A côté des maquis et bars régulièrement interpellés, voire fermés pour leurs nuisances sonores, des églises et mosquées font de plus en plus l'objet de plaintes dans les différentes mairies d'Abidjan. Des citoyens leur reprochent de perturber leur tranquillité par des excès de bruit.
Le cas du collège Montherlant, à Adjamé-Renault, plante le décor. L'établissement qui compte près de 800 élèves a eu des démêlés avec une mosquée. Un pan du collège fait face à une église. L'autre pan, distant du premier d'une centaine de mètres, est situé devant une mosquée. Ce rapprochement a été la source d'une discorde. Les responsables de l'établissement scolaire se sont plaints du bruit des appels à la prière. Précisément ceux de 13h et de 15h qui trouvent élèves et enseignants en classe. Le muezzin utilise un mégaphone pour se faire entendre le plus loin possible. Ce que Montherlant trouve gênant. L'école n'a pas tardé à porter plainte contre le lieu de culte pour nuisance sonore. Selon un éducateur, le son du mégaphone empêche les apprenants de se concentrer. « Deux tiers de nos effectifs sont des affectés de l'Etat. Nous ne pouvons pas accepter que les cours soient toujours perturbés », explique-t-il.
Des plaintes contre églises et mosquées
Les responsables de l'établissement ont souhaité que le muezzin fasse son appel sans utiliser le haut-parleur. Selon l'éducateur, cette proposition a été refusée par l'imam de la mosquée. Le guide religieux aurait rétorqué qu'il s'agit d'un lieu de prière, un endroit consacré à Dieu et que par conséquent, l'appel à la prière doit se faire convenablement. N'ayant pas pu le convaincre, les responsables du groupe scolaire ont saisi la mairie d'Adjamé. « Nous avons envoyé une délégation pour régler le problème », explique Koné Fidèle, le chargé de communication de la mairie. Cette démarche amène l'imam à accepter l'abandon du mégaphone. « Depuis, les bruits ont cessé », se réjouit l'éducateur. Et la cohabitation est redevenue pacifique entre les deux voisins. L'autre partie de l'établissement fait face à une église. Les prières ne se faisant que les dimanches, elles ne gênent que les résidents.
Si cette église prie uniquement le dimanche, ce n'est pas le cas pour beaucoup de lieux de prière. Aux II-Plateaux, 7ème tranche, non loin de l'église Tabernacle, une communauté religieuse à forte audience donne des insomnies à J.B, un habitant du quartier. « Il n'y a pas de dimanche ici. Presque tous les soirs, ce sont des séances de prière avec de la musique à tout vent, des applaudissements tonnants, des cris stridents qui nous dérangent énormement », se plaint-il. Et selon lui, de jour en jour, le vacarme gagne en intensité avec l'arrivée de nouveaux fidèles. Le quartier n'a pas encore porté plainte pour ces nuisances sonores, mais il ne l'exclut pas. Pareil à la Riviera 2, où un religieux a révélé avoir le sommeil troublé par les bruits d'une église. « Tous les jours, de 20h jusqu'à l'aube, elle nous gêne. On est servi au quotidien. Souvent, les fidèles en prière se mettent à jeter des pierres sur nos maisons. J'attends que les riverains portent plainte pour me joindre à eux », explique Sékou Sylla, imam de la mosquée An Nour. Il arrive que le bruit sème la discorde entre différentes confessions religieuses. Ce qui s'est produit à Adjamé. Une année, la fête de la Tabaski a été célébrée un dimanche. Pendant que des musulmans officiaient la prière, les fidèles d'une église voisine priaient également. Chaque groupe a élevé le volume de son micro parce qu'il se sentait gêné par l'autre. Après la prière, une bagarre a éclaté entre les fidèles des deux lieux de prière. Heureusement, les guides ont réussi à calmer les esprits à temps, évitant ainsi l'irréparable.
