Après les informations que nous avions reçues et qui faisaient état de surfacturations dans l`acquisition des engins pour pistes villageoises, acquisitions faites par le Comité de gestion de la filière café cacao, nous avons, dans un souci d`équilibre de l`information, rencontré, au 23ème étage de l`immeuble de la Caistab le mardi 2 mars, M. Gilbert Anoh qu`assistaient 4 de ses collaborateurs, pour lui demander sa part de vérité. Nous vous proposons en intégralité, sa réaction.
Monsieur Anoh Gilbert, des informations en notre possession font état de ce qu`il y a eu des surfacturations dans l`achat d`engins pour l`entretien des pistes villageoises. Lesquels engins ont été acquis dans le courant de l`année 2009. Selon nos informations, ces engins n`ont coûté que 3,728 milliards. Or, vous avez déclaré les avoir achetés à 7, 2 milliards. Pouvez-vous nous expliquer cette situation ?
Vous avez bien fait de venir nous rencontrer. Parce que, quand vous achetez un engin en Chine, vous avez son transport, ses frais d`assurances, son dédouanement, son montage, bref vous avez un certain nombre de charges inhérentes à prendre en compte. A notre conférence de presse à laquelle a assisté votre collègue Djè KM le 4 février dernier et même avant, lorsque le président de la République remettait officiellement ces engins le 19 octobre dernier, nous avons annoncé ce chiffre de 7,2 milliards. Et si vous étiez là, vous aussi pour voir ces acquisitions, vous sauriez qu`il n`y a pas que les engins. Il y a aussi les frais d`approche qui font partie de ce montant.
Donc ce sont ces frais d`approche qui ont fait passer le montant de 3,7 milliards à 7,2 milliards ?
Le journal " Le Quotidien " est revenu sur le même sujet il y a une semaine. Nous avons produit un droit de réponse. Mais nous avons constaté que " Le Quotidien " a occulté une partie de notre droit de réponse qui montre en détail la décomposition des 7,2 milliards. Parce qu`ils veulent toujours laisser le flou dans la tête des gens. Ces engins font 3,7 milliards y compris les pièces détachées. Vous avez les bennes, les graders, les bulldozers, les compacteurs. Il y a également les frais d`approche, notamment les frais de douane, d`aconage et de transit. Il y a les frais de montage des engins, les frais de port et de transport des engins dans les différentes localités du pays. Il faut ajouter les camions qui ont été achetés localement et la Tva que nous avons payée directement avec les fournisseurs. Vous pouvez aller vérifier à la douane, mener des enquêtes à la " Sari " pour vérifier les camions de 11 et de 7 tonnes, les pick-up, les camions citerne à gasoil. Vous avez aussi le système de GPS qui permet de vérifier par exemple que l`engin est en train de travailler effectivement à Soubré au lieu d`être à San Pédro. Tous les coûts mis ensemble font 7,2 milliards. Quand nous avons fait les prospections ici, ces engins nous revenaient à 20 millions de dollars.
Dans votre droit de réponse à " Le Quotidien ", vous parliez de Forexi-Sa qui devrait gérer ces engins. Mais que après coup, vous avez retiré cette gestion à Forexi-Sa parce que cette société avait un passif de 2 milliards et que si les engins lui avaient été confiés, ils auraient fait l`objet de saisie conservatoire. Dans ce cas, pourquoi avez-vous confié la charge de l`importation de ces engins à Forexi-Sa au point où tous les documents ayant servi à l`importation portent et l`entête de Forexi-Sa et la signature du Dg de Forexi-Sa ?
