La récente sortie de monsieur Anaky Kobena, président du MF A, à la télévision nationale vient encore une fois poser les problèmes cruciaux auxquels la démocratie en Afrique en général et en Côte d'Ivoire, en particulier, est confrontée. II s'agit d'une part, de la culture politique même des acteurs de cette démocratie et de la tendance des africains à vouloir coûte que coûte régler les conlEts inhérents au jeu démocratique par les méthodes de “ l'arbre à palabre”, d'autre part. Avant de développer ces points, il faut d'abord saluer et encourager la célérité et la fermeté avec lesquelles le gouvernement de la république a réagi face à ces propos irresponsables.
De la culture politique de certains acteurs de la démocratie en Côte d'Ivoire
Depuis que Dramane Ouattara a introduit la violence verbale et physique comme moyen d'expression politique en Côte d'Ivoire (n'en déplaise à ses partisans et inconditionnels, les faits et l'histoire l'étayent suffisamment : il y a eu d'abord les “je vais frapper ce pouvoir, et il va tomber” ; «je vais rendre ce pays ingouvernable», «on va mélanger ce pays », et comme suite logique, la violence physique contre l'Etat en 2002 avec la rébellion), certaines catégories d'acteurs de notre jeune démocratie veulent en faire non l'exception, mais la normalité. On veut banaliser la violence pour que l'ivoirien s'en accommode. Mais la violence, ce n'est pas la culture de l'IVOIRIEN!
C'est le politologue américain Gabriel Almond qui a relevé le premier, avec son compatriote S. Verba, l'importance de la culture civique et politique de chaque nation pour le développement de son système politique. En effet, dans leur livre The Civic Culture, publié en 1963 et qui a connu un succès planétaire, analysant les causes du succès ou de J'échec des jeunes démocraties qui ont émergé avant la 2éme Guerre Mondiale, ils vinrent à la conclusion que c'est la culture civique nationale qui fait la diffërence.
C'est pourquoi de telles dérives ne peuvent être appréhendées et jugées qu'en rapport avec la dose de culture civique qui les sous-tend. Anaky fut certainement un opérateur économique prospère. Mais quand on n'a pas de conviction idéologique et qu'on a atterri cn politique un peu par dépit et vengeance comme il l'a fait, on ne peut pas se défaire de sa culture de boutiquier, de marchand. Cette culture ne peut évidemment s'accommoder de la démocratie, qui est adversité dans les idées, contradictions dans le respect des lois et des institutions. Ses intérêts marchands sont-ils menacés par Houphouët, qu'il le quitte pour rejoindre Gbagbo. Les premières adversités apparaissent-elles au sein du FPI, qu'il s'éloigne de Gbagbo.
Si Anaky peut appeler publiquement à l'insurrection populaire, ce n'est point parce qu'il est courageux, mais bien parce qu'il lui manque cette culture civique et politique qui fonde tout homme politique. Jean Marie Le Pen a beau haïr Sarkozy en France, mais il n'appellerait jamais le peuple à renverser son adversaire politique, par culture civique. De même Christophe Blocher, le leader de l'extrême droite en Suisse, n'a jamais été limité dans sa liberté d'opinion et d'expression, mais jamais il a demandé le renversement de l'ordre constitutionnel suisse, parce qu'il a de la culture civique ! Pour rester collé à la Côte d'Ivoire, sachez que si à l'époque le FPI de Laurent Gbagbo pouvait collaborer avec le RDR de Djény Kobenan, c'était parce qu'on avait en Côte d'Ivoire deux leaders de grande culture politique.
Mais ce manque de culture ne concerne pas que les semblants de leaders politiques comme Anaky. C'est aussi la plaie de la presse ivoirienne, considérée comme l'une des institutions de la démocratie moderne. Le traitement que certains groupes de presse ont fait de cette sortie d'Anaky en dit long sur leur culture civique. Le groupe Nord-Sud, pour ne citer que ce journal, fait un reportage de l'événement au lendemain de l'arrestation d'Anaky en insistant sur son arrestation. Pourquoi il a été arrêté, n'est visiblement pas aussi important aux yeux du journal de la rébellion. Comment en effet, de simples propos d'un individu à la télévision peuvent-ils émouvoir, si on a soi-même fait pire que parler? Là aussi c'est le rapport à la culture civique qui permet de comprendre l'attitude de nos journalistes d'inspiration bouakéenne.
