Le Fonds d'appui africain pour le développement de l'entreprise est une initiative spéciale de partenariat de l'Alliance pour une révolution verte en Afrique, présidée par Koffi Annan et financée par Rockefeller et Bill et Melinda Gates. Son directeur exécutif était à Abidjan vendredi à la Chambre de commerce et d'industrie pour le présenter aux opérateurs économiques. André Dellevoet estime que malgré les effets de la crise, le secteur privé ivoirien garde ses chances pour bénéficier de l'appui du Faade.
• Qu'est-ce que le Fonds d'appui africain pour le développement de l'entreprise (Faade) vient proposer au secteur privé ivoirien ?
Nous croyons que le vrai moteur du développement économique et même dans le domaine agricole, c'est le secteur privé et les compagnies privées. On a déjà établi dans le passé que c'est tout à fait possible de mettre en œuvre un processus de développement axé sur la création de l'emploi ou de revenus pour les populations et une faisabilité commerciale (un investissement commercial). Le lien entre ces deux notions a fait ses preuves dans beaucoup de pays dans le monde. On cherche ces solutions en Afrique aussi. Le Faade est une initiative de haute importance issue du rapport de la Commission pour l'Afrique 2006. Mais notre contribution est vraiment substantielle. On peut octroyer des dons et des prêts à intérêt nul pour contribuer à un investissement d'une compagnie privée mais à des conditions très strictes et concurrentielles. Le fonds est en train d'organiser une série de concurrences qui ne sont ouvertes qu'aux entreprises à but lucratif et aux projets innovateurs en Afrique. On cherche à cet effet des entreprises bien établies avec la capacité de proposer elles-mêmes leurs projets. Elles doivent avoir une bonne réputation parce que nous travaillons avec des fonds publics fournis par des bailleurs de fonds. Le maximum qu'on peut apporter pour le financement des projets est de 50% du coût global avec des conditions assez favorables pour le secteur privé. Ainsi le Faade fournit des dons et des prêts à hauteur d'un minimum de 250.000 dollars US (125 millions de Fcfa) et d'un maximum de 1,5 million de dollars US (750 millions de Fcfa). Mais on peut atteindre 3 millions de dollars US (1,5 milliard de Fcfa) avec les entreprises à moyenne et grande échelle avec un délai maximum de remboursement de 6 ans et les appels d'offres prennent cinq à six mois. Il ne s'agit pas des petites structures qui ne peuvent pas mobiliser ce capital. Ce n'est pas non plus les compagnies multinationales parce qu'elles travaillent sur la base de plusieurs dizaines de millions de dollars dans leurs investissements. Au jour d'aujourd'hui le fonds a ciblé 13 pays dont le Ghana, l'Afrique du Sud, le Kenya, la Tanzanie, le Mozambique,…
• Eu égard aux pays ayant bénéficié du soutien du Faade, on a le sentiment que vous êtes plus concentré dans les pays anglophones hormis des Etats comme le Mali et le Burkina. Est-ce à dire que les pays francophones sont moins entreprenants?
Au début de la création du Faade, on a essayé de se concentrer sur des pays avec un secteur privé déjà bien établi. Mais finalement, on a décidé d'en faire un fonds panafricain. Cela veut dire qu'il s'ouvre désormais à tous les pays africains anglophones, francophones et tous les autres. Maintenant on cherche à faire un bilan entre les pays francophones et anglophones. Il faut avouer qu'en Afrique de l'Ouest, le secteur privé a une nature différente de celle des Etats anglophones. Il manque un certain dynamisme et il est très étroit ici. La base économique est très faible. Si on compare les économies d'ici à celles d'un pays comme le Kenya ou l'Afrique du Sud, c'est bien clair qu'il y a une grande différence.