Je peux vous affirmer que Forexi n`a négocié aucun contrat. C`est le comité de gestion qui a négocié tous les contrats. Nous avons un droit de réserve parce qu`il y a en ce moment une enquête en cours sur la filière. Il y a des choses, si nous en parlons, elles peuvent avoir des influences sur les décisions de justice en cours. C`est pour cela que nous ne pouvons pas trop parler, afin de laisser la justice faire son travail. Mais je peux vous dire que le comité de gestion a été mis en place par une ordonnance du président de la République, ordonnance qui a été complétée par un décret. Dans ces décisions, il ressort que tous les actifs de la filière (financiers, industriels et humains) sont mis à la disposition du comité de gestion. Donc la Forexi est un actif de la filière. L`actionnaire majoritaire à 94,84% de Forexi, c`est la filière aujourd`hui représentée de manière légale par le comité de gestion. Donc Forexi appartient au comité de gestion. Tout comme Coco Service, Sifca-Coop et bien d`autres, ont été réquisitionnées et mises à la disposition du comité pour lui permettre de réussir sa mission. Après avoir fait un tour d`horizon pour voir ces entreprises, nous avons constaté que dans le cadre des pistes rurales, la filière mettait beaucoup d`argent avant que nous n`arrivions à sa tête. La filière dépensait 9 milliards par an pour réaliser 1200Km…
Monsieur Anoh, vous ne répondez pas à ma question…
J`arrive. Et donc quand nous avons fait les calculs, nous avons réalisé que ça tournait autour de 6 à 7 millions pratiquement par Km réalisé. Et nous avons trouvé que c`est quand même assez élevé. Nous sommes dans ce secteur depuis une trentaine d`années et au niveau des zones de savane, je veux parler de la Cidt, nous avons eu à nous occuper aussi des pistes rurales et ça ne coûtait pas autant. Comment se fait-il que l`on dépense 7 millions par Km pour faire ces pistes-là ? Nous avons constaté aussi que la pression fiscale avait aussi une incidence sur le revenu des producteurs vu que c`est la parafiscalité. On fait des prélèvements même si c`est 5 F, 10 F. et donc notre souci était d`alléger cette pression en faisant en sorte que certains objectifs soient atteints. Nous avons constaté au cours de notre tournée que toutes les pistes étaient dégradées. Et que par cette approche de 1200Km, il fallait 10 ans pour qu`une piste rurale de la zone cacaoyère puisse bénéficier d`une intervention parce qu`on fait 1200Km. Et avec le Bnetd, l`Agéroute et avec les informations que nous avons, il y a quinze mille Km dans cette zone et chaque année, on ne reprofilait que 1200Km avec 9 milliards. Et quand nous sommes arrivés, l`Agéroute nous a appris qu`il fallait réactualiser le programme pour l`année 2009. Dans la réactualisation, nos 1200Km nous revenaient à 14 milliards. On s`est dit qu`on ne pouvait pas s`en sortir et qu`il fallait trouver une voie qui nous permette de pouvoir réaliser quelque chose. Dans les études que nous avons eu à faire, nous avons remarqué que le matériel représentait plus de 60% du coût lié à la location du matériel. On s`est dit que si nous réussissons à acquérir du matériel bon marché et fiable, nous aurons réussi à résoudre le problème. Cela nous permettra de réaliser plus de Km de piste avec le même montant, même en incluant les amortissements. Nous nous sommes tourné donc vers la Chine parce que nous avons constaté que les pays de l`Occident commandent maintenant tout ce qui est de l`industrie secondaire en Asie (Chine, Malaisie…). Après donc ces investigations, nous avons constaté que pour les mêmes machines, ici, ça nous faisait 20 millions de dollars hors taxe. C`est-à-dire en gros, 10 milliards Fcfa, sans les taxes et sans les pièces détachées. Alors que nous étions à 7,5 millions de dollars y compris les pièces détachées (bien sûr hors taxes) vendues port-Abidjan. Donc ces 3,5 milliards dont vous parlez, c`est vendu port-Abidjan. C`est y compris le transport et autres qui reviennent à 7,5 millions de dollars. Il y a aussi l`assurance. Ces engins sont des " Cummins " qui ne sont pas très connus ici mais qui ont une cote plus élevée que les " Caterpillar ". Ils sont surtout utilisés aux Etats Unis. A partir de ce moment, nous n`avions pas de raison de douter de la qualité de ces engins. Nous avons même fait l`amortissement sur 5 ans alors que pour les gros investissements de ce genre, c`est 10 ans. En mesurant même la longévité de ces engins, nous nous sommes rendus compte qu`au lieu de faire 1200Km, on pouvait faire 10 à 11000Km ce qui fait 10 fois ce qui était fait avant. Et pour faire cela, nous avons pensé à la Forexi. Parce que quand nous sommes arrivés, nous avons essayé de voir toutes les acquisitions et on s`est rendu compte que tout était en faillite pratiquement. Lors de la prise de fonction du comité de gestion, aucune entreprise, aucune acquisition n`était viable. Elles étaient toutes au dépôt de bilan. Sifca-Coop était à moins 4 milliards. Elle vivait sur des fonds propres négatifs, c`est-à-dire que sur le plan légal même, elle n`existait plus. Et c`est pareil pour Coco service et Forexi. Que faire donc ? Etant donné que Forexi a une composante forage, nous avons eu à un moment, l`idée d`acquérir Forexi. Car dans le cadre des activités du comité de gestion, il y a tout ce qui est hydraulique villageoise. A ce niveau-là, l`approche d`acquérir Forexi était une bonne chose. Même il faut voir aussi son coût de réalisation pour apprécier si elle est compétitive. Quand on a envoyé nos experts faire l`état des lieux, on a vu que Forexi était dans une situation délicate de moins 2 milliards. Et c`était surtout des dettes vis-à-vis des tiers qu`elle ne pouvait pas payer. Nous avons eu l`idée de faire ces acquisitions d`engins pour permettre à Forexi de pouvoir avoir une seconde composante. Mais le problème va se poser par la suite. Fallait-il laisser Forexi, système de régie faire ce travail ? Mais les créanciers de Forexi peuvent saisir du jour au lendemain les comptes de Forexi. Pour confier donc la gestion de ces engins à Forexi, il fallait donc apurer ces 2 milliards pour qu`elle soit fiable, viable et sans poursuites.
