x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Société Publié le jeudi 25 février 2010 | Nord-Sud

Relations sexuelles en milieu scolaire (2e partie) : Les grossesses poussent, poussent…dans les écoles

Dans la première partie de ce dossier sur les relations sexuelles en milieu scolaire publiée hier, nous mettions en évidence la difficile application de la charte de bonne conduite qui interdit des rapports intimes entre enseignants et élèves. Cette seconde partie tire la sonnette d'alarme sur la prolifération des grossesses chez les apprenantes.


K.R. ne terminera pas l'année scolaire en classe. Cette adolescente en classe de 5ème au lycée moderne de Grand-Bassam a contracté une grossesse non désirée qui va sûrement l'éloigner de son établissement.

Benjamine d'une famille de 5 enfants, sa mère est commerçante, mais ne tire pas grand' chose de son commerce. Elle habite le quartier Impérial. L'état de la maison laisse à désirer. Très tôt, la jeune fille a été contrainte de se prendre en charge. K.R n'a pas cherché loin pour pouvoir joindre les deux bouts. Son petit ami est maçon. C'est ce dernier qui l'aide de temps à autre. Leur amitié qui dure depuis plus d'une année, a débouché sur une grossesse. K.R. n'a pas terminé le premier trimestre à cause de son état. Depuis plus deux semaines, elle attend son certificat de grossesse. « Ça a été difficile pour moi d'accepter une grossesse à cet âge. Mais, j'ai fini par la garder. Ma mère qui était très remontée contre moi, a elle aussi fini par m'accepter. Les choses ne sont pas aussi simples pour moi. J'ai décidé de faire entre-temps des cours du soir pour ne pas oublier mes leçons. Je veux aller à l'école », explique la collégienne qui admet amèrement que son rendement a baissé. « Il m'a été demandé de présenter un certificat de grossesse. Pour l'instant, je suis à la maison. L'école n'accepte pas les élèves en grossesse», regrette-t-elle. B.E, 17 ans, vit la même galère. Elève en classe de 2nd dans le même lycée, elle est elle aussi enceinte. Son état ne lui permet pas de suivre normalement les cours. Elle est clouée à la maison. Sa situation n'est pas reluisante. Elle dépend de son petit ami, qui est lui aussi élève. Elle loue une maison dans un quartier précaire de la ville. A. C, élève dans le même lycée est dégoûté. Pour lui, cette élève n'a pas bonne presse. « Elle fait de sa beauté un fonds de commerce. L'école, ce n'est pas sa priorité », avoue-t-il. Contrairement aux deux précédentes filles, Y.A élève en classe de 3ème est très éveillée. Bien que brillante, elle est n'a pas échappé à cette situation. Avec son état, elle réussit à suivre les cours. Elle tient à son examen. Vêtue de sa tenue d'école, qui laisse entrevoir son bedon, le visage innocent, les cheveux courts, elle accepte de se confier à nous. A l'en croire, cette idée de grossesse n'avait jamais effleuré son esprit. «Je vis chez ma grand-mère depuis ma classe de 6ème. Mon petit ami est lui élève dans un lycée de Dabou. Il est l'auteur de ma grossesse. Je n'étais pas préparée à cela. Au début, j'ai voulu faire un avortement. Mes tantes m'ont conduite chez un médecin pour le faire. Celui-ci a trouvé que j'étais trop jeune. Et que cette pratique n'était pas sans conséquence. Je pourrais être stérile ou mourir dans le pire des cas.


La démission des parents

Ce n'est pas rose. Moi, enceinte en classe de 3ème», raconte-t-elle les larmes aux yeux. Elle se plaint aussi de son résultat scolaire, qui va décroissant. «Mon rendement en clase a considérablement baissé. En 4ème j'avais entre 12 et 13 de moyenne. Cette année, je me retrouve avec 11 au premier trimestre. Je ne sais pas vraiment si je pourrai me présenter au brevet d'études du premier cycle (Bepc)» et d'ajouter l'air désabusé « Je demande à mes camarades d'écouter les conseils de leurs parents». Les responsables d'établissement constatent avec impuissance, la montée en puissance des cas de grossesse au sein de leur école. Au lycée II de Grand-Bassam par exemple, en deux ans, le nombre de grossesses a doublé pour le premier trimestre. «Cette année, précise notre source, il y a plus de cas de grossesses au premier cycle qu'au second. L'âge des filles concernées varie entre 16 et 23 ans.» Notre source souligne que ces statistiques ne sont pas synonyme d'une sagesse chez les filles des grandes classes : « Elles passent plutôt le plus clair de leur temps à faire des curetages.» A cela, il faut ajouter le fait que les résultats pour ce trimestre ne sont pas fameux, surtout pour les classes d'examen. 9, 27 de moyenne générale pour toutes les classes de 3ème. En Tles D et A, on enregistre des moyennes de 08 sur 20. Mme Tanoh, proviseur du Lycée II de Grand-Bassam, déplore la démission des parents d'élèves. Au lycée I, on enregistre par contre 1 seul cas de grossesse pour le premier trimestre, contre 4 au premier trimestre de l'année dernière. Au collège moderne d'Aboisso, ce sont 7 cas pour le premier trimestre. Les âges varient entre 12 et 19 ans. « Ces chiffres n'ont pas varié par rapport à l'année antérieure », déclare M. Koffi Edmond, éducateur. Au lycée moderne d'Aboisso, l'on enregistre plutôt une réduction. M. Dohou Claude, éducateur, révèle qu'il n'existe (pour le moment) que deux cas officiels, contre 13 l'année dernière au premier trimestre. A la fin de l'année dernière, l'école avait enregistré 21 cas de grossesse pour un effectif total de 4.026 élèves dont environ 1.400 filles. Cette année, l'établissement compte 4.201 élèves dont 1.563 filles. Les jours à venir, il est prévu une réunion de direction sur le sujet. A la suite de cela, se tiendra une autre réunion avec les chefs de classes pour débattre de plusieurs points dont celui des grossesses».

99 cas à Aboisso en 2009

L'année dernière, dans la direction régionale de l'éducation nationale (Dren) d'Aboisso, ce sont 99 cas de grossesse qui ont été enregistrés. Une situation que le directeur régional Haoulé Zirimba Jacques avait déplorée au cours du séminaire de réflexion sur l'amélioration des résultats scolaires, tenu les 27 et 28 à Krindjabo. Les causes, selon lui, sont multiples : un environnement malsain, surtout depuis la suppression des internats. Selon lui, les foyers qui ont remplacé les internats sont de véritables nids de la débauche. Ces filles dont l'âge varie entre 15 et 20 ans sont livrées à des prédateurs qui rôdent autour de ces foyers. S'ajoutent la floraison de bars et de clubs vidéo autour des écoles.


Emmanuelle Kanga à Grand-Bassam
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Société

Toutes les vidéos Société à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