On l`appelait “Doux-amer”. De son vrai nom Tiéhé Vincent, cet ex-agent de “Vigassitance” à Abidjan est né en 1967 à Boué 2, dans la sous-préfecture de Kouibly, de Tiéhé Bernard et de Yré Madeleine. Il est mort des suites d`une maladie qu`il a traînée après la bastonnade des marcheurs d`octobre 2000 auxquelles il s`était joint. Après avoir abandonné son fusil d`assaut sans cartouches dans un immeuble. Il a eu la vie sauve, ce jour là, parce qu`il a dit qu`il était venu marcher pour la démocratie.
C`est dans un état lamentable que “Doux- amer” est parti de Boribana Sébroko, chez ses amis, pour regagner Yopougon. Il a voulu parler pour que l`opinion sache. Il a même fait visiter certains endroits à l`enquêteur qui a recueilli son témoignage.
“Pensant qu`un jour il allait être president de la Côte d`Ivoire, Ado étant au Fmi, a demandé à son ex- garde de corps, le karatéka Ib de recruter les hommes qu`il fallait pour constituer une milice. Il y avait des Ivoiriens, des Maliens, des Guinéens, des Burkinabè et des combattants du Ruf de la Sierra-Leone. Ne pouvant pas directement attaquer le régime de Bédié, Ib et ses amis militaires ont profité des revendications salariales des militaires venant de la Centrafrique pour chasser Bédié. Ils ont aussi pris la poudrière en un temps record. Elle a été vidée et Ib s`est désigné chef de sécurité du Général Guéi. Ces jeunes militaires ont utilisé et manipulé les armes de toute sorte. Leurs parents, amis et connaissance en ont reçu. Et surtout ils ont équipé le Rdr. Les ministres Rdr voulaient tout de suite que la transition prenne fin pour que Ado s`installe. Aidés de Ib et ses amis, ils travaillent pour le Rdr. Gbagbo a déclaré que c`était un gouvernement Rdr et les militaires qui voulaient donner des ordres aux Généraux, ont été rappelés à l`ordre. Les unités comme le Pc- crise qu`ils voulaient transformer en cabinet de recrutement et de règlement de compte ont été supprimées par le Général.
Les complots contre Guéi
Pensant être équipés pour attaquer un bataillon et chasser un régime du pouvoir, les jeunes militaires disaient que Guéi était l`intérimaire et Ado le vrai président. Tous les jours, ils étaient avec Ado et lui rendaient compte. Militairement, on l`avait équipé. Tous les matins, il recevait des bulletins quotidiens d`informations. C`est le commissaire Camara Yaya qui le faisait. On retirait les informations secrètes concernant la déstabilisation du régime Guéi. Mais le Rdr ignorait que Guéi recevait le BQI en entier avant Ado, grâce à sa cellule d`écoute. Ce qui l`a sauvé des multiples tentatives. Ado disposait des talkies- walkies de l`armée et de la police. Son dispositif de sécurité écoutait tous les messages. Et grâce au Lt Traoré Kader (garde de corps de Palenfo), on connaissait tous les déplacements du président Guéi. Guéi ayant su que ses jeunes gens écoutaient plus Ado, a décidé de confier sa sécurité aux hommes de Boka Yapi. C`est comme ça que les jeunes militaires ont fait bloc derrière Ado. On nous formait militairement pour la prise du pouvoir. On n`avait pas de lieu fixe d`entraînement. On était 138. Mais 8 sont morts lors de la formation. La sélection était dure. On devait profiter des moindres troubles et certains militaires des pays limitrophes devaient nous aider. C`est ainsi que le lundi 27 mars 2000, entre 9 heures et 10 heures, un détachement guinéen est entré en action à Daloa, lors de la mutinerie des militaires. Malheureusement, quatre ont été arrêtés. Il s`agissait de Cissé Kabiné, Sow Ibrahim, Konaté Moloulou et Cissé Brahamane. Ils étaient tous des recrues de l`armée guinéenne. Pour entrer en Côte d`Ivoire, ils ont porté des tenues de dozo, avec la caution des généraux Coulibaly et Palenfo. Ils ont travaillé aux côtés des Forces de l`ordre dans nos corridors. Ils ont étudié leur habitude et évalué leur armement avant de quitter les corridors, sur plainte de Gbagbo. Croyant que tout était calme, Guéi a entrepris des tournées d`explication sur le “Et” et le “Ou”. On a voulu faire du sensationnel. Il avait été décidé de tuer le Général à la fin de ses voyages, c`est-à-dire lors du dernier voyage en rentrant de Dabou. On jalonnait le tronçon Abidjan - Songon Agban en tenue de manœuvre agricole, puissamment armés. Mais les Renseignements généraux nous ont dénoncés.