Vous n`aviez pas pris la décision d`apurer ces dettes avant de confier l`importation des engins à Forexi ?
J`en arrive. Après l`état des lieux, nous avons compris que Forexi n`avait pas les moyens de sa politique. Ils n`ont même pas de matériels de bonne qualité pour forer. Donc, même si on mettait 2 milliards pour payer les dettes, il fallait encore investir 500 millions à 1 milliard pour acheter du matériel pour que l`activité première puisse fonctionner. Pour l`acquisition des engins, nous avons utilisé seulement le code d`importation de Forexi. Forexi n`a signé aucun contrat. Nous n`avons pas pris 5 F aux mains de Forexi pour acheter ces engins. Nous avons un compte comité de gestion au FIMR (Fonds d`investissement en milieu rural). A partir du moment où on a eu connaissance du problème, on pouvait toujours voir comment trouver les pistes. Mais la contrainte majeure, c`est la Banque mondiale qui, dans le cadre du Ppte, a signé des accords avec le gouvernement ivoirien. Et la filière café cacao fait partie des conditionnalités pour le point d`achèvement Ppte. Cela veut dire que si on fait des détournements, ça va bloquer le Ppte. Donc nous ne pouvons pas nous permettre cela. Tous les mois, les comptes du comité de gestion sont transmis au ministère de l`Economie et des finances. Tous les trimestres, au conseil des ministres et tous les mois à la Banque mondiale. On a besoin de la Banque mondiale pour tous les mouvements sur les comptes. La Forexi n`a jamais lancé d`elle-même, en tant qu`entreprise, l`achat des engins.
Avez-vous décidé de liquider Forexi ?
J`en arrive. La Forexi n`étant pas en bon état, on a essayé de l`équiper. Et le ministre de l`Agriculture nous a soutenus dans ce domaine pour dire aux gens de la Banque mondiale que la régie n`est pas mauvaise en soi. C`est quand vous n`avez pas de ressources pour ajouter dans votre régie qu`elle pose problème. La banque a voulu que ce soient des privés. Nous sommes d`accord pour les privés mais nous avons constaté qu`ils n`ont pas les moyens de leur politique. Nous avons donc fait un appel d`offres pour confier les engins d`un commun accord avec le Bnetd, la direction des marchés publics, à des privés qui ont été choisis.
Avez-vous décidé de liquider Forexi ?
La liquidation de Forexi, si elle arrive. Vous savez, ça dépend, ça dépend de quel type de liquidation. Forexi n`est pas la seule entreprise qui pourrait éventuellement passer par là. Nous essayons de trouver des voies et moyens pour éventuellement la sauver. Mais tout est question de ressources. Vous avez entendu parler de Fulton ? Nous sommes actuellement en liquidation de Fulton. Aujourd`hui, Forexi est en cessation de paiement. Qu`est-ce qu`on fait ? Le propriétaire regarde dans sa caisse, s`il y a quelque chose, je mets pour que la société fonctionne, mais, et si je n`en ai pas ? Pour l`instant, nous n`avons pas encore pris cette décision mais c`est une décision envisageable.
Qu`est-ce qui explique la démission du Dg de Forexi ?
