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Politique Publié le jeudi 26 novembre 2009 | Le Repère

Blé Guirao (président de Action pour demain) : “Que Bédié et Ouattara quittent le Cpc”

Jean Blé Guirao, ex-président de la Jeunesse de l`Union pour la démocratie et la paix (Judpci) et actuel secrétaire général adjoint dudit parti semble déçu de la ligne politique adoptée par les quatre leaders de l`opposition politique réunis au sein du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Il a décidé de créer un mouvement politique " de pression ", selon ses propres termes, baptisé Action pour demain (Apd). Il en donne les explications dans cet entretien.

Vous êtes un membre influant de l`Udpci et également du Rhdp. Vous avez décidé de créer le mouvement "Action Pour Demain" (Apd). Est-ce-à dire que pour vous le présent ne compte plus ?
Je vous remercie et vous salue pour le combat que vous menez. Aujourd`hui, en Côte d`Ivoire, face à la démission de fait des organisations politiques, c`est vous les journalistes qui mènez le combat. Lorsque nous lisons à la Une de certains journaux "Rhdp, réveillez-vous !, nous avons un pincement au cœur. C`est vrai que face à un pouvoir comme le Fpi, vous avez souvent été l`objet d`attaque. Ils ont envoyé des gens détruire le matériel au "Nouveau Réveil". Mais je crois qu`un journal qui se veut crédible doit passer par cette étape-là. Un journal qui veut embrasser les préoccupations du peuple doit passer par ces étapes. Pour revenir à votre question, je voudrais dire que nous avons fait le constat amer. 9 ans après l`accession de Laurent Gbagbo au pouvoir et 7 ans après le déclenchement de la crise, Laurent Gbagbo change de stratégie pour les adapter et aux circonstances et aux problèmes qui se posent. Le constat amer est que l`opposition est restée là figée. Depuis le 19 septembre 2002, c`est Laurent Gbagbo qui nous mène en bateau. Lorsqu`il est content, tout le monde est content, quand il rit tout le monde rit, quant il s`arrête tout le monde s`arrête. Tous les accords qui ont été signés ont été mis en veilleuse par Laurent Gbagbo et ses affidés face à une opposition passive. Nous sommes une opposition politique. Lorsque la société civile se met en branle pour demander un mieux être afin que leurs conditions de vie s`améliorent, nous devons la soutenir. Des gens sont en grève depuis des années pour les mêmes problèmes. Et pour ces mêmes problèmes, nous sommes restés silencieux. Il y a un fossé énorme entre le Rhdp en tant que mouvement politique et les forces sociales qui constituent un véritable conglomérat pour beaucoup d`Ivoiriens. De tel sorte que si aujourd`hui, nous allons aux élections, nous ne sommes pas sûrs d`avoir, comme dans les autres pays, le soutien des syndicats ou des fédérations de syndicats. Parce que nous avons été à un certain moment donné inexistants dans leur lutte pour l`amélioration de leurs conditions de vie. Devant cette inaction de l`opposition face à Laurent Gbagbo, nous avons décidé, des amis et nous, depuis six mois d`agir. Parce que ce qui arrive, nous l`avons prévu. Nous avons déjà assisté à cinq reports. Si le 29 novembre prochain, nous ne faisons rien, nous assisterons à un sixième report. Depuis six mois, nous le savions, donc nous avons songé à mettre en place une structure dénommée "Action pour demain" (Apd). Pour nous, la Côte d`Ivoire de demain se prépare aujourd`hui. Si nous refusons de poser des actes maintenant, si nous acceptons de subir le diktat d`une minorité au sein du Fpi qui s`enrichit d`une manière insolente avec les moyens de l`Etat, qui finit l`argent du pétrole et du gaz, qui est sujet au détournements devant la passivité de l`opposition... Si nous ne faisons rien aujourd`hui de façon concrète, demain la Côte d`ivoire ne sera pas à nous, elle sera aux mains de personnes qui ont tué l`école.