Les manœuvres contre la constitution
Et lors du référendum, Coulibaly Auguste, pharmacien à Ouangolodougou, était chargé d`envoyer 20.000 Fcfa aux chefs de bureau et à leurs assistants, afin qu`ils désertent les bureaux et fassent disparaître les listings et les cartes d`électeurs, alors qu`il avait dit officiellement de voter Guéi. Le gouvernement proposait 2500F Cfa et le Rdr a distribué 20 000F Cfa. Il y a eu La Mercedes rouge hibou, sur l`ordre du général président. Il a décidé de se séparer de ses proches tels qu`Ib et ses amis en les affectant. Cela a créé un mécontentement et IB a été caché par son ami, un Libanais à Assinie, dans le domaine de son frère, propriétaire d`un magasin de jouets et d`une agence de voyage et de transit. Pour mettre leur famille à l`abri hors de la Côte d`Ivoire et pour avoir de la liquidité. Ib a ordonné à ses amis de vendre les véhicules de l`Etat. C`est ainsi que le Libanais a acheté la Pajero VB 3000 immatriculée 8954CX01 à 8 millions de F cfa, avec le permis de port d`arme N°2000-000-0235/100/SAM ; La Pajero V6 3000 immatriculée 2087CV01 à Abdalla Sakr à 8 millions de F cfa. Puis trois (3) autres 4x4, une Peugeot 605 et la Mercedes de IB. Ces voitures coûtent entre 30 et 32 millions de F CFA l`unité. Ce Libanais et ces deux fils devaient être des conseillers à la présidence, si d`Ado devenait président. Avec leur société de transit, il importait des armes pour nous ainsi, que du matériel militaire. Certains des nôtres et des dirigeants du Rdr voyageaient grâce à leur agence qui donnait gratuitement les billets et qui s`arrangeait à nous trouver des visas nécessaires. Une fois, chez le Libanais en zone 4, on a fêté la présidence prochaine d`Ado et le vieux a tué un mouton, le dimanche 10 septembre 2000, pour célébrer l`évènement. Comme les militaires prévoyaient l`attaque du domicile du président, ils ont demandé au vieux Libanais de quitter le pays, le jeudi 14 septembre 2000. Les 17 et 18 septembre 2000, le domicile du président a été attaqué. Mais avant de quitter la Côte d`Ivoire, IB a laissé 8 portables talkies- walkies à la famille Sakr. Ainsi, tous les jours, il composait les numéros de Ib où qu`il soit et à l`aide de leurs cellulaires, le branchaient sur les réseaux de la police et de l`armée ivoirienne. En vue de cafouillage dans le pays, Ib et les Sakr ont distribué à leur domicile, des mitraillettes, des pistolets, des fusils d`assaut, des grenades et des munitions à des Libanais pour leur défense. On nous appris à infiltrer les marches, (comment paniquer la population au maximum), les rumeurs d`empoisonnement, les attaques de barrages, des postes de police et des camps. Ces cours nous étaient donnés par des commissaires de police. S`agissant des centres de distribution de courant et de traitement eaux, des hauts responsables de ces services membres du Rdr devaient s`en charger. Exemple, plonger la ville dans l`obscurité pour permettre la progression des troupes. Il fallait aussi mettre en place rapidement des éléments et le transport des armes. Des instructeurs nous apprenaient le démontage et le montage des armes, l`exercice au tir. On partait aux champs de tir de la police et de l`armée. Abou Touré concordait les stratégies. On était à l`écoute 24h/24 et on avait un sac où mettre nos tenues de dozo et les treillis de l`armée, selon la circonstance.
