Donner des «instructions fermes» dans une affaire civile. C’est la prouesse qu’a réussie le chef d’état-major des FDS, le général Phillipe Mangou. En ordonnant dans un communiqué diffusé le 20 mars dernier, l’interpellation du président du Mouvement des Forces d’Avenir, l’officier supérieur s’est trahi. Mangou, par cette sortie, non seulement a commis une méprise grave, mais achève de montrer qu’il est l’homme d’un régime. «Le chef d’état-major des armées et les chefs des grands commandements des forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire condamnent vigoureusement cette attitude de M. Anaky Kobena», dit le communiqué des FDS signé du colonel Babri Gohourou Hilaire, porte-parole. Ce communiqué va plus loin en mentionnant que c’est l’état-major des FDS qui a ordonné l’interpellation du président du MFA pour les propos qu’il a tenus mercredi dernier à la télévision ivoirienne. Oui, vous avez bien lu. Sous d’autres cieux, une telle sortie occasionnerait immédiatement la démission ou la destitution du chef d’état-major. Car dans une vraie démocratie, une telle immixtion du chef d’état-major ou des militaires dans la vie politique s’apparente à un coup de force. La grande muette, comme son nom l’indique, n’a pas pour rôle d’être bavarde. Mais de défendre la République et ses institutions en cas de graves dangers externes. Que vient donc faire l’armée dans une affaire civile? Pourquoi c’est l’état-major des armées qui ordonne l’interpellation d’un leader d’opinion qui plus est, est un civil? Sommes-nous en Côte d’Ivoire dans un état policier ou dans une dictature militaire? Le dire ne serait pas exagéré au vu de cette curieuse sortie qui ressemble plus à une allégeance qu’à un souci de maintien d’ordre. Si l’on avait encore des doutes sur le manque de loyauté du général Mangou envers le peuple, aujourd’hui ce n’est plus le cas. Le premier soldat de Côte d’Ivoire et ses camarades du haut commandement ont choisi leur camp. Celui de Laurent Gbagbo et son régime. C’est pourquoi, ils peuvent se permettre de rappeler à l’ordre les acteurs politiques et d’ordonner leur arrestation si besoin est. Des militaires qui donnent des ordres dans une démocratie, c’est en Côte d’Ivoire que l’on peut voir cela. Mais il ne faut pas se leurrer. Cela explique tout simplement que le chef d’état-major s’est trahi et a trahi sa mission. Celle d’être du côté du peuple, de la République et rien d’autre. Malheureusement, ce n’est pas le cas.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly