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Économie Publié le mercredi 25 février 2009 | Fraternité Matin

Crise financière mondiale : L’Afrique est bel et bien exposée

Après l’optimisme du début, la plupart des analystes redoutent une baisse des exportations des matières premières des pays en voie de développement.

Le 9 février dernier, au cours de la cérémonie d’ouverture de la 33e assemblée générale de la Fédération des sociétés d’assurance de droit africain (Fanaf), à Yamoussoukro, les participants et invités ont remarqué le pessimisme avec lequel le président de cette structure, Protais Ayangma Amang, a évoqué les menaces de la crise financière mondiale pour les économies africaines. Entre autres bouts de phrases révélateurs: “Dans les prochains mois, les effets indirects ou collatéraux de la crise vont se révéler plus, sérieux pour les économies africaines”.

Le fait est que de plus en plus les discours du genre “la crise aura des effets limités pour l’Afrique» ou «nous n’avons rien à craindre parce que nous sommes immunisés grâce au sous-développement” ne prospèrent plus. La plupart des économistes et autres analystes sont de plus en plus affirmatifs sur les menaces que court l’Afrique du fait de la crise financière mondiale. Tous sont d’accord qu’il ne faut plus se leurrer. Parce que c’est désormais certain que, bien qu’étant complètement étrangère à la survenue de cette crise, l’Afrique est bien partie pour en subir les effets. Il ne s’agit plus de futur dans certains cas. Le marché des matières premières ne reçoit-il pas déjà les contrecoups?

Les pays occidentaux étant entrés en récession économique, cela est en train d’engendrer la baisse de la demande en produits primaires. Il ne faudrait donc pas être surpris de constater une baisse des exportations et des cours des principales matières premières. La conséquence pour l’Afrique sera une baisse des revenus d’exportation. Avec pour corollaire, une récession économique. Heureusement, on n’en est pas encore là. Mais, ils sont de plus en plus nombreux, ceux qui redoutent ce cas de figure. Ce sera “une catastrophe pour les Etats africains…”, prédisent-ils. En attendant, le dernier rapport du Fmi fait état de ce que l’Afrique ne connaîtra qu’une croissance de 3 % en 2009, là où l’on était en droit d’attendre entre 5 et 6%, justement à cause des prévisions de baisse des exportations africaines de produits primaires.

L’un des gros problèmes qui guettent également le continent noir, c’est bien la baisse du volume de l’aide publique au développement. “La crise financière risque donc fort de devenir pour l’Afrique une crise de l’aide au développement”, redoutent des économistes. Explication de Mivedor Ekué, chargé de portefeuille à la Banque africaine de développement (Bad): “La plupart des gros projets (publics ou privés), en Afrique, sont financés par des fonds de pays étrangers. Si ceux-ci n’ont pas de visibilité, c’est en toute logique qu’ils deviennent réticents”. Pour nombre d’analystes, il est clair que sur ce chapitre, de nombreux projets importants risquent d’être gelés.

En fait, le raisonnement tient à ce que les trésors publics des pays occidentaux, confrontés à la récession économique et obligés de faire face à de lourdes mesures de soutien à leurs institutions financières, auront de plus en plus de mal à honorer leurs engagements d’aide au développement ou à prendre d’autres engagements. Du haut de la tribune que lui offrait la cérémonie d’ouverture de la 33e assemblée générale de la Fanaf, le président Protais, exposant ses inquiétudes, a poursuivi : “La crise provoquera la réduction plus que probable du volume de l’aide au développement. Ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences sur la vie de plusieurs pays africains qui dépendent de cette manne financière pour faire face aux défis de la lutte contre la pauvreté, la faim et les épidémies comme le paludisme, la tuberculose et le Vih-sida”.

Si la baisse de l’aide publique au développement et des exportations paraît évidente, il n’est pas pour autant prudent d’écarter des difficultés sur le système financier. Du moins dans certains pays africains. L’économiste en chef pour l’Afrique et le Moyen-Orient au centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économique, Jose Gijon Spalla, pense, pour sa part, que “les conséquences de cette crise peuvent varier selon le niveau de développement des pays”. Pour lui, l’effet de contagion peut atteindre des Etats comme l’Egypte, l’Afrique du Sud ou le Maroc, dont les systèmes financiers sont plus intégrés au système international. Le magazine “The African executive” apporte de l’eau à son moulin en notant que des fonds occidentaux en quête de diversification de leurs investissements ont injecté beaucoup d’argent sur ces marchés. Le risque aussi de voir des banques africaines touchées par la crise existe selon certains économistes. Dans la mesure où elles ne recevront plus de fonds de la part de leurs consoeurs occidentales. Ces expert affirment que “si les banques occidentales, pour des raisons de solvabilité, refusent de se prêter de l’argent entre elles, il y a de fortes chances qu’elles ne veuillent pas financer les banques africaines… Et si ces dernières ne peuvent pas bénéficier de ces crédits, elles se retrouveront dans l’incapacité de prêter à leurs clients (particuliers ou entreprises)”.

Malgré ces prévisions, il faut reconnaître qu’après plus d’un an de crise financière, le système financier africain n’a véritablement pas été bousculé. Mis à part quelques affaires comme celle relative à “l’investissement hasardeux” effectué par la Banque centrale des Etats de l’Afrique centrale dans des fonds spéculatifs en France. Qui lui a fait perdre 25 millions d’euros (plus de 15 milliards de francs Cfa).

