L'école ivoirienne est mourante, sinon en déconfiture. Détruite par près de 10 ans d'instrumentalisation et de navigation à vue de la part des gouvernants, elle ne forme plus que des guérilleros, des hors-la loi, des adeptes de la tricherie, de la corruption. L'école n’est plus ce qu'elle devait être. Elle a plus que besoin d'être réhabilitée avec fermeté et maestria. Comment ? Voici le remède du Président Henri Konan Bédié pour sauver l'école ivoirienne. Déjà, en 1995, il avait annoncé ce plan salvateur. En 2009, ce plan est plus que d'actualité, parce que la situation de l'école ivoirienne est affligeante.
La reforme de notre système éducatif
Pour une école qui prépare à la vie, une école rénovée et qualifiante
" L'école est l'instrument de la liberté et la clef de la réussite.
Je lance un appel pressant à tous mes compatriotes pour les sensibiliser davantage à la priorité à accorder à l'élévation du niveau de la formation des jeunes générations. Le problème qui se pose à nous est simple: nous devons préparer la génération la mieux formée de notre histoire.
Nous le devons parce que le progrès de la formation est une condition de la modernisation du pays dont nous voyons chaque jour qu'elle fait appel à des compétences nouvelles.
La nation doit se mobiliser autour de son école car la formation est un élément moteur du développement économique, social et culturel. Or, nombre de qualifications ne répondent plus aux besoins de notre société. Bien plus, dans de nombreux cas, la sortie de l'école correspond tout juste à l'acquisition de la lecture et de l'écriture.
A l'évidence, la responsabilité de cette situation n'incombe pas seulement à l'école-même si la rapidité de son adaptation au monde extérieur est insuffisante mais à la société tout entière qui donne trop souvent le spectacle de la facilité et non de l'effort.
Il est urgent pour les parents, les jeunes et les enseignants de prendre conscience que le concurrent n'habite plus le village d'à côté, mais le bord du pacifique ou le continent sud-américain. Il est urgent de comprendre que, désormais aucun avenir individuel ne se construira sans un travail constant pour devenir compétent, et même excellent, dans le domaine choisi. Urgent d'informer largement nos jeunes, garçons et filles, sur les métiers d'avenir, de faciliter les orientations vers les disciplines techniques, agricoles, scientifiques. Urgent aussi de comprendre que le temps d'une seule formation, pour un seul métier tout au long de sa vie est révolu, même chez nous.
Que le système éducatif traverse une crise aiguë, qui s'en étonnera lorsqu'en un quart de siècle, les effectifs scolarisés ont été multipliés par 5 en Afrique, et que le taux de scolarisation est passé dans le même temps de 36 à 75% en moyenne dans le primaire.
Il s'agit d'une crise structurelle, conséquence d'une croissance trop rapide, dont il ne faudrait pas tirer cette conclusion trop hâtive qui consisterait à dire que l'Afrique est trop scolarisée, ce qui est loin d'être le cas au regard des autres continents.
Pour retrouver la confiance dans notre système scolaire, nous devons procéder à une réforme fondamentale, mieux conformer les formations à nos exigences de production à venir, et restaurer en profondeur une école garante de l'ascension sociale des plus méritants.
L'investissement éducatif, même s'il coûte cher, est sans aucun doute, le plus rentable que nous puissions faire. L'enjeu en est l'émergence de nouvelles qualifications à la fois adaptées à nos besoins immédiats, aux exigences du monde moderne et capables de donner à la fois aux individus les moyens de leur épanouissement et à la société ceux de maîtriser son développement.
A cette fin, nous devons reconsidérer les programmes, les filières, les finalités de notre enseignement. Aujourd'hui l'approche théorique est trop favorisée au détriment des apprentissages pratiques. Ce dont nous avons le plus besoin en l'état actuel de notre développement, ce sont des techniciens dans les secteurs aussi divers que l'agriculture, la mécanique, la gestion, l'informatique, le management... Toute discipline indispensable au bon fonctionnement économique de notre pays.
Mais en même temps, nous devons relever les défis de la modernité et donc former des enseignants, des scientifiques, des chercheurs et des ingénieurs. Nous devons être les premiers en Afrique de l'ouest, y compris dans la formation, si nous souhaitons réellement participer au développement de notre région et affirmer aux yeux du monde notre identité culturelle.
Une loi de programmation pour l'éducation montrera aux jeunes notre détermination à agir dans la durée, pour l'égalité des chances et pour que tous puissent étudier dans de bonnes conditions.
Elle devra aussi permettre de lier les aspects quantitatifs et qualitatifs, de mettre en place une réforme pour la démocratisation de l'enseignement supérieur, de planifier les moyens matériels pour sa réalisation.
Il sera procédé à la réhabilitation et à la modernisation des installations à partir d'un audit faisant un état précis et exhaustif des instruments indispensables à la formation et à la recherche. Un effort particulier doit être accompli dans la maintenance des matériels pédagogiques.
Une formation qualifiante et une activité pour tous, voilà ce que doit être la perspective de chaque ivoirien dans les années qui viennent. Cela impose de développer les immenses ressources humaines de la Côte d'Ivoire de sorte que chacun renforce son action personnelle au service du pays par sa capacité d'entreprendre, de créer et de répondre aux besoins réels de notre développement. Il importe avant tout que les jeunes disposent aujourd'hui d'une compétence professionnelle, d'un savoir-faire pratique qui leur permettent de s'insérer harmonieusement dans le monde du travail et dans la société dès la fin de leurs études. C'est une priorité nationale.
Des formations qualifiantes doivent s'adresser aux bacheliers de l'enseignement en situation d'échec, aux diplômés de l'enseignement supérieur sans emploi, aux demandeurs de compléments de formation, et enfin à tous les personnels en poste désireux d'améliorer leur profil et de maîtriser les technologies nouvelles. Il est possible de faire des choix autrement. La Côte d'Ivoire a des atouts pour les années de la réussite à l'école.
