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Politique Publié le samedi 25 avril 2009 | Le Temps

Autopsie d`une manipulation : Affaire Noël à Abidjan

Un documentaire sur le coup tordu que préparait le putschiste Ibrahim Coulibaly dit Ib, contre le pouvoir d`Abidjan, en décembre 2007, est désormais à l`écran.

Il faut, pour s`aventurer dans le maquis touffu et fangeux des coups tordus franco-africains, une foulée sûre et du souffle. Mieux vaut aussi avoir l`oreille fine, l`œil aux aguets et l`estomac pas trop délicat. Il faut surtout, sous peine de s`embourber, placer ses pas dans ceux de guides opiniâtres. Jean-Paul Billault, Emmanuel Razavi et Jean-Pierre Canet, les auteurs du documentaire label Capa diffusé ce mercredi, sur Planète, forment à cet égard, un trio de sherpas aguerri. Intitulé " Manipulations sous haute tension ", le long trekking tropical -près de deux heures- qu`ils cornaquent, fruit d`une année d`enquêtes, vaut le détour.
Le 27 décembre 2007, un Français nommé Jean-Paul Ney est arrêté devant un abribus d`Abidjan, non loin du siège de la Radio-Télévision ivoirienne (Rti). Les policiers qui l`interpellent dénichent dans le double fond de son sac un trésor : des heures de bandes vidéo, chronique des préparatifs d`un coup d`Etat dirigé selon toute vraisemblance contre le président Laurent Gbagbo (lire le récit de Pascal Ceaux dans L`Express du 11 mars 2009). Ney se dit journaliste. Même si sa fascination (un rien puéril) pour le fusil d`assaut, les soldats d`élite et les mercenaires le conduit parfois, de son propre aveu, à flirter avec " la ligne rouge ", voire à la franchir. Deux personnages émergent du " making-of " putschiste filmé par le reporter en treillis : d`abord, Ibrahim Coulibaly, alias Ib, ex-figure de proue de la rébellion nordiste ivoirienne et comploteur impénitent; ensuite, Jean-François Cazé, ingénieur en informatique saisi par le démon de la barbouzerie subsaharienne.
Au vu des rodomontades de ce tandem, on croit au canular ou au jeu de rôles d`une bande de pieds-nickelés. Tentant, mais sans doute simpliste. Car les images, dont les extraits diffusés sur le web font un malheur, ne sont que le prologue d`une formidable " manip` " à géométrie variable, en apparence orchestrée par Cazé. Or, Billault, Razavi et Canet vont s`attacher à décrypter les manœuvres d`un acteur qui, de confidences en menaces, de mensonges en aveux, tente de les " balader " puis de s`arroger le beau rôle. De fait, le cerveau supposé du complot avorté n`est pas que ce quadra tantôt hâbleur, tantôt pathétique : il finit par mouiller une poignée de pontes du renseignement français, dont à l`évidence il a fréquenté certains, ou tel diplomate de haut-vol. De même, on apprend que la " bande de Cazé " a ses habitudes dans le cabinet parisien d`un avocat familier des turpitudes de la Françafrique. De là à imaginer le " coup " téléguidé par un cabinet noir de la République…
On se calme. L`équipe de Capa a la sagesse de s`en tenir aux faits vérifiables pour échafauder deux autres scénarii : un complot manipulé par le clan Gbagbo afin d`embarrasser l`ancienne puissance coloniale, ou une opération associant des Français et des Ivoiriens désireux de torpiller le rapprochement tout juste ébauché entre Paris et Abidjan. Une évidence : l`affaire embarrasse autant sur les bords de la Seine que sur les rivages de la lagune Ebrié. Et elle entrave d`indéchiffrable desseins : quelques heures après qu`Emmanuel Razavi eut joint pour la première fois par téléphone Jean-Paul Ney, reclus dans sa cellule de la Maison d`arrêt et de correction d`Abidjan (Maca), où il croupit encore aujourd`hui, une équipe de gros bras a tenté de pénétrer en force dans les locaux de son agence dijonnaise. Et il ne s`agissait là que de l`épisode inaugural d`une longue série d`intimidations. Peine perdue : le même Razavi est parvenu, quelques mois plus tard, à introduire une mini-caméra dans l`enceinte de la Maca pour y enregistrer les propos de Ney.
On l`aura compris : ce documentaire haletant, et parfois vertigineux, ne dissipe pas toutes les zones d`ombres d`une énigme à tiroirs. Mais il a le mérite d`illustrer la vocation du journaliste telle que la dépeignait Albert Londres : passer la plume dans la plaie.

Capa.

NB : le chapeau est de la rédaction
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