Les municipalités qui reçoivent pétitions et plaintes verbales, sont conscientes du problème. A la mairie du Plateau, Terha Sinaly, directeur des relations publiques et de la communication, rappelle que récemment, des chrétiens ont été déguerpis en pleine veillée, non loin de la préfecture de police.
Sus aux nuisances sonores
Le vacarme de la veillée était tel que le voisinage en a eu marre. Le Plateau reste cependant l'une des communes les moins touchées par ce type de nuisance sonore. Même si M. Térha ajoute cet autre fait : « Avant cela, nous avons reçu une plainte contre une autre église qui faisait assez de bruit, mais cela remonte à longtemps ». A Adjamé, l'on préfère régler ce type de problème à l'amiable. Le cas du collège Montherlant est là pour en témoigner.
Au service technique de la mairie de Cocody, situé à la Rivéra 2, M. Coulibaly qui gère les dossiers des nuisances sonores, note environ 300 plaintes qui sont reçues par son service, bien qu'elles ne concernent pas que les lieux de culte. A Abobo, les habitants ne cessent de saisir le service technique que gère Olivier Gnangne. Ils dénoncent les bruits d'orchestres d'églises ou de muezzins utilisant des mégaphones. Les veillées de prière sont les plus indexées, selon M. Gnangne. Et, à chaque plainte, la mairie use de tact pour calmer les ardeurs des plaignants. Car, selon Yves Doumbia, chargé de communication de la mairie, il faut éviter de créer d'autres problèmes beaucoup plus délicats en voulant régler un simple problème de bruits sonores. Certains diront que les plus bruyants et les plus blâmables sont les maquis et bars qui inondent leur environnement de sons mondains. Doit-on pour autant garder le silence devant les excès que s'autorisent certains citoyens dans leurs lieux de culte au détriment du bien-être d'autres citoyens ? La laïcité choisie par la Nation ivoirienne et la diversité confessionnelle des Ivoiriens n'imposent-elles pas que personne ne gêne son prochain dans la pratique de sa religion ? Que dit la loi sur les nuisances sonores ? Quels sont les avis du citoyen et des responsables des principales confessions religieuses sur le sujet ? Nord-Sud Quotidien ouvre le débat.
Raphaël Tanoh
Le cas du collège Montherlant, à Adjamé-Renault, plante le décor. L'établissement qui compte près de 800 élèves a eu des démêlés avec une mosquée. Un pan du collège fait face à une église. L'autre pan, distant du premier d'une centaine de mètres, est situé devant une mosquée. Ce rapprochement a été la source d'une discorde. Les responsables de l'établissement scolaire se sont plaints du bruit des appels à la prière. Précisément ceux de 13h et de 15h qui trouvent élèves et enseignants en classe. Le muezzin utilise un mégaphone pour se faire entendre le plus loin possible. Ce que Montherlant trouve gênant. L'école n'a pas tardé à porter plainte contre le lieu de culte pour nuisance sonore. Selon un éducateur, le son du mégaphone empêche les apprenants de se concentrer. « Deux tiers de nos effectifs sont des affectés de l'Etat. Nous ne pouvons pas accepter que les cours soient toujours perturbés », explique-t-il.
Des plaintes contre églises et mosquées
Les responsables de l'établissement ont souhaité que le muezzin fasse son appel sans utiliser le haut-parleur. Selon l'éducateur, cette proposition a été refusée par l'imam de la mosquée. Le guide religieux aurait rétorqué qu'il s'agit d'un lieu de prière, un endroit consacré à Dieu et que par conséquent, l'appel à la prière doit se faire convenablement. N'ayant pas pu le convaincre, les responsables du groupe scolaire ont saisi la mairie d'Adjamé. « Nous avons envoyé une délégation pour régler le problème », explique Koné Fidèle, le chargé de communication de la mairie. Cette démarche amène l'imam à accepter l'abandon du mégaphone. « Depuis, les bruits ont cessé », se réjouit l'éducateur. Et la cohabitation est redevenue pacifique entre les deux voisins. L'autre partie de l'établissement fait face à une église. Les prières ne se faisant que les dimanches, elles ne gênent que les résidents.
