. La prestation de serment aura lieu au Capitole, le siège du Congrès américain, sur la façade ouest de l’édifice, qui donne sur l’Esplanade de Washington, comme cela se fait depuis 1801. Thomas Jefferson (le 2ème président) a prononcé ce même serment. C’est le président de la Cour Suprême des États-Unis qui préside la cérémonie d’investiture depuis la troisième prestation de serment en 1797 de John Adams. A l’investiture de M. Obama, seront présents aux premières loges, les membres de sa famille, le président sortant et son gouvernement, le nouveau gouvernement, des sénateurs et des députés, des magistrats de la Cour Suprême et une foule d’invités. La cérémonie sera pleine de symboles. M. Obama prêtera serment la main posée sur la même Bible que le Président Lincoln a utilisée lors de sa première investiture en 1861. Cette Bible fait partie d’une collection de la Bibliothèque du Congrès. Bien que la Bible serve à prêter serment, comme le veut la tradition, il faut noter que cet acte n’est pas prescrit par la Constitution américaine. Le défilé qui suivra la cérémonie d’investiture verra pour la première fois la participation des descendants de membres du fameux 54ème Bataillon d’infanterie de Massachusetts ; ce bataillon entièrement composé de soldats noirs ayant pris une part active à notre guerre civile, a fait montre de courage à une époque où beaucoup doutaient de la capacité des Noirs à exercer le métier des armes.
Le sens de la cérémonie
Il est important de souligner que c’est l’investiture en soi, qui est le plus grand symbole, en ce sens que pour nous, l’investiture d’un nouveau président est une occasion de magnifier la démocratie. L’installation du président américain n’est pas moins importante que l’expression du suffrage du peuple. Je pense qu’il importe pour ceux qui assistent pour la première fois à une investiture de comprendre qu’il s’agit ici, en fin de compte, de la concrétisation du choix du peuple. C’est pourquoi elle se fait en présence et avec la participation de toutes les autorités de la nation. En outre, la cérémonie a lieu là où siègent les représentants du peuple et sous l’égide du président de la Cour Suprême, en présence du président sortant qui rentre immédiatement après dans la vie civile. Chaque cérémonie de prestation est un événement singulier ; d’où l’intérêt qu’elle suscite chez des milliers de nos concitoyens et de non-Américains qui effectuent à chaque fois le déplacement sur Washington. C’est pour eux, l’occasion de voir la démocratie en action. La tenue de la cérémonie de l’investiture représente l’acceptation par toutes les autorités et par le peuple dans son entièreté, d’une transition de pouvoir. Les symboles que véhicule cette cérémonie nous rappellent que les transitions paisibles sont et doivent rester une tradition américaine incontestable. L’investiture de M. Barack Obama sera historique, bien sûr, étant donné qu’il sera le premier Africain-Américain à prêter serment comme président des Etats-Unis ; mais son investiture sera dans le même temps la continuation d’une longue et très belle tradition américaine. Les discours prononcés après la prestation de serment sont devenus un élément de cette tradition. C’est lors du discours inaugural que la majorité des présidents ont présenté leur vision du futur à travers leur programme au peuple américain. Parmi ces discours, le plus fameux est celui de John F. Kennedy, qui disait : «Ainsi donc, chers concitoyens, ne demandez pas ce que l’Amérique peut faire pour vous. Demandez-vous plutôt ce que vous pouvez faire pour l’Amérique. » C’est souvent aussi une occasion pour le nouveau président de souligner l’importance historique du moment. En 1981, par exemple, Ronald Reagan a dit : « Pour quelques-uns d’entre nous, ici aujourd’hui, ceci est un moment solennel, d’une importance suprême ; et pourtant, dans l’histoire de notre nation, c’est un événement ordinaire. Le transfert méthodique du pouvoir tel qu’il est stipulé par la Constitution s’est fait comme il se fait régulièrement depuis près de deux siècles, et peu d’entre nous s’arrêtent pour songer à son caractère exceptionnel. Aux yeux de nombre de gens à travers le monde, cette cérémonie quadriennale qui nous paraît normale ne représente rien moins qu’un miracle. » Personnellement, j’apprécie particulièrement la formule du premier président Bush qui disait en 1989 : « Je vois l’histoire comme un livre fait de nombreuses pages que nous remplissons chaque jour d’actes d’espoir et de raison. Une nouvelle brise souffle, une page se tourne, et l’histoire suit son cours. Ainsi, un nouveau chapitre commence aujourd’hui. C’est une histoire simple mais solennelle, une histoire d’unité, de diversité et de générosité, que nous partageons et écrivons ensemble. »
La démocratie américaine
Comme l’élection de M. Obama, la cérémonie d’investiture suscitera aussi beaucoup de discussions sur le système de démocratie aux États-Unis. Les journalistes, les politologues, les enseignants, etc. saisiront l’occasion pour analyser la démocratie américaine dans le but d’expliquer les éléments qui ont concouru à la réussite de notre système pendant tant d’années. Dans cet esprit, j’aimerais partager avec vous quelques idées qui peuvent intéresser vos lecteurs. Tout d’abord, j’aimerais vous rappeler que nos pères fondateurs étaient en majorité des personnes qui avaient quitté leur pays natal pour chercher un espace où ils peuvent vivre librement. Plus précisément, ils rêvaient d’un endroit où ils auraient la liberté de pratiquer leur religion ou de poursuivre un mode de vie à leur convenance. Alors depuis le commencement de notre démocratie, il existe un attachement très fort aux principes de l’égalité des hommes et de la liberté de d’expression. Aussi, nos pères fondateurs se méfiaient-ils des aristocrates; ils mettaient beaucoup plus leur confiance dans la sagesse du peuple. C’est pourquoi, ils ont créé un système qui oblige les autorités à obtenir l’accord préalable du peuple (ou de leurs représentants) pour les prises de décisions. Je citerai donc la participation massive de la population à travers un libre échange d’idées comme un élément clé qui a contribué au succès de notre système de démocratie. Ce libre échange d’idées est souvent effectué à travers les médias, ce qui justifie notre attachement si fort à la liberté de la presse. L’accès à une multiplicité d’opinions et d’idées permet à nos citoyens de former leurs propres idées, de situer leurs opinions dans l’ensemble de celles d’une population plus large et finalement d’accepter, même s’ils ne sont pas d’accord, le choix de la majorité. La liberté d’expression est aussi le meilleur moyen de fournir aux dirigeants l’information indispensable à la prise de décision collective optimale. Ceux qui écoutent et tiennent compte des signaux émis par l’ensemble du peuple ont tendance à réussir. Un deuxième élément clé, à mon avis, c’est la séparation des pouvoirs. En bref, notre constitution, qui définit les droits fondamentaux du peuple, consacre certains pouvoirs à l’exécutif, d’autres au législatif, et établit un pouvoir judiciaire indépendant. Cette dispersion de pouvoirs oblige les différents éléments du gouvernement à travailler ensemble et elle minimise la possibilité d’actions qui ne correspondent pas à la volonté du peuple, ou l’adoption des mesures qui puissent remettre en cause les droits du peuple. Pour vous citer un exemple, l’exécutif peut demander le changement de n’importe quelle loi, mais seul un membre du Congrès peut introduire un ‘bill’ (un projet de loi) pour l’effectuer. Une majorité des membres du Congrès doivent voter en faveur de ce changement, tout en sachant qu’il ou elle sera interpellé (é) par le peuple pour expliquer cette décision. Même après qu’une loi a été amendée, un citoyen qui pense qu’elle va contre la Constitution peut saisir le pouvoir judiciaire et porter plainte, parfois devant la Cour Suprême, pour demander qu’elle se prononce sur la légitimité de la nouvelle loi. C’est peut-être la raison pour laquelle la prestation de serment ne comprend que 35 mots « Je jure solennellement de remplir fidèlement les fonctions de président des États-Unis, et, dans toute la mesure de mes moyens, de sauvegarder, protéger, et défendre la Constitution des États-Unis. »