VALORISER LES ENSEIGNEMENTS TECHNIQUES ET PROFESSIONNELS
Trop de jeunes diplômés ne trouvent pas d'emploi. La recherche de la meilleure adéquation possible formation-emploi est la condition première de la réussite d'un nouveau contrat pour l'école. Pour que l'école remplisse pleinement ce rôle en offrant à chacun de participer au processus de développement, il faut clarifier ses missions fondamentales: instruire, qualifier, intégrer. Il faut réaffirmer sa fonction d'unification sociale en renforçant l'adhésion des jeunes à l'apprentissage d'un métier dont l'économie a besoin notamment en produisant des qualifications nouvelles pour satisfaire aux évolutions du monde du travail. Un métier qui leur permette de mieux se situer dans la cité et de mieux vivre au quotidien. On ne souligne jamais assez l'importance de l'enseignement professionnel au bénéfice en définitive de la cohésion sociale.
La formation professionnelle est un moyen privilégié pour permettre aux jeunes sans qualification d'acquérir un emploi stable, valorisant et de s'intégrer durablement. Il est de la responsabilité de l'Etat et des collectivités territoriales d'y veiller et d'y participer.
J'ajouterai qu'en dépit d'efforts multiples, l'école reste un lieu fermé. La liaison entre le système de formation et la vie de l'entreprise demeure très insuffisante. Ces deux mondes se regardent, commencent à se parler alors qu'ils devraient vivre en harmonie. Mieux relier l'école et l'entreprise suppose de mieux penser les programmes et les contenus des formations en fonction des besoins de l'économie et de la société.
LE RETOUR DES JEUNES
AUX ACTIVITES AGRICOLES
Nul moins que moi ne saurait oublier que la Côte d'Ivoire est et demeurera longtemps une nation agricole dont les principales richesses sortent du travail de la terre, des métiers de la terre.
Les perspectives de développement des cultures d'exportation, la promotion du secteur agro-alimentaire basé sur de nouvelles technologies appellent un retour des jeunes aux activités agricoles.
Mais si un bel avenir nous est assuré, il ne s'y prépare pas autrement qu'ailleurs: il dépend de la formation des hommes, de la recherche et du développement des techniques nouvelles. L'enseignement et la recherche agricoles s'inscrivent désormais dans les priorités nationales. Il conviendra de donner aux exploitants agricoles, notamment aux jeunes qui auront à assurer la relève paysanne, et les femmes qui représentent l'essentiel de la main d'œuvre agricole, les connaissances nécessaires à une meilleure maîtrise de leur métier et d'introduire, dans leurs réflexes, des éléments de rationalité agronomique, technique et économique les conduisant à la recherche personnelle de solutions pratiques à leurs problèmes.
Il faut enfin enraciner et développer l'intelligence et le savoir-faire du développement agricole en milieu rural.
Cette volonté est devenue une urgence, car la désertification de nos campagnes a pour corollaire une perte de substance de matière grise et d'expérience.
Comment réagir? Plusieurs pistes pourraient être explorées : le collège rural, lieu de réussite scolaire, doit être un lieu performant au service du développement local, intégrant les techniques modernes de communication (apprentissage des langues étrangères, accès à des banques de données à caractère pédagogiques...) Il peut avoir aussi une fonction d'appui technique de proximité à des pépinières d'entreprises rurales à créer et une cellule d'appui au développement local.
Enfin l'université doit devenir un partenaire de choix des collectivités territoriales en milieu rural pour une meilleure prise en compte des besoins de formation supérieure correspondant à des débouchés existant localement. C'est en ce sens que le monde rural peut et doit participer à la modernité de notre société.
L'UNIVERSITE ET LES GRANDES ECOLES, VIVIERS DE
L'EXPRESSION DES MEILLEURS
Avoir été scolarisé ne signifie plus aujourd'hui avoir été formé. Pour un pays en situation d'émergence comme le nôtre, une seule question mérite d'être posée: Quelle est la proportion d'élèves et d'étudiants issus de notre système éducatif qui ont acquis, au terme d'un cursus couronné de succès, les compétences indispensables pour représenter une valeur économique sur le marché du travail?
Il nous faut résolument pratiquer une lecture économique de la réalité éducative. C'est pourquoi, le cursus scolaire et universitaire doit impérativement être marqué par des étapes dont chacune est auto-suffisante, c'est-à-dire sanctionnée par une certification de compétences qui autorise et permet l'insertion effective du lauréat dans la vie active, à un niveau qui soit conforme aux aptitudes qui sont les siennes et aux efforts consentis par sa famille et par la Nation pour qu'il l'atteigne.
Dans cet esprit d'efficacité et de rigueur, la culture de l'excellence et la promotion au mérite doivent redevenir les principes de base de la sélection scolaire et universitaire. Une sélection rigoureuse fondée sur l'égalité des chances et la promotion au seul mérite doivent constituer les seuls critères d'attribution des bourses qu'il convient de revaloriser.
Le principe qui doit prévaloir en la matière est le suivant: tout ivoirien, qui le mérite, doit avoir la possibilité d'entreprendre et de poursuivre des études qui le conduisent aussi loin que possible.
II n'est plus concevable que l'origine modeste d'une famille, et par conséquent la précarité de sa situation matérielle, puisse désormais constituer, pour une ivoirienne ou un ivoirien, un obstacle à sa scolarisation, et ce jusqu'au plus haut niveau.
UNE POLITIQUE AMBITIEUSE POUR L'UNIVERSITE ET LA RECHER CHE SCIENTIFIQUE
Notre pays, comme les autres pays du monde, est aujourd'hui confronté aux défis de mutations technologiques, économiques, culturelles qui ont connu peu de précédents dans l'histoire de l'humanité.
Parmi les cartes maîtresses qui nous permettront d'assurer cette situation et de nous en sortir, malgré les autres enjeux prioritaires, il en est deux qui relèvent directement de notre système éducatif: ce sont la recherche et le niveau de formation générale et professionnelle de nos cadres, autrement dit la qualité de notre enseignement supérieur et les moyens déployés en matière de recherche.