De la tendances des africains à appliquer les méthodes de l'arbre à palabre pour régler les conflits de la démocratie
Je voudrais d'emblée lever toute équivoque: la démocratie ne peut fonctionner effectivement que si elle est adaptée aux réalités locales et non copiée aveuglement sur le modèle occidental. L'inde, l'une des plus grandes démocraties, pour ne pas dire la plus grande du monde, est l'exemple parfait de cette adaptation. Mais cette adaptation ne doit pas dévoyer les principes fondateurs de la culture démocratique. J'appelle «méthodes de l'arbre à palabre», la recherche des voies de la tradition africaine là où Ja force du droit moderne doit prévaloir pour affirmer l'autorité de l'Etat moderne auquel notre pays aspire. Il y aura certainement toujours des problèmes que seul l'usage de la voie coutumière peut régler dans nos pays d'Atrique. C'est d'ailleurs là notre avantage comparatif par rapport à l'occident.
Toutefois, je voudrais faire remarquer que si Anaky peut tenir de tels propos publics, c'est parce qu'il sait qu'un certain Kobenan Adjoumani, qui avait nommément cité le président Gbagbo dans le renversement de Bédié, avait été purement et simplement pardonné, suite à l'intervention d'une délégation des notables de sa région chez le président Gbagbo. La condamnation judiciaire avait alors été ignorée pour fàire place à l'émotion de la tradition.
Autre exemple, lorsque la junte militaire arrive au pouvoir en 1999, elle constate des détournements massifs des fonds de l'Etat au profit de châteaux aux poignées en or et aux salles de bain parées de pièces de 250 FCF A. Elle lance alors des procédures judiciaires contre le président Bédié. Plus tard, au nom du forum de réconciliation nationale, les affàires sont classées, sans que l'affaire soit élucidée pour la postérité. Quels enseignements voulonsnous que les auteurs de tels actes passibles de peines et le peuple tirent de tels an1algames? Quels acquis culturels voulons-nous cultiver, si l'on ne veut pas sanctionner pour marquer la conscience collective nationale?
Tant qu'il y aura ce genre d'amalgames, on aura toujours des déculturés politiques comme Anaky Kobena, Konan Bertin de la jeunesse du PDcr et autres qui croient que la haine et la rage qu'un « leader politique» nourrit l'affranchissent de la loi dans une démocratie.
On avait laissé Dramane Ouattara déverser sa haine et sa rage, IMPUNEMENT, un peu à la «je m'en fous ». Aujourd'hui, nous nous sommes «retrouvés au village de si je savais», pour paraphraser Pat Sako et ses amis. C'est pourquoi, la sanction judiciaire pour l'incivisme d'Anaky devrait être à la hauteur de la haine viscérale qui a envahi son visage et rougi ses yeux dans les images rapportées par la presse de notre pays, pour que vive notre démocratie!
Laurent Hodio Citoyen ivoirien résidant en Suisse: hodiolaurent(à)hotmai l.com
De la culture politique de certains acteurs de la démocratie en Côte d'Ivoire
Depuis que Dramane Ouattara a introduit la violence verbale et physique comme moyen d'expression politique en Côte d'Ivoire (n'en déplaise à ses partisans et inconditionnels, les faits et l'histoire l'étayent suffisamment : il y a eu d'abord les “je vais frapper ce pouvoir, et il va tomber” ; «je vais rendre ce pays ingouvernable», «on va mélanger ce pays », et comme suite logique, la violence physique contre l'Etat en 2002 avec la rébellion), certaines catégories d'acteurs de notre jeune démocratie veulent en faire non l'exception, mais la normalité. On veut banaliser la violence pour que l'ivoirien s'en accommode. Mais la violence, ce n'est pas la culture de l'IVOIRIEN!
C'est le politologue américain Gabriel Almond qui a relevé le premier, avec son compatriote S. Verba, l'importance de la culture civique et politique de chaque nation pour le développement de son système politique. En effet, dans leur livre The Civic Culture, publié en 1963 et qui a connu un succès planétaire, analysant les causes du succès ou de J'échec des jeunes démocraties qui ont émergé avant la 2éme Guerre Mondiale, ils vinrent à la conclusion que c'est la culture civique nationale qui fait la diffërence.
C'est pourquoi de telles dérives ne peuvent être appréhendées et jugées qu'en rapport avec la dose de culture civique qui les sous-tend. Anaky fut certainement un opérateur économique prospère. Mais quand on n'a pas de conviction idéologique et qu'on a atterri cn politique un peu par dépit et vengeance comme il l'a fait, on ne peut pas se défaire de sa culture de boutiquier, de marchand. Cette culture ne peut évidemment s'accommoder de la démocratie, qui est adversité dans les idées, contradictions dans le respect des lois et des institutions. Ses intérêts marchands sont-ils menacés par Houphouët, qu'il le quitte pour rejoindre Gbagbo. Les premières adversités apparaissent-elles au sein du FPI, qu'il s'éloigne de Gbagbo.