Le coup du 24-25 octobre 2000
A l`annulation de la candidature d`Ado à la présidentielle, un message a été passé et nous nous sommes regroupés pour prendre les consignes. On a commencé à effrayer la population avec l`annonce de présence d`objets dangereux, d`explosifs, d`eau empoissonnée, des braquages des personnalités. L`atmosphère était mauvaise, la population paniquait. Le président a sécurisé les sites Cie et Sodeci. L`ex- Dg de la police, Alain Mouandou (Gouro) et le commissaire Tiolé (teint clair, Burkinabè d`origine) ont pris des caisses d`armes, des munitions et des grenades à la Sûreté pour nous les livrer. Une partie a été livrée à la résidence d`Ado et l`autre partie à Azaguié Blida au domicile de M`Gbo Loba Antoine, en service à la trésorerie à la Sicogie Mirador et propriétaire de la Corolla Toyota 2385CL01. Ce sont ces grenades qui ont été retrouvées sur Kaboré Jean Philippe, lors des troubles à Abidjan.
C`est à bord d`une Renault 4 que Ado et son épouse ont été déposés chez M`Gbo Loba. Le couple Ado y a passé 9 jours. Ils dormaient dans une chambre au sous- sol de Loba. Ado avait douze (12) portables cellulaires, un carton de puces et une quantité importante de cartes de recharge “Ivoiris “et” Telecel”. Sans problème, Ado appelait le monde entier. Et pour garder le silence, les chefs de famille ont reçu 1 500 000F cfa.
L`appel à l`insurrection
Le 24 octobre 2000, alors que Honoré Guié donnait les résultats du scrutin de la présidentielle, les hommes de Boka Yapi voyant Gbagbo vainqueur, l`ont enlevé pour le brutaliser et ils ont proclamé Guéi vainqueur. Les Ivoiriens, mécontents du résultat sont descendus dans la rue et Gbagbo, un moment, a déclaré être le vrai vainqueur et a demandé aux Ivoiriens de descendre dans la rue, et tout Abidjan s`est retrouvé au Plateau. Dans la confusion, nous sommes entrés en action et on a effectué la mise en place avec les voitures de nos complices corps habillés ; nous qui étions en civils nous étions éparpillés dans les immeubles avec des fusils d`assaut et ceux en tenue militaire étaient le long du boulevard de la Carena, de Sébroko au pont Houphouët- Boigny. La mise en place a été faite la nuit, quand les résultats traînaient. On devait tuer le moins possible et faire plusieurs blessés. On ne devait pas tirer par rafale, pour ne pas être vu. On devait se cacher. Notre but était d`accuser les hommes de Guéi et ensuite les militants du Fpi pour demander l`annulation de l`élection. Quand on a commencé à tirer, les marcheurs tombaient et les radios étrangères diffusaient l`information et disaient que les hommes de Guéi tiraient sur les marcheurs. On accentuait les tirs et la colère gagnait la population. Les militaires, la police et la gendarmerie, tous voulaient en finir avec la “brigade rouge” et Guéi. Le général et ses hommes se demandaient ce qui leur arrivait et qui avait monté ce coup pour leur faire perdre le pouvoir. Dans la nuit du 24 ou 25, il y a eu l`attaque à l`arme lourde. Ils ont compris qu`il fallait éviter un affrontement sanglant pour rien et ont préféré quitter Abidjan. C`est en voulant fuir qu`ils ont écrasé des gens sur leur passage. Sinon, ce n`était vraiment pas eux qui tiraient sur les marcheurs. Le bilan aurait dans ce cas été très lourd, puisqu`ils étaient 200, ce jour-là au Plateau, avec leurs Kalachnikovs bien cadencées. Les morts auraient atteint très facilement les 500. Certains tireurs parlaient anglais. C`étaient nos gars du Ruf, venus en renfort. Quand les radios ont annoncé le départ de Guéi et de ses hommes, d`Azaguié Ado a demandé aux militants de descendre dans les rues, le 26 octobre 2000. Et pour venger les dozos morts à Blockhaus et ceux tombés au Plateau, on tuait au fusil, à la machette, au gourdin. On volait et pillait tout sur notre passage. Nos complices corps habillés ont ramassé nos cadavres. Ceux