L'UNIVERSITE DE L'AVENIR
Pour répondre aux besoins d'encadrement, il faut doubler d'ici l'an 2000 le nombre d'étudiants. Ce qui implique de financer l'urgente réhabilitation des cités universitaires pour offrir les meilleures conditions de vie et d'études possibles et parallèlement de créer de nouveaux centres universitaires autonomes. Mais en raison des différences existant entre les régions, toutes les universités ne peuvent pas tirer, à effort égal, un égal bénéfice de l'autonomie.
L'Etat doit donc intervenir pour rétablir l'équilibre, en accordant davantage de moyens aux universités dont l'environnement économique n'est pas porteur.
Multiplication des antennes universitaires, adaptation des filières, amélioration des conditions de logement, et augmentation des bourses, plus grande autonomie des universités permettant un accroissement sans précédent du nombre des étudiants, développement de la recherche en liaison plus étroite avec les universités, voilà les grandes lignes de ce qu'il est indispensable de proposer à la nation et de mettre en œuvre rapidement.
L'objectif est d'améliorer tous les jours la qualité des entreprises ivoiriennes, leur compétitivité, et d'en être fier grâce à la formation des hommes dispensée par nos universités. A ce titre, le renforcement et la diversification des filières technologiques, en particulier des sections de techniciens supérieurs et des instituts universitaires de technologie, sont évidemment des projets nécessaires pour l'adaptation aux besoins toujours changeants et toujours plus exigeants de la Nation.
LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE POUR L'AFRIQUE
La recherche sera, elle aussi, un enjeu essentiel de la bataille pour le développement industriel à l'horizon du XXIème siècle. Les succès dans la compétition internationale reposeront largement sur les innovations technologiques.
Au moment où notre pays fait face à de formidables défis économiques et financiers, la volonté affichée depuis une quinzaine d'années, et à laquelle j'ai donné une impulsion décisive en 1995, est de mener une vraie politique au service de la recherche scientifique et technologique pour combler notre retard.
Le développement de la recherche scientifique est crucial pour notre pays. Nous pouvons déjà être fiers de la place prépondérante de certains de nos laboratoires en Afrique en particulier dans le domaine médical. Cependant nous sommes largement en dessous de nos besoins. Il s'agit là d'une nécessité politique tout autant qu'économique. Une recherche nationale et régionale, indépendante autant que possible de celle des pays du nord, est la garantie de notre autonomie, en même temps que la possibilité de participer honorablement à la communauté scientifique internationale.
Il faudra veiller à ce que cette recherche irrigue davantage l'enseignement supérieur et s'assurer qu'elle ouvre progressivement à une coordination ou une organisation à l'échelle de notre région. Une priorité doit être donnée à la recherche, au niveau national, mais aussi dans le cadre de l'UEMOA. En effet, les bénéfices d'une collaboration dans les divers domaines de la recherche sont multiples. Le financement de la recherche est évidemment le problème majeur. Certains développements exigent un financement d'un volume qui dépasse les capacités des seuls Etats ou firmes nationales. Les institutions internationales nous aident; nous ferons, par ailleurs, le maximum pour accorder des subventions d'Etat mais aussi pour organiser le mécénat ou le partenariat avec les grandes entreprises.
La climatologie, les recherches médicale et pharmaceutique, l'océanographie et la géologie semblent des voies qui s'offrent naturellement à nos investigations. La création par l'Etat de banques de données et de réseaux de courrier électronique, en cours d'élaboration, permettra cette coopération scientifique régionale et internationale, facteur de paix et de progrès pour tous.
En toute hypothèse, la recherche technologique coûte de plus en plus cher et des alliances stratégiques sur des objectifs précis permettent une meilleure compétitivité.
Aujourd'hui plus qu'hier, la recherche scientifique n'a de sens qu'à 'l’échelle internationale, et naturellement d'abord à l'échelle de notre région qui doit connaître dans le monde futur une force et une richesse industrielles à l'égal des autres continents.
Concrètement, notre recherche appliquée est morcelée et faible. Il est donc indispensable de la renforcer, de la coordonner par la création d'un Commissariat à la Recherche Technologique. Nous devons faire un effort gigantesque dans cette direction, grâce aux grands programmes de la nation, grâce aux entreprises nationales qui ont un rôle pilote à jouer, grâce aussi à l'introduction d'une "culture de la recherche" dans la formation de nos cadres industriels, de nos ingénieurs, de nos étudiants en science et technologie.
Dans une démocratie, il faut que les citoyens maîtrisent l'évolution de la société dans laquelle ils vivent. Les enjeux de la technologie sont dorénavant trop importants. Formation, recherche, culture, c'est le pari de l'intelligence. C'est aussi le pari de la Côte d'Ivoire pour sa réussite.
UNE CITE DES ARTS,
DES SCIENCES ET
DES TECHNIQUES
L'idéal, qui continue de guider ma réflexion et mes choix, cherche à donner aux jeunes le sens de la liberté et de la responsabilité. La passion de la liberté de l'esprit et la soif de connaissances sont le ferment de la création et de la culture. L'école, et plus précisément l'Université, sont les lieux d'élection de l'homme libre.
Je souhaite que tous, étudiants et professeurs, éprouvent la joie de partager et de vivre une éducation ouverte au monde sur un savoir délivré de toute allégeance en participant à l'expression de la culture scientifique universelle.
Je souhaite que la Côte d'Ivoire accueille à Yamoussoukro, une Cité des Arts des Sciences et des Techniques où toutes les réflexions sur le savoir, ses finalités, son adaptation aux exigences du monde moderne, aident à l'apparition d'un nouvel humanisme technologique qui saura opérer la fertilisation et la synthèse des formes traditionnelles et des formes modernes de notre culture.