Certes, ce système est compliqué et loin d’être parfait. Mais c’est aussi un système vivant, parce que notre démocratie est vivante. C’est un système qui permet les ajustements nécessaires mais qui encadre et qui protège, depuis plus de 200 ans, les droits et les libertés du peuple américain. Fierté afro-américaine
C'est un peu difficile à expliquer, mais je dirais que je suis très fière du fait que demain (aujourd'hui, Ndlr), nous aurons notre premier Président africain-américain. C'est, évidemment, un grand moment d'émotion pour mon pays. Mais, en même temps, je suis très consciente du fait que je suis une employée du gouvernement des Etats-Unis. C'est un devoir pour moi de servir ma patrie. Pour marquer ce jour, nous allons, l'Ambassade, faire une projection de la cérémonie d'investiture avec nos employés et nos invités. Je suis très consciente qu'il s'agit d'un moment historique. J'étais, ce matin (hier) en communication avec une de mes sœurs qui habite Chicago - M. Obama est de l'Etat de l'Illinois - et c'est un sentiment de tristesse qui m'habite de ne pouvoir être aux Etats-Unis pour la cérémonie. C'est un moment fabuleux que le monde entier va vivre en direct. De l’élection à l’investiture
Vous voulez savoir pourquoi il y a deux mois entre la fin de l'élection et la cérémonie d'investiture ? C'est parce que, par le passé, toutes nos autorités qui venaient de contrées lointaines des Etats-Unis, pour prendre part aux élections, avaient besoin de plusieurs mois pour arriver à Washington. On avait même pris en compte le fait qu'il y avait les fêtes de Noël. Au XVIIIe-XIXe siècle, l'investiture se faisait au mois de mars. Puis, en 1933, le mois de janvier fut choisi. Il est important de savoir qu'il est précisé, désormais, dans la Constitution, que l'investiture du Président de la République des Etats-Unis a lieu le 20 janvier, à midi. En outre, le Président des Etats-Unis n'est pas élu au suffrage universel direct. Il est élu indirectement par le collège des électeurs, lequel fait sa rentrée la première semaine de décembre. C'est seulement, après que le Collège s'est réuni pour voter, que le Président est formellement élu. Ce qui lui donne le temps de constituer son équipe, et devenir officiellement le président des Etats-Unis.
Transition
Ce que je peux dire, c'est que dans la mémoire collective récente, c'est certainement l'une des transitions les plus souples. Il est évident que le Président Obama a beaucoup réfléchi sur sa manière de gérer la transition. En outre, le fait que ce soit la première fois que nous avons un Président africain-américain, a rendu tout le monde un peu sensible. Et, je crois que les autorités de l'administration Bush, voulaient aussi montrer qu'elles n'avaient aucun problème à pouvoir et vouloir travailler avec le nouveau Président. Rôle de la Première dame
Chaque administration et chaque famille sont différentes. Le rôle de la Première dame, à mon sens, a beaucoup évolué aux Etats-Unis. Si je pense, par exemple, à la femme de George Washington, ou encore à Mme Lincoln, ces Premières dames étaient plus portées sur les œuvres sociales. Mais au XXe siècle, elles ont commencé à devenir un peu plus politiques. Je citerai, par exemple, Mme Roosevelt, qui avait vraiment lutté pour des causes sociales fortes. Et, depuis ce temps, selon les personnalités des Premières dames, elles s'impliquent de plus en plus en politique. Mais, je tiens à dire que c'est M. Obama qui a été élu. Et cela vaut pour les anciens Présidents. Même si l'on sait que lorsqu'un Président est élu, il faut s'attendre à voir son épouse jouer un rôle important.
Religion et serment
La liberté de la pratique religieuse a été un élément très important dans la naissance de notre nation et dans le renforcement de notre démocratie. Beaucoup de personnes, qui ont choisi de quitter leur pays, cherchaient un endroit où elles pouvaient pratiquer librement leur religion. Nous avons une Constitution qui proclame la liberté de choix de la religion ; ce qui rassure toute la population. Nous sommes une nation très religieuse, ce qui explique pourquoi le Président prête serment sur la Bible. Ce n'est certes pas prescrit par la Constitution, mais c'est une manière de démontrer que, lui aussi, a sa foi. La Constitution ne demande pas que l'on utilise une Bible, elle demande, seulement, que l'on prononce ses 35 mots. Je suis sûre qu'un jour, on aura un Président musulman ou juif, et qu'il prêtera serment, selon ses préférences religieuses.
Pourquoi Obama?
Il y a plusieurs explications ! Tout d'abord, je dirais qu'il ne faut pas sous-estimer le fait qu'aujourd'hui nous sommes en 2009. La candidature de Jessie Jackson date d'il y a quelques années. La société américaine a beaucoup évolué ces 25 dernières années. Sa composition également. Au mois de décembre, j'étais à Yamoussoukro où quelqu'un m'a posé plus ou moins la même question. Ce que je lui ai expliqué, c'est que aujourd'hui, la société américaine est vraiment une société multiculturelle. C'est-à-dire que dans les 20 dernières années, il y a eu beaucoup d'immigrants qui sont venus aux Etats-Unis, pas d'Europe, mais de l'Asie. Il y a aussi beaucoup de Chinois. Beaucoup d'immigrants qui viennent de Thaïlande, de l'Inde, de l'Indonésie, du Pakistan, de l'Amérique du Sud. La population hispanique des Etats-Unis est maintenant un peu plus nombreuse que la population noire. La composition de l'électorat américain est donc différente aujourd'hui. La population est plus jeune et je crois que tous ces jeunes gens qui ont des racines multiculturelles voient en M. Obama, plus qu'un Jessie Jackson. C'est vraiment pour moi, une des explications. Le deuxième élément, c'est qu'il ne faut pas oublier que M. Obama est de mère américaine blanche. Il y a donc des Américains blancs qui voient en lui, un des leurs. Il n'est donc pas que Noir. Il est Noir et il est Blanc. Il a donc la possibilité de parler à toute la population. Obama a une histoire personnelle qui est vraiment différente.
Hilary Clinton
Je crois que M. Obama a bien dit lui-même que ce qu'il recherchait pour son cabinet, c'étaient les meilleurs. Il voulait des personnes qui avaient les capacités et l'intelligence nécessaires. Il y a eu par le passé des Présidents qui ont été accusés d'avoir choisi telle ou telle autre personne sur des bases pas toujours claires. Obama, pour éviter toutes les supputations, a dit : " Non, je veux choisir les gens qui ont une certaine réputation et des capacités avérées ". Et c'est pour cela, je crois, qu'il a choisi Mme Hilary Clinton, parce que c'est une personnalité bien connue et qui a beaucoup d'expérience dans les affaires étrangères. Mais, la nomination de Hilary démontre aussi qu'Obama est quelqu'un qui, dans son cœur, ne nourrit aucune rancune. Il veut dépasser les rivalités de la campagne électorale. Élection d’Obama et immigration
C'est une très bonne question pour laquelle j'ai plusieurs réponses. Tout d'abord, je dirais qu'ici à Abidjan, nous n'avons pas vu une augmentation des demandes de visa pour les Etats-Unis. Et je crois que dans beaucoup d'autres ambassades en Afrique, elles ont baissé. Cela n'a rien à voir avec l'élection d'Obama. C'est à cause de la crise financière. Il y a moins de gens qui sont prêts à payer un voyage aux Etats-Unis, parce que les gens pensent peut-être que c'est mieux de garder leur argent. Je ne pense pas que la popularité d'Obama puisse avoir un impact direct sur l'immigration. Je crois que la popularité des Etats-Unis augmente depuis son élection parce qu'il est tellement bien vu par beaucoup de gens à travers le monde. Constitution
J'ai l'impression que depuis très longtemps, il y a des pays à travers le monde, notamment en Afrique, qui ont analysé l'exemple des Etats-Unis et qui se demandent pourquoi ils n'en n'ont pas fait autant chez eux. Ce n'est pas toujours à cause d'une mauvaise volonté. Mais parce que les pays changent très lentement. Les cultures également. Pour que les autres pays puissent suivre l'exemple des Etats-Unis, il faut souvent qu'ils dépassent certaines traditions, et qu'ils laissent de côté certaines pratiques. Ce qui est souvent difficile à faire.