Si cette église prie uniquement le dimanche, ce n'est pas le cas pour beaucoup de lieux de prière. Aux II-Plateaux, 7ème tranche, non loin de l'église Tabernacle, une communauté religieuse à forte audience donne des insomnies à J.B, un habitant du quartier. « Il n'y a pas de dimanche ici. Presque tous les soirs, ce sont des séances de prière avec de la musique à tout vent, des applaudissements tonnants, des cris stridents qui nous dérangent énormement », se plaint-il. Et selon lui, de jour en jour, le vacarme gagne en intensité avec l'arrivée de nouveaux fidèles. Le quartier n'a pas encore porté plainte pour ces nuisances sonores, mais il ne l'exclut pas. Pareil à la Riviera 2, où un religieux a révélé avoir le sommeil troublé par les bruits d'une église. « Tous les jours, de 20h jusqu'à l'aube, elle nous gêne. On est servi au quotidien. Souvent, les fidèles en prière se mettent à jeter des pierres sur nos maisons. J'attends que les riverains portent plainte pour me joindre à eux », explique Sékou Sylla, imam de la mosquée An Nour. Il arrive que le bruit sème la discorde entre différentes confessions religieuses. Ce qui s'est produit à Adjamé. Une année, la fête de la Tabaski a été célébrée un dimanche. Pendant que des musulmans officiaient la prière, les fidèles d'une église voisine priaient également. Chaque groupe a élevé le volume de son micro parce qu'il se sentait gêné par l'autre. Après la prière, une bagarre a éclaté entre les fidèles des deux lieux de prière. Heureusement, les guides ont réussi à calmer les esprits à temps, évitant ainsi l'irréparable.
Les municipalités qui reçoivent pétitions et plaintes verbales, sont conscientes du problème. A la mairie du Plateau, Terha Sinaly, directeur des relations publiques et de la communication, rappelle que récemment, des chrétiens ont été déguerpis en pleine veillée, non loin de la préfecture de police.
Sus aux nuisances sonores
Le vacarme de la veillée était tel que le voisinage en a eu marre. Le Plateau reste cependant l'une des communes les moins touchées par ce type de nuisance sonore. Même si M. Térha ajoute cet autre fait : « Avant cela, nous avons reçu une plainte contre une autre église qui faisait assez de bruit, mais cela remonte à longtemps ». A Adjamé, l'on préfère régler ce type de problème à l'amiable. Le cas du collège Montherlant est là pour en témoigner.
Au service technique de la mairie de Cocody, situé à la Rivéra 2, M. Coulibaly qui gère les dossiers des nuisances sonores, note environ 300 plaintes qui sont reçues par son service, bien qu'elles ne concernent pas que les lieux de culte. A Abobo, les habitants ne cessent de saisir le service technique que gère Olivier Gnangne. Ils dénoncent les bruits d'orchestres d'églises ou de muezzins utilisant des mégaphones. Les veillées de prière sont les plus indexées, selon M. Gnangne. Et, à chaque plainte, la mairie use de tact pour calmer les ardeurs des plaignants. Car, selon Yves Doumbia, chargé de communication de la mairie, il faut éviter de créer d'autres problèmes beaucoup plus délicats en voulant régler un simple problème de bruits sonores. Certains diront que les plus bruyants et les plus blâmables sont les maquis et bars qui inondent leur environnement de sons mondains. Doit-on pour autant garder le silence devant les excès que s'autorisent certains citoyens dans leurs lieux de culte au détriment du bien-être d'autres citoyens ? La laïcité choisie par la Nation ivoirienne et la diversité confessionnelle des Ivoiriens n'imposent-elles pas que personne ne gêne son prochain dans la pratique de sa religion ? Que dit la loi sur les nuisances sonores ? Quels sont les avis du citoyen et des responsables des principales confessions religieuses sur le sujet ? Nord-Sud Quotidien ouvre le débat.
Raphaël Tanoh