• Est-ce qu'il n'y a pas une discrimination quelque part quand vous dites que le fonds ne s'intéresse qu'aux grandes entreprises. Pourtant, un pays comme la Côte d'Ivoire qui sort d'une crise et dont les Pme/Pmi sont éprouvées, a besoin de développer ce secteur également…
On cherche à identifier les secteurs à valeur ajoutée en comparaison avec tous les autres programmes des bailleurs de fonds. Parce que les institutions comme la Bad, le Fida, le Cde pour ne citer que celles-ci, tout le monde se dirige vers les petites compagnies mais les effets de développement sont encore moindres. Donc dans l'analyse, il faut bien comprendre que les grandes entreprises peuvent apporter le développement si elles font des investissements à grande échelle. On essaie de les stimuler pour y arriver. Il faut préciser que le but du Faade est d'appuyer les entreprises du secteur privé afin de leur permettre de formuler et de tester des idées d'affaires neuves et innovatrices dans les domaines des agro-industries et des services financiers ruraux en Afrique. Il s'agit de prouver qu'il est possible d'utiliser les fonds des donateurs en partenariat avec les sociétés privées pour améliorer les conditions de vie des populations dans le continent et réduire la pauvreté dans les zones rurales.
• Le fonds s'intéresse beaucoup plus au secteur agricole. Or le constat en Côte d'Ivoire, c'est que ce secteur primaire appartient généralement aux petits exploitants. Pourtant vos investissements ne visent que les grandes entreprises. Il n'y a-t-il pas dichotomie ?
Il est utile d'apporter certaines précisions à la mission assignée au Fonds. Ce n'est pas que nous voulons soutenir le secteur rural d'emblée. Mais il faut indiquer que dans ce secteur il y a des entreprises qui interviennent dans la chaîne de valeur pour aider à transformer les matières premières agricoles. Ce sont ces entreprises qui peuvent challenger pour ce fonds. C'est une compétition au niveau de toute l'Afrique. C'est-à-dire les entreprises dans les pays africains capables d'avoir des projets novateurs (la capacité à les exécuter) à grande intensité de transformation, qui ont un impact sur le développement et qui peuvent aider le monde rural à émerger. Ces entreprises doivent faciliter les changements systémiques. C'est-à-dire travailler dans la chaîne de valeur avec d'autres partenaires surtout pour les petites entreprises qui doivent aller au regroupement pour accroître leurs chances. Il y a des potentialités en Côte d'Ivoire. Si on prend le cas du Zimbabwe avant l'année 2000, le secteur privé a dirigé l'agriculture en lui donnant une dimension commerciale. Cela a été un grand succès. Ce pays arrivait à exporter massivement ses produits. Mais les changements politiques ont affecté négativement cet élan. C'est le cas au Nord du Cameroun où le projet de production de sorgho avec la société Guiness qui a pris en compte 10.000 petits paysans et au Ghana le projet de chaîne de valeur des maïs de l'entreprise Yara international avec 15.000 petits producteurs. Cela montre que l'échelle est plus grande et plus importante avec les grandes compagnies.
• Vous avez indiqué tantôt que le Faade ouvre une série de concurrences entre les entreprises. Or vous savez qu'en la matière la compétitivité reste un élément déterminant. Mais pour cela, il faut un environnement propice aux affaires. Qu'est-ce que vous faites dans ce sens ?
C'est juste. Mais ce n'est pas notre tâche première. C'est vraiment pour que d'autres partenaires puissent se concentrer sur ce volet. D'ailleurs nous en cherchons afin qu'ils s'occupent spécifiquement de l'amélioration du climat des affaires et qu'ils prennent part dans notre programme.
• Au niveau de l'appel d'offres, il faut cinq à six mois d'attente pour les entreprises. Ceci n'est pas trop contraignant ?
En comparaison avec d'autres organisations que je n'ose pas mentionner, six mois, c'est vraiment bref. C'est un délai vraiment acceptable. En général la plupart des organisations ou bailleurs qui sont dans ce créneau d'appui au secteur privé, ont des délais largement au-dessus de six mois. C'est donc un point fort pour le Faade.
• Quelles sont les chances pour le secteur privé ivoirien ?
