Habitués aux brutalités des « jeunes patriotes » de Charles Blé Goudé, bon nombre de commerçants, dans certains quartiers d’Abidjan, ont refusé d’ouvrir boutique ou d’aller sur les marchés, le samedi matin. En tout cas, des étals sont restés vides et des portes hermétiquement fermées. Ces opérateurs économiques se rappelant, sans doute, des casses et autres pillages perpétrés par « les jeunes patriotes » sur les marchés ou les boutiques, à leurs heures de gloire, à chacune de leurs sorties, n’ont voulu prendre de risques. Ils savent que ces jeunes incontrôlables agissent en toute impunité, réduisant à néant, plusieurs années de dur labeur. Ces commerçants ont donc cru que le général de la rue et ses troupes allaient s’adonner, le samedi, après la rencontre avec le candidat du FPI, à leur jeu préféré. Les casses, le pillage, les agressions physiques. Mais, peut-être que les temps ne sont plus les mêmes, ou que la mobilisation, peu réussie, a ramolli les ardeurs, toujours est-il que flottant dans les bus qui les ont convoyés, ils ont regagné, sagement, leur domicile. La crainte de ces commerçants est la preuve que Blé Goudé et ses troupes ne procurent pas la quiétude aux populations. C’est avec beaucoup d’appréhensions que les habitants des quartiers d’Abidjan apprennent la tenue des manifestations de ces patriotes d’une autre nature. Le problème alors est de savoir si, dans ces conditions, le directeur de campagne du candidat Laurent Gbagbo, chargé des jeunes, ne fonctionne pas comme du vinaigre avec lequel l’on veut attirer les mouches. Si la timide mobilisation des jeunes est vue comme le désintérêt de plus en plus grandissant d’une frange importante d’une jeunesse blasée, se sentant trahie, la fermeture des boutiques de certains commerçants traduit le souhait des populations de ne pas voir le retour des vieux démons. De quoi faire revenir le candidat du FPI, à la réalité du terrain. Maintenant, l’heure n’est plus aux sondages. Ce sont les populations qui parlent.
Raoul Mapiéchon
Raoul Mapiéchon