Mais posez la question au Dg de Forexi ! Ce que je peux vous dire, il y a tellement d`amalgames. Le Dg de Forexi a été embauché il y a un peu plus d`un an par le Conseil d`Administration de Forexi. Nous, nous n`avons fait qu`entériner. Voilà, mes collaborateurs sont là. On nous a informés que, comme l`autre Dg était poursuivi dans le cadre de l`enquête sur la filière, alors ils ont trouvé un autre Dg. Et ce Dg, est effectivement venu, nous, nous avons reçu un courrier au moment où il partait, où il a dit que comme nous n`avons pas pu relever Forexi et que si lui, il avait accepté d`être Dg, c`est parce qu`il avait pensé qu`on était prêt à mettre suffisamment de ressources pour que la société puisse repartir. Mais étant donné qu`il n`y a pas de ressources, il préfère aller se chercher ailleurs. Il est libre de partir. Mais c`est lui qui peut mieux vous expliquer pourquoi il est parti.
Entretien réalisé par Assalé Tiémoko
Collaboration : François Bécanty
Monsieur Anoh Gilbert, des informations en notre possession font état de ce qu`il y a eu des surfacturations dans l`achat d`engins pour l`entretien des pistes villageoises. Lesquels engins ont été acquis dans le courant de l`année 2009. Selon nos informations, ces engins n`ont coûté que 3,728 milliards. Or, vous avez déclaré les avoir achetés à 7, 2 milliards. Pouvez-vous nous expliquer cette situation ?
Vous avez bien fait de venir nous rencontrer. Parce que, quand vous achetez un engin en Chine, vous avez son transport, ses frais d`assurances, son dédouanement, son montage, bref vous avez un certain nombre de charges inhérentes à prendre en compte. A notre conférence de presse à laquelle a assisté votre collègue Djè KM le 4 février dernier et même avant, lorsque le président de la République remettait officiellement ces engins le 19 octobre dernier, nous avons annoncé ce chiffre de 7,2 milliards. Et si vous étiez là, vous aussi pour voir ces acquisitions, vous sauriez qu`il n`y a pas que les engins. Il y a aussi les frais d`approche qui font partie de ce montant.
Donc ce sont ces frais d`approche qui ont fait passer le montant de 3,7 milliards à 7,2 milliards ?
Le journal " Le Quotidien " est revenu sur le même sujet il y a une semaine. Nous avons produit un droit de réponse. Mais nous avons constaté que " Le Quotidien " a occulté une partie de notre droit de réponse qui montre en détail la décomposition des 7,2 milliards. Parce qu`ils veulent toujours laisser le flou dans la tête des gens. Ces engins font 3,7 milliards y compris les pièces détachées. Vous avez les bennes, les graders, les bulldozers, les compacteurs. Il y a également les frais d`approche, notamment les frais de douane, d`aconage et de transit. Il y a les frais de montage des engins, les frais de port et de transport des engins dans les différentes localités du pays. Il faut ajouter les camions qui ont été achetés localement et la Tva que nous avons payée directement avec les fournisseurs. Vous pouvez aller vérifier à la douane, mener des enquêtes à la " Sari " pour vérifier les camions de 11 et de 7 tonnes, les pick-up, les camions citerne à gasoil. Vous avez aussi le système de GPS qui permet de vérifier par exemple que l`engin est en train de travailler effectivement à Soubré au lieu d`être à San Pédro. Tous les coûts mis ensemble font 7,2 milliards. Quand nous avons fait les prospections ici, ces engins nous revenaient à 20 millions de dollars.
Dans votre droit de réponse à " Le Quotidien ", vous parliez de Forexi-Sa qui devrait gérer ces engins. Mais que après coup, vous avez retiré cette gestion à Forexi-Sa parce que cette société avait un passif de 2 milliards et que si les engins lui avaient été confiés, ils auraient fait l`objet de saisie conservatoire. Dans ce cas, pourquoi avez-vous confié la charge de l`importation de ces engins à Forexi-Sa au point où tous les documents ayant servi à l`importation portent et l`entête de Forexi-Sa et la signature du Dg de Forexi-Sa ?