Il y avait un secteur privé fort en Côte d'Ivoire avant le coup d'Etat de 1999 et les évènements politiques qui ont eu lieu après. Cela ne veut pas dire que ce secteur privé ne peut pas se ressusciter. Il y a encore en Côte d'Ivoire des compagnies bien capables de discuter des projets, qui peuvent trouver des financements et qu'on peut assister avec notre fonds.
Interview réalisée par Cissé Cheick Ely
• Qu'est-ce que le Fonds d'appui africain pour le développement de l'entreprise (Faade) vient proposer au secteur privé ivoirien ?
Nous croyons que le vrai moteur du développement économique et même dans le domaine agricole, c'est le secteur privé et les compagnies privées. On a déjà établi dans le passé que c'est tout à fait possible de mettre en œuvre un processus de développement axé sur la création de l'emploi ou de revenus pour les populations et une faisabilité commerciale (un investissement commercial). Le lien entre ces deux notions a fait ses preuves dans beaucoup de pays dans le monde. On cherche ces solutions en Afrique aussi. Le Faade est une initiative de haute importance issue du rapport de la Commission pour l'Afrique 2006. Mais notre contribution est vraiment substantielle. On peut octroyer des dons et des prêts à intérêt nul pour contribuer à un investissement d'une compagnie privée mais à des conditions très strictes et concurrentielles. Le fonds est en train d'organiser une série de concurrences qui ne sont ouvertes qu'aux entreprises à but lucratif et aux projets innovateurs en Afrique. On cherche à cet effet des entreprises bien établies avec la capacité de proposer elles-mêmes leurs projets. Elles doivent avoir une bonne réputation parce que nous travaillons avec des fonds publics fournis par des bailleurs de fonds. Le maximum qu'on peut apporter pour le financement des projets est de 50% du coût global avec des conditions assez favorables pour le secteur privé. Ainsi le Faade fournit des dons et des prêts à hauteur d'un minimum de 250.000 dollars US (125 millions de Fcfa) et d'un maximum de 1,5 million de dollars US (750 millions de Fcfa). Mais on peut atteindre 3 millions de dollars US (1,5 milliard de Fcfa) avec les entreprises à moyenne et grande échelle avec un délai maximum de remboursement de 6 ans et les appels d'offres prennent cinq à six mois. Il ne s'agit pas des petites structures qui ne peuvent pas mobiliser ce capital. Ce n'est pas non plus les compagnies multinationales parce qu'elles travaillent sur la base de plusieurs dizaines de millions de dollars dans leurs investissements. Au jour d'aujourd'hui le fonds a ciblé 13 pays dont le Ghana, l'Afrique du Sud, le Kenya, la Tanzanie, le Mozambique,…
• Eu égard aux pays ayant bénéficié du soutien du Faade, on a le sentiment que vous êtes plus concentré dans les pays anglophones hormis des Etats comme le Mali et le Burkina. Est-ce à dire que les pays francophones sont moins entreprenants?
Au début de la création du Faade, on a essayé de se concentrer sur des pays avec un secteur privé déjà bien établi. Mais finalement, on a décidé d'en faire un fonds panafricain. Cela veut dire qu'il s'ouvre désormais à tous les pays africains anglophones, francophones et tous les autres. Maintenant on cherche à faire un bilan entre les pays francophones et anglophones. Il faut avouer qu'en Afrique de l'Ouest, le secteur privé a une nature différente de celle des Etats anglophones. Il manque un certain dynamisme et il est très étroit ici. La base économique est très faible. Si on compare les économies d'ici à celles d'un pays comme le Kenya ou l'Afrique du Sud, c'est bien clair qu'il y a une grande différence.