Attentes
Je crois qu'il a déjà répondu à beaucoup d'attentes des Américains. Depuis l'attaque du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont connu des jours très difficiles et notre confiance a été un peu ébranlée. Obama nous a fait croire encore une fois que nous sommes capables, que nous pouvons tout faire, que nous pouvons faire ce que nous décidons. Dans un certain sens, il a déjà donné de l'espoir. Le Président Obama amène le peuple américain vers une autre direction. Celle qui consiste à laisser derrière nous les anciennes pratiques politiques pour avoir des pratiques d'espoir. Une chose qu'il a dite plusieurs fois pendant la campagne : on doit cesser de parler des problèmes et commencer à parler des solutions ; on doit débattre des solutions et pas des problèmes, parce qu'on ne peut pas les résoudre simplement par des débats. Je pense que c'est ce que le peuple américain attend de lui.
Sécurité
Nous avons un service aux Etats-Unis qui s'appelle " secret service " (service secret). C'est lui qui est chargé de la sécurité du Président. Même avant son élection, M. Obama a bénéficié de l'assistance de cette unité. Je peux vous dire qu'il est accompagné 24h/24, par des gardes du corps, pour s'assurer qu'il n'y a pas de problèmes. Au niveau de l'investiture, il y a un imposant dispositif sécuritaire. On a même sollicité l'assistance de l'armée américaine, pour s'assurer qu'il n'y aura aucun problème. Tous ceux qui vont assister à la cérémonie d'investiture sont obligés de passer par un détecteur de métaux. Il y a une certaine zone autour du Capitole qui sera limitée aux officiels, aux autorités…Le public sera un peu plus loin. Je suis sûr qu'il y a des mesures très précises qui ont été prises pour éviter qu'il y ait des problèmes au niveau de la sécurité.
Organisation politique
Dans le passé, à plusieurs reprises, on a eu deux, trois voire quatre grands partis politiques. Il n'y a pas toujours eu seulement les républicains et les démocrates. Il y avait d'autres partis qui n'ont pas connu une grande réussite. La raison, c'est la culture américaine. Pour gagner une élection aux Etats-Unis, vous devez avoir un programme et des idées qui intéressent la grande majorité. Il faut savoir que culturellement, les Américains sont des gens qui aiment gagner. Les petits partis basés sur une idéologie, (par exemple, il y a toujours un parti communiste aux Etats-Unis, un parti socialiste, un parti des verts…), n'ont pas les idées qui attirent le soutien d'une grande majorité de la population. Je crois que ces petits partis n'ont pas eu de succès, parce que les Américains veulent faire partie d'un parti qui va gagner, ou qui a des chances de gagner. Ils se disent que dans ce système, leurs représentants seront en mesure de défendre leurs intérêts. Comme vous l'avez dit, il n'y a aucune loi qui limite le nombre des partis politiques. Mais, c'est la culture politique qui a peut-être freiné les autres partis. Financement des candidats
La plupart des candidats font appel à des personnes qui ont beaucoup d'argent, mais aussi à des citoyens ordinaires pour leur donner de l'argent, afin de financer leur campagne. C'est une question très importante, qui rejoint également la préoccupation de savoir pourquoi il y a seulement deux grands partis aux Etats-Unis. Le gouvernement ne finance pas les campagnes. Il donne une certaine somme d'argent, seulement au parti qui attire un certain pourcentage des votes. Pour avoir l'appui gouvernemental, on doit enregistrer au moins 5% des électeurs. Mais il faut savoir que c'est le peuple américain qui finance la grande majorité des campagnes électorales. C'est lui qui donne parfois 5 dollars, 10 dollars, 1000 dollars, aux candidats. Et il y a une limite au montant qu'un individu peut donner, pour s'assurer que le candidat ne soit pas trop influencé par une ou deux personnes. Mardi dans le système américain
C'est une simple coïncidence. De tradition, l'investiture se tient toujours le 20 janvier, quel que soit le jour. Quant aux élections, elles sont toujours organisées un mardi. Même les primaires. Il y a très longtemps que ce jour a été choisi. Pour une raison très simple : tout le monde était disponible ce jour-là pour venir à la ville. Le jour du dimanche est réservé à l'église. Ce n'est donc pas un jour indiqué pour des élections aux Etats-Unis. Le lundi coïncide souvent avec des jours fériés, des fêtes, etc. Le vendredi n'est pas indiqué parce que c'est le début du week-end, et le samedi un jour de repos. En définitive, dans la semaine, nous nous retrouvons avec trois jours francs qui sont mardi, mercredi et jeudi. Le jour de mardi a été retenu pour les élections, parce qu'à l'époque, c'était le jour du marché. Les habitants des zones rurales se retrouvaient donc tous en ville.
Congrès, Sénat...
L'exécutif s'occupe de la défense du pays, des relations extérieures, de l'application des lois. Le président propose le budget, mais c'est le Congrès qui le valide, qui dit si oui ou non, sa proposition peut être prise en compte ou revue à la baisse. Le judiciaire ne fait que du judiciaire. C'est ce pouvoir qui détermine la légitimité des lois. Selon qu'elles soient conformes ou non à la Constitution. Le pouvoir judiciaire est indépendant. Le juge également. Une fois qu'un citoyen est nommé, par exemple, à la présidence de la Cour suprême, il ne dépend plus du Président de la République. Il est totalement indépendant.
Gestion des crises
Tout se règle généralement par des votes. Je vous donne un exemple : En 1993-94, il y a eu un vrai problème entre la Maison-Blanche et le Congrès. Qui a refusé le budget que proposait le Président de la République. Après un vote, le Congrès lui a adressé sa contre-proposition. A trois reprises, il a fait une contre-proposition. Le gouvernement est resté bloqué pendant plusieurs semaines. C'est après négociations que la Maison-Blanche a accepté un compromis. Le Président ne peut donc pas décider tout seul, il doit absolument avoir l'accord du Congrès, qui, non plus, ne doit pas insister si ce dernier n'est pas d'accord, puisqu'il peut utiliser son droit de veto. Ils doivent toujours, à travers des négociations, trouver le juste milieu. Obama et l’Afrique
Pendant la campagne, il lui fallait démontrer qu'il était à la hauteur de ses ambitions. Qu'il était tout aussi capable que n'importe quel autre candidat de s'occuper des grandes questions. Pour nous, les questions qui étaient à la une, c'étaient l'Irak, l'Afghanistan, la crise financière, etc. Il est donc obligé de s'occuper d'abord de ces questions-là, puisqu'elles sont les plus importantes pour la majorité des Américains. Je crois que vous ne serez pas surpris si je vous dis que les questions africaines ne sont pas les premières qui préoccupent la population américaine. Voilà donc ce qui explique le fait que le Président Obama ne les a pas encore abordées.
Leçons d’une élection
Pour moi, l'élection de Barack Obama et son investiture, sont la concrétisation du rêve de Martin Luther King. C'est la preuve que la population américaine est capable de regarder au-delà de la couleur. Que la population américaine est prête à juger les gens sur la base de leur caractère, leurs idées. C'est la preuve que la couleur de la peau, la race n'est plus importante. Ce qui l'est, c'est la capacité de chacun. Vu, je crois, qu'il y a beaucoup d'Africains-Américains qui ont le même profil.