Dans cette Cité, la libre circulation des hommes et des idées doit y être la règle pour transmettre et partager les connaissances les plus récentes (notamment dans les domaines scientifiques et techniques) mais surtout pour en débattre et envisager de nouveaux développements, car ce lieu privilégié de rencontres et d'échanges ne saurait se contenter de répéter ce que d'autres ont découvert. La cité aura une vocation à la recherche et à la création.
Dans chaque discipline, ce sont les personnalités les plus respectées qui seront invitées pour partager avec la Côte d'Ivoire l'immense champ de la connaissance. La Côte d'Ivoire souhaite être un pôle de convergence d'éminents chercheurs et de prestigieux professeurs pour œuvrer de concert avec les meilleurs esprits aux définitions culturelles et scientifiques du nouveau monde.
LA FORMATION PERMANENTE, UNE AUTRE CHANCE DE PROMOTION
Dans un monde où il faut s'instruire sans cesse pour ne pas être distancé, absorbé, oublié, il faut aussi penser à placer l'homme dans une exigence de formation continue avec pour promesse l'épanouissement de sa personnalité et un enrichissement professionnel. Ainsi, le droit à la formation permanente complète-t-il le droit à l'instruction.
La vie ne se découpera plus en trois tranches, à savoir la formation, l'activité et la retraite. La formation initiale ne scellera plus définitivement la somme de connaissances destinées à permettre l'exercice d'un métier. Il faudra apprendre de nouvelles techniques tout au long de sa vie professionnelle.
La formation permanente doit permettre le rattrapage d'une formation initiale insuffisante, elle doit permettre de faire des études qu'on n'a pas eu la chance d'entreprendre dans son jeune âge. Elle doit constituer une seconde chance, voire une troisième chance. Cela vaut en particulier pour les femmes qui dépendent pour leur promotion professionnelle d'une formation à laquelle elles n'ont que trop rarement eu accès.
C'est parce qu'elle lie efficacité et équité, compétitivité et justice sociale, que la formation après l'école devra connaître une véritable explosion dans les années qui viennent.
Ces formations nouvelles pourront d'ailleurs utiliser largement les compétences du système éducatif. Ce faisant, elles contribueront à rapprocher l'entreprise de l'école. Demain la présence des enseignants dans l'entreprise sera aussi nécessaire que la présence périodique des salariés à l'école.
Enfin cette formation permanente doit concerner aussi les travailleurs extérieurs aux entreprises, afin de contribuer à la réinsertion de catégories sociales qui risquent d'être marginalisées, (jeunes en difficulté, chômeurs...).
A l'horizon 2000, nous devrons être capables de mettre en formation professionnelle et technique non seulement une tranche d'âge, mais toute une génération. Cet enjeu fait appel à de nouveaux systèmes de transmission de connaissance avec lesquels nous devrons nous familiariser.
Par exemple, il faut envisager dès maintenant de mettre en place un système de formation à distance pour le secondaire et le supérieur, dont l'objectif sera dans un premier temps de désengorger l'espace éducatif qui risque d'être saturé.
Ce système constituerait à terme un des éléments moteurs d'une nouvelle pratique éducative, celle de la formation en alternance.
Une lecture moderne du système des classes d'âge chez les populations lagunaires qui pratiquent implicitement la formation en alternance et la solidarité entre les générations, pourrait constituer pour nous une source d'inspiration.
Cette solidarité dans le temps pourrait trouver son pendant dans une solidarité dans l'espace, consistant à encourager nos compatriotes expatriés et qui opèrent dans des services de pointe, à mettre leur savoir et leur savoir-faire au service de leur pays d'origine.
Nous pourrions dans ce domaine prendre appui sur un programme du PNUD qui a fait ses preuves dans d'autres pays, et qui consiste à transférer les connaissances acquises ailleurs par des nationaux en les incitant à encadrer des stages de formation continue à l'intention de leurs compatriotes intervenant dans le même domaine d'activité.
Le transfert de compétence à travers nos nationaux expatriés constituerait à n'en pas douter une voie privilégiée pour adapter ces technologies modernes aux spécificités nationales.
LA REVALORISATION DU NOBLE METIER D'ENSEIGNANT
Les succès de l'Ecole de la réussite ne dépendent pas seulement de l'amélioration des institutions, des programmes, des orientations nouvelles, ils dépendent aussi et surtout des hommes.
Nul ne doute que la qualité de l'enseignement ne repose en définitive entre les mains des maîtres, et qu'elle dépend par conséquent, non seulement de leur formation, mais aussi de leur moral, lequel est tout à la fois fonction du sort matériel qui leur est fait et de la place qui leur est reconnue dans la cité.
Pour reconstruire durablement une école de la réussite, il faut restaurer la considération que le corps enseignant est en droit de mériter. La démocratisation de l'enseignement ne doit pas être le contraire de la qualité et de l'excellence. L'image et la condition de l'enseignant doivent être revalorisées car il est celui en qui la société se reconnaît.
Toute amélioration de notre système éducatif passe par la revalorisation du noble métier d'enseignant, sur le double plan de leur formation et de leur condition.
Une telle démarche ne va pas non plus sans moyens d'accompagnement pour l'enseignant: recrutement de nouveaux professeurs dans les lycées techniques et d'enseignement professionnel, élévation du niveau de formation de ces professeurs, recherche de collaboration entre les entreprises et les enseignants pour donner aux formations recherchées des compétences multiples et complémentaires et donc un enrichissement pédagogique.
Nous avons la volonté de voir notre Université et nos Grandes Ecoles redevenir le creuset de l'excellence. Cela passe par l'effort particulier qui sera accompli en termes de rémunération et de carrière pour nos enseignants et nos chercheurs du Supérieur.
Sans remettre en cause le principe de la garantie de l'emploi dans la fonction publique, il convient de revaloriser les inspections et les notes administratives en tant qu'éléments d'appréciation des différents intervenants, de telle sorte que le profil de carrière d'un enseignant soit soumis aux mêmes exigences que celui d'un salarié: l'absentéisme et la démobilisation sanctionnés et inversement la disponibilité, mobilité, l'initiative doivent être récompensées.
