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Politique Publié le jeudi 24 décembre 2009 | Le Patriote

Filière café-cacao : Palais de justice - Des mères de famille battues par la police devant la cathédrale

« Trop c’est trop ! Depuis 17 mois nos parents sont en prison et sans jugement. Et aujourd’hui, on nous parle encore d’un troisième audit. S’ils n’ont rien contre eux qu’ils les libère !». Ces propos ont été tenus hier par des parents de prisonniers de la filière café-cacao détenus à la Maca (Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan) depuis près de 18 mois, ce, sans jugement. Il s’agit précisément de huit personnes ayant exercé les fonctions de Directeur administratifs et financiers (Daf) dans certaines structures de la filière café-cacao. A savoir Bolou Sophie Laure épouse Dago (Bcc), Loukou Ahou Dominique épouse Agbalessi (Frc), Kouassi Tohouri Prosper (Frc), Gnako Sokouri (Fgccc), Sahé Kouadio (Sarem), Digbeu Toh Lambert (Fdpcc), Souanga Koffi (Simatp), Kra Banny (Sifca-coop). Ces prévenus, face au refus de leur accorder la liberté provisoire ont décidé d'observer un sit-in à la Maca. Ayant fait déjà l'objet de plusieurs convocations dans le cadre de l'enquête, avec en prime la fourniture de tous les documents, ils disent ne pas comprendre qu'ils soient encore en détention. Surtout que les différents audits de l'inspection générale d'Etat et l'inspection générale des finances ne prouvent pas leur culpabilité. Tout comme les investigations conduites par la police économique et la Brigade de recherche de la gendarmerie. Ils disent ne plus être concernés à ce stade de la procédure et expliquent que la nomination de nouveaux dirigeants et responsables à la tête des structures élimine toute possibilité d'influence ou de dissimulation de preuves de nature à porter atteinte à la manifestation de la vérité. Certains dirigeants eux aussi détenus ont joint à la demande une lettre de décharge indiquant qu’en ce qui les concerne, ils n’ont fait qu’exécuter leurs instructions, conformément à leur contrat de travail. Aussi ces prisonniers qui ont écrit au Procureur Tchimou le 09 novembre 2009 avaient-ils rendez-vous avec lui hier.

La colère des parents contre Tchimou

A la question de savoir ce qu’ils sont venus faire en ce lieu, les parents des prisonniers nous ont fait savoir qu’ils étaient venus apporter leur soutien à leurs fils, filles, mères ou parents qui échangeaient depuis 12h avec le Procureur Tchimou pour lui demander la liberté provisoire. Pendant que nous attendions la fin de la rencontre entre le Procureur de la République et les Daf, certains parents n’ont pas manqué de crier leur ras-le-bol. « Depuis 9h nous sommes arrivés. Nous attendons de voir ce que le Procureur Tchimou dira. Il a parlé de détournements massifs mais il n’a rien prouvé et depuis nos parents croupissent en prison. Il faut qu’il les libère. Nous savons ce que nous préparons. Bientôt nous allons barrer les voies qui mènent à la Maca et faire de grandes manifestations car nous voulons qu’on juge nos parents puisque l’enquête n’a que trop duré », dit Mme Brigitte Sery, une des parentes d’un détenu de la filière venue apporter son soutien aux autres familles. Pour Mme Souanga, il est temps de libérer les prévenus. « Ce n’est pas avec eux que le président va faire sa réforme. Je ne mange même plus. On a toutes les difficultés pour scolariser les enfants. Je suis fatiguée de demander l’aumône », souligne-t-elle. Quant à la mère de Dago Sophie (une détenue), la voix nouée par l’émotion, elle estime que ‘‘pour des vols massifs, l’on n’a pas besoin de 17 mois d’enquête’’. Abondant dans le même sens, Kouakou Solange, sœur de Dago Sophie déplore : « On n’a pas besoin d’autant de temps quand on a annoncé en grandes pompes des vols massifs ! On nous parle d’un 3è audit. C’est pour préparer l’opinion à la tricherie, faire intervenir des dossiers qui n’ont rien à voir avec la procédure actuelle. La Justice ivoirienne c’est n’importe quoi. Mais le temps de Dieu est arrivé », a averti Kouakou Solange. Plus incisive, Allou Akissi Rose, mère de Ahou Dominique épouse Agbalessi, n’hésite pas à qualifier Tchimou de premier procureur et Sansan Kouao de deuxième procureur de la république. « Que Sansan Kouao vienne libérer ma fille sinon je me rendrai dans son village. Ma fille a tout perdu. J’attends qu’on me mette aussi en prison. Les enfants de ma fille n’ont plus de quiétude. Lorsqu’ils sont à l’école, leurs camarades n’hésitent pas à les traiter d’enfants de voleurs », souligne-t-elle entre deux sanglots. Pour Anselme Dago, frère au mari de Dago Sophie, ‘‘on a beau être républicain, 18 mois sans voir sa famille c’est déplorable’’. Et d’ajouter : « Quand on analyse, on voit l’injustice. Si c’était un jeune patriote qui avait maille à partir avec la justice, l’Etat aurait tout de suite trouvé une solution. C’est dommage que la présomption d’innocence n’existe pas. Qu’on nous dise ce qu’ils ont volé. Ce sont des otages de la république alors que les vrais voleurs sont en ville ». Vers 13h, les parents des détenus et les forces de l’ordre du palais de justice ne manquent pas de s’échanger des propos très durs. Autour de 13h15mn nous apprenons que la rencontre entre le procureur Tchimou et les huit prévenus vient de prendre fin. A 13h25mn, le bureau du Procureur Tchimou est assiégé par les mères des détenus. Car informées du refus de celui-ci d’accorder la liberté provisoire aux huit détenus. Au motif que c’est le juge d’instruction qui peut prendre une telle décision. La tension monte. Les parents des prisonniers dénoncent alors ‘‘une justice honteuse, hypocrite’’.

Des mères battues devant la cathédrale

Certains refusent de sortir du palais de justice tant que les prisonniers ne sont pas libérés. Tandis que d’autres veulent se constituer prisonniers. Le taux d’adrénaline monte de part et d’autres. Des échauffourées éclatent entre parents de détenus et forces de l’ordre. « Que Dieu ait pitié des péchés de Tchimou », indique un des parents des détenus. « Les péchés de Tchimou sont tels que Dieu n’en voudra pas. Il a mené le pays en bateau. Qu’il ait le courage de dire au président de la république qu’il s’es trompé », rétorque un autre. Dépassées par la situation, des renforts sont appelés. Arrivent alors à 14h, sur les lieux, des éléments de la préfecture de police. Les parents des prisonniers ne veulent nullement abdiquer. Ils finissent par sortir du palais de justice, pancartes en mains en scandant : « libérez nos parents !libérez nos parents ». Comme point de refuge, les parents des détenus choisissent l’entrée de la cathédrale Saint Paul du Plateau. Mais c’était mal connaître les forces des l’ordre. Celles-ci ont usé de coup de pieds et de matraques. Violentant à souhait des femmes, des mères de familles, qui peuvent être leurs mères. Restant ainsi, sourds aux cris et supplications. Certaines se sont écroulées mais ont pu se relever grâce au soutien des uns et des autres. Ces pauvres femmes ont été tabassées pour avoir réclamé moins d’injustice à la justice dans ce procès de la filière café-cacao.

Jean Eric ADINGRA
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