Partis et races
Je ne sais pas la différence. Mais, ce que je peux vous expliquer sur ce que vous avez observé dans notre société, c'est qu'il est vrai, aux Etats-Unis, qu'on est fiers d'être Américains et, en même temps, on est fiers de notre " background " ethnique, qui n'est pas lié à un programme politique ou à un parti politique. Nous avons cette dualité parce que nous croyons que la diversité est un atout. Et puisque nous n'avons que deux partis politiques, il est impossible de croire que les gens d'une tribu donnée votent seulement pour leur compatriote. Par le passé, les candidats étaient toujours des hommes blancs. Donc, il n'y avait pas de choix lié à l'ethnie. Argent et politique
S'il est une chose que j'aime rappeler, c'est que cela fait plus de 200 ans que nous avons ce système de démocratie. Et on sait très bien que dans les années 1800, on n'avait pas le même niveau de développement qu'aujourd'hui. Alors, ce n'est pas l'argent qui explique ce système. Mais il est absolument vrai que les partis politiques cherchent à avoir le maximum de donateurs. C'est ce qui explique également l'imposition d'un plafonnement. Cette limite oblige les partis politiques et les candidats à chercher le maximum de donateurs possibles. Au lieu d'avoir un seul grand donateur, pour la même somme d'argent, il faut peut-être chercher 10 ou 12 personnes. Ce qui oblige à prendre en compte les idées de toutes ces personnes au lieu de celles du seul grand donateur. Ingérence démocratique
Nous ne cherchons pas du tout à imposer la démocratie. Ce n'est pas possible. Mais il est absolument vrai que nous soutenons les peuples qui veulent s'exprimer librement. Ce n'est pas la même chose. Il y a beaucoup de pays où il n'existe pas la liberté d'expression. C'est ce genre de choses que nous prenons en compte, parce que nous croyons que chaque individu a des droits. La démocratie est un système qui marche chez nous, que nous soutenons, mais que nous ne cherchons pas à imposer. Ce sont les valeurs et les droits humains que nous soutenons.
La démocratie est un système dans lequel le pouvoir appartient au peuple. Je ne connais aucun pays au monde où le peuple veut être soumis à la dictature. Le multipartisme n'a pas été imposé, il a été encouragé. Mais, c'est chaque pays qui a pris la décision de suivre ou non. Il y a certains pays africains, asiatiques ou autres qui ont dit non, parce qu'ils n'y croyaient pas. Ils ont décidé de continuer avec leur propre système. En revanche, d'autres pays ont décidé d'essayer le multipartisme. Les Etats-Unis ne veulent pas et ne peuvent pas obliger un pays à choisir la voie démocratique. Ce que nous faisons plutôt, c'est d'encourager et de promouvoir les droits de l'homme et les libertés individuelles, afin que les populations de tous les pays soient en mesure de demander la démocratie. Le degré d'influence que nous pouvons exercer sur un pays dépend beaucoup plus du pays, de la population, de la culture. Et parfois, il y a un genre de relation que nous entretenons avec ce pays.
Condeeliza Rice
Je me demande s'il existe un seul cas où quelqu'un a refusé de partir de son poste. Ça n'est jamais arrivé. Je voudrais préciser que M. Obama va prêter serment, il va choisir ses ministres. Mais ces derniers savent déjà quand va prendre fin leur mandat.
Dollar et Dieu
Il s'agit de Dieu et non du dieu argent. Je voudrais vous rappeler que les Américains sont très religieux. La religion y est très importante. Et c'est pour cette raison que nous avons décidé qu'il y ait une nette séparation entre elle et l'Etat. Le peuple américain est très religieux, mais l'Etat doit être neutre.
“American way of life”
Cela signifie, d'abord, que vous êtes libre d'avoir une éducation, de choisir la profession de votre choix, la carrière, qui vous permet de vivre confortablement. Ensuite, vous êtes sans peur de quoi que ce soit, parce que vous vivez dans un pays libre, tant que vous vivez dans le respect de la loi. Rêve américain et immigration
Sur le plan pratique, il y a des lois aux Etats-Unis qui précisent combien de personnes peuvent immigrer chaque année. Et c'est notre Congrès qui, par un vote annuel, décide s'il faut changer la loi ou non. A propos du rêve américain, je n'ai aucun doute que beaucoup d'autres pays sont capables de faire comme les Etats-Unis. Beaucoup peuvent avoir exactement la même façon de vivre qui peut être aussi un rêve. Il suffit que le peuple en ait la volonté. Ce qui a été fait n'est pas l'oeuvre d'un magicien, c'est quelque chose qui a été établi par le peuple américain. Ce que je veux que les gens comprennent, c'est la notion : "You can do the same thing" c'est-à-dire : "Vous pouvez faire la même chose".
Nouvelle diplomatie
Si vous regardez de près, vous verrez que ce que nous avons toujours fait et ce que le Président Bush a toujours dit, sur l'Irak, l'Afghanistan, c'est de combattre la dictature. Ce n'était pas pour imposer la démocratie. Comme je vous l'ai dit, je ne crois pas que cela soit possible. La démocratie est un système qui vient du peuple d'un pays donné, libre d'établir le système de son choix. Ce que nous avons fait, c'était d'essayer de créer ces conditions. Très honnêtement, je ne sais ce que je peux vous dire aujourd'hui, parce que je crois qu'on doit attendre un peu pour voir exactement ce que sera la politique de la nouvelle administration. Cependant, je dirais que M. Obama a été très clair en disant qu'il cherche à avoir une conversation avec les pays, à comprendre leurs besoins, leurs problèmes, et non à juger d'avance sur des questions importantes. Crise financière
Nous avons espoir que son programme va améliorer notre vie.
Conclusion
Je voudrais simplement vous dire merci pour toutes vos questions que je trouve très intéressantes. Je vous quitte en espérant que vous suivrez les cent premiers jours de M. Obama. Parce que je crois que dans toute nouvelle administration, les cents premiers jours sont très importants. Certainement que M. Obama va essayer de faire passer son programme en faisant beaucoup de réalisations durant cette période.
Propos recueillis par Paulin N. Zobo
Landry Kohon
Marc Yevou
Rémi Coulibaly
Barthélemy Kouamé
coordonnateur
Abel Doualy
... et du DDR,
Alfred Dan Moussa
Madame l’ambassadeur, je voudrais vous dire merci d’avoir magnifié, à votre manière, la démocratie, comme ce sera le cas à l’investiture. Merci aussi, de nous avoir fait partager votre espoir de voir la démocratie s’implanter, progressivement - je ne sais pas si ce sera à la manière de la tortue- dans les pays du Tiers-monde. Parce que, vous l’avez dit, la culture ou les habitudes ne changent pas facilement. Il faut cependant garder l’espoir. Merci d’être venue, merci d’être restée avec nous, pendant tout ce temps.
Le mot de la Pca,
Mme Viviane Zunon-Kipré...
J’étais récemment avec les dames du Bureau national d’études techniques et de développement (Bnetd) pour parler justement de leurs chances. Je disais que les Africains sont fiers de l’élection de Barack Obama, mais il n’a pas été élu parce qu’il est Noir. Il a été élu par sa capacité de convaincre qu’il est un grand homme. ... Directeur général, Jean-Baptiste Akrou...