Avant de revenir au report de l’élection présidentielle du 29 novembre 2009, selon vous, qu`est-ce qui explique l`inaction de l`opposition face à Laurent Gbagbo qui s`obstine à rester au pouvoir ?
Je voudrais terminer avec ce qui a conduit à la création de l`Apd. Il y a six mois, nous avions prévu ce report. Nous nous sommes dit qu`il était temps que nous nous organisions pour que les militants du Pdci, du Rdr, du Mfa, de l`Udpci qui ont compris que la lutte politique ne se fait pas seulement que dans les salons se retrouvent. Et qu`en dehors des déclarations, ils mènent des actions concrètes. C`est la base qui souffre. Il faut donc changer de tactique face à Laurent Gbagbo. Et tous, ensemble, ces camarades ont siégé au sein de l`Apd. Le samedi 21 novembre 2009, nous avons effectué le lancement officiel de l`Apd. Nous allons désormais influencer les structures du Rhdp, les tirer vers l`avant pour que demain…

Quelles sont les actions concrètes ?
Laurent Gbagbo a été opposant dans ce pays, il nous a montré que les actions démocratiques sont les marches, les sit-in, les grèves et les déclarations. Malheureusement, le Rhdp qui est né en mai 2005 ne se contente que des déclarations, alors qu`il y a d`autres voies pour influencer le processus en cours.

Pour vous, le constat est clair, le Rhdp a échoué ?
Il y a le Rhdp, en terme de direction et le Rhdp en terme de base. Lorsque vous prenez la base du Rhdp dans les petits quartiers, sous quartiers, les hameaux, les villes de la Côte d`Ivoire, vous verrez qu`il y a une véritable symbiose, une cohésion, une volonté unanime de lutter, de mener le combat afin que Laurent Gbagbo parte du pouvoir. Vous l`avez senti au niveau des audiences foraines, vous l`avez senti au niveau des élections de la Cnse, de la Cei où la base, unie, a fait échec à Laurent Gbagbo et au Fpi dans toutes les contrées de la Côte d`Ivoire. Le problème qui se pose aujourd`hui, c`est le directoire du Rhdp. C`est-à-dire ceux qui doivent donner les mots d`ordre. Quand vont-ils donner les mots d`ordre ? Comment vont-ils donner ces mots d`ordre ? C`est cette stratégie qui fait défaut au directoire du Rhdp. Et c`est ce qui fait que la base est en train de s`amuser, de se scléroriser. Ce sont les cadres de l`opposition que Gbagbo achète aujourd`hui. Malgré les difficultés, vous n`allez pas voir la base aller derrière Gbagbo et son argent.

Le directoire du Rhdp a-t-il donc échoué ?
Les quatre présidents du Rhdp l`ont reconnu. Le président Mabri Toikeusse l`a dit lors de son passage au journal "L`expression". Les présidents Bédié et Ouattara ne disent pas autre chose. Le président Anaky Kobena le dit toujours. Le Rhdp ne fait pas ce que la base attend.

Peut-on parler d`une déconnexion entre la base et le directoire ?
Il y a un fossé qui est en train de s`élargir entre la volonté de la base et le directoire…

Quelles sont les conséquences d`un tel fossé ?
Les conséquences sont à deux niveaux. Premier niveau, c`est d`abord le Rhdp, car si l`on n`y prend garde nous allons faire le lit de Laurent Gbagbo. Et en ce moment-là, le Fpi et ses affidés, quoique minoritaires, vont se proclamer vainqueurs. Aujourd`hui, ils ne parlent plus de second tour. Or, le Rhdp a malheureusement axé sa stratégie sur le second tour. Le Fpi parle maintenant d`un seul tour. Et pendant que le Fpi a changé de stratégie, le Rhdp est resté figé. Il y a aussi la base qui, de plus en plus, est en train de s`interroger à savoir quelle opposition nous avons. Malgré la souffrance du peuple, le Rhdp est en train d`accompagner Laurent Gbagbo dans tout ce qu`il fait. Les militants s`interrogent de plus en plus. Je vous ai parlé des syndicats, de la société civile. Aujourd`hui, vous avez les victimes des déchets toxiques, qui sont face à un régime répressif. Mais que fait l`opposition pour les aider ? Lorsque vous parlez, ils disent vous manipuler les gens. Quel homme politique qui veut arriver au pouvoir sans le soutien de la société civile et des organisations syndicales. Donc il y a un fossé qui est en train de se creuser.

