Mme Klopfenstein née Vi Lou Martine est une femme d’affaires d’origine ivoirienne vivant en Suisse. Cette native de la Sous-préfecture de Bédiala veut aider les femmes de sa région à s’auto-suffire. Pour elle, la lutte contre la pauvreté a besoin que chacun y mette du sien. Elle nous donne ses recettes pour améliorer le quotidien des défavorisés dans la perspective de 2015, année du bilan des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Mme Klopfenstein, pouvez-vous nous parler de la structure que vous dirigez? Femmes et Développement de Bédiala (FDB) est une ONG que j’ai créée en 2008, avec pour objectif de faire sortir les femmes de la localité dans l’extrême pauvreté dans laquelle elles se trouvent. Pour y parvenir, plusieurs projets seront menés. Nous allons réunir toutes les femmes productrices de vivriers et tous les jeunes exerçant en milieu rural pour d’abord les organiser. Puis nous allons ensemble concevoir et réaliser des actions concertées pour l’amélioration des rendements et des revenus du vivrier à Bédiala. En même temps l’ONG va réaliser des activités à but non lucratif pour l’amélioration des conditions de vie des populations de la région. Etant donné que ces populations pour la plupart ne sont pas allées à l’école, des actions d’alphabétisation en milieu rural seront aussi initiées afin de permettre à ces femmes et ces jeunes d’avoir des notions élémentaires pour lire, écrire et compter. Autre action qui me tient à cœur, est la promotion de la jeunesse dans le domaine agricole. Vous savez, le Président de la République a lancé un appel à la production en masse du vivrier, activité génératrice de revenus. Mais, il faut des projets bien pensés pour initier le mouvement. C’est en cela que nous voulons apporter notre aide. La souffrance dans nos villages, surtout du côté des femmes, s’est exacerbée. Vous vivez bien en Suisse, mais qu’est-ce qui vous a poussé à venir initier ce projet pour Bédiala ? Je vis depuis très longtemps en Europe, mais je suis très souvent en Côte d’Ivoire et je passe la plupart de mes vacances au village à Bédiala. Et j’ai été durablement marqué par un évènement lors d’un de mes séjours il y a quelques années. Un soir, j’ai vu un homme qui transportait à vélo une femme enceinte et qui visiblement était à terme. Ce couple sortait d’un campement lointain et n’avait pas d’autres moyens pour regagner la sous-préfecture pour la naissance de leur enfant. Il fallait à leur arrivée, transporter dans de bonnes conditions la femme à la maternité. J’ai voulu agir mais pour des raisons inconnues je n’ai pas bougé. J’ai appris plus tard que la femme et son bébé n’ont pas survécu. Cette histoire m’a marquée et depuis j’avais envie de faire quelque chose pour mes parents et c’est ce qui m’a motivée à créer “Femmes et Développement de Bédiala”. En 2015, ce sera le bilan pour les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). En Afrique généralement et en Côte d’Ivoire particulièrement beaucoup reste à faire dans le combat contre la pauvreté, l’analphabétisme, la malnutrition, le VIH-Sida, la mortalité infantile… Seul le bénévolat, le don de soi désintéressé d’hommes et de femmes engagés contre ces fléaux pourra nous faire sortir de cette misère galopante. Concrètement à quoi doit-on s’attendre à cour, moyen et long terme pour Bédiala ? D’abord, nous allons mettre des véhicules, je ne sais le nombre, à la disposition des populations et des coopératives. Ces véhicules serviront à faire sortir le vivrier des champs et les amener sur les marchés où les prix sont les plus intéressants pour les producteurs. Car très souvent, les acheteurs viennent acheter le produit directement dans le village en proposant des prix ridicules pour la marchandise. Etant dans le besoin, les femmes acceptent contre leur gré. Autre chose, étant en Europe, nous avons pris des contacts avec des partenaires pour venir en aide à nos parents. Je commence d’abord par Bédiala, parce que c’est le lieu que je maîtrise le mieux, mais si les projets aboutissent, nous étendrons notre aide à d’autres communautés villageoises. L’amélioration du plateau sanitaire dans un coin reculé, la construction d’écoles, la création d’activités socio-professionnelles…sont autant d’éléments que nous voulons améliorer. Mais pour cela, il faut s’organiser, faire du lobbying, communiquer surtout et souhaiter que notre message passe après des décideurs, ceux-là mêmes capables de nous ouvrir beaucoup de portes.
Propos recueillis par OG
Propos recueillis par OG