en tenue de dozo et treillis ont été déshabillés, transportés pour une direction que j`ignore. Ils ont ensuite photographié ces cadavres et remis les photos à Ado qui les a remises à son journal. On a alors réclamé une enquête internationale. On n`avait pas peur parce qu`on nous disait qu`on avait Palenfo, Coulibaly et Ib avec nous. On nous faisait croire que Ib a comme épouse la fille du général N`Daw et que celui-ci ne pouvait jamais juger nos amis. C`est peut-être ce qui a expliqué la commission du tribunal militaire lors des procès des généraux Coulibaly et Palenfo. On disait aussi que le colonel Dosso ne donnerait jamais l`ordre aux avions d`attaquer. Ce qui s`est vérifié lors des attaques des 7 et 8 janvier 2001. Tous les véhicules 4x4 qu`on braquait ont constitué la colonne venue du Nord. Moi, j`ai été frappé par les marcheurs au Plateau. Je n`avais plus de minutions et j`ai dû abandonner mon arme pour infiltrer les marcheurs. Sur indication d`un gardien d`immeuble, j`ai été battu. Je dois mon salut au fait que j`ai déclaré que je n`étais pas rebelle, mais un marcheur pour la liberté. On m`a aidé et je suis rentré à Yopougon. C`est cette maladie que je traîne. Je ne pouvais pas me soigner parce que nous étions coupés d`avec nos “boss”. Eux-mêmes se cherchaient et ne voulaient plus qu`on les approche. Ils changeaient de domicile. Certains de nos amis étaient partis au Burkina et d`autres, en Europe.
On nous avait promis 50 millions de Fcfa chacun, des visas et bourses d`études. Ado a promis de supprimer la carte de séjour. La terre appartiendrait à celui qui allait la mettre en valeur. Les recrutements dans l`armée se feraient avec les jugements supplétifs ou les extraits de naissance. Il faisait rêver. C`est comme ça qu`on était motivé. Il y a eu mort d`hommes. C`est ce qui effraie le Rdr et Ado. Voilà ce qu`il faut dire aux parents des disparus. On leur fait croire le contraire. Les recrues ne se sont jamais battus pour l`Islam ou pour le Nord, mais pour l`argent et pour le luxe. On parlait de l`Islam et du Nord pour qu`ils soient motivés. Je tiens à préciser qu`un jour, le Burkina emportera la Côte d`Ivoire, parce que ce sont les évènements entre Burkinabè et Kroumen, en novembre 1999, qui ont motivé nos deux généraux et les jeunes des troupes à renverser Bédié. Je demande pardon à mes chers parents”.
Le Temps N°452
du jeudi 21 octobre 2004
C`est dans un état lamentable que “Doux- amer” est parti de Boribana Sébroko, chez ses amis, pour regagner Yopougon. Il a voulu parler pour que l`opinion sache. Il a même fait visiter certains endroits à l`enquêteur qui a recueilli son témoignage.
“Pensant qu`un jour il allait être president de la Côte d`Ivoire, Ado étant au Fmi, a demandé à son ex- garde de corps, le karatéka Ib de recruter les hommes qu`il fallait pour constituer une milice. Il y avait des Ivoiriens, des Maliens, des Guinéens, des Burkinabè et des combattants du Ruf de la Sierra-Leone. Ne pouvant pas directement attaquer le régime de Bédié, Ib et ses amis militaires ont profité des revendications salariales des militaires venant de la Centrafrique pour chasser Bédié. Ils ont aussi pris la poudrière en un temps record. Elle a été vidée et Ib s`est désigné chef de sécurité du Général Guéi. Ces jeunes militaires ont utilisé et manipulé les armes de toute sorte. Leurs parents, amis et connaissance en ont reçu. Et surtout ils ont équipé le Rdr. Les ministres Rdr voulaient tout de suite que la transition prenne fin pour que Ado s`installe. Aidés de Ib et ses amis, ils travaillent pour le Rdr. Gbagbo a déclaré que c`était un gouvernement Rdr et les militaires qui voulaient donner des ordres aux Généraux, ont été rappelés à l`ordre. Les unités comme le Pc- crise qu`ils voulaient transformer en cabinet de recrutement et de règlement de compte ont été supprimées par le Général.