• Est-ce qu'il n'y a pas une discrimination quelque part quand vous dites que le fonds ne s'intéresse qu'aux grandes entreprises. Pourtant, un pays comme la Côte d'Ivoire qui sort d'une crise et dont les Pme/Pmi sont éprouvées, a besoin de développer ce secteur également…
On cherche à identifier les secteurs à valeur ajoutée en comparaison avec tous les autres programmes des bailleurs de fonds. Parce que les institutions comme la Bad, le Fida, le Cde pour ne citer que celles-ci, tout le monde se dirige vers les petites compagnies mais les effets de développement sont encore moindres. Donc dans l'analyse, il faut bien comprendre que les grandes entreprises peuvent apporter le développement si elles font des investissements à grande échelle. On essaie de les stimuler pour y arriver. Il faut préciser que le but du Faade est d'appuyer les entreprises du secteur privé afin de leur permettre de formuler et de tester des idées d'affaires neuves et innovatrices dans les domaines des agro-industries et des services financiers ruraux en Afrique. Il s'agit de prouver qu'il est possible d'utiliser les fonds des donateurs en partenariat avec les sociétés privées pour améliorer les conditions de vie des populations dans le continent et réduire la pauvreté dans les zones rurales.
• Le fonds s'intéresse beaucoup plus au secteur agricole. Or le constat en Côte d'Ivoire, c'est que ce secteur primaire appartient généralement aux petits exploitants. Pourtant vos investissements ne visent que les grandes entreprises. Il n'y a-t-il pas dichotomie ?
Il est utile d'apporter certaines précisions à la mission assignée au Fonds. Ce n'est pas que nous voulons soutenir le secteur rural d'emblée. Mais il faut indiquer que dans ce secteur il y a des entreprises qui interviennent dans la chaîne de valeur pour aider à transformer les matières premières agricoles. Ce sont ces entreprises qui peuvent challenger pour ce fonds. C'est une compétition au niveau de toute l'Afrique. C'est-à-dire les entreprises dans les pays africains capables d'avoir des projets novateurs (la capacité à les exécuter) à grande intensité de transformation, qui ont un impact sur le développement et qui peuvent aider le monde rural à émerger. Ces entreprises doivent faciliter les changements systémiques. C'est-à-dire travailler dans la chaîne de valeur avec d'autres partenaires surtout pour les petites entreprises qui doivent aller au regroupement pour accroître leurs chances. Il y a des potentialités en Côte d'Ivoire. Si on prend le cas du Zimbabwe avant l'année 2000, le secteur privé a dirigé l'agriculture en lui donnant une dimension commerciale. Cela a été un grand succès. Ce pays arrivait à exporter massivement ses produits. Mais les changements politiques ont affecté négativement cet élan. C'est le cas au Nord du Cameroun où le projet de production de sorgho avec la société Guiness qui a pris en compte 10.000 petits paysans et au Ghana le projet de chaîne de valeur des maïs de l'entreprise Yara international avec 15.000 petits producteurs. Cela montre que l'échelle est plus grande et plus importante avec les grandes compagnies.
• Vous avez indiqué tantôt que le Faade ouvre une série de concurrences entre les entreprises. Or vous savez qu'en la matière la compétitivité reste un élément déterminant. Mais pour cela, il faut un environnement propice aux affaires. Qu'est-ce que vous faites dans ce sens ?
C'est juste. Mais ce n'est pas notre tâche première. C'est vraiment pour que d'autres partenaires puissent se concentrer sur ce volet. D'ailleurs nous en cherchons afin qu'ils s'occupent spécifiquement de l'amélioration du climat des affaires et qu'ils prennent part dans notre programme.
• Au niveau de l'appel d'offres, il faut cinq à six mois d'attente pour les entreprises. Ceci n'est pas trop contraignant ?
En comparaison avec d'autres organisations que je n'ose pas mentionner, six mois, c'est vraiment bref. C'est un délai vraiment acceptable. En général la plupart des organisations ou bailleurs qui sont dans ce créneau d'appui au secteur privé, ont des délais largement au-dessus de six mois. C'est donc un point fort pour le Faade.
• Quelles sont les chances pour le secteur privé ivoirien ?
Il y avait un secteur privé fort en Côte d'Ivoire avant le coup d'Etat de 1999 et les évènements politiques qui ont eu lieu après. Cela ne veut pas dire que ce secteur privé ne peut pas se ressusciter. Il y a encore en Côte d'Ivoire des compagnies bien capables de discuter des projets, qui peuvent trouver des financements et qu'on peut assister avec notre fonds.
Interview réalisée par Cissé Cheick Ely