Je peux vous affirmer que Forexi n`a négocié aucun contrat. C`est le comité de gestion qui a négocié tous les contrats. Nous avons un droit de réserve parce qu`il y a en ce moment une enquête en cours sur la filière. Il y a des choses, si nous en parlons, elles peuvent avoir des influences sur les décisions de justice en cours. C`est pour cela que nous ne pouvons pas trop parler, afin de laisser la justice faire son travail. Mais je peux vous dire que le comité de gestion a été mis en place par une ordonnance du président de la République, ordonnance qui a été complétée par un décret. Dans ces décisions, il ressort que tous les actifs de la filière (financiers, industriels et humains) sont mis à la disposition du comité de gestion. Donc la Forexi est un actif de la filière. L`actionnaire majoritaire à 94,84% de Forexi, c`est la filière aujourd`hui représentée de manière légale par le comité de gestion. Donc Forexi appartient au comité de gestion. Tout comme Coco Service, Sifca-Coop et bien d`autres, ont été réquisitionnées et mises à la disposition du comité pour lui permettre de réussir sa mission. Après avoir fait un tour d`horizon pour voir ces entreprises, nous avons constaté que dans le cadre des pistes rurales, la filière mettait beaucoup d`argent avant que nous n`arrivions à sa tête. La filière dépensait 9 milliards par an pour réaliser 1200Km…
Monsieur Anoh, vous ne répondez pas à ma question…
J`arrive. Et donc quand nous avons fait les calculs, nous avons réalisé que ça tournait autour de 6 à 7 millions pratiquement par Km réalisé. Et nous avons trouvé que c`est quand même assez élevé. Nous sommes dans ce secteur depuis une trentaine d`années et au niveau des zones de savane, je veux parler de la Cidt, nous avons eu à nous occuper aussi des pistes rurales et ça ne coûtait pas autant. Comment se fait-il que l`on dépense 7 millions par Km pour faire ces pistes-là ? Nous avons constaté aussi que la pression fiscale avait aussi une incidence sur le revenu des producteurs vu que c`est la parafiscalité. On fait des prélèvements même si c`est 5 F, 10 F. et donc notre souci était d`alléger cette pression en faisant en sorte que certains objectifs soient atteints. Nous avons constaté au cours de notre tournée que toutes les pistes étaient dégradées. Et que par cette approche de 1200Km, il fallait 10 ans pour qu`une piste rurale de la zone cacaoyère puisse bénéficier d`une intervention parce qu`on fait 1200Km. Et avec le Bnetd, l`Agéroute et avec les informations que nous avons, il y a quinze mille Km dans cette zone et chaque année, on ne reprofilait que 1200Km avec 9 milliards. Et quand nous sommes arrivés, l`Agéroute nous a appris qu`il fallait réactualiser le programme pour l`année 2009. Dans la réactualisation, nos 1200Km nous revenaient à 14 milliards. On s`est dit qu`on ne pouvait pas s`en sortir et qu`il fallait trouver une voie qui nous permette de pouvoir réaliser quelque chose. Dans les études que nous avons eu à faire, nous avons remarqué que le matériel représentait plus de 60% du coût lié à la location du matériel. On s`est dit que si nous réussissons à acquérir du matériel bon marché et fiable, nous aurons réussi à résoudre le problème. Cela nous permettra de réaliser plus de Km de piste avec le même montant, même en incluant les amortissements. Nous nous sommes tourné donc vers la Chine parce que nous avons constaté que les pays de l`Occident commandent maintenant tout ce qui est de l`industrie secondaire en Asie (Chine, Malaisie…). Après donc ces investigations, nous avons constaté que pour les mêmes machines, ici, ça nous faisait 20 millions de dollars hors taxe. C`est-à-dire en gros, 10 milliards Fcfa, sans les taxes et sans les pièces détachées. Alors que nous étions à 7,5 millions de dollars y compris les pièces détachées (bien sûr hors taxes) vendues port-Abidjan. Donc ces 3,5 milliards dont vous parlez, c`est vendu port-Abidjan. C`est y compris le transport et autres qui reviennent à 7,5 millions de dollars. Il y a aussi l`assurance. Ces engins sont des " Cummins " qui ne sont pas très connus ici mais qui ont une cote plus élevée que les " Caterpillar ". Ils sont surtout utilisés aux Etats Unis. A partir de ce moment, nous n`avions pas de raison de douter de la qualité de ces engins. Nous avons même fait l`amortissement sur 5 ans alors que pour les gros investissements de ce genre, c`est 10 ans. En mesurant même la longévité de ces engins, nous nous sommes rendus compte qu`au lieu de faire 1200Km, on pouvait faire 10 à 11000Km ce qui fait 10 fois ce qui était fait avant. Et pour faire cela, nous avons pensé à la Forexi. Parce que quand nous sommes arrivés, nous avons essayé de voir toutes les acquisitions et on s`est rendu compte que tout était en faillite pratiquement. Lors de la prise de fonction du comité de gestion, aucune entreprise, aucune acquisition n`était viable. Elles étaient toutes au dépôt de bilan. Sifca-Coop était à moins 4 milliards. Elle vivait sur des fonds propres négatifs, c`est-à-dire que sur le plan légal même, elle n`existait plus. Et c`est pareil pour Coco service et Forexi. Que faire donc ? Etant donné que Forexi a une composante forage, nous avons eu à un moment, l`idée d`acquérir Forexi. Car dans le cadre des activités du comité de gestion, il y a tout ce qui est hydraulique villageoise. A ce niveau-là, l`approche d`acquérir Forexi était une bonne chose. Même il faut voir aussi son coût de réalisation pour apprécier si elle est compétitive. Quand on a envoyé nos experts faire l`état des lieux, on a vu que Forexi était dans une situation délicate de moins 2 milliards. Et c`était surtout des dettes vis-à-vis des tiers qu`elle ne pouvait pas payer. Nous avons eu l`idée de faire ces acquisitions d`engins pour permettre à Forexi de pouvoir avoir une seconde composante. Mais le problème va se poser par la suite. Fallait-il laisser Forexi, système de régie faire ce travail ? Mais les créanciers de Forexi peuvent saisir du jour au lendemain les comptes de Forexi. Pour confier donc la gestion de ces engins à Forexi, il fallait donc apurer ces 2 milliards pour qu`elle soit fiable, viable et sans poursuites.