Excellence, Madame l’Ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique en Côte d’Ivoire, c’est avec une énorme joie et une profonde reconnaissance que le Groupe Fraternité Matin vous accueille ce matin. Une énorme joie, parce que nous considérons la rencontre d’aujourd’hui comme des retrouvailles en famille. En effet, Mme Viviane Zunon-Kipré, présidente du Conseil d’administration de la SNPECI, société éditrice de Fraternité Matin, est la présidente en exercice de l’Association ivoirienne des visiteurs internationaux (AIVI), c’est-à-dire les personnalités qui, à divers titres, ont bénéficié d’un séjour de formation ou de découverte de votre grand et beau pays. Les rédactions de Fraternité Matin ont bénéficié dans un passé récent de ces voyages ; nous attendons que la tradition se perpétue. Une profonde reconnaissance aussi, parce que vous avez choisi de nous accorder l’exclusivité de votre éclairage sur la mémorable cérémonie d’investiture du 44e Président des Etats-Unis, Barack Obama. Merci ! Car, le faisant, vous confortez Fraternité Matin dans sa posture de journal de référence, sérieux, crédible et surtout citoyen ; c’est-à-dire ouvert à tous ceux qui ont un message important à faire savoir. Au nom du Conseil d’administration, des rédactions du Groupe Fraternité Matin et de tous les travailleurs, nous vous présentons nos meilleurs vœux pour 2009 et vous disons Akwaba, chez vous, à Fraternité Matin. Merci des échanges instructifs avec nos journalistes.
Propos liminaires
Lorsque M. Barack Obama prêtera serment, le 20 janvier à midi, pour entamer un mandat de quatre ans, il sera le 44ème président des États-Unis à répéter ces paroles prononcées pour la première fois par George Washington en 1789. La prestation de serment aura lieu au Capitole, le siège du Congrès américain, sur la façade ouest de l’édifice, qui donne sur l’Esplanade de Washington, comme cela se fait depuis 1801. Thomas Jefferson (le 2ème président) a prononcé ce même serment. C’est le président de la Cour Suprême des États-Unis qui préside la cérémonie d’investiture depuis la troisième prestation de serment en 1797 de John Adams. A l’investiture de M. Obama, seront présents aux premières loges, les membres de sa famille, le président sortant et son gouvernement, le nouveau gouvernement, des sénateurs et des députés, des magistrats de la Cour Suprême et une foule d’invités. La cérémonie sera pleine de symboles. M. Obama prêtera serment la main posée sur la même Bible que le Président Lincoln a utilisée lors de sa première investiture en 1861. Cette Bible fait partie d’une collection de la Bibliothèque du Congrès. Bien que la Bible serve à prêter serment, comme le veut la tradition, il faut noter que cet acte n’est pas prescrit par la Constitution américaine. Le défilé qui suivra la cérémonie d’investiture verra pour la première fois la participation des descendants de membres du fameux 54ème Bataillon d’infanterie de Massachusetts ; ce bataillon entièrement composé de soldats noirs ayant pris une part active à notre guerre civile, a fait montre de courage à une époque où beaucoup doutaient de la capacité des Noirs à exercer le métier des armes.
Le sens de la cérémonie
Il est important de souligner que c’est l’investiture en soi, qui est le plus grand symbole, en ce sens que pour nous, l’investiture d’un nouveau président est une occasion de magnifier la démocratie. L’installation du président américain n’est pas moins importante que l’expression du suffrage du peuple. Je pense qu’il importe pour ceux qui assistent pour la première fois à une investiture de comprendre qu’il s’agit ici, en fin de compte, de la concrétisation du choix du peuple. C’est pourquoi elle se fait en présence et avec la participation de toutes les autorités de la nation. En outre, la cérémonie a lieu là où siègent les représentants du peuple et sous l’égide du président de la Cour Suprême, en présence du président sortant qui rentre immédiatement après dans la vie civile. Chaque cérémonie de prestation est un événement singulier ; d’où l’intérêt qu’elle suscite chez des milliers de nos concitoyens et de non-Américains qui effectuent à chaque fois le déplacement sur Washington. C’est pour eux, l’occasion de voir la démocratie en action. La tenue de la cérémonie de l’investiture représente l’acceptation par toutes les autorités et par le peuple dans son entièreté, d’une transition de pouvoir. Les symboles que véhicule cette cérémonie nous rappellent que les transitions paisibles sont et doivent rester une tradition américaine incontestable. L’investiture de M. Barack Obama sera historique, bien sûr, étant donné qu’il sera le premier Africain-Américain à prêter serment comme président des Etats-Unis ; mais son investiture sera dans le même temps la continuation d’une longue et très belle tradition américaine. Les discours prononcés après la prestation de serment sont devenus un élément de cette tradition. C’est lors du discours inaugural que la majorité des présidents ont présenté leur vision du futur à travers leur programme au peuple américain. Parmi ces discours, le plus fameux est celui de John F. Kennedy, qui disait : «Ainsi donc, chers concitoyens, ne demandez pas ce que l’Amérique peut faire pour vous. Demandez-vous plutôt ce que vous pouvez faire pour l’Amérique. » C’est souvent aussi une occasion pour le nouveau président de souligner l’importance historique du moment. En 1981, par exemple, Ronald Reagan a dit : « Pour quelques-uns d’entre nous, ici aujourd’hui, ceci est un moment solennel, d’une importance suprême ; et pourtant, dans l’histoire de notre nation, c’est un événement ordinaire. Le transfert méthodique du pouvoir tel qu’il est stipulé par la Constitution s’est fait comme il se fait régulièrement depuis près de deux siècles, et peu d’entre nous s’arrêtent pour songer à son caractère exceptionnel. Aux yeux de nombre de gens à travers le monde, cette cérémonie quadriennale qui nous paraît normale ne représente rien moins qu’un miracle. » Personnellement, j’apprécie particulièrement la formule du premier président Bush qui disait en 1989 : « Je vois l’histoire comme un livre fait de nombreuses pages que nous remplissons chaque jour d’actes d’espoir et de raison. Une nouvelle brise souffle, une page se tourne, et l’histoire suit son cours. Ainsi, un nouveau chapitre commence aujourd’hui. C’est une histoire simple mais solennelle, une histoire d’unité, de diversité et de générosité, que nous partageons et écrivons ensemble. »
La démocratie américaine
Comme l’élection de M. Obama, la cérémonie d’investiture suscitera aussi beaucoup de discussions sur le système de démocratie aux États-Unis. Les journalistes, les politologues, les enseignants, etc. saisiront l’occasion pour analyser la démocratie américaine dans le but d’expliquer les éléments qui ont concouru à la réussite de notre système pendant tant d’années. Dans cet esprit, j’aimerais partager avec vous quelques idées qui peuvent intéresser vos lecteurs. Tout d’abord, j’aimerais vous rappeler que nos pères fondateurs étaient en majorité des personnes qui avaient quitté leur pays natal pour chercher un espace où ils peuvent vivre librement. Plus précisément, ils rêvaient d’un endroit où ils auraient la liberté de pratiquer leur religion ou de poursuivre un mode de vie à leur convenance. Alors depuis le commencement de notre démocratie, il existe un attachement très fort aux principes de l’égalité des hommes et de la liberté de d’expression. Aussi, nos pères fondateurs se méfiaient-ils des aristocrates; ils mettaient beaucoup plus leur confiance dans la sagesse du peuple. C’est pourquoi, ils ont créé un système qui oblige les autorités à obtenir l’accord préalable du peuple (ou de leurs représentants) pour les prises de décisions. Je citerai donc la participation massive de la population à travers un libre échange d’idées comme un élément clé qui a contribué au succès de notre système de démocratie. Ce libre échange d’idées est souvent effectué à travers les