Si Anaky peut appeler publiquement à l'insurrection populaire, ce n'est point parce qu'il est courageux, mais bien parce qu'il lui manque cette culture civique et politique qui fonde tout homme politique. Jean Marie Le Pen a beau haïr Sarkozy en France, mais il n'appellerait jamais le peuple à renverser son adversaire politique, par culture civique. De même Christophe Blocher, le leader de l'extrême droite en Suisse, n'a jamais été limité dans sa liberté d'opinion et d'expression, mais jamais il a demandé le renversement de l'ordre constitutionnel suisse, parce qu'il a de la culture civique ! Pour rester collé à la Côte d'Ivoire, sachez que si à l'époque le FPI de Laurent Gbagbo pouvait collaborer avec le RDR de Djény Kobenan, c'était parce qu'on avait en Côte d'Ivoire deux leaders de grande culture politique.
Mais ce manque de culture ne concerne pas que les semblants de leaders politiques comme Anaky. C'est aussi la plaie de la presse ivoirienne, considérée comme l'une des institutions de la démocratie moderne. Le traitement que certains groupes de presse ont fait de cette sortie d'Anaky en dit long sur leur culture civique. Le groupe Nord-Sud, pour ne citer que ce journal, fait un reportage de l'événement au lendemain de l'arrestation d'Anaky en insistant sur son arrestation. Pourquoi il a été arrêté, n'est visiblement pas aussi important aux yeux du journal de la rébellion. Comment en effet, de simples propos d'un individu à la télévision peuvent-ils émouvoir, si on a soi-même fait pire que parler? Là aussi c'est le rapport à la culture civique qui permet de comprendre l'attitude de nos journalistes d'inspiration bouakéenne.
De la tendances des africains à appliquer les méthodes de l'arbre à palabre pour régler les conflits de la démocratie
Je voudrais d'emblée lever toute équivoque: la démocratie ne peut fonctionner effectivement que si elle est adaptée aux réalités locales et non copiée aveuglement sur le modèle occidental. L'inde, l'une des plus grandes démocraties, pour ne pas dire la plus grande du monde, est l'exemple parfait de cette adaptation. Mais cette adaptation ne doit pas dévoyer les principes fondateurs de la culture démocratique. J'appelle «méthodes de l'arbre à palabre», la recherche des voies de la tradition africaine là où Ja force du droit moderne doit prévaloir pour affirmer l'autorité de l'Etat moderne auquel notre pays aspire. Il y aura certainement toujours des problèmes que seul l'usage de la voie coutumière peut régler dans nos pays d'Atrique. C'est d'ailleurs là notre avantage comparatif par rapport à l'occident.
Toutefois, je voudrais faire remarquer que si Anaky peut tenir de tels propos publics, c'est parce qu'il sait qu'un certain Kobenan Adjoumani, qui avait nommément cité le président Gbagbo dans le renversement de Bédié, avait été purement et simplement pardonné, suite à l'intervention d'une délégation des notables de sa région chez le président Gbagbo. La condamnation judiciaire avait alors été ignorée pour fàire place à l'émotion de la tradition.
Autre exemple, lorsque la junte militaire arrive au pouvoir en 1999, elle constate des détournements massifs des fonds de l'Etat au profit de châteaux aux poignées en or et aux salles de bain parées de pièces de 250 FCF A. Elle lance alors des procédures judiciaires contre le président Bédié. Plus tard, au nom du forum de réconciliation nationale, les affàires sont classées, sans que l'affaire soit élucidée pour la postérité. Quels enseignements voulonsnous que les auteurs de tels actes passibles de peines et le peuple tirent de tels an1algames? Quels acquis culturels voulons-nous cultiver, si l'on ne veut pas sanctionner pour marquer la conscience collective nationale?
Tant qu'il y aura ce genre d'amalgames, on aura toujours des déculturés politiques comme Anaky Kobena, Konan Bertin de la jeunesse du PDcr et autres qui croient que la haine et la rage qu'un « leader politique» nourrit l'affranchissent de la loi dans une démocratie.
On avait laissé Dramane Ouattara déverser sa haine et sa rage, IMPUNEMENT, un peu à la «je m'en fous ». Aujourd'hui, nous nous sommes «retrouvés au village de si je savais», pour paraphraser Pat Sako et ses amis. C'est pourquoi, la sanction judiciaire pour l'incivisme d'Anaky devrait être à la hauteur de la haine viscérale qui a envahi son visage et rougi ses yeux dans les images rapportées par la presse de notre pays, pour que vive notre démocratie!
Laurent Hodio Citoyen ivoirien résidant en Suisse: hodiolaurent(à)hotmai l.com