Dans cette perspective, la demande de rigueur professionnelle ne se conçoit pas sans donner à chaque enseignant l'accès à un processus de promotion.
Des hommes et des femmes responsables, un métier en main, ces objectifs traduisent une exigence de formation, de culture et de démocratie. Cette exigence est celle de notre jeunesse, donc de notre avenir.(…) ".
La reforme de notre système éducatif
Pour une école qui prépare à la vie, une école rénovée et qualifiante
" L'école est l'instrument de la liberté et la clef de la réussite.
Je lance un appel pressant à tous mes compatriotes pour les sensibiliser davantage à la priorité à accorder à l'élévation du niveau de la formation des jeunes générations. Le problème qui se pose à nous est simple: nous devons préparer la génération la mieux formée de notre histoire.
Nous le devons parce que le progrès de la formation est une condition de la modernisation du pays dont nous voyons chaque jour qu'elle fait appel à des compétences nouvelles.
La nation doit se mobiliser autour de son école car la formation est un élément moteur du développement économique, social et culturel. Or, nombre de qualifications ne répondent plus aux besoins de notre société. Bien plus, dans de nombreux cas, la sortie de l'école correspond tout juste à l'acquisition de la lecture et de l'écriture.
A l'évidence, la responsabilité de cette situation n'incombe pas seulement à l'école-même si la rapidité de son adaptation au monde extérieur est insuffisante mais à la société tout entière qui donne trop souvent le spectacle de la facilité et non de l'effort.
Il est urgent pour les parents, les jeunes et les enseignants de prendre conscience que le concurrent n'habite plus le village d'à côté, mais le bord du pacifique ou le continent sud-américain. Il est urgent de comprendre que, désormais aucun avenir individuel ne se construira sans un travail constant pour devenir compétent, et même excellent, dans le domaine choisi. Urgent d'informer largement nos jeunes, garçons et filles, sur les métiers d'avenir, de faciliter les orientations vers les disciplines techniques, agricoles, scientifiques. Urgent aussi de comprendre que le temps d'une seule formation, pour un seul métier tout au long de sa vie est révolu, même chez nous.
Que le système éducatif traverse une crise aiguë, qui s'en étonnera lorsqu'en un quart de siècle, les effectifs scolarisés ont été multipliés par 5 en Afrique, et que le taux de scolarisation est passé dans le même temps de 36 à 75% en moyenne dans le primaire.
Il s'agit d'une crise structurelle, conséquence d'une croissance trop rapide, dont il ne faudrait pas tirer cette conclusion trop hâtive qui consisterait à dire que l'Afrique est trop scolarisée, ce qui est loin d'être le cas au regard des autres continents.
Pour retrouver la confiance dans notre système scolaire, nous devons procéder à une réforme fondamentale, mieux conformer les formations à nos exigences de production à venir, et restaurer en profondeur une école garante de l'ascension sociale des plus méritants.
L'investissement éducatif, même s'il coûte cher, est sans aucun doute, le plus rentable que nous puissions faire. L'enjeu en est l'émergence de nouvelles qualifications à la fois adaptées à nos besoins immédiats, aux exigences du monde moderne et capables de donner à la fois aux individus les moyens de leur épanouissement et à la société ceux de maîtriser son développement.
A cette fin, nous devons reconsidérer les programmes, les filières, les finalités de notre enseignement. Aujourd'hui l'approche théorique est trop favorisée au détriment des apprentissages pratiques. Ce dont nous avons le plus besoin en l'état actuel de notre développement, ce sont des techniciens dans les secteurs aussi divers que l'agriculture, la mécanique, la gestion, l'informatique, le management... Toute discipline indispensable au bon fonctionnement économique de notre pays.
Mais en même temps, nous devons relever les défis de la modernité et donc former des enseignants, des scientifiques, des chercheurs et des ingénieurs. Nous devons être les premiers en Afrique de l'ouest, y compris dans la formation, si nous souhaitons réellement participer au développement de notre région et affirmer aux yeux du monde notre identité culturelle.
Une loi de programmation pour l'éducation montrera aux jeunes notre détermination à agir dans la durée, pour l'égalité des chances et pour que tous puissent étudier dans de bonnes conditions.
Elle devra aussi permettre de lier les aspects quantitatifs et qualitatifs, de mettre en place une réforme pour la démocratisation de l'enseignement supérieur, de planifier les moyens matériels pour sa réalisation.
Il sera procédé à la réhabilitation et à la modernisation des installations à partir d'un audit faisant un état précis et exhaustif des instruments indispensables à la formation et à la recherche. Un effort particulier doit être accompli dans la maintenance des matériels pédagogiques.
Une formation qualifiante et une activité pour tous, voilà ce que doit être la perspective de chaque ivoirien dans les années qui viennent. Cela impose de développer les immenses ressources humaines de la Côte d'Ivoire de sorte que chacun renforce son action personnelle au service du pays par sa capacité d'entreprendre, de créer et de répondre aux besoins réels de notre développement. Il importe avant tout que les jeunes disposent aujourd'hui d'une compétence professionnelle, d'un savoir-faire pratique qui leur permettent de s'insérer harmonieusement dans le monde du travail et dans la société dès la fin de leurs études. C'est une priorité nationale.
Des formations qualifiantes doivent s'adresser aux bacheliers de l'enseignement en situation d'échec, aux diplômés de l'enseignement supérieur sans emploi, aux demandeurs de compléments de formation, et enfin à tous les personnels en poste désireux d'améliorer leur profil et de maîtriser les technologies nouvelles. Il est possible de faire des choix autrement. La Côte d'Ivoire a des atouts pour les années de la réussite à l'école.
