Si vous arrivez à Tiassalé ces temps-ci, il y a au moins une chose que vous partagerez avec la population : la psychose des coupeurs de route. Ce qui explique d'ailleurs l'engouement de la population hier matin devant le tribunal de Tiassalé.
Depuis 8h, un monde fou a pris d'assaut le temple de Thémis de Tiassalé. De la brigade de gendarmerie, on aperçoit du monde déambuler sur le trottoir, entre le tribunal et le centre ville. Sur les lieux, une centaine de spectateurs sont sous les arbres qui ornent l'entrée. Ceux-là ne peuvent pas entrer parce que la salle des audiences est bondée. Alors que le juge écoule les affaires ordinaires de flagrants délits, on s'impatiente. « Je suis là depuis 9 h pour voir le jugement des coupeurs de route. On aurait dû commencer par ça !», se lamente dehors Kouassi K., un paysan que la curiosité a conduit en ce lieu. Il n'est pas le seul. La plupart des personnes ne sont venues que pour le gang des coupeurs de route. Ces gangsters ne sont pas méconnus de la population. Car, dans cette petite ville, presque tout le monde connaît tout le monde. « Je connais deux d'entre eux. Seydou Comité et Carême. Ce sont des farotteurs ici », raconte un autre habitant de Tiassalé. Ils veulent tous être convaincus de leur culpabilité. Car le gang n'a jamais été pris sur les faits. Ils ont été arrêtés le 31 août après une attaque contre un gendarme. Le procès commencera finalement à 14h, dans la chaleur de la petite salle d'audience du tribunal où le public est entassé. Le juge Kacou Florent et le procureur Zahe Edmond suivent l'affaire. Ils vont appeler à la barre Lonfo Soumahila dit Ismo et Yéo Zanga, poursuivis pour vol de nuit avec violence et port d'armes à feu. Ensuite, Soumahoro Sina dit Marcel, N'Dri Joseph dit Bébé et Tamani Carême, poursuivis pour association de malfaiteurs. Enfin, Couibaly Wonkolé Lokolé dit Seydou Comité, poursuivi pour complicité de vol de nuit. Ces six personnes sont accusées de faire partie d'un gang des coupeurs de route qui a sévit sur l'autoroute et fait de nombreuses victimes. Les choses vont vite. Deux d'entre eux passent aux aveux. Tamani Carême et Lonfo Soumahila dit Ismo. « J'ai intégré le groupe alors que j'étais vendeur de vélo et de portable. Koro Oumar et Abou Taureau (deux des gangsters qui ont pris le large) venaient acheter des portables chez moi. C'est là-bas que je les ai connus », explique Ismo au juge. C'est un jeune maigre dans la trentaine. Il est vêtu d'un Jeans coupé et d'un tee-shirt blanc. Il n'a pas sa langue dans la poche. Il explique que ses deux clients lui ont proposé d'intégrer le gang. Idée qu'il a refusée. « Mais, ils m'ont dit qu'ils ont eu confiance en moi en venant me dire leur secret et que je n'avais pas le droit de refuser », ajoute-t-il. Il a finalement accepté. Son rôle, dans un premier temps, était de prendre les armes qu'ils emballaient dans des sacs et qu'il transportait sur un vélo pour aller les déposer aux lieux de rendez-vous. Cette histoire a commencé en 2006. La première attaque à la laquelle il a participé a eu lieu sur l'autoroute du Nord où auront lieu par ailleurs toutes les autre attaques. Ismo affirme n'avoir jamais tenu d'arme à feu, parce qu'il était considéré comme un « petit ». Il se contentait d'une torche à main. Les plus expérimentés opéraient avec des armes à feu. Il participera de 2006 au 31 août 2009, à 6 attaques sur l'autoroute du Nord, sans jamais tenir une arme à feu. Tamani Carême, lui intègre le groupe en 2007 grâce à Ismo, son ami. Lui, également affirme n'avoir jamais tenu un flingue. Il ne portait que les torches pendant les opérations. Il a participé à 4 braquages sur l'autoroute du Nord. Très souvent