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Art et Culture Publié le mardi 17 février 2009 | Notre Voie

Pasteur Moïse Koré : "Il faut reformer l`Eglise en Côte d’Ivoire"

Fondateur de la Mission évangélique Schekina Glory, le Pasteur Moïse Koré est également le Pasteur du Président de la République, Laurent Gbagbo. Dans cette interview, il parle avec son franc-parler habituel, de l’Eglise et de ses maux, de la Côte d’Ivoire et du processus électoral.


Notre Voie : Comment se porte la Mission Schekina Glory que vous dirigez depuis plusieurs années ?

Pasteur Koré : Si je veux faire comme tout le monde, je dirais qu’elle se porte bien. Mais je serai beaucoup plus critique parce que quand on a fait un travail, il faut savoir s’arrêter pour dresser le bilan.


N.V : Quel est le vôtre ?

P.K : Au niveau quantitatif, on a de plus en plus de fidèles. Mais ce n’est pas ce niveau qui préoccupe celui qui m’emploie en tant que Pasteur. Je parle de l’Eternel Dieu. Ce qui l’intéresse, c’est le qualitatif. Or aujourd’hui, à l’instar de toutes les églises à travers le monde, nous constatons beaucoup d’appelés, de personnes qui ont cru mais il y a peu de convertis.


N.V. : Où se situe la nuance ?

P.K. : Croire est différent d’être converti. L’on peut croire que Dieu existe, c’est la première étape.
Etre converti, c’est passer d’un état à un autre. La Bible dit que celui qui est en Christ est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées. Tout devient nouveau. Dans nos églises, nous nous apercevons que les anciennes pratiques demeurent. C’est pour cela que j’affirme qu’il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus.

Nous voulons maintenant nous atteler à créer un peuple de chrétiens convertis. Pas de chrétiens émotionnels, de chrétiens qui viennent à l’église seulement pour les miracles et les prophéties. Mais qui écoutent la parole de Dieu, la pratiquent et la gardent.


N.V. : Où en êtes-vous avec votre projet de construction d’un temple de 10.000 places à Abidjan ?

P.K. : Il y a deux projets. On a celui de la construction d’un temple provisoire dont la finition sera bientôt entamée afin qu’on procède rapidement à son inauguration officielle. Le second projet, plus important, est effectivement celui d’un temple de 10.000 places. Lorsque nous achèverons le temple provisoire, nous l'attaquerons.


N.V. : Des observateurs soutiennent que contrairement à bon nombre de Pasteurs, vous ne harcelez pas vos fidèles pour qu’ils contribuent financièrement aux activités de votre église. Vous préférez vous-même mettre la main à la poche. Est-ce vrai ? Pourquoi agissez-vous ainsi ?

P.K. : Contribuer financièrement pour un chrétien à la vie de l’église, consiste à payer ses offrandes et ses dîmes. Il est inutile, à mon sens, de mettre la pression sur les fidèles parce que dans la Bible, le Seigneur dit les bergers pour parler des Pasteurs, et les brebis pour parler des fidèles. La brebis est faible et ne sait pas où elle va. C’est au berger, donc au Pasteur d'aider et de conduire ses brebis vers « les verts pâturages » comme le dit le Psalmiste dans la Bible.



N.V. : D’où tirez-vous tout cet argent ?

P.K : De quel argent parlez-vous ?


N.V. : L’argent qui vous permet de financer la construction de grand temple, d’afficher une autonomie financière qui vous rend si différent des autres Pasteurs ?

P.K. : Je ne suis pas différent des autres Pasteurs. Evitons de singulariser les gens. De nombreuses personnes ne m’ont certainement pas connu avant que je ne sois Pasteur. Surtout dans le milieu chrétien. J’ai été cadre Télécom puis responsable d’une multinationale. J’ai eu des revenus sur lesquels, je continue de travailler malgré le fait que je sois devenu Pasteur. Pour ne pas être un obstacle à l’évangile, j’ai décidé de ne pas profiter des fidèles. En dehors de ma mission de Pasteur, je mène des activités qui me rapportent de l’argent que j’utilise pour aider ma communauté chrétienne.


N.V. : On pourrait vous rétorquer que vous bénéficiez des largesses du chef de l’Etat qui est l’un de vos fidèles.

P.K. : Ce qui fonde la solidité de mes relations avec le Président de la République, ce n’est pas l’argent mais Dieu. Mon souci, c’est que son âme soit sauvée. Qu’il agisse selon la volonté de Dieu qui l’a établi sur ce pays.


N.V. : Il ne vous a donc jamais remis de l’argent pour l’église ?