VALORISER LES ENSEIGNEMENTS TECHNIQUES ET PROFESSIONNELS
Trop de jeunes diplômés ne trouvent pas d'emploi. La recherche de la meilleure adéquation possible formation-emploi est la condition première de la réussite d'un nouveau contrat pour l'école. Pour que l'école remplisse pleinement ce rôle en offrant à chacun de participer au processus de développement, il faut clarifier ses missions fondamentales: instruire, qualifier, intégrer. Il faut réaffirmer sa fonction d'unification sociale en renforçant l'adhésion des jeunes à l'apprentissage d'un métier dont l'économie a besoin notamment en produisant des qualifications nouvelles pour satisfaire aux évolutions du monde du travail. Un métier qui leur permette de mieux se situer dans la cité et de mieux vivre au quotidien. On ne souligne jamais assez l'importance de l'enseignement professionnel au bénéfice en définitive de la cohésion sociale.
La formation professionnelle est un moyen privilégié pour permettre aux jeunes sans qualification d'acquérir un emploi stable, valorisant et de s'intégrer durablement. Il est de la responsabilité de l'Etat et des collectivités territoriales d'y veiller et d'y participer.
J'ajouterai qu'en dépit d'efforts multiples, l'école reste un lieu fermé. La liaison entre le système de formation et la vie de l'entreprise demeure très insuffisante. Ces deux mondes se regardent, commencent à se parler alors qu'ils devraient vivre en harmonie. Mieux relier l'école et l'entreprise suppose de mieux penser les programmes et les contenus des formations en fonction des besoins de l'économie et de la société.
LE RETOUR DES JEUNES
AUX ACTIVITES AGRICOLES
Nul moins que moi ne saurait oublier que la Côte d'Ivoire est et demeurera longtemps une nation agricole dont les principales richesses sortent du travail de la terre, des métiers de la terre.
Les perspectives de développement des cultures d'exportation, la promotion du secteur agro-alimentaire basé sur de nouvelles technologies appellent un retour des jeunes aux activités agricoles.
Mais si un bel avenir nous est assuré, il ne s'y prépare pas autrement qu'ailleurs: il dépend de la formation des hommes, de la recherche et du développement des techniques nouvelles. L'enseignement et la recherche agricoles s'inscrivent désormais dans les priorités nationales. Il conviendra de donner aux exploitants agricoles, notamment aux jeunes qui auront à assurer la relève paysanne, et les femmes qui représentent l'essentiel de la main d'œuvre agricole, les connaissances nécessaires à une meilleure maîtrise de leur métier et d'introduire, dans leurs réflexes, des éléments de rationalité agronomique, technique et économique les conduisant à la recherche personnelle de solutions pratiques à leurs problèmes.
Il faut enfin enraciner et développer l'intelligence et le savoir-faire du développement agricole en milieu rural.
Cette volonté est devenue une urgence, car la désertification de nos campagnes a pour corollaire une perte de substance de matière grise et d'expérience.
Comment réagir? Plusieurs pistes pourraient être explorées : le collège rural, lieu de réussite scolaire, doit être un lieu performant au service du développement local, intégrant les techniques modernes de communication (apprentissage des langues étrangères, accès à des banques de données à caractère pédagogiques...) Il peut avoir aussi une fonction d'appui technique de proximité à des pépinières d'entreprises rurales à créer et une cellule d'appui au développement local.
Enfin l'université doit devenir un partenaire de choix des collectivités territoriales en milieu rural pour une meilleure prise en compte des besoins de formation supérieure correspondant à des débouchés existant localement. C'est en ce sens que le monde rural peut et doit participer à la modernité de notre société.
L'UNIVERSITE ET LES GRANDES ECOLES, VIVIERS DE
L'EXPRESSION DES MEILLEURS
Avoir été scolarisé ne signifie plus aujourd'hui avoir été formé. Pour un pays en situation d'émergence comme le nôtre, une seule question mérite d'être posée: Quelle est la proportion d'élèves et d'étudiants issus de notre système éducatif qui ont acquis, au terme d'un cursus couronné de succès, les compétences indispensables pour représenter une valeur économique sur le marché du travail?
Il nous faut résolument pratiquer une lecture économique de la réalité éducative. C'est pourquoi, le cursus scolaire et universitaire doit impérativement être marqué par des étapes dont chacune est auto-suffisante, c'est-à-dire sanctionnée par une certification de compétences qui autorise et permet l'insertion effective du lauréat dans la vie active, à un niveau qui soit conforme aux aptitudes qui sont les siennes et aux efforts consentis par sa famille et par la Nation pour qu'il l'atteigne.
Dans cet esprit d'efficacité et de rigueur, la culture de l'excellence et la promotion au mérite doivent redevenir les principes de base de la sélection scolaire et universitaire. Une sélection rigoureuse fondée sur l'égalité des chances et la promotion au seul mérite doivent constituer les seuls critères d'attribution des bourses qu'il convient de revaloriser.
Le principe qui doit prévaloir en la matière est le suivant: tout ivoirien, qui le mérite, doit avoir la possibilité d'entreprendre et de poursuivre des études qui le conduisent aussi loin que possible.
II n'est plus concevable que l'origine modeste d'une famille, et par conséquent la précarité de sa situation matérielle, puisse désormais constituer, pour une ivoirienne ou un ivoirien, un obstacle à sa scolarisation, et ce jusqu'au plus haut niveau.
UNE POLITIQUE AMBITIEUSE POUR L'UNIVERSITE ET LA RECHER CHE SCIENTIFIQUE
Notre pays, comme les autres pays du monde, est aujourd'hui confronté aux défis de mutations technologiques, économiques, culturelles qui ont connu peu de précédents dans l'histoire de l'humanité.
Parmi les cartes maîtresses qui nous permettront d'assurer cette situation et de nous en sortir, malgré les autres enjeux prioritaires, il en est deux qui relèvent directement de notre système éducatif: ce sont la recherche et le niveau de formation générale et professionnelle de nos cadres, autrement dit la qualité de notre enseignement supérieur et les moyens déployés en matière de recherche.
L'UNIVERSITE DE L'AVENIR
Pour répondre aux besoins d'encadrement, il faut doubler d'ici l'an 2000 le nombre d'étudiants. Ce qui implique de financer l'urgente réhabilitation des cités universitaires pour offrir les meilleures conditions de vie et d'études possibles et parallèlement de créer de nouveaux centres universitaires autonomes. Mais en raison des différences existant entre les régions, toutes les universités ne peuvent pas tirer, à effort égal, un égal bénéfice de l'autonomie.
