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Art et Culture Publié le mardi 29 septembre 2009 | L’intelligent d’Abidjan

Touré Ahmed Boua :“La profession prend de l’aile à cause de ces rats de rédaction qui s’invitent à chaque manifestation(...)”

Monsieur le représentant de son Excellence Monsieur le Président de la République
Monsieur le représentant de son Excellence Monsieur le Premier ministre
Madame la représentante de la Communication
Honorable Chef Secrétaire Permanent des Associations des Rois, Sultans et Chefs Traditionnels
Monsieur le Directeur Général de l'Intelligent d'Abidjan
Vous tous valeureux journalistes de l'Intelligent d'Abidjan.
Honorables participants à ce sixième séminaire anniversaire de l'Intelligent d'Abidjan
Mesdames, Messieurs
6ème anniversaire de l'Intelligent d'Abidjan, occasion d'un séminaire de cadrage et sortie détente. En somme, ce que d'autres de façon prosaïque appellent: «joindre l'utile à l’agréable».
Laissez-moi vous dire Monsieur le Directeur Fondateur de l'Intelligent d'Abidjan et vous Messieurs les journalistes, que votre initiative est louable. C'est en effet œuvre de haute portée à la fois intellectuelle et managériale que de savoir, en des périodes déterminées de l'évolution d'une entité, marquer un temps d'arrêt, pour jauger le chemin parcouru, faire son auto évolution, pour davantage appréhender les défis futurs. Monsieur le Directeur Général Fondateur de l'Intelligent d'Abidjan, cette démarche est d'autant -plus pertinente, qu'en bon manager, vous incluez un temps de détente pour renforcer la culture de la confraternité, facteur de motivation du personnel. En somme, vous n'avez pas usurpé votre entité homérique de «l’Intelligent » même si, il est vrai, que vous en avez été inspiré par votre aînée de prestige «Jeune Afrique l'Intelligent».
Honorables parterre de personnalités, Mesdames et Messieurs,
Au-delà de la forme ; ce qui a davantage motivé notre totale adhésion au parrainage de cette sixième édition de l'anniversaire de «l'Intelligent d'Abidjan» ; c'est assurément la haute portée stratégique de votre thème: «Presse indépendante Abidjan en période électorale ; cas de l'Intelligent d'Abidjan. Enjeux difficultés et perspectives pour l'Intelligent d'Abidjan».
Rassurez-vous Honorable aréopage, Mesdames et Messieurs, nous n'allons pas ici prendre la place des panelistes ; encore moins, démarrer l'atelier de réflexion plutôt que prévu.
Mais, souffrez que nous ne puissions nous empêcher de toucher deux mots des thèmes majeurs, que sont:
1. l'Indépendance de la Presse;
2. les enjeux ;
3. les difficultés;
4. les perspectives.
Quand on sait, que pour nous, peuples de culture francophone, notre référence en matière de presse écrite est Théophraste Renaudot ;
Quand on sait, que ce prestigieux journaliste, dû la création et la survie de sa gazette, au bon soutien de Richelieu, un politique comme il n'en eut pas beaucoup dans l'histoire ; peut-on parler ici de presse indépendante, surtout en période électorale?
Indépendante par rapport à qui et à quoi?
Il nous revient, à juste effet, la boutade de cet auteur qui disait et nous citons : «si quelqu'un vous revendique son indépendance, c'est qu'il veut l'inféoder ailleurs».
La presse qu'on dit être le quatrième pouvoir, mais qui est en réalité le 1er pouvoir comme l’a dit tout à l’heure l’un des monuments de la presse que j’admire beaucoup, et c'est vrai, se doit-il de se murer, dans nos pays dans cette stérile querelle aux antipodes de la presse dite partisane d'un côté, et de l'autre, celle dite indépendante?
Il y a à notre sens, des luxes dont on devrait se priver, pour que dans nos pays, la presse se fasse véritablement outil de développement. Il importe qu'on dépasse ces querelles de chapelle au nom et au titre desquelles, on se donne le droit de se croire obliger, de manquer de courtoisie ou de descendre dans les soutes et les bas étages... Combien sont-ils, ces organes de presse qui se soucient véritablement du feed back de la population qu'ils sont censés servir?
Période électorale ou période ordinaire, peu importe, c'est chaque jour, et tous les jours que la presse se doit de servir les intérêts du développement.
Vous avez dit «enjeux», et vous avez vu juste Monsieur le Directeur Général, vous et vos confrères. Mais de quels enjeux?
Ne nous trompons pas de combat même en période électorale. Loin de parler d'une pléthore d'enjeux au point de tout embrasser pour mal étreindre ; la presse à notre sens, devra se fixer le seul enjeu qui vaille : la perspective de lutte contre les causes du mal développement chronique devenu, signe distinctif de nos pays d'Afrique.
La presse qui se veut indépendante, se doit de se lier à la cause du sort des millions de populations pour lesquelles, le mal développement chronique se traduit en termes de famine, de guerre fratricide, de mal gouvernance etc.
Certes, ce choix n'est pas très lucratif, en des temps où, dit-on, nul n'est venu regarder la mer ; même si, il est vrai, qu'on aime venir à Bassam, pour le temps d'un séminaire.
Vous avez donc raison de parler de «difficultés». Déjà que dit-on, les Africains en général et les Ivoiriens en particulier, ne lisent pas. Pire, ils sont passés maîtres dans l'art moderne bien africain de la «Titrologie».