P.K. : Si, il participe comme tout fidèle aux activités de l’église. Dire le contraire, ce serait mentir. Mais, je dis qu’on ne va pas le harceler pour cela. C’est vrai que c’est un fidèle chrétien particulier puisqu’il est le Chef de l’Etat, mais il participe à la hauteur de ce qu’il gagne en tant que salarié de l’Etat. Il nous a d’ailleurs beaucoup aidé dans la construction du temple provisoire. On ne doit pas le nier. Mais, il n’est pas pour nous, une banque. Nous devons nous-mêmes nous mettre au travail avant de recevoir l’aide des autres.


N.V. : Il y a un phénomène dans l’Eglise évangélique en Côte d’Ivoire de nos jours. Il s’agit de cette course effrénée vers les révélations et les prophéties. Avez-vous fait le même constat ? Qu’en pensez-vous ?

P.K. : De nombreuses personnes sont en train de s’apercevoir au sein de l’Eglise, qu’elles ont couru après les révélations et les prophéties en vain. Cela ne leur a rien apporté. Le fondement de la foi de tout chrétien, quelle que soit l’obédience à laquelle il appartient, c’est la parole de Dieu. Elle est la révélation achevée. C’est un grand défaut dans l’Eglise de Côte d’Ivoire de voir que les gens courent vers les révélations et les prophéties. Heureusement qu’il y a un mouvement qui est en train de voir le jour.


N.V. : Lequel ?

P.K. : C’est le mouvement de retour vers la parole de Dieu. Parce que les gens sont fatigués des révélations, des miracles et des promesses. Ils sont fatigués qu’on les fasse vivre sur des fables. Pour être béni dans la vie, il n’y a pas mille chemins. Ce n’est pas en donnant ton argent au Pasteur Koré que tu seras béni. C’est en te tournant vers Dieu. En établissant des relations de fidélité envers Dieu et sa parole.


N.V. : L’image de la nouvelle vague des Pasteurs des Eglises évangéliques est écornée dans l’opinion publique parce qu’on les voit vêtus de costumes à prix d’or, parés de bijoux. Ils adorent également prêcher la prospérité. En êtes-vous conscient ?

P.K. : Personnellement, tout cela, c’est de la distraction. Il faut éviter le show et la personnalisation des ministères. Dans le livre de Mathieu, au chapitre 11 verset 11, la parole dit que de tous ceux qui sont nés de femmes, il n’est pas apparu de plus grand que Jean-Baptiste. C’est un témoignage que Jésus rend à Jean-Baptiste. Or, nous savons tous que Jean-Baptiste vivait dans les grottes du désert. Il était vêtu de peaux d’animaux et se nourrissait de miel sauvage et de sauterelles. Mais Jésus-Christ rend témoignage de lui. Ce n’est pas l’aspect extérieur qui compte mais ce que le Pasteur enseigne conformément à la parole de Dieu.


N.V. : Anciens Pasteurs et Pasteurs de la nouvelle génération étaient en conflit ouvert, il y a plus de deux années autour du Haut Conseil des églises protestantes et évangéliques. La paix est-elle aujourd’hui définitivement scellée entre ces deux groupes ?

P.K. : C’était un faux problème qui avait été soulevé à un moment donné par des personnes qui avaient d’autres objectifs. J’ai été au cœur de la médiation entre les deux parties puisque j’ai lu le pamphlet que les Pasteurs de la jeune génération ont fait circuler au sein des églises. Je les ai rencontrés et ils m’ont fait part de leur colère. Ils disaient que les Pasteurs devanciers projetaient de faire fermer leurs églises que ceux-ci qualifiaient d’églises boutiques. Que le Haut Conseil allait tout régenter. J’ai rencontré le Haut Conseil en compagnie des Pasteurs de la nouvelle génération et on s’est tous rendu compte que c’était de l’intox. La preuve, de tous ceux qui étaient dans ce mouvement de protestation, contre le Haut Conseil, combien y sont encore ?


N.V. : Le Pasteur Kassi d’Azito (Abidjan-Yopougon) qui menait la fronde des Pasteurs de la nouvelle génération n’a pas encore rangé ses récriminations contre le Haut Conseil ?

P.K. : J’ai parlé au Pasteur Kassi d’Azito. Je l’ai conduit devant le Haut Conseil et on a tous constaté qu’aucune des récriminations énoncées ne figure dans aucun document du Haut Conseil. Après cette réunion, je pense que tout est rentré dans l’ordre. Puisque je pense qu’à l’installation du Haut Conseil, le Pasteur Kassi était présent.


N.V. : Ne pensez-vous pas qu’il est effectivement nécessaire de reformer l’Eglise évangélique en Côte d’Ivoire ?

P.K. : Je ne pense pas que ce soit une reforme en profondeur. Il s’agit d’imposer un minimum de principes qui doivent guider notre marche. La Bible est notre boussole, c’est le fondement de notre foi. Il faut simplement tous nous asseoir au cours d’une réunion pastorale et nous accorder sur ce que demande la Bible. Parce que les polarisations sur certains aspects du message biblique conduisent toujours à des déviations.