entre N'Douci et Ziannouan. Koro Oumar et Abou Taureau, des jeunes de la ville, étaient ceux qu'ils appelaient les anciens. Ce sont eux qui portaient les armes. Et les instructions étaient respectées à la lettre. Pendant les braquages, on ne viole pas, on ne coupe pas de chaîne au cou, parce que ça porte la poisse. On prend ce qui nous intéresse, on fout le camp, raconte-t-il. Ainsi, Ismo et Carême témoignent que jamais ils n'ont tué ni violé pendant leurs attaques. La dernière opération a eu lieu le 18 août sur l'autoroute du Nord. Un car ghanéen a été attaqué et 9 millions de Fcfa emportés, confessent-ils. Les coups étaient toujours si bien préparé que jamais ils n'ont été pris sur le terrain. Cette préparation, minutieuse, les indics, les heures de frappe, Ismo et Carême sont incapables de les expliquer. Ils ne faisaient que suivre le groupe. Toutefois, ils sont tous les deux unanimes sur un fait. Coulibaly Wonkolé Lokolé, dit Seydou Comité, riche planteur, est le parrain du groupe. « A chaque fois qu'on avait un problème Oumar nous disait qu'il allait voire Seydou Comité pour le résoudre», expliquent-ils à la barre. Mais, Seydou n'a jamais participé à l'une de leurs missions. Et quand ils le voyaient, c'était toujours dans le cadre de ses activités car il est aussi président de la communauté burkinabé. « Mais, il a participé au partage du butin de notre dernier coup », explique Ismo. Ce dernier coup, c'était l'attaque du car ghanéen. Le partage a eu lieu à l'école régionale de N'Douci. Interrogé, Coulibaly Wonkolé Lokolé dit ne pas être Seydou Comité. Il affirme ne pas connaître ces «voyous». Les autres prévenus n'ont pas reconnu les faits. Selon Ismo et Carême, ils sont innocents. Avec la fuite de Oumar et de Abou Taureau, seul un aveu de Coulibaly Wonkolé Lokolé permettra d'éclairer la lanterne du tribunal sur la provenance des armes, les indics, etc. Le procès se poursuit aujourd'hui.
Raphaël Tanoh,
Envoyé spécial à Tiassalé
Depuis 8h, un monde fou a pris d'assaut le temple de Thémis de Tiassalé. De la brigade de gendarmerie, on aperçoit du monde déambuler sur le trottoir, entre le tribunal et le centre ville. Sur les lieux, une centaine de spectateurs sont sous les arbres qui ornent l'entrée. Ceux-là ne peuvent pas entrer parce que la salle des audiences est bondée. Alors que le juge écoule les affaires ordinaires de flagrants délits, on s'impatiente. « Je suis là depuis 9 h pour voir le jugement des coupeurs de route. On aurait dû commencer par ça !», se lamente dehors Kouassi K., un paysan que la curiosité a conduit en ce lieu. Il n'est pas le seul. La plupart des personnes ne sont venues que pour le gang des coupeurs de route. Ces gangsters ne sont pas méconnus de la population. Car, dans cette petite ville, presque tout le monde connaît tout le monde. « Je connais deux d'entre eux. Seydou Comité et Carême. Ce sont des farotteurs ici », raconte un autre habitant de Tiassalé. Ils veulent tous être convaincus de leur culpabilité. Car le gang n'a jamais été pris sur les faits. Ils ont été arrêtés le 31 août après une attaque contre un gendarme. Le procès commencera finalement à 14h, dans la chaleur de la petite salle d'audience du tribunal où le public est entassé. Le juge Kacou Florent et le procureur Zahe Edmond suivent l'affaire. Ils vont appeler à la barre Lonfo Soumahila dit Ismo et Yéo Zanga, poursuivis pour vol de nuit avec violence et port d'armes à feu. Ensuite, Soumahoro Sina dit Marcel, N'Dri Joseph dit Bébé et Tamani Carême, poursuivis pour association de malfaiteurs. Enfin, Couibaly Wonkolé Lokolé dit Seydou Comité, poursuivi pour complicité de vol de nuit. Ces six personnes sont accusées de faire