Et comme si cela ne suffisait pas! Internet, puis le concept du journal gratuit, s'y mêlent pour faire de ce secteur, l'un, sinon le plus touché par la crise financière. De par le monde, des journaux de renom ferment boutiques ou sont rachetés. Que faire alors pour les petites unités de presse de nos pays, quand même les magnats mondiaux rendent gorge ? La profession prend nécessairement du plomb dans ses ailes d'éthique et de déontologie, faisant naître comme une pandémie, dans nos pays, le syndrome du journalisme à la petite semaine. La SJPS des rats de rédaction, qui s'invitent à chaque manifestation, arborant carte de journaliste pas toujours conformes, contre quelques peccadilles dans des enveloppes... véritable honte de la profession. En juger, ces femmes et ces hommes formés à des écoles de renom qui en sont, sous la pression du ventre, à prostituer cette noble profession?
«La critique est aisée mais l’art difficile» dit le penseur.
Monsieur le Directeur Général de l'Intelligent d’Abidjan, vos confrères et vous, avez du mérite. Votre parcours depuis la rédaction de journaux à tendance jusqu'à cette initiative est méritoire. Et c'est, parce que nous croyons qu'il est important que vous teniez le cap, que nous sommes à ce rendez-vous.
Honorables parterre de personnalités,
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes ici à ce séminaire à juste titre dit: de «cadrage », pour donner notre modeste contribution en termes de «perspective ».
«A vaincre sans péril ; on triomphe sans gloire » écrivait le dramaturge. Nous pensons, par expérience, que dans nos pays; toute entreprise qui se veut porteuse sur le long terme, quelqu'en soit le secteur, se doit de s'en faire son leitmotiv. Nous pensons même que, dans le secteur de la presse ; cela est davantage mis en évidence.
Vous pouvez mettre votre organe au service du thuriféraire; on vous applaudira un temps, mais pas tout le temps.
Vous pouvez mettre votre plume au service de la «mangecratie» ; vous mangerez un moment, mais pas pour longtemps; dans nos pays où les fortunes se font et se défont, et les pouvoirs se prennent et se perdent ; tel jeu de LOTO ou de CASINO. Monsieur le Directeur Général et valeureux journalistes de l'Intelligent d'Abidjan; comparaison n'est pas raison, me diriez vous ; le bâtiment ce n'est pas la presse. Je vous répondrais ce que dit le sage: «La fourmi et l’Eléphant tels qu'ils sont, chacun à sa taille, sentent pourtant la faim de la même façon».
« La perspective », puisque vous êtes l’Intelligent d’Abidjan : c’est opter pour le choix, du long terme à l’image de vos confrères de référence tels Béchir Ben Yamed, Siradou DIALLO, les Bamba Alex, les Samba, les Isaïe Biton, les MAM, les Zio Moussa etc
A vous Monsieur le Directeur Général, nous disons que votre choix nous rappelle cet autre célèbre journaliste qu'est Hubert BEUVE Mery fondateur du prestigieux titre : «Le Monde». Avec lui, nous avons compris que le véritable enjeu lié au développement; c'est la confiance des lecteurs. Ainsi dans le marasme ambiant, il y a des lecteurs qui en sont devenus de véritables mécènes et qui mettent, qui, leurs sous de bas de laine, qui, leur fortune; pour que le titre «Le Monde» et ses titres spécifiques tel «LeMonde Diplomatique » entre autres, demeure au-delà du temps et des modes. Ne croyez pas les éternels pourfendeurs de nos consciences africaines. Croyez qu'il est possible d'avoir mille, dix mille voire un million d'Ivoiriens disposés à soutenir la cause de l'information véritable, au service du développement, la seule qui à l'image de la santé, de l'alphabétisation, de l'alimentation, de la qualité de la vie; n'a ni couleur, ni religion, ni région. Innover et quitter les sentiers battus de journalistes qui se contentent d'écrire leurs pages. Ouvrir des rubriques permanentes aux lecteurs, solliciter leurs avis, critiques et suggestions; non pas un jour mais tous les jours. Accroître les évènementiels en termes de stratégie d'information, d'éducation et de communication ; avec la seule vraie alliée de la vérité du développement: la population, entendu au sens du concept peu connu, car peu pris en compte dans les discours politiquement corrects : le Pays Réel.
Par-dessus tout ; éviter la maladie des lieux communs, et la doxologie des théories journalistiques souvent en déphasage avec nos réalités.
Monsieur le Directeur Général et émérites journalistes de l'Intelligent d’Abidjan : je vous exhorte à travailler pour le long terme en faisant le choix ingrat et amer de la recherche et de l'innovation dans un secteur où tout semble dit et codifié. «Mille fois sur le métier ; remettez votre ouvrage». Aucune autre alternative ne nous semble possible et viable à terme; à moins que, à l'instar de milliers de titres fleuris au printemps de la presse ivoirienne et mort bien avant l'automne; le temps ait raison des choix d'une saison. Il y a des secteurs tels ceux de l'art et de la science; où la notoriété, la gloire et la prospérité se gagnent, et souvent hélas, à titre posthume, à la pointe de la plume et à la chaleur des remues méninges. Il faut le faire savoir; on entre en journalisme comme on entre en religion; par pure sacerdoce. Nous souhaitons très sincèrement que l'Intelligent d'Abidjan nous survive tous; et qu'un jour, au 106ème anniversaire, on cite avec fierté, ces pionniers d'une œuvre, se perpétuant de génération en génération.
Je vous remercie.
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