N.V. : C’est l'unique solution ?

P.K. : Ce n’est pas seulement l’Eglise évangélique mais l’Eglise toute entière qui doit être reformée. Et l’unique solution est effectivement le retour à la parole de Dieu. Nous, les serviteurs de Dieu, notre rôle est de gagner des âmes à Dieu. De leur enseigner la vérité qui est Jésus-Christ. Tant que chacun voudra se faire voir à Abidjan, évidemment il y aura des querelles de leadership. Mais quand on ira dans la moisson du Seigneur, dans les recoins du pays, pour briser les oeuvres de la sorcellerie, pour amener les gens à connaître Dieu, l’Eglise n’aura plus de problèmes. J’avais à l’époque commencer à mettre en place, un mouvement d’évangélisation que j’ai baptisé “Côte d’Ivoire pour Jésus”. Je suis en train de redonner vie à ce mouvement d’évangélisation. Tous ceux ont envie d’aller à travers le pays pendant des jours ou des semaines pour porter la bonne nouvelle de Jésus-Christ je leur lance cet appel afin qu’ils se joignent à nous en envoyant un message au contact suivant : 07-69-16-77. Qu’ils soient Pasteurs, chantres ou simples chrétiens, nous les attendons parce que nous avons besoin d’évangéliser notre pays. Notre mouvement n’est pas une fédération ni une nouvelle église.


N.V. : Certains Pasteurs continuent de vous accuser de les empêcher d’avoir accès au Chef de l’Etat. Cette rengaine dure depuis plusieurs années. Que faites-vous pour faire changer les choses ?

P.K. : Je ne me reconnais pas dans de telles accusations.
Les audiences du Président de la République sont gérées par son secrétariat pas par moi. Je ne vois donc pas comment je pourrais empêcher qui que ce soit de rencontrer le Président Gbagbo.


N.V. : Comment voyez-vous 2009 ? Sera-t-elle effectivement l’année de la tenue des élections présidentielles ?

P.K. : La Bible dit qu’une prophétie peut se faire attendre. L’attente n’est pas le fait de Dieu. Car Dieu veut que les Hommes vivent en paix. S’il n’y a pas de paix, seuls les Hommes en sont responsables.

Dieu ne nous force pas à aller à la paix comme il ne nous force pas à devenir tous chrétiens sinon il nous aurait saisis par la tête pour nous y contraindre. Avec Dieu, il y a la liberté. Je voyage énormément et je constate que le monde se développe. Les gens sont en train de bâtir leurs pays pour le bien-être de leurs populations et de leurs générations à venir. Pendant ce temps, en Côte d’Ivoire, on se bat au nom du “quitte-là pour que je m’y mette”.

Quelle genre de politique faisons-nous dans ce pays ? Pourquoi cet égocentrisme ? Pourquoi ne pouvons-nous pas trouver de l’intelligence en l’autre ? On croit que sans soi, rien ne peut être fait dans ce pays ? Mais personne n’est indispensable sur cette terre. Les Occidentaux nous montrent que seules les idées doivent triompher, pas les armes et la violence. Les dernières élections présidentielles aux Etats-Unis sont un bel exemple qui doit nous instruire.

Dieu ne m’a rien révélé à propos de la tenue des élections présidentielles, cette année. Mais je fais simplement une analyse. Je constate qu’il n’y a pas de démocratie dans les pays du Nord de l’Afrique, mais ils se développent. Mais ici, on laisse la liberté aux gens et ils font n’importe quoi. Ils tirent le pays vers le bas.


N.V. : Vous estimez qu’il faut moins de démocratie pour faire évoluer les choses ?

P.K. : Moi, je ne suis pas pour la démocratie au sens de la liberté totale. Pour moi, un pouvoir, ça se tient ferme. Le pouvoir provient de Dieu. Lorsqu’il vous le donne, c’est entièrement. Pas à moitié. Alors, il faut l’exercer entièrement. Dieu n’est pas un démocrate. Il dirige le monde selon sa volonté. Moi, je suis du gouvernement de Dieu. Donc, je marche derrière lui. Il est mon patron et je fais ce qu’il me demande sans broncher. Mes propos vont certainement choqués beaucoup de personnes mais j’estime que c’est ainsi que nos pays devraient se comporter pour se développer. Quand Dieu met à la tête d’un peuple à un moment précis, un homme, c’est que celui-ci remplit les conditions pour faire face à la situation. Il faut éviter pour des raisons politiciennes, de le tirer vers le bas en y entraînant le pays. L’Afrique est véritablement malade de son leadership depuis les indépendances. Ce constat n’engage que moi. Je l’assume.

Interview réalisée par Didier Depry didierdepri@yahoo.fr
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