L'Etat doit donc intervenir pour rétablir l'équilibre, en accordant davantage de moyens aux universités dont l'environnement économique n'est pas porteur.
Multiplication des antennes universitaires, adaptation des filières, amélioration des conditions de logement, et augmentation des bourses, plus grande autonomie des universités permettant un accroissement sans précédent du nombre des étudiants, développement de la recherche en liaison plus étroite avec les universités, voilà les grandes lignes de ce qu'il est indispensable de proposer à la nation et de mettre en œuvre rapidement.
L'objectif est d'améliorer tous les jours la qualité des entreprises ivoiriennes, leur compétitivité, et d'en être fier grâce à la formation des hommes dispensée par nos universités. A ce titre, le renforcement et la diversification des filières technologiques, en particulier des sections de techniciens supérieurs et des instituts universitaires de technologie, sont évidemment des projets nécessaires pour l'adaptation aux besoins toujours changeants et toujours plus exigeants de la Nation.
LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE POUR L'AFRIQUE
La recherche sera, elle aussi, un enjeu essentiel de la bataille pour le développement industriel à l'horizon du XXIème siècle. Les succès dans la compétition internationale reposeront largement sur les innovations technologiques.
Au moment où notre pays fait face à de formidables défis économiques et financiers, la volonté affichée depuis une quinzaine d'années, et à laquelle j'ai donné une impulsion décisive en 1995, est de mener une vraie politique au service de la recherche scientifique et technologique pour combler notre retard.
Le développement de la recherche scientifique est crucial pour notre pays. Nous pouvons déjà être fiers de la place prépondérante de certains de nos laboratoires en Afrique en particulier dans le domaine médical. Cependant nous sommes largement en dessous de nos besoins. Il s'agit là d'une nécessité politique tout autant qu'économique. Une recherche nationale et régionale, indépendante autant que possible de celle des pays du nord, est la garantie de notre autonomie, en même temps que la possibilité de participer honorablement à la communauté scientifique internationale.
Il faudra veiller à ce que cette recherche irrigue davantage l'enseignement supérieur et s'assurer qu'elle ouvre progressivement à une coordination ou une organisation à l'échelle de notre région. Une priorité doit être donnée à la recherche, au niveau national, mais aussi dans le cadre de l'UEMOA. En effet, les bénéfices d'une collaboration dans les divers domaines de la recherche sont multiples. Le financement de la recherche est évidemment le problème majeur. Certains développements exigent un financement d'un volume qui dépasse les capacités des seuls Etats ou firmes nationales. Les institutions internationales nous aident; nous ferons, par ailleurs, le maximum pour accorder des subventions d'Etat mais aussi pour organiser le mécénat ou le partenariat avec les grandes entreprises.
La climatologie, les recherches médicale et pharmaceutique, l'océanographie et la géologie semblent des voies qui s'offrent naturellement à nos investigations. La création par l'Etat de banques de données et de réseaux de courrier électronique, en cours d'élaboration, permettra cette coopération scientifique régionale et internationale, facteur de paix et de progrès pour tous.
En toute hypothèse, la recherche technologique coûte de plus en plus cher et des alliances stratégiques sur des objectifs précis permettent une meilleure compétitivité.
Aujourd'hui plus qu'hier, la recherche scientifique n'a de sens qu'à 'l’échelle internationale, et naturellement d'abord à l'échelle de notre région qui doit connaître dans le monde futur une force et une richesse industrielles à l'égal des autres continents.
Concrètement, notre recherche appliquée est morcelée et faible. Il est donc indispensable de la renforcer, de la coordonner par la création d'un Commissariat à la Recherche Technologique. Nous devons faire un effort gigantesque dans cette direction, grâce aux grands programmes de la nation, grâce aux entreprises nationales qui ont un rôle pilote à jouer, grâce aussi à l'introduction d'une "culture de la recherche" dans la formation de nos cadres industriels, de nos ingénieurs, de nos étudiants en science et technologie.
Dans une démocratie, il faut que les citoyens maîtrisent l'évolution de la société dans laquelle ils vivent. Les enjeux de la technologie sont dorénavant trop importants. Formation, recherche, culture, c'est le pari de l'intelligence. C'est aussi le pari de la Côte d'Ivoire pour sa réussite.
UNE CITE DES ARTS,
DES SCIENCES ET
DES TECHNIQUES
L'idéal, qui continue de guider ma réflexion et mes choix, cherche à donner aux jeunes le sens de la liberté et de la responsabilité. La passion de la liberté de l'esprit et la soif de connaissances sont le ferment de la création et de la culture. L'école, et plus précisément l'Université, sont les lieux d'élection de l'homme libre.
Je souhaite que tous, étudiants et professeurs, éprouvent la joie de partager et de vivre une éducation ouverte au monde sur un savoir délivré de toute allégeance en participant à l'expression de la culture scientifique universelle.
Je souhaite que la Côte d'Ivoire accueille à Yamoussoukro, une Cité des Arts des Sciences et des Techniques où toutes les réflexions sur le savoir, ses finalités, son adaptation aux exigences du monde moderne, aident à l'apparition d'un nouvel humanisme technologique qui saura opérer la fertilisation et la synthèse des formes traditionnelles et des formes modernes de notre culture.
Dans cette Cité, la libre circulation des hommes et des idées doit y être la règle pour transmettre et partager les connaissances les plus récentes (notamment dans les domaines scientifiques et techniques) mais surtout pour en débattre et envisager de nouveaux développements, car ce lieu privilégié de rencontres et d'échanges ne saurait se contenter de répéter ce que d'autres ont découvert. La cité aura une vocation à la recherche et à la création.