médias, ce qui justifie notre attachement si fort à la liberté de la presse. L’accès à une multiplicité d’opinions et d’idées permet à nos citoyens de former leurs propres idées, de situer leurs opinions dans l’ensemble de celles d’une population plus large et finalement d’accepter, même s’ils ne sont pas d’accord, le choix de la majorité. La liberté d’expression est aussi le meilleur moyen de fournir aux dirigeants l’information indispensable à la prise de décision collective optimale. Ceux qui écoutent et tiennent compte des signaux émis par l’ensemble du peuple ont tendance à réussir. Un deuxième élément clé, à mon avis, c’est la séparation des pouvoirs. En bref, notre constitution, qui définit les droits fondamentaux du peuple, consacre certains pouvoirs à l’exécutif, d’autres au législatif, et établit un pouvoir judiciaire indépendant. Cette dispersion de pouvoirs oblige les différents éléments du gouvernement à travailler ensemble et elle minimise la possibilité d’actions qui ne correspondent pas à la volonté du peuple, ou l’adoption des mesures qui puissent remettre en cause les droits du peuple. Pour vous citer un exemple, l’exécutif peut demander le changement de n’importe quelle loi, mais seul un membre du Congrès peut introduire un ‘bill’ (un projet de loi) pour l’effectuer. Une majorité des membres du Congrès doivent voter en faveur de ce changement, tout en sachant qu’il ou elle sera interpellé (é) par le peuple pour expliquer cette décision. Même après qu’une loi a été amendée, un citoyen qui pense qu’elle va contre la Constitution peut saisir le pouvoir judiciaire et porter plainte, parfois devant la Cour Suprême, pour demander qu’elle se prononce sur la légitimité de la nouvelle loi. C’est peut-être la raison pour laquelle la prestation de serment ne comprend que 35 mots « Je jure solennellement de remplir fidèlement les fonctions de président des États-Unis, et, dans toute la mesure de mes moyens, de sauvegarder, protéger, et défendre la Constitution des États-Unis. »
Certes, ce système est compliqué et loin d’être parfait. Mais c’est aussi un système vivant, parce que notre démocratie est vivante. C’est un système qui permet les ajustements nécessaires mais qui encadre et qui protège, depuis plus de 200 ans, les droits et les libertés du peuple américain. Fierté afro-américaine
C'est un peu difficile à expliquer, mais je dirais que je suis très fière du fait que demain (aujourd'hui, Ndlr), nous aurons notre premier Président africain-américain. C'est, évidemment, un grand moment d'émotion pour mon pays. Mais, en même temps, je suis très consciente du fait que je suis une employée du gouvernement des Etats-Unis. C'est un devoir pour moi de servir ma patrie. Pour marquer ce jour, nous allons, l'Ambassade, faire une projection de la cérémonie d'investiture avec nos employés et nos invités. Je suis très consciente qu'il s'agit d'un moment historique. J'étais, ce matin (hier) en communication avec une de mes sœurs qui habite Chicago - M. Obama est de l'Etat de l'Illinois - et c'est un sentiment de tristesse qui m'habite de ne pouvoir être aux Etats-Unis pour la cérémonie. C'est un moment fabuleux que le monde entier va vivre en direct. De l’élection à l’investiture
Vous voulez savoir pourquoi il y a deux mois entre la fin de l'élection et la cérémonie d'investiture ? C'est parce que, par le passé, toutes nos autorités qui venaient de contrées lointaines des Etats-Unis, pour prendre part aux élections, avaient besoin de plusieurs mois pour arriver à Washington. On avait même pris en compte le fait qu'il y avait les fêtes de Noël. Au XVIIIe-XIXe siècle, l'investiture se faisait au mois de mars. Puis, en 1933, le mois de janvier fut choisi. Il est important de savoir qu'il est précisé, désormais, dans la Constitution, que l'investiture du Président de la République des Etats-Unis a lieu le 20 janvier, à midi. En outre, le Président des Etats-Unis n'est pas élu au suffrage universel direct. Il est élu indirectement par le collège des électeurs, lequel fait sa rentrée la première semaine de décembre. C'est seulement, après que le Collège s'est réuni pour voter, que le Président est formellement élu. Ce qui lui donne le temps de constituer son équipe, et devenir officiellement le président des Etats-Unis.
Transition
Ce que je peux dire, c'est que dans la mémoire collective récente, c'est certainement l'une des transitions les plus souples. Il est évident que le Président Obama a beaucoup réfléchi sur sa manière de gérer la transition. En outre, le fait que ce soit la première fois que nous avons un Président africain-américain, a rendu tout le monde un peu sensible. Et, je crois que les autorités de l'administration Bush, voulaient aussi montrer qu'elles n'avaient aucun problème à pouvoir et vouloir travailler avec le nouveau Président. Rôle de la Première dame
Chaque administration et chaque famille sont différentes. Le rôle de la Première dame, à mon sens, a beaucoup évolué aux Etats-Unis. Si je pense, par exemple, à la femme de George Washington, ou encore à Mme Lincoln, ces Premières dames étaient plus portées sur les œuvres sociales. Mais au XXe siècle, elles ont commencé à devenir un peu plus politiques. Je citerai, par exemple, Mme Roosevelt, qui avait vraiment lutté pour des causes sociales fortes. Et, depuis ce temps, selon les personnalités des Premières dames, elles s'impliquent de plus en plus en politique. Mais, je tiens à dire que c'est M. Obama qui a été élu. Et cela vaut pour les anciens Présidents. Même si l'on sait que lorsqu'un Président est élu, il faut s'attendre à voir son épouse jouer un rôle important.
Religion et serment
La liberté de la pratique religieuse a été un élément très important dans la naissance de notre nation et dans le renforcement de notre démocratie. Beaucoup de personnes, qui ont choisi de quitter leur pays, cherchaient un endroit où elles pouvaient pratiquer librement leur religion. Nous avons une Constitution qui proclame la liberté de choix de la religion ; ce qui rassure toute la population. Nous sommes une nation très religieuse, ce qui explique pourquoi le Président prête serment sur la Bible. Ce n'est certes pas prescrit par la Constitution, mais c'est une manière de démontrer que, lui aussi, a sa foi. La Constitution ne demande pas que l'on utilise une Bible, elle demande, seulement, que l'on prononce ses 35 mots. Je suis sûre qu'un jour, on aura un Président musulman ou juif, et qu'il prêtera serment, selon ses préférences religieuses.
Pourquoi Obama?
Il y a plusieurs explications ! Tout d'abord, je dirais qu'il ne faut pas sous-estimer le fait qu'aujourd'hui nous sommes en 2009. La candidature de Jessie Jackson date d'il y a quelques années. La société américaine a beaucoup évolué ces 25 dernières années. Sa composition également. Au mois de décembre, j'étais à Yamoussoukro où quelqu'un m'a posé plus ou moins la même question. Ce que je lui ai expliqué, c'est que aujourd'hui, la société américaine est vraiment une société multiculturelle. C'est-à-dire que dans les 20 dernières années, il y a eu beaucoup d'immigrants qui sont venus aux Etats-Unis, pas d'Europe, mais de l'Asie. Il y a aussi beaucoup de Chinois. Beaucoup d'immigrants qui viennent de Thaïlande, de l'Inde, de l'Indonésie, du Pakistan, de l'Amérique du Sud. La population hispanique des Etats-Unis est maintenant un peu plus nombreuse que la population noire. La composition de l'électorat américain est donc différente aujourd'hui. La population est plus jeune et je crois que tous ces jeunes gens qui ont des racines multiculturelles voient en M. Obama, plus qu'un Jessie Jackson. C'est vraiment pour moi, une des explications. Le deuxième élément, c'est qu'il ne faut pas oublier que M. Obama est de mère américaine blanche. Il y a donc des Américains blancs qui voient en lui, un des leurs. Il n'est donc pas que Noir. Il est Noir et il est Blanc. Il a donc la possibilité de parler à toute la population. Obama a une histoire personnelle qui est vraiment différente.
