La réunion de Washington qui décidera de l’éligibilité de la Côte d’Ivoire aura lieu le 27 mars à Washington. Abidjan retient son souffle.
Le 27 mars les autorités ivoiriennes auront les yeux rivés vers Washington. A cette date, les institutions multilatérales diront si la Côte d’Ivoire peut progresser vers le point de décision, étape préalable à l’éligibilité à l’initiative des Pays pauvres très endettés (Ppte). «C’est une question cruciale parce que c’est la seule chance pour que notre pays sorte la tête du gouffre. Il faut que le fardeau de la dette soit allégé», explique le ministre de l’Economie et des Finances. Selon Charles Diby Koffi, la dette extérieure est estimée à près de 7.000 milliards Fcfa, soit trois fois le budget national, rendant impossible les investissements nécessaires au développement. Plus du tiers des 2.000 milliards Fcfa est ainsi affecté au remboursement de la dette multilatérale. L’enjeu est que si le pays parvient à effacer cette dette multilatérale et à être éligible à l’initiative en faveur des Ppte, il pourrait bénéficier d’un excédent de 3.000 milliards Fcfa. Cet excédent devrait servir à financer des investissements et surtout à favoriser un regain de l’économie pour lutter contre la pauvreté. Certes, un pas important a été réalisé avec notamment la mise à disposition du Document de stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp). Théoriquement, il établit tous les nouveaux plans de lutte contre l’extrême pauvreté. Malheureusement, ces efforts ont besoin d’être soutenus. Les institutions multilatérales se déclarent de plus en plus sceptiques quant à la capacité des autorités ivoiriennes à lever les derniers obstacles sur le chemin de l’éligibilité. De mauvaises prévisions de bonne gouvernance pèsent sur la gestion financière des ressources publiques. Par exemple, sur la question de la masse salariale, les autorités, jusque-là, n’apportent pas de réponses satisfaisantes aux exigences du Fonds monétaire international (Fmi). L’institution financière recommande que le volume de la masse salariale passe de 750 milliards à 730 milliards Fcfa. Soit 20 milliards Fcfa de moins. Sur ce point, le ministre Charles Diby est à la croisée des chemins. Comment remettre en cause les acquis des fonctionnaires et autres agents de l’Etat ? Un casse-tête chinois pour l’Etat qui en cache bien d’autres. Selon Arend Kouwenarr, chef de la délégation Fmi, le gouvernement éprouve d’énormes difficultés à calibrer ses dépenses d’investissement. Sur l’exercice 2008, des dépassements budgétaires ont été constatés dans le financement des travaux du transfert de la capitale à Yamoussoukro. En effet, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international restent circonspects sur la gestion budgétaire, le comportement des agents de l’Etat et l’environnement des affaires. Les deux institutions insistent particulièrement sur les énormes contrats passés de gré à gré notamment dans le pétrole et le domaine portuaire. Les écarts dans ces domaines font planer des menaces sur l’éclosion d’un secteur privé compétitif. Les experts de la Banque mondiale se préoccupent notamment de l’état de la corruption, du racket des forces de l’ordre, de la qualité de la formation des ressources humaines. Le travail analytique réalisé dans les domaines de la gestion économique montre un déficit de transparence des réformes structurelles dans les secteurs financiers, de l’énergie, du café-cacao et de la gestion des dépenses publiques. «Je peux vous dire que c’est moins de 40% du prix international qui est payé au paysan ivoirien, comparé au Ghana où il touche 70%, au Nigeria, où il touche 90% du prix international. En Indonésie, c’est la même chose. Comment se fait-il qu’en Côte d’Ivoire, le paysan ivoirien touche moins de 40% du prix international », s’interroge Madani Tall président des opérations de la Banque mondiale. Le programme économique, socle de l’évaluation des bailleurs de fonds, prévoit une suppression des dépenses improductives (dépenses de souveraineté et dépenses militaires) au profit des dépenses dans l’éducation, la santé et les infrastructures de base. En filigrane, il s’agit d’améliorer la gouvernance, en veillant: premièrement, à respecter scrupuleusement les allocations budgétaires et à publier régulièrement les modalités d’emploi des crédits; deuxièmement, à améliorer l’information sur les flux du secteur énergétique - dans le but aussi d’assurer l’allocation de recettes suffisantes au budget - et, troisièmement, à améliorer la gestion du secteur du café-cacao et à abaisser les prélèvements parafiscaux pour accroître les revenus des agriculteurs. Le concept de Pays pauvres très endettés, susceptible de faire bénéficier de l’annulation de dette multilatérale apparaît au début de 1995. Le Fmi a estimé «qu’une majorité de pays pauvres très endettés devraient être en mesure de gérer le service de leur dette multilatérale» mais admet que «dans certains pays, le service de la dette et le surendettement envers les institutions multilatérales constituent un lourd fardeau qui hypothèque manifestement leurs perspectives de développement» et préconise un traitement au cas par cas.