A part donc quelques écueils, pour l’instant, les graves menaces annoncées relèvent, du futur. Fût-il immédiat.

Alakagni Hala
Option : Il était temps
Pendant longtemps, l’Afrique s’est tue face à la crise financière qui secoue actuellement le monde. Les quelques rares interventions entendues ou lues ici et là se sont contentées de soutenir que le continent n’a rien à craindre relativement à cette crise lointaine, “cette crise des riches”. L’un des Chefs d’Etat de la sous-région disait que “la crise ne peut pas nous ébranler parce que nous, pays africains, déjà couchés, ne pouvons pas tomber”. Il insinuait que les pays africains sont si pauvres qu’ils ne peuvent être touchés par la crise financière. A première lecture, ils ont raison. L’Afrique, non connectée à la finance internationale, n’a effectivement pas encore été ébranlée au niveau de ses institutions financières. Cependant dans l’absolu, ces voix se sont vraiment plantées.

L’on a oublié royalement les effets auxquels l’Afrique ne pouvait échapper. Pour la simple raison qu’économiquement “elle est très connectée” au reste du monde. Notamment au monde occidental en proie à cette crise. Ceux qui, comme le Président Abdoulaye Wade du Sénégal, étaient convaincus que “les effets de la crise seraient limités pour l’Afrique”, se ravisent peu à peu, aidés en cela par les inte,rpellations des analystes et autres économistes. Les gouvernants africains qui dormaient tranquillement, nullement préoccupés par “la crise des riches”, ont le sommeil quelque peu troublé désormais. On leur a expliqué que le volume de leur cacao, café, manganèse, fer, bauxite et autres produits primaires exportés vers les pays développés va baisser. Parce que les populations de ces pays n’ont plus suffisamment d’argent pour consommer au même rythme qu’avant la crise.

Les décideurs africains savent qu’une telle tendance ne peut qu’affecter leurs recettes à l’exportation. Et donc les finances de leurs Etats. Et quand, ajouté à cela, on leur explique que leurs Etats courent le risque de voir la manne de l’aide publique au développement s’amenuiser, les Chefs d’Etat comprennent qu’il faut faire attention. Et faire attention, c’est penser à prendre des mesures structurelles pour ne pas être pris de court.

Encore une fois, le problème de l’extraversion des économies africaines est en passe de leur jouer un mauvais tour.

Pour l’heure, croisons les doigts pour que les pays développés trouvent les solutions à “leur crise” qui nous menace.

par Alakagni Hala
Focus : Le plan d’action du G20
Le 15 novembre 2008, les pays membres du G 20 se sont retrouvés à Washington pour se donner un plan d’action contre la crise financière.
Il s’est agi, après les mesures décidées par les différents pays à leurs niveaux, de s’accorder sur des solutions devant permettre de soutenir l’économie, mettre en œuvre une nouvelle régulation internationale et réformer la gouvernance mondiale pour tenter d’enrayer la plus grave crise économique après celle de 1929.
Ainsi, à l’issue du sommet, il a été décidé de “prendre toutes les mesures supplémentaires nécessaires” pour maintenir élevée ou pour relancer l’offre de crédit des banques. Dans la mesure où ce secteur est le moteur de la croissance économique et de l’investissement.

Le G20 a décidé de stimuler la consommation par des stratégies coordonnées.

Les pays membres se sont donnés comme délai le 31 mars 2009 pour mettre sur pied un collège de superviseurs comprenant les principaux régulateurs des finances dans le monde. Ils ont décidé de renforcer les attributions du forum sur la stabilité financière et de l’élargir aux puissances économiques émergentes (Chine, Brésil, Inde) pour légitimer son rôle et accroître sa représentativité.

L’une des importantes mesures adoptées au sommet du G20 le 15 novembre de l’an dernier est sans conteste celle relative à la décision de réformer le Fonds monétaire international (Fmi) et la Banque mondiale. Il s’agit de prendre en compte la nouvelle donne économique internationale qui fait des Etats émergents les principaux moteurs de la croissance économique.

Le sommet de Washington a résolument engagé les participants à lutter contre le protectionnisme et à relancer le cycle de Doha. Le but est d’empêcher une contraction globale des échanges et des flux commerciaux.

Certaines de ces mesures devraient faire l’objet d’un premier bilan au 31 mars 2009 avant la convocation d’un second sommet entre le 31 mars et le 30 avril.

A. Hala
Repères

Origine. A l’origine de la crise financière mondiale, se trouvent les crédits “subprime” que certains organismes de crédit américains accordaient depuis des années aux ménages qui n’avaient pas les moyens. C’est-à-dire, ceux qui n’avaient pas accès aux prêts des grosses banques.

Sommet. Le G 20 s’est réuni le 15 novembre 2008 pour plancher sur la crise financière. Le sommet s’est soldé par un texte commun, nommé “déclaration de Washington”, qui a annoncé des mesures à prendre à court terme tout en ouvrant des perspectives de changement en profondeur dans la régulation financière et économique mondiale.

Évaluation. Le 2 avril prochain, les pays membres du G 20 se réunissent à Londres. Comme décidé en novembre dernier, il s’agira d’évaluer la mise en œuvre et les effets des mesures prises à Washington.
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