Les complots contre Guéi
Pensant être équipés pour attaquer un bataillon et chasser un régime du pouvoir, les jeunes militaires disaient que Guéi était l`intérimaire et Ado le vrai président. Tous les jours, ils étaient avec Ado et lui rendaient compte. Militairement, on l`avait équipé. Tous les matins, il recevait des bulletins quotidiens d`informations. C`est le commissaire Camara Yaya qui le faisait. On retirait les informations secrètes concernant la déstabilisation du régime Guéi. Mais le Rdr ignorait que Guéi recevait le BQI en entier avant Ado, grâce à sa cellule d`écoute. Ce qui l`a sauvé des multiples tentatives. Ado disposait des talkies- walkies de l`armée et de la police. Son dispositif de sécurité écoutait tous les messages. Et grâce au Lt Traoré Kader (garde de corps de Palenfo), on connaissait tous les déplacements du président Guéi. Guéi ayant su que ses jeunes gens écoutaient plus Ado, a décidé de confier sa sécurité aux hommes de Boka Yapi. C`est comme ça que les jeunes militaires ont fait bloc derrière Ado. On nous formait militairement pour la prise du pouvoir. On n`avait pas de lieu fixe d`entraînement. On était 138. Mais 8 sont morts lors de la formation. La sélection était dure. On devait profiter des moindres troubles et certains militaires des pays limitrophes devaient nous aider. C`est ainsi que le lundi 27 mars 2000, entre 9 heures et 10 heures, un détachement guinéen est entré en action à Daloa, lors de la mutinerie des militaires. Malheureusement, quatre ont été arrêtés. Il s`agissait de Cissé Kabiné, Sow Ibrahim, Konaté Moloulou et Cissé Brahamane. Ils étaient tous des recrues de l`armée guinéenne. Pour entrer en Côte d`Ivoire, ils ont porté des tenues de dozo, avec la caution des généraux Coulibaly et Palenfo. Ils ont travaillé aux côtés des Forces de l`ordre dans nos corridors. Ils ont étudié leur habitude et évalué leur armement avant de quitter les corridors, sur plainte de Gbagbo. Croyant que tout était calme, Guéi a entrepris des tournées d`explication sur le “Et” et le “Ou”. On a voulu faire du sensationnel. Il avait été décidé de tuer le Général à la fin de ses voyages, c`est-à-dire lors du dernier voyage en rentrant de Dabou. On jalonnait le tronçon Abidjan - Songon Agban en tenue de manœuvre agricole, puissamment armés. Mais les Renseignements généraux nous ont dénoncés.
Les manœuvres contre la constitution
Et lors du référendum, Coulibaly Auguste, pharmacien à Ouangolodougou, était chargé d`envoyer 20.000 Fcfa aux chefs de bureau et à leurs assistants, afin qu`ils désertent les bureaux et fassent disparaître les listings et les cartes d`électeurs, alors qu`il avait dit officiellement de voter Guéi. Le gouvernement proposait 2500F Cfa et le Rdr a distribué 20 000F Cfa. Il y a eu La Mercedes rouge hibou, sur l`ordre du général président. Il a décidé de se séparer de ses proches tels qu`Ib et ses amis en les affectant. Cela a créé un mécontentement et IB a été caché par son ami, un Libanais à Assinie, dans le domaine de son frère, propriétaire d`un magasin de jouets et d`une agence de voyage et de transit. Pour mettre leur famille à l`abri hors de la Côte d`Ivoire et pour avoir de la liquidité. Ib a ordonné à ses amis de vendre les véhicules de l`Etat. C`est ainsi que le Libanais a acheté la Pajero VB 3000 immatriculée 8954CX01 à 8 millions de F cfa, avec le permis de port d`arme N°2000-000-0235/100/SAM ; La Pajero V6 3000 immatriculée 2087CV01 à Abdalla Sakr à 8 millions de F cfa. Puis trois (3) autres 4x4, une Peugeot 605 et la