Lanciné Bakayoko
Le 27 mars les autorités ivoiriennes auront les yeux rivés vers Washington. A cette date, les institutions multilatérales diront si la Côte d’Ivoire peut progresser vers le point de décision, étape préalable à l’éligibilité à l’initiative des Pays pauvres très endettés (Ppte). «C’est une question cruciale parce que c’est la seule chance pour que notre pays sorte la tête du gouffre. Il faut que le fardeau de la dette soit allégé», explique le ministre de l’Economie et des Finances. Selon Charles Diby Koffi, la dette extérieure est estimée à près de 7.000 milliards Fcfa, soit trois fois le budget national, rendant impossible les investissements nécessaires au développement. Plus du tiers des 2.000 milliards Fcfa est ainsi affecté au remboursement de la dette multilatérale. L’enjeu est que si le pays parvient à effacer cette dette multilatérale et à être éligible à l’initiative en faveur des Ppte, il pourrait bénéficier d’un excédent de 3.000 milliards Fcfa. Cet excédent devrait servir à financer des investissements et surtout à favoriser un regain de l’économie pour lutter contre la pauvreté. Certes, un pas important a été réalisé avec notamment la mise à disposition du Document de stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp). Théoriquement, il établit tous les nouveaux plans de lutte contre l’extrême pauvreté. Malheureusement, ces efforts ont besoin d’être soutenus. Les institutions multilatérales se déclarent de plus en plus sceptiques quant à la capacité des autorités ivoiriennes à lever les derniers obstacles sur le chemin de l’éligibilité. De mauvaises prévisions de bonne gouvernance pèsent sur la gestion financière des ressources publiques. Par exemple, sur la question de la masse salariale, les autorités, jusque-là, n’apportent pas de réponses satisfaisantes aux exigences du Fonds monétaire international (Fmi). L’institution financière recommande que le volume de la masse salariale passe de 750 milliards à 730 milliards Fcfa. Soit 20 milliards Fcfa de moins. Sur ce point, le ministre Charles Diby est à la croisée des chemins. Comment remettre en cause les acquis des fonctionnaires et autres agents de l’Etat ? Un casse-tête chinois pour l’Etat qui en cache bien d’autres. Selon Arend Kouwenarr, chef de la délégation Fmi, le gouvernement éprouve d’énormes difficultés à calibrer ses dépenses d’investissement. Sur l’exercice 2008, des dépassements budgétaires ont été constatés dans le financement des travaux du transfert de la capitale à Yamoussoukro. En effet, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international restent circonspects sur la gestion budgétaire, le comportement des agents de l’Etat et l’environnement des affaires. Les deux institutions insistent particulièrement sur les énormes contrats passés de gré à gré notamment dans le pétrole et le domaine portuaire. Les écarts dans ces domaines font planer des menaces sur l’éclosion d’un secteur privé compétitif. Les experts de la Banque mondiale se préoccupent notamment de l’état de la corruption, du racket des forces de l’ordre, de la qualité de la formation des ressources humaines. Le travail analytique réalisé dans les domaines de la gestion économique montre un déficit de transparence des réformes structurelles dans les secteurs financiers, de l’énergie, du café-cacao et de la gestion des dépenses publiques. «Je peux vous dire que c’est moins de 40% du prix international qui est payé au paysan ivoirien, comparé au Ghana où il touche 70%, au Nigeria, où il touche 90% du prix international. En Indonésie, c’est la même chose. Comment se fait-il qu’en Côte d’Ivoire, le paysan ivoirien touche moins de 40% du prix international », s’interroge Madani Tall président des opérations de la Banque mondiale. Le programme économique, socle de l’évaluation des bailleurs de fonds, prévoit une suppression des dépenses improductives (dépenses de souveraineté et dépenses militaires) au profit des dépenses dans l’éducation, la santé et les infrastructures de base. En filigrane, il s’agit d’améliorer la gouvernance, en veillant: premièrement, à respecter scrupuleusement les allocations budgétaires et à publier régulièrement les modalités d’emploi des crédits; deuxièmement, à améliorer l’information sur les flux du secteur énergétique - dans le but aussi d’assurer l’allocation de recettes suffisantes au budget - et, troisièmement, à améliorer la gestion du secteur du café-cacao et à abaisser les prélèvements parafiscaux pour accroître les revenus des agriculteurs. Le concept de Pays pauvres très endettés, susceptible de faire bénéficier de l’annulation de dette multilatérale apparaît au début de 1995. Le Fmi a estimé «qu’une majorité de pays pauvres très endettés devraient être en mesure de gérer le service de leur dette multilatérale» mais admet que «dans certains pays, le service de la dette et le surendettement envers les institutions multilatérales constituent un lourd fardeau qui hypothèque manifestement leurs perspectives de développement» et préconise un traitement au cas par cas.
Lanciné Bakayoko