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Société Publié le mercredi 16 décembre 2009 | Nord-Sud

Grève dans les hôpitaux publics : Le calvaire des malades d’Abobo et de Treichville

Elle est là. La grève du personnel soignant avec son corolaire de désagréments, de perturbations de prestation et de pertes en vie humaine a débuté hier. Cette fois-ci, le mouvement risque de causer plus de dégâts.

Hôpital général Houphouët Boigny d’Abobo. L’horloge indique 10 heures quand nous y arrivons. Le portail principal est fermé. Un coup d’œil à l’intérieur suffit pour se rendre compte que le mot d’ordre lancé par la Coordination des syndicats des personnels soignants de la santé est suivi. De l’autre côté, une entrée annexe. L’un des deux vigiles postés à cet endroit nous confirme la nouvelle : « Le personnel soignant ne travaille pas. Repassez après vendredi ». A ce même moment, une femme en travail et son mari arrivent à bord d’un taxi. Après des échanges avec le vigile, le taxi rebrousse chemin. « Je lui ai indiqué une clinique non loin d’ici, à la Sogefiha (un quartier de la même commune). Là-bas, elle sera mieux prise en charge. Ici, les sages-femmes ne travaillent pas », explique-t-il. Le service des urgences situé non loin de là est presque désert.

Service minimum à Cocody

Quelques patients, étendus sur des bancs. Parmi eux, une dame de la cinquantaine qui attend son fils. « Je suis venue me faire soigner. Je ne savais pas que les travailleurs faisaient la grève. J’attends mon fils qui m’enverra dans un autre hôpital. Un agent de santé qui a requis l’anonymat révèle que tous les malades hospitalisés aux urgences ont été libérés la veille. Selon lui, seules les personnes qui ont subi des opérations chirurgicales et qui ne sont pas encore rétablies sont dans cet hôpital. Un peu plus loin, au service de chirurgie, d’autres malades. La plupart d’entre eux ont encore des sparadraps à l’abdomen ou sur le dos. Ils témoignent qu’aucune visite médicale n’a été faite et que par conséquent, il n’y a eu ni de pansements ni de soins. « Je soigne moi-même ma fille. Je connais les médicaments qu’elle prend, alors j’en ai acheté à la pharmacie de l’hôpital », relate la dame. A côté du service de chirurgie, se trouve la maternité. Les portes sont fermées. « On ne travaille pas aujourd’hui, il n’ y a personne ici», signalent deux femmes qui se trouvaient à la porte à notre arrivée. Les autres services sont également fermés. Le bureau d’entrée qui, d’habitude, fourmille de monde, est fermé au grand désarroi des parents des malades qui arrivent. Jusqu’à notre départ des lieux, à 12 heures, aucun décès n’avait été signalé. Cap a été mis sur le Chu de Treichville. Chez les malades souffrants du cœur, à l’Institut de cardiologie de d’Abidjan, le parking est désert. Deux ou trois véhicules. A l’intérieur, un vigile assis, presqu’endormi. Cela justifie l’absence de travail. Aucun patient dans la salle d’attente. Selon lui, les malades qui viennent sont renvoyés vers le service des urgences de l’institut. Aux urgences, on ne reçoit pas. Aucun service minimum n’est assuré. Deux jeunes femmes, assises à la caisse, nous répètent la phrase du jour : «On ne travaille pas. Le personnel soignant est en grève pour cinq jours». Apparemment, les urgences ne fonctionnent pas. Un vieillard d’environ 70 ans est assis seul dans la salle d’attente. Interrogé, il affirme avoir été hospitalisé dans ce service, mais libéré lundi soir. Hier, il s’y est rendu pour des examens de routine. Il n’a pu les faire parce que les agents du laboratoire de l’Institut observent également un arrêt de travail. Plus loin, le service de médecine. Là-bas, les malades n’ont pas été libérés. Mais, ils n’ont bénéficié d’aucun soin. Aucun ballon accroché. Les malades sont tous couchés, le regard perdu. Une femme prévoit mettre son fils sous un traitement traditionnel dès le lendemain. « Je vais accentuer le traitement avec les médicaments traditionnels de paludisme à l’aide des feuilles. C’est de cette maladie que souffre mon fils depuis bientôt une semaine », annonce-t-elle. Les ‘’urgences de chirurgie’’et le service de chirurgie pédiatrique ne sont pas restés en marge. Une femme qui accompagnait son mari victime d’une hernie étranglée, aux urgences de chirurgie, a dû rebrousser chemin, selon un agent de santé qui y était. Comme toujours, la grève des agents de santé affecte les populations. Le collectif des syndicats grévistes ont choisi le Chu de Cocody comme lieu du service minimum. C’est dans cet hôpital qu’é­taient censés se diriger tous les malades du district d’Abidjan refoulés dans les autres hôpitaux publics de la capitale économique. Mais, seuls les cas d’accouchement et d’urgence ont été traités. Il n’y a eu ni opérations chirurgicales, ni de consultations.

Adélaïde Konin (stagiaire)
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