Hilary Clinton
Je crois que M. Obama a bien dit lui-même que ce qu'il recherchait pour son cabinet, c'étaient les meilleurs. Il voulait des personnes qui avaient les capacités et l'intelligence nécessaires. Il y a eu par le passé des Présidents qui ont été accusés d'avoir choisi telle ou telle autre personne sur des bases pas toujours claires. Obama, pour éviter toutes les supputations, a dit : " Non, je veux choisir les gens qui ont une certaine réputation et des capacités avérées ". Et c'est pour cela, je crois, qu'il a choisi Mme Hilary Clinton, parce que c'est une personnalité bien connue et qui a beaucoup d'expérience dans les affaires étrangères. Mais, la nomination de Hilary démontre aussi qu'Obama est quelqu'un qui, dans son cœur, ne nourrit aucune rancune. Il veut dépasser les rivalités de la campagne électorale. Élection d’Obama et immigration
C'est une très bonne question pour laquelle j'ai plusieurs réponses. Tout d'abord, je dirais qu'ici à Abidjan, nous n'avons pas vu une augmentation des demandes de visa pour les Etats-Unis. Et je crois que dans beaucoup d'autres ambassades en Afrique, elles ont baissé. Cela n'a rien à voir avec l'élection d'Obama. C'est à cause de la crise financière. Il y a moins de gens qui sont prêts à payer un voyage aux Etats-Unis, parce que les gens pensent peut-être que c'est mieux de garder leur argent. Je ne pense pas que la popularité d'Obama puisse avoir un impact direct sur l'immigration. Je crois que la popularité des Etats-Unis augmente depuis son élection parce qu'il est tellement bien vu par beaucoup de gens à travers le monde. Constitution
J'ai l'impression que depuis très longtemps, il y a des pays à travers le monde, notamment en Afrique, qui ont analysé l'exemple des Etats-Unis et qui se demandent pourquoi ils n'en n'ont pas fait autant chez eux. Ce n'est pas toujours à cause d'une mauvaise volonté. Mais parce que les pays changent très lentement. Les cultures également. Pour que les autres pays puissent suivre l'exemple des Etats-Unis, il faut souvent qu'ils dépassent certaines traditions, et qu'ils laissent de côté certaines pratiques. Ce qui est souvent difficile à faire.
Attentes
Je crois qu'il a déjà répondu à beaucoup d'attentes des Américains. Depuis l'attaque du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont connu des jours très difficiles et notre confiance a été un peu ébranlée. Obama nous a fait croire encore une fois que nous sommes capables, que nous pouvons tout faire, que nous pouvons faire ce que nous décidons. Dans un certain sens, il a déjà donné de l'espoir. Le Président Obama amène le peuple américain vers une autre direction. Celle qui consiste à laisser derrière nous les anciennes pratiques politiques pour avoir des pratiques d'espoir. Une chose qu'il a dite plusieurs fois pendant la campagne : on doit cesser de parler des problèmes et commencer à parler des solutions ; on doit débattre des solutions et pas des problèmes, parce qu'on ne peut pas les résoudre simplement par des débats. Je pense que c'est ce que le peuple américain attend de lui.
Sécurité
Nous avons un service aux Etats-Unis qui s'appelle " secret service " (service secret). C'est lui qui est chargé de la sécurité du Président. Même avant son élection, M. Obama a bénéficié de l'assistance de cette unité. Je peux vous dire qu'il est accompagné 24h/24, par des gardes du corps, pour s'assurer qu'il n'y a pas de problèmes. Au niveau de l'investiture, il y a un imposant dispositif sécuritaire. On a même sollicité l'assistance de l'armée américaine, pour s'assurer qu'il n'y aura aucun problème. Tous ceux qui vont assister à la cérémonie d'investiture sont obligés de passer par un détecteur de métaux. Il y a une certaine zone autour du Capitole qui sera limitée aux officiels, aux autorités…Le public sera un peu plus loin. Je suis sûr qu'il y a des mesures très précises qui ont été prises pour éviter qu'il y ait des problèmes au niveau de la sécurité.
Organisation politique
Dans le passé, à plusieurs reprises, on a eu deux, trois voire quatre grands partis politiques. Il n'y a pas toujours eu seulement les républicains et les démocrates. Il y avait d'autres partis qui n'ont pas connu une grande réussite. La raison, c'est la culture américaine. Pour gagner une élection aux Etats-Unis, vous devez avoir un programme et des idées qui intéressent la grande majorité. Il faut savoir que culturellement, les Américains sont des gens qui aiment gagner. Les petits partis basés sur une idéologie, (par exemple, il y a toujours un parti communiste aux Etats-Unis, un parti socialiste, un parti des verts…), n'ont pas les idées qui attirent le soutien d'une grande majorité de la population. Je crois que ces petits partis n'ont pas eu de succès, parce que les Américains veulent faire partie d'un parti qui va gagner, ou qui a des chances de gagner. Ils se disent que dans ce système, leurs représentants seront en mesure de défendre leurs intérêts. Comme vous l'avez dit, il n'y a aucune loi qui limite le nombre des partis politiques. Mais, c'est la culture politique qui a peut-être freiné les autres partis. Financement des candidats
La plupart des candidats font appel à des personnes qui ont beaucoup d'argent, mais aussi à des citoyens ordinaires pour leur donner de l'argent, afin de financer leur campagne. C'est une question très importante, qui rejoint également la préoccupation de savoir pourquoi il y a seulement deux grands partis aux Etats-Unis. Le gouvernement ne finance pas les campagnes. Il donne une certaine somme d'argent, seulement au parti qui attire un certain pourcentage des votes. Pour avoir l'appui gouvernemental, on doit enregistrer au moins 5% des électeurs. Mais il faut savoir que c'est le peuple américain qui finance la grande majorité des campagnes électorales. C'est lui qui donne parfois 5 dollars, 10 dollars, 1000 dollars, aux candidats. Et il y a une limite au montant qu'un individu peut donner, pour s'assurer que le candidat ne soit pas trop influencé par une ou deux personnes. Mardi dans le système américain
C'est une simple coïncidence. De tradition, l'investiture se tient toujours le 20 janvier, quel que soit le jour. Quant aux élections, elles sont toujours organisées un mardi. Même les primaires. Il y a très longtemps que ce jour a été choisi. Pour une raison très simple : tout le monde était disponible ce jour-là pour venir à la ville. Le jour du dimanche est réservé à l'église. Ce n'est donc pas un jour indiqué pour des élections aux Etats-Unis. Le lundi coïncide souvent avec des jours fériés, des fêtes, etc. Le vendredi n'est pas indiqué parce que c'est le début du week-end, et le samedi un jour de repos. En définitive, dans la semaine, nous nous retrouvons avec trois jours francs qui sont mardi, mercredi et jeudi. Le jour de mardi a été retenu pour les élections, parce qu'à l'époque, c'était le jour du marché. Les habitants des zones rurales se retrouvaient donc tous en ville.
Congrès, Sénat...
L'exécutif s'occupe de la défense du pays, des relations extérieures, de l'application des lois. Le président propose le budget, mais c'est le Congrès qui le valide, qui dit si oui ou non, sa proposition peut être prise en compte ou revue à la baisse. Le judiciaire ne fait que du judiciaire. C'est ce pouvoir qui détermine la légitimité des lois. Selon qu'elles soient conformes ou non à la Constitution. Le pouvoir judiciaire est indépendant. Le juge également. Une fois qu'un citoyen est nommé, par exemple, à la présidence de la Cour suprême, il ne dépend plus du Président de la République. Il est totalement indépendant.
Gestion des crises
Tout se règle généralement par des votes. Je vous donne un exemple : En 1993-94, il y a eu un vrai problème entre la Maison-Blanche et le Congrès. Qui a refusé le budget que proposait le Président de la République. Après un vote, le Congrès lui a adressé sa contre-proposition. A trois reprises, il a fait une contre-proposition. Le gouvernement est resté bloqué pendant plusieurs semaines. C'est après négociations que la Maison-Blanche a accepté un compromis. Le Président ne peut donc pas décider tout seul, il doit absolument avoir l'accord du Congrès, qui, non plus, ne doit pas insister si ce dernier n'est pas d'accord, puisqu'il peut utiliser son droit de veto. Ils doivent toujours, à travers des négociations, trouver le juste milieu. Obama et l’Afrique
Pendant la campagne, il lui fallait démontrer qu'il était à la hauteur de ses ambitions. Qu'il était tout aussi capable que n'importe quel autre candidat de s'occuper des grandes questions. Pour nous, les questions qui étaient à la une, c'étaient l'Irak, l'Afghanistan, la crise financière, etc. Il est donc obligé de s'occuper d'abord de ces questions-là, puisqu'elles sont les plus importantes pour la majorité des Américains. Je crois que vous ne serez pas surpris si je vous dis que les questions africaines ne sont pas les premières qui préoccupent la population américaine. Voilà donc ce qui explique le fait que le Président Obama ne les a pas encore abordées.