La solution est-elle l`appel à la démission des leaders de l`opposition ?
Nous ne sommes pas encore arrivés à ce stade. Nous voulons seulement interpeller nos responsables. Pourquoi, diantre, quatre grands de partis politiques qui ont signé des accords ont-ils des problèmes pour se voir. Aujourd`hui, pour que les présidents Bédié, Ouattara, Anaky et Mabri se voient, c`est tout un problème. Il faut qu`ils aient le courage de dire aux Ivoiriens qu`ils se sont embarqués dans un bateau appelé Rhdp qui aurait des problèmes. Le problème est nos leaders. Est-ce qu`au sein du Rhdp nous avons une vision commune, une volonté commune, un combat commun contre Laurent Gbagbo. Si ce n`est pas le cas, je ne sais pas si notre union a encore son sens. Est-ce que le Rhdp considère que ce qui est primordial est que Laurent Gbagbo parte du pouvoir ou ce qui est primordial, c`est qui au sein du Rhdp va gérer le pouvoir. Pour nous l`essentiel, c`est le départ de Gbagbo et ce qui est secondaire c`est qui va gérer le pouvoir. Or, ce qui se dit dans les salons avec leurs nombreux conseillers, c`est que c`est déjà fini pour Gbagbo, donc ils commencent à se jeter des peaux de bananes. Ce n`est pas sérieux parce que le peuple nous regarde. Avant, les Ivoiriens mangeaient un plat par jour, maintenant c`est un repas tous les deux jours.

Si le report du 29 novembre est confirmé, ce sera le sixième report. Cela veut dire que l`inaction de l`opposition à la peau dure. Pensez-vous que cette façon d`interpeller l`opposition pourrait avoir les effets escomptés ?
Avec l`Apd, nous quittons le stade des interpellations. Et dans un pays qui se veut démocratique, il y a plusieurs actions démocratiques pour que l`opposition s`exprime. Ces actions passent par des déclarations, des marches, des sit-in, des grèves, des soutiens actifs aux syndicats en lutte ou les organisations de la société civile. A partir de là, nous sortons du carcan des déclarations. Aujourd`hui, il faut qu`on définisse le facteur bloquant qui a fait que nous sommes arrivés au sixième report. Si cela est fait, il convient de mener des actions concrètes pour que ce facteur bloquant change. Nous avons détecté les facteurs bloquants. Ce sont les deux têtes des opérateurs qui interviennent dans les élections. Il y a la Cei et la Cnse. Il faut changer ces deux titres. Il faut que Beugré Mambé et le magistrat Hua qui a fini son mandat quittent la tête de ces institutions. Les deux nous ont mis avec leur collaboration dans une position de rente. Aujourd`hui, ils préfèrent que la crise dure pour se remplir les poches. L`on peut garder les techniciens qui eux maîtrisent les fichiers électoraux. Et puis pour l`honneur de la partie et la souffrance des Ivoiriens, il faut que les présidents Bédié, Ouattara quittent le Cpc. Ils ne peuvent pas aller à une réunion autour d`une table pour décider du report des élections et venir dire à leurs militants qu`ils ne sont pas d`accord. Lorsqu`ils vont quitter le Cpc, nos amis verront que le processus est bloqué en Côte d`Ivoire. Ensuite, lorsque le directoire du Rhdp va décider un matin à 9h de retirer leurs ministres du gouvernement, vous allez voir que le Président Gbagbo va quitter le pouvoir dans un an. Tant que cela n`est pas fait, nous allons tourner en rond dans des gymnastiques à géométrie variable. Et nous allons nous en sortir. L`opposition doit nous donner les moyens dans notre entreprise. Des moyens qui vont donner de l`espoir aux Ivoiriens.

Vous êtes seul aujourd`hui. Quelles sont les personnes sur lesquelles vous comptez afin de contraindre les leaders du Rhdp à procéder comme vous le dites ?
Nous avons changé de stratégie depuis 2002. Les mots d`ordre venaient des leaders. Eux qui ne maitrisent pas les réalités du peuple donnaient les mots d`ordre depuis leur salon, les bars climatisés, au cours des réunions. Aujourd`hui, les choses ont changés, c`est la base qui va donner les directives aux leaders. Je vous apprends que nous avons au sein de l`Apd des militants du Pdci, du Rdr, du Mfa, de l`Udpci. C`est véritablement la base du Rhdp qui ne comprend pas où son directoire l`amène qui a décidé de prendre le destin du pays en main, car cette base ne veut pas mourir.