partie d'un gang des coupeurs de route qui a sévit sur l'autoroute et fait de nombreuses victimes. Les choses vont vite. Deux d'entre eux passent aux aveux. Tamani Carême et Lonfo Soumahila dit Ismo. « J'ai intégré le groupe alors que j'étais vendeur de vélo et de portable. Koro Oumar et Abou Taureau (deux des gangsters qui ont pris le large) venaient acheter des portables chez moi. C'est là-bas que je les ai connus », explique Ismo au juge. C'est un jeune maigre dans la trentaine. Il est vêtu d'un Jeans coupé et d'un tee-shirt blanc. Il n'a pas sa langue dans la poche. Il explique que ses deux clients lui ont proposé d'intégrer le gang. Idée qu'il a refusée. « Mais, ils m'ont dit qu'ils ont eu confiance en moi en venant me dire leur secret et que je n'avais pas le droit de refuser », ajoute-t-il. Il a finalement accepté. Son rôle, dans un premier temps, était de prendre les armes qu'ils emballaient dans des sacs et qu'il transportait sur un vélo pour aller les déposer aux lieux de rendez-vous. Cette histoire a commencé en 2006. La première attaque à la laquelle il a participé a eu lieu sur l'autoroute du Nord où auront lieu par ailleurs toutes les autre attaques. Ismo affirme n'avoir jamais tenu d'arme à feu, parce qu'il était considéré comme un « petit ». Il se contentait d'une torche à main. Les plus expérimentés opéraient avec des armes à feu. Il participera de 2006 au 31 août 2009, à 6 attaques sur l'autoroute du Nord, sans jamais tenir une arme à feu. Tamani Carême, lui intègre le groupe en 2007 grâce à Ismo, son ami. Lui, également affirme n'avoir jamais tenu un flingue. Il ne portait que les torches pendant les opérations. Il a participé à 4 braquages sur l'autoroute du Nord. Très souvent entre N'Douci et Ziannouan. Koro Oumar et Abou Taureau, des jeunes de la ville, étaient ceux qu'ils appelaient les anciens. Ce sont eux qui portaient les armes. Et les instructions étaient respectées à la lettre. Pendant les braquages, on ne viole pas, on ne coupe pas de chaîne au cou, parce que ça porte la poisse. On prend ce qui nous intéresse, on fout le camp, raconte-t-il. Ainsi, Ismo et Carême témoignent que jamais ils n'ont tué ni violé pendant leurs attaques. La dernière opération a eu lieu le 18 août sur l'autoroute du Nord. Un car ghanéen a été attaqué et 9 millions de Fcfa emportés, confessent-ils. Les coups étaient toujours si bien préparé que jamais ils n'ont été pris sur le terrain. Cette préparation, minutieuse, les indics, les heures de frappe, Ismo et Carême sont incapables de les expliquer. Ils ne faisaient que suivre le groupe. Toutefois, ils sont tous les deux unanimes sur un fait. Coulibaly Wonkolé Lokolé, dit Seydou Comité, riche planteur, est le parrain du groupe. « A chaque fois qu'on avait un problème Oumar nous disait qu'il allait voire Seydou Comité pour le résoudre», expliquent-ils à la barre. Mais, Seydou n'a jamais participé à l'une de leurs missions. Et quand ils le voyaient, c'était toujours dans le cadre de ses activités car il est aussi président de la communauté burkinabé. « Mais, il a participé au partage du butin de notre dernier coup », explique Ismo. Ce dernier coup, c'était l'attaque du car ghanéen. Le partage a eu lieu à l'école régionale de N'Douci. Interrogé, Coulibaly Wonkolé Lokolé dit ne pas être Seydou Comité. Il affirme ne pas connaître ces «voyous». Les autres prévenus n'ont pas reconnu les faits. Selon Ismo et Carême, ils sont innocents. Avec la fuite de Oumar et de Abou Taureau, seul un aveu de Coulibaly Wonkolé Lokolé permettra d'éclairer la lanterne du tribunal sur la provenance des armes, les indics, etc. Le procès se poursuit aujourd'hui.
Raphaël Tanoh,
Envoyé spécial à Tiassalé