Certitude ou annonce populiste? Laurent Gbagbo, le président sortant de la Côte d’Ivoire, annonçait l’année dernière, sa volonté à «aller vite, vite, vite aux élections». Pour cela, il a fait placarder des panneaux dans la capitale économique et dans les villes de l’intérieur du pays. Par ailleurs, il a pris un décret fixant la prochaine présidentielle au 29 novembre prochain. Alors qu’on était en droit de penser que le scrutin aurait lieu à la date indiquée, que des velléités de report se font sentir dans la démarche du camp présidentiel. En effet, alors que le Premier ministre, Guillaume Kigbafori Soro et la Commission Electorale Indépendante (CEI) ont sonné la fin du processus d’identification et d’enrôlement, des voix et relais de la refondation font une campagne insidieuse, pour réclamer sa prorogation. L’argument consiste à dire que des Ivoiriens ne se sont pas fait identifier et que cela est une preuve d’exclusion. Par ailleurs, pendant sa récente tournée à l’Ouest du pays, Laurent Gbagbo a levé un coin de voile sur ses réelles intentions, par des propos sans équivoque: «allons- y doucement, doucement, pour faire de bonnes élections». Les Ivoiriens ont commencé dès lors à douter du discours du grand chef, surtout qu’il se susurre que des membres de la galaxie dite patriotique ont été instrumentalisés, pour réclamer un délai supplémentaire pour la fin de l’identification. A la vérité, il s’agit d’une stratégie du pouvoir pour reculer la date de la présidentielle. La raison est toute simple. En dépit des cris d’orfraie et des proclamations, la refondation et son chef sont convaincus de perdre la face le 29 novembre prochain. Il faut donc chercher des subterfuges pour demeurer encore aux affaires sans élection. Le grand chef a beau dire qu’il est «un enfant des élections», il n’arrive pas à convaincre ses compatriotes. Ses propos sonnent comme un slogan sans consistance. Historiquement, cela n’est pas valable. Il n’a participé véritablement qu’à une seule élection. Celle de 1990 où il a perdu contre Félix Houphouët-Boigny, le bâtisseur de la Côte d’Ivoire moderne. Les faits sont bien vivaces dans les esprits. En 1995, Laurent Gbagbo n’est pas allé au scrutin. Dans le cadre du Front Républicain, il a boycotté activement la compétition, laissant le Président Bédié affronter le candidat du parti ivoirien des Travailleurs, Francis Wodié. En octobre 2000, il n’y a pas eu de vraies élections en Côte d’Ivoire. Avec l’exclusion des principaux candidats que sont Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié. La peur d’affronter ces deux personnalités a amené Gbagbo à entraîner le Général Robert Guéi dans une voie sans issue. Le candidat du Front Populaire Ivoirien l’a dit ouvertement aux Ivoiriens : «c’est moi qui ai demandé au Général Guéi de faire retirer la candidature de Ouattara… Si la candidature d’Alassane Ouattara est maintenue, je n’hésiterai pas à faire descendre mes partisans dans la rue». Peut-on raisonnablement dire que Laurent Gbagbo est «un enfant des élections?» Assurément non! Pour tout dire, la psychose est réelle chez le leader de la refondation. Selon de bonnes sources, pour mesurer ses chances à la présidentielle, Laurent Gbagbo a fait diligenter un sondage. Les résultats ont été un véritable désastre pour le camp présidentiel. Si la présidentielle se tient, Laurent Gbagbo viendrait en troisième position, derrière les deux candidats du RHDP, Ouattara et Bédié. Ce qui revient à dire qu’il ne serait pas au second tour, qui se déroulera en famille, entre les enfants d’Houphouët-Boigny, qui viennent de participer à la cérémonie de remise du prix portant l’illustre nom du premier président ivoirien, décerné cette année au président brésilien, Lula. Par ailleurs, dans la seule partie gouvernementale, Gbagbo viendrait également en troisième position avec 26% des voix contre 46% au numéro un des Républicains, Alassane Ouattara. Pour ces chiffres, la lecture à faire coule de source. Les Ivoiriens, à l’usure du temps, ont été désintoxiqués des mensonges et menteries collés à l’ancien Premier ministre ivoirien. Aussi, il faut y lire la désillusion des jeunes dits «patriotes», qui ont fini par connaître la vraie nature du régime FPI. Voilà en gros, les raisons objectives de la frénésie qui s’empare depuis, du camp présidentiel. Il fait donc des mains et des pieds, pour retarder vainement la marche vers les élections. Le président français Nicolas Sarkozy et son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner ont bien perçu le manège, qui ont appelé au respect du chronogramme électoral.
Bakary Nimaga
Bakary Nimaga