Dans chaque discipline, ce sont les personnalités les plus respectées qui seront invitées pour partager avec la Côte d'Ivoire l'immense champ de la connaissance. La Côte d'Ivoire souhaite être un pôle de convergence d'éminents chercheurs et de prestigieux professeurs pour œuvrer de concert avec les meilleurs esprits aux définitions culturelles et scientifiques du nouveau monde.
LA FORMATION PERMANENTE, UNE AUTRE CHANCE DE PROMOTION
Dans un monde où il faut s'instruire sans cesse pour ne pas être distancé, absorbé, oublié, il faut aussi penser à placer l'homme dans une exigence de formation continue avec pour promesse l'épanouissement de sa personnalité et un enrichissement professionnel. Ainsi, le droit à la formation permanente complète-t-il le droit à l'instruction.
La vie ne se découpera plus en trois tranches, à savoir la formation, l'activité et la retraite. La formation initiale ne scellera plus définitivement la somme de connaissances destinées à permettre l'exercice d'un métier. Il faudra apprendre de nouvelles techniques tout au long de sa vie professionnelle.
La formation permanente doit permettre le rattrapage d'une formation initiale insuffisante, elle doit permettre de faire des études qu'on n'a pas eu la chance d'entreprendre dans son jeune âge. Elle doit constituer une seconde chance, voire une troisième chance. Cela vaut en particulier pour les femmes qui dépendent pour leur promotion professionnelle d'une formation à laquelle elles n'ont que trop rarement eu accès.
C'est parce qu'elle lie efficacité et équité, compétitivité et justice sociale, que la formation après l'école devra connaître une véritable explosion dans les années qui viennent.
Ces formations nouvelles pourront d'ailleurs utiliser largement les compétences du système éducatif. Ce faisant, elles contribueront à rapprocher l'entreprise de l'école. Demain la présence des enseignants dans l'entreprise sera aussi nécessaire que la présence périodique des salariés à l'école.
Enfin cette formation permanente doit concerner aussi les travailleurs extérieurs aux entreprises, afin de contribuer à la réinsertion de catégories sociales qui risquent d'être marginalisées, (jeunes en difficulté, chômeurs...).
A l'horizon 2000, nous devrons être capables de mettre en formation professionnelle et technique non seulement une tranche d'âge, mais toute une génération. Cet enjeu fait appel à de nouveaux systèmes de transmission de connaissance avec lesquels nous devrons nous familiariser.
Par exemple, il faut envisager dès maintenant de mettre en place un système de formation à distance pour le secondaire et le supérieur, dont l'objectif sera dans un premier temps de désengorger l'espace éducatif qui risque d'être saturé.
Ce système constituerait à terme un des éléments moteurs d'une nouvelle pratique éducative, celle de la formation en alternance.
Une lecture moderne du système des classes d'âge chez les populations lagunaires qui pratiquent implicitement la formation en alternance et la solidarité entre les générations, pourrait constituer pour nous une source d'inspiration.
Cette solidarité dans le temps pourrait trouver son pendant dans une solidarité dans l'espace, consistant à encourager nos compatriotes expatriés et qui opèrent dans des services de pointe, à mettre leur savoir et leur savoir-faire au service de leur pays d'origine.
Nous pourrions dans ce domaine prendre appui sur un programme du PNUD qui a fait ses preuves dans d'autres pays, et qui consiste à transférer les connaissances acquises ailleurs par des nationaux en les incitant à encadrer des stages de formation continue à l'intention de leurs compatriotes intervenant dans le même domaine d'activité.
Le transfert de compétence à travers nos nationaux expatriés constituerait à n'en pas douter une voie privilégiée pour adapter ces technologies modernes aux spécificités nationales.
LA REVALORISATION DU NOBLE METIER D'ENSEIGNANT
Les succès de l'Ecole de la réussite ne dépendent pas seulement de l'amélioration des institutions, des programmes, des orientations nouvelles, ils dépendent aussi et surtout des hommes.
Nul ne doute que la qualité de l'enseignement ne repose en définitive entre les mains des maîtres, et qu'elle dépend par conséquent, non seulement de leur formation, mais aussi de leur moral, lequel est tout à la fois fonction du sort matériel qui leur est fait et de la place qui leur est reconnue dans la cité.
Pour reconstruire durablement une école de la réussite, il faut restaurer la considération que le corps enseignant est en droit de mériter. La démocratisation de l'enseignement ne doit pas être le contraire de la qualité et de l'excellence. L'image et la condition de l'enseignant doivent être revalorisées car il est celui en qui la société se reconnaît.
Toute amélioration de notre système éducatif passe par la revalorisation du noble métier d'enseignant, sur le double plan de leur formation et de leur condition.
Une telle démarche ne va pas non plus sans moyens d'accompagnement pour l'enseignant: recrutement de nouveaux professeurs dans les lycées techniques et d'enseignement professionnel, élévation du niveau de formation de ces professeurs, recherche de collaboration entre les entreprises et les enseignants pour donner aux formations recherchées des compétences multiples et complémentaires et donc un enrichissement pédagogique.
Nous avons la volonté de voir notre Université et nos Grandes Ecoles redevenir le creuset de l'excellence. Cela passe par l'effort particulier qui sera accompli en termes de rémunération et de carrière pour nos enseignants et nos chercheurs du Supérieur.
Sans remettre en cause le principe de la garantie de l'emploi dans la fonction publique, il convient de revaloriser les inspections et les notes administratives en tant qu'éléments d'appréciation des différents intervenants, de telle sorte que le profil de carrière d'un enseignant soit soumis aux mêmes exigences que celui d'un salarié: l'absentéisme et la démobilisation sanctionnés et inversement la disponibilité, mobilité, l'initiative doivent être récompensées.
Dans cette perspective, la demande de rigueur professionnelle ne se conçoit pas sans donner à chaque enseignant l'accès à un processus de promotion.
Des hommes et des femmes responsables, un métier en main, ces objectifs traduisent une exigence de formation, de culture et de démocratie. Cette exigence est celle de notre jeunesse, donc de notre avenir.(…) ".