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Faits Divers Publié le jeudi 24 septembre 2009 | Nord-Sud

Agression, viol, consommation de drogue… - Cimetière Williamsville : un lieu de danger ?

Le 4 août. Il est un peu plus de 11h. Une étudiante, Ema, à la recherche d’un éta­blissement, rencontre trois jeunes hommes à l’entrée du cimetière de Williamsville. Elle leur demande des renseignements sur l’école qu’elle cherche. Mais, la malheureuse ignore qu’elle vient de s’adresser à des voyous de la pire espèce. En l’étudiante désorientée, ils flairent une bonne affaire. Bien vêtue, sac à main, cellulaire... Ils se font passer pour des voyants alors que ce sont en réalité des prestidigitateurs. Ils promettent à Ema de résoudre tous ses problèmes en un coup de…pierre magique. «Prends ce caillou et vas le déposer sur une tombe», lui disent les indélicats. Ema oublie l’école qu’elle cherche et se laisse guider par ses bourreaux. Ils la suivent dans le cimetière de Williamsville, vaste de 50 hectares. Les malfrats s’arrangent à conduire leur pigeon le plus loin possible de l’entrée de cet espace fait pour accueillir les morts. Là, le masque tombe. Ema apprend a ses dépends qu’elle a affaire à des voyous.


Des cas de viol

Munis d’un couteau, les trois forcenés lui arrachent son téléphone portable, des numéraires et la violent. Parmi ses agresseurs, Ema reconnaît Tro Daniel qui porte une énorme cicatrice sur le cou. « Elle nous a décri le violeur, nous l’avons arrêté au cimetière le jour suivant et conduit au 11ème arrondissement de Williasmville », explique un gardien du cimetière. Tro est jugé le 19 août au tribunal du Plateau pour vol en réunion avec agression et attentat à la pudeur. Il purge en ce moment une peine de 10 ans fermes à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca). « Après son forfait, il était revenu sur les lieux, où nous l’avons arrêté », détaille l’un des gardiens du cimetière. Qui sait combien de jeunes filles ont été victimes de Tro et ses amis dans ce lieu ? Quand on sait que le cimetière de Williamsville est très souvent le théâtre de ce type de scène. «Les viols ont baissé au cimetière depuis que l’herbe a diminué ici», explique l’un des jeunes chargés de la sécurité du lieu funèbre.

Ce mercredi matin, ils sont une demi-dizaine, assis à l’ombre d’une tombe construite. Ils ont déjà attrapé des violeurs au cimetière. «Et c’est toujours la journée. Parce que ces gens ont peur de venir ici la nuit. A chaque fois qu’on en attrape, on les chicote avant de les conduire au 11ème arrondissement », raconte l’un d’entre eux. Comment les victimes arrivent-elles à se faire traîner dans un tel lieu par des inconnus ? Est-ce possible que ce soient des couples qui cherchent un lieu où satisfaire leur libido ? Les gardiens sont catégoriques : ce sont bien des cas de viol. Car, leurs victimes le confirment toujours. En tout cas, elles n’ont pas toutes le courage d’Ema d’envoyer l’affaire en justice, au risque de s’exposer à la raillerie. Toutefois, les cas de viol ont quelque peu baissé. «Nous veillons au grain. Aussi, le coin devient de plus en plus clairsemé», ajoute un gardien. Au Nord-Ouest du cimetière, quelques hommes creusent des fosses. Ce sont des habitués du coin. L’un d’entre eux a passé plus de 17 ans en tant qu’employé du cimetière. Il affirme que la sécurité ne peut être assurée sur toute cette espace. Car, le cimetière est vaste et les malfrats en profitent toujours. Ainsi, il peut y avoir des scènes obscènes quelque part, entre des tombes, sans qu’ils ne le sachent. « Souvent, c’est lorsque les violeurs terminent leur acte et qu’ils sont prêts à s’enfuir, que leurs victimes se mettent à hurler pour nous alerter », raconte un vigile. Plusieurs fois ils arrivent à maîtriser les mis en cause. Ce qui a réduit ces actes d’obscénité au cimetière. Mais, si les viols ont un peu cessé, un autre fait prend de l’ampleur dans la nécropole. La drogue. Plus précisément, la consommation de cannabis. Cha­que mois, des fumeurs sont pris dans l’enceinte de ce lieu sacré, en train de fumer de l’herbe. Le 9 janvier, la police des stupéfiants et des drogues (Dpsd) a mis la main sur 4 consommateurs de cannabis dans le cimetière. Ce sont Koné Bakary, 27 ans (Ivoirien), Mariko Issa, 25 ans, Kaboré Oumar, 22 ans et Tidiane Taofick, 34 ans. Ils ont été arrêtés au cimetière de Williamsville, aux environs de 11 h. Le 17 août, la Dpsd met le grap­pin sur un autre groupe de drogués. Ce sont Bamba Valery, Doumbia Adama, Sermé Moussa, Traoré Sékou, Zogomé Moussa. Ils portaient sur eux 290 grammes de cannabis. Répertorié dans le carnet de cette section de la police comme un fumoir, le cimetière est désormais surveillé par les flics. La récente prise remonte au début de ce mois. Koné Siaka, 27 ans, est pris en possession de 750 grammes de cannabis. Il est conduit au tribunal du Plateau le 9 septembre, où il sera condamné à un an ferme. Créé depuis les années 1970, on le voit, le cimetière de Williamsville est devenu le lieu de prédilection des délinquants. L’imam Sylla Sékou de la mosquée de Treichville, avenue 8, qualifie l’acte d’aberration. La justice, dit-il, doit punir sévèrement tous ces voyous qui vont commettre leurs délits ou leurs crimes dans le cimetière. «Un homme ne doit pas profaner une tombe. La morale a foutu le camp. C’est l’image de la déliquescence de notre société», s’indigne-t-il. Avant de lancer la pierre à la sécurité : « Ceux qui assurent la sécurité sont les premiers responsables. Quand les gens payent les tombes, les frais de sécurité y sont compris ». Le bureau de la sécurité qui est juste à l’entrée du cimetière est constamment bondé de monde. Mais, on est moins prolixe sur le sujet…comme des morts.

Raphaël Tanoh
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