Mercedes de IB. Ces voitures coûtent entre 30 et 32 millions de F CFA l`unité. Ce Libanais et ces deux fils devaient être des conseillers à la présidence, si d`Ado devenait président. Avec leur société de transit, il importait des armes pour nous ainsi, que du matériel militaire. Certains des nôtres et des dirigeants du Rdr voyageaient grâce à leur agence qui donnait gratuitement les billets et qui s`arrangeait à nous trouver des visas nécessaires. Une fois, chez le Libanais en zone 4, on a fêté la présidence prochaine d`Ado et le vieux a tué un mouton, le dimanche 10 septembre 2000, pour célébrer l`évènement. Comme les militaires prévoyaient l`attaque du domicile du président, ils ont demandé au vieux Libanais de quitter le pays, le jeudi 14 septembre 2000. Les 17 et 18 septembre 2000, le domicile du président a été attaqué. Mais avant de quitter la Côte d`Ivoire, IB a laissé 8 portables talkies- walkies à la famille Sakr. Ainsi, tous les jours, il composait les numéros de Ib où qu`il soit et à l`aide de leurs cellulaires, le branchaient sur les réseaux de la police et de l`armée ivoirienne. En vue de cafouillage dans le pays, Ib et les Sakr ont distribué à leur domicile, des mitraillettes, des pistolets, des fusils d`assaut, des grenades et des munitions à des Libanais pour leur défense. On nous appris à infiltrer les marches, (comment paniquer la population au maximum), les rumeurs d`empoisonnement, les attaques de barrages, des postes de police et des camps. Ces cours nous étaient donnés par des commissaires de police. S`agissant des centres de distribution de courant et de traitement eaux, des hauts responsables de ces services membres du Rdr devaient s`en charger. Exemple, plonger la ville dans l`obscurité pour permettre la progression des troupes. Il fallait aussi mettre en place rapidement des éléments et le transport des armes. Des instructeurs nous apprenaient le démontage et le montage des armes, l`exercice au tir. On partait aux champs de tir de la police et de l`armée. Abou Touré concordait les stratégies. On était à l`écoute 24h/24 et on avait un sac où mettre nos tenues de dozo et les treillis de l`armée, selon la circonstance.
Le coup du 24-25 octobre 2000
A l`annulation de la candidature d`Ado à la présidentielle, un message a été passé et nous nous sommes regroupés pour prendre les consignes. On a commencé à effrayer la population avec l`annonce de présence d`objets dangereux, d`explosifs, d`eau empoissonnée, des braquages des personnalités. L`atmosphère était mauvaise, la population paniquait. Le président a sécurisé les sites Cie et Sodeci. L`ex- Dg de la police, Alain Mouandou (Gouro) et le commissaire Tiolé (teint clair, Burkinabè d`origine) ont pris des caisses d`armes, des munitions et des grenades à la Sûreté pour nous les livrer. Une partie a été livrée à la résidence d`Ado et l`autre partie à Azaguié Blida au domicile de M`Gbo Loba Antoine, en service à la trésorerie à la Sicogie Mirador et propriétaire de la Corolla Toyota 2385CL01. Ce sont ces grenades qui ont été retrouvées sur Kaboré Jean Philippe, lors des troubles à Abidjan.
C`est à bord d`une Renault 4 que Ado et son épouse ont été déposés chez M`Gbo Loba. Le couple Ado y a passé 9 jours. Ils dormaient dans une chambre au sous- sol de Loba. Ado avait douze (12) portables cellulaires, un carton de puces et une quantité importante de cartes de recharge “Ivoiris “et” Telecel”. Sans problème, Ado appelait le monde entier. Et pour garder le silence, les chefs de famille ont reçu 1 500 000F cfa.