Allez-vous rester seulement à vous posez des questions ?
Non, je vous ai dit que l`Apd n`est pas une structure de déclaration. C`est une structure d`action. Vous verrez nos actions s`appuierons sur la Constitution. Ce sont des actions légales telles que des marches, des sit-in, des grèves, des soutiens à la société civile. Le samedi dernier , nous avons apporté notre soutien total aux syndicats de l`enseignement secondaire général et l`enseignement technique qui sont en grève. Nous apportons notre soutien aux élèves qui sont en grève en ce moment. Parce qu`un pays sous-développé qui veut arriver à un stade de développement ne doit pas atteindre un taux d`échec de 90% à l`école. C`est inconcevable. Contrairement à nos responsables qui ont peur de soutenir les syndicats, l`Apd leur apporte son soutien. Et nous avons dit à tous nos camarades qui sont à la base d`apporter leur soutien aux syndicats qui sont en lutte. Moi-même, je devais être le samedi aux côtés du syndicat des inspecteurs de la Fonction publique à un meeting, malheureusement j`ai été empêché au dernier moment. Partout maintenant où les syndicats seront en grève, vous nous verrez de façon concrète apporter notre soutien, n`en déplaise à ceux qui pensent que nous sommes manipulés.

Tout porte à croire que l`Apd peut mener des manifestations violentes de rue ?
Pas manifestations violentes. Si nous marchons et la marche est réprimées elle va aboutir à une manifestation violente. Nous allons informer les autorités sur les actions que nous allons entreprendre. Nous allons demander à ce que les Forces républicaines encadrent nos manifestations. A partir de là, le reste dépendra de Dieu et des hommes.

Un message qui vous tient à cœur?
Aujourd`hui, beaucoup d`Ivoiriens sont déçus. Dans la rue, à la maison tout le monde dit, ça suffit ! Il faut que Gbagbo parte du pouvoir. Je suis souvent peiné de savoir que nos leaders n`envoient pas des gens dans la rue pour écouter le message du peuple. C`est par dépit que les Ivoiriens s`expriment comme cela. Mais, j`ai peur que par ce dépit les Ivoiriens fassent un vote sanction contre nous. Le Rhdp n`est pas en phase avec le peuple. Aujourd`hui, nos quatre leaders sont admis dans la "cour des grands". Mais, cela ne suffit pas. C`est vrai, la liste est affichée, cela ne suffit pas. Mais, si demain, Gbagbo fait sortir ses miliciens, son armée qui est tribalisée, pour nous empêcher de voter, que pourrons-nous faire ? C`est pourquoi, il faut bien lire les résolutions de la dernière convention de 2009 du Fpi, la deuxième du genre, à Yamosusoukro qui pose comme condition le désarmement pour aller aux élections. Et en plus, en janvier 2010, jusqu`en février 2010 il y aura la Coupe d`Afrique des nations. Il ne peut pas se tenir d`élections. En mars 2010 et avril 2010, il se tiendra les assemblées générales de la Bad en Côte d`Ivoire donc pas d`élection. En juin et juillet 2010, ce sera la Coupe du monde. Vous savez que le football est l`opium du peuple. Et le 7 août jusqu`au 7 décembre 2010, ce sera le cinquantenaire de l`indépendance de la Côte d`Ivoire. Donc les élections ne pourront pas se tenir. Par conséquent, après le 29 novembre 2009, la prochaine date ne peut-être connue qu`après le 7 décembre 2010. Or, le Fpi pose comme condition, le désarmement à partir du 7 décembre 2010. Cela veut dire que nous sommes partis pour 2011. Et ceci rejoint ce que le député Atteby Williams avait dit lors d`un meeting à Yopougon que les élections auront lieu en octobre 2015. C`est le schéma dans lequel le Fpi est et c`est ce schéma que nous avons compris. Et c`est pour cela que nous appelons l`opposition ivoirienne à se réveiller, sinon demain il sera trop tard.

Interview réalisée par
Parfait Tadjau
et Foumséké Coulibaly
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