Leçons d’une élection
Pour moi, l'élection de Barack Obama et son investiture, sont la concrétisation du rêve de Martin Luther King. C'est la preuve que la population américaine est capable de regarder au-delà de la couleur. Que la population américaine est prête à juger les gens sur la base de leur caractère, leurs idées. C'est la preuve que la couleur de la peau, la race n'est plus importante. Ce qui l'est, c'est la capacité de chacun. Vu, je crois, qu'il y a beaucoup d'Africains-Américains qui ont le même profil.
Partis et races
Je ne sais pas la différence. Mais, ce que je peux vous expliquer sur ce que vous avez observé dans notre société, c'est qu'il est vrai, aux Etats-Unis, qu'on est fiers d'être Américains et, en même temps, on est fiers de notre " background " ethnique, qui n'est pas lié à un programme politique ou à un parti politique. Nous avons cette dualité parce que nous croyons que la diversité est un atout. Et puisque nous n'avons que deux partis politiques, il est impossible de croire que les gens d'une tribu donnée votent seulement pour leur compatriote. Par le passé, les candidats étaient toujours des hommes blancs. Donc, il n'y avait pas de choix lié à l'ethnie. Argent et politique
S'il est une chose que j'aime rappeler, c'est que cela fait plus de 200 ans que nous avons ce système de démocratie. Et on sait très bien que dans les années 1800, on n'avait pas le même niveau de développement qu'aujourd'hui. Alors, ce n'est pas l'argent qui explique ce système. Mais il est absolument vrai que les partis politiques cherchent à avoir le maximum de donateurs. C'est ce qui explique également l'imposition d'un plafonnement. Cette limite oblige les partis politiques et les candidats à chercher le maximum de donateurs possibles. Au lieu d'avoir un seul grand donateur, pour la même somme d'argent, il faut peut-être chercher 10 ou 12 personnes. Ce qui oblige à prendre en compte les idées de toutes ces personnes au lieu de celles du seul grand donateur. Ingérence démocratique
Nous ne cherchons pas du tout à imposer la démocratie. Ce n'est pas possible. Mais il est absolument vrai que nous soutenons les peuples qui veulent s'exprimer librement. Ce n'est pas la même chose. Il y a beaucoup de pays où il n'existe pas la liberté d'expression. C'est ce genre de choses que nous prenons en compte, parce que nous croyons que chaque individu a des droits. La démocratie est un système qui marche chez nous, que nous soutenons, mais que nous ne cherchons pas à imposer. Ce sont les valeurs et les droits humains que nous soutenons.
La démocratie est un système dans lequel le pouvoir appartient au peuple. Je ne connais aucun pays au monde où le peuple veut être soumis à la dictature. Le multipartisme n'a pas été imposé, il a été encouragé. Mais, c'est chaque pays qui a pris la décision de suivre ou non. Il y a certains pays africains, asiatiques ou autres qui ont dit non, parce qu'ils n'y croyaient pas. Ils ont décidé de continuer avec leur propre système. En revanche, d'autres pays ont décidé d'essayer le multipartisme. Les Etats-Unis ne veulent pas et ne peuvent pas obliger un pays à choisir la voie démocratique. Ce que nous faisons plutôt, c'est d'encourager et de promouvoir les droits de l'homme et les libertés individuelles, afin que les populations de tous les pays soient en mesure de demander la démocratie. Le degré d'influence que nous pouvons exercer sur un pays dépend beaucoup plus du pays, de la population, de la culture. Et parfois, il y a un genre de relation que nous entretenons avec ce pays.
Condeeliza Rice
Je me demande s'il existe un seul cas où quelqu'un a refusé de partir de son poste. Ça n'est jamais arrivé. Je voudrais préciser que M. Obama va prêter serment, il va choisir ses ministres. Mais ces derniers savent déjà quand va prendre fin leur mandat.
Dollar et Dieu
Il s'agit de Dieu et non du dieu argent. Je voudrais vous rappeler que les Américains sont très religieux. La religion y est très importante. Et c'est pour cette raison que nous avons décidé qu'il y ait une nette séparation entre elle et l'Etat. Le peuple américain est très religieux, mais l'Etat doit être neutre.
“American way of life”
Cela signifie, d'abord, que vous êtes libre d'avoir une éducation, de choisir la profession de votre choix, la carrière, qui vous permet de vivre confortablement. Ensuite, vous êtes sans peur de quoi que ce soit, parce que vous vivez dans un pays libre, tant que vous vivez dans le respect de la loi. Rêve américain et immigration
Sur le plan pratique, il y a des lois aux Etats-Unis qui précisent combien de personnes peuvent immigrer chaque année. Et c'est notre Congrès qui, par un vote annuel, décide s'il faut changer la loi ou non. A propos du rêve américain, je n'ai aucun doute que beaucoup d'autres pays sont capables de faire comme les Etats-Unis. Beaucoup peuvent avoir exactement la même façon de vivre qui peut être aussi un rêve. Il suffit que le peuple en ait la volonté. Ce qui a été fait n'est pas l'oeuvre d'un magicien, c'est quelque chose qui a été établi par le peuple américain. Ce que je veux que les gens comprennent, c'est la notion : "You can do the same thing" c'est-à-dire : "Vous pouvez faire la même chose".
Nouvelle diplomatie
Si vous regardez de près, vous verrez que ce que nous avons toujours fait et ce que le Président Bush a toujours dit, sur l'Irak, l'Afghanistan, c'est de combattre la dictature. Ce n'était pas pour imposer la démocratie. Comme je vous l'ai dit, je ne crois pas que cela soit possible. La démocratie est un système qui vient du peuple d'un pays donné, libre d'établir le système de son choix. Ce que nous avons fait, c'était d'essayer de créer ces conditions. Très honnêtement, je ne sais ce que je peux vous dire aujourd'hui, parce que je crois qu'on doit attendre un peu pour voir exactement ce que sera la politique de la nouvelle administration. Cependant, je dirais que M. Obama a été très clair en disant qu'il cherche à avoir une conversation avec les pays, à comprendre leurs besoins, leurs problèmes, et non à juger d'avance sur des questions importantes. Crise financière
Nous avons espoir que son programme va améliorer notre vie.
Conclusion
Je voudrais simplement vous dire merci pour toutes vos questions que je trouve très intéressantes. Je vous quitte en espérant que vous suivrez les cent premiers jours de M. Obama. Parce que je crois que dans toute nouvelle administration, les cents premiers jours sont très importants. Certainement que M. Obama va essayer de faire passer son programme en faisant beaucoup de réalisations durant cette période.
Propos recueillis par Paulin N. Zobo
Landry Kohon
Marc Yevou
Rémi Coulibaly
Barthélemy Kouamé
coordonnateur
Abel Doualy
... et du DDR,
Alfred Dan Moussa
Madame l’ambassadeur, je voudrais vous dire merci d’avoir magnifié, à votre manière, la démocratie, comme ce sera le cas à l’investiture. Merci aussi, de nous avoir fait partager votre espoir de voir la démocratie s’implanter, progressivement - je ne sais pas si ce sera à la manière de la tortue- dans les pays du Tiers-monde. Parce que, vous l’avez dit, la culture ou les habitudes ne changent pas facilement. Il faut cependant garder l’espoir. Merci d’être venue, merci d’être restée avec nous, pendant tout ce temps.