L`appel à l`insurrection
Le 24 octobre 2000, alors que Honoré Guié donnait les résultats du scrutin de la présidentielle, les hommes de Boka Yapi voyant Gbagbo vainqueur, l`ont enlevé pour le brutaliser et ils ont proclamé Guéi vainqueur. Les Ivoiriens, mécontents du résultat sont descendus dans la rue et Gbagbo, un moment, a déclaré être le vrai vainqueur et a demandé aux Ivoiriens de descendre dans la rue, et tout Abidjan s`est retrouvé au Plateau. Dans la confusion, nous sommes entrés en action et on a effectué la mise en place avec les voitures de nos complices corps habillés ; nous qui étions en civils nous étions éparpillés dans les immeubles avec des fusils d`assaut et ceux en tenue militaire étaient le long du boulevard de la Carena, de Sébroko au pont Houphouët- Boigny. La mise en place a été faite la nuit, quand les résultats traînaient. On devait tuer le moins possible et faire plusieurs blessés. On ne devait pas tirer par rafale, pour ne pas être vu. On devait se cacher. Notre but était d`accuser les hommes de Guéi et ensuite les militants du Fpi pour demander l`annulation de l`élection. Quand on a commencé à tirer, les marcheurs tombaient et les radios étrangères diffusaient l`information et disaient que les hommes de Guéi tiraient sur les marcheurs. On accentuait les tirs et la colère gagnait la population. Les militaires, la police et la gendarmerie, tous voulaient en finir avec la “brigade rouge” et Guéi. Le général et ses hommes se demandaient ce qui leur arrivait et qui avait monté ce coup pour leur faire perdre le pouvoir. Dans la nuit du 24 ou 25, il y a eu l`attaque à l`arme lourde. Ils ont compris qu`il fallait éviter un affrontement sanglant pour rien et ont préféré quitter Abidjan. C`est en voulant fuir qu`ils ont écrasé des gens sur leur passage. Sinon, ce n`était vraiment pas eux qui tiraient sur les marcheurs. Le bilan aurait dans ce cas été très lourd, puisqu`ils étaient 200, ce jour-là au Plateau, avec leurs Kalachnikovs bien cadencées. Les morts auraient atteint très facilement les 500. Certains tireurs parlaient anglais. C`étaient nos gars du Ruf, venus en renfort. Quand les radios ont annoncé le départ de Guéi et de ses hommes, d`Azaguié Ado a demandé aux militants de descendre dans les rues, le 26 octobre 2000. Et pour venger les dozos morts à Blockhaus et ceux tombés au Plateau, on tuait au fusil, à la machette, au gourdin. On volait et pillait tout sur notre passage. Nos complices corps habillés ont ramassé nos cadavres. Ceux en tenue de dozo et treillis ont été déshabillés, transportés pour une direction que j`ignore. Ils ont ensuite photographié ces cadavres et remis les photos à Ado qui les a remises à son journal. On a alors réclamé une enquête internationale. On n`avait pas peur parce qu`on nous disait qu`on avait Palenfo, Coulibaly et Ib avec nous. On nous faisait croire que Ib a comme épouse la fille du général N`Daw et que celui-ci ne pouvait jamais juger nos amis. C`est peut-être ce qui a expliqué la commission du tribunal militaire lors des procès des généraux Coulibaly et Palenfo. On disait aussi que le colonel Dosso ne donnerait jamais l`ordre aux avions d`attaquer. Ce qui s`est vérifié lors des attaques des 7 et 8 janvier 2001. Tous les véhicules 4x4 qu`on braquait ont constitué la colonne venue du Nord. Moi, j`ai été frappé par les marcheurs au Plateau. Je n`avais plus de minutions et j`ai dû abandonner mon arme pour infiltrer les marcheurs. Sur indication d`un gardien d`immeuble, j`ai été battu. Je dois mon salut au fait que j`ai déclaré que je n`étais pas rebelle, mais un marcheur pour la liberté. On m`a aidé et je suis rentré à Yopougon. C`est cette maladie que je traîne. Je ne pouvais pas me soigner parce que nous étions coupés d`avec nos “boss”. Eux-mêmes se cherchaient et ne voulaient plus qu`on les approche. Ils changeaient de domicile. Certains de nos amis étaient partis au Burkina et d`autres, en Europe.
On nous avait promis 50 millions de Fcfa chacun, des visas et bourses d`études. Ado a promis de supprimer la carte de séjour. La terre appartiendrait à celui qui allait la mettre en valeur. Les recrutements dans l`armée se feraient avec les jugements supplétifs ou les extraits de naissance. Il faisait rêver. C`est comme ça qu`on était motivé. Il y a eu mort d`hommes. C`est ce qui effraie le Rdr et Ado. Voilà ce qu`il faut dire aux parents des disparus. On leur fait croire le contraire. Les recrues ne se sont jamais battus pour l`Islam ou pour le Nord, mais pour l`argent et pour le luxe. On parlait de l`Islam et du Nord pour qu`ils soient motivés. Je tiens à préciser qu`un jour, le Burkina emportera la Côte d`Ivoire, parce que ce sont les évènements entre Burkinabè et Kroumen, en novembre 1999, qui ont motivé nos deux généraux et les jeunes des troupes à renverser Bédié. Je demande pardon à mes chers parents”.
Le Temps N°452
du jeudi 21 octobre 2004