Vous n`aviez pas pris la décision d`apurer ces dettes avant de confier l`importation des engins à Forexi ?
J`en arrive. Après l`état des lieux, nous avons compris que Forexi n`avait pas les moyens de sa politique. Ils n`ont même pas de matériels de bonne qualité pour forer. Donc, même si on mettait 2 milliards pour payer les dettes, il fallait encore investir 500 millions à 1 milliard pour acheter du matériel pour que l`activité première puisse fonctionner. Pour l`acquisition des engins, nous avons utilisé seulement le code d`importation de Forexi. Forexi n`a signé aucun contrat. Nous n`avons pas pris 5 F aux mains de Forexi pour acheter ces engins. Nous avons un compte comité de gestion au FIMR (Fonds d`investissement en milieu rural). A partir du moment où on a eu connaissance du problème, on pouvait toujours voir comment trouver les pistes. Mais la contrainte majeure, c`est la Banque mondiale qui, dans le cadre du Ppte, a signé des accords avec le gouvernement ivoirien. Et la filière café cacao fait partie des conditionnalités pour le point d`achèvement Ppte. Cela veut dire que si on fait des détournements, ça va bloquer le Ppte. Donc nous ne pouvons pas nous permettre cela. Tous les mois, les comptes du comité de gestion sont transmis au ministère de l`Economie et des finances. Tous les trimestres, au conseil des ministres et tous les mois à la Banque mondiale. On a besoin de la Banque mondiale pour tous les mouvements sur les comptes. La Forexi n`a jamais lancé d`elle-même, en tant qu`entreprise, l`achat des engins.
Avez-vous décidé de liquider Forexi ?
J`en arrive. La Forexi n`étant pas en bon état, on a essayé de l`équiper. Et le ministre de l`Agriculture nous a soutenus dans ce domaine pour dire aux gens de la Banque mondiale que la régie n`est pas mauvaise en soi. C`est quand vous n`avez pas de ressources pour ajouter dans votre régie qu`elle pose problème. La banque a voulu que ce soient des privés. Nous sommes d`accord pour les privés mais nous avons constaté qu`ils n`ont pas les moyens de leur politique. Nous avons donc fait un appel d`offres pour confier les engins d`un commun accord avec le Bnetd, la direction des marchés publics, à des privés qui ont été choisis.
Avez-vous décidé de liquider Forexi ?
La liquidation de Forexi, si elle arrive. Vous savez, ça dépend, ça dépend de quel type de liquidation. Forexi n`est pas la seule entreprise qui pourrait éventuellement passer par là. Nous essayons de trouver des voies et moyens pour éventuellement la sauver. Mais tout est question de ressources. Vous avez entendu parler de Fulton ? Nous sommes actuellement en liquidation de Fulton. Aujourd`hui, Forexi est en cessation de paiement. Qu`est-ce qu`on fait ? Le propriétaire regarde dans sa caisse, s`il y a quelque chose, je mets pour que la société fonctionne, mais, et si je n`en ai pas ? Pour l`instant, nous n`avons pas encore pris cette décision mais c`est une décision envisageable.
Qu`est-ce qui explique la démission du Dg de Forexi ?
Mais posez la question au Dg de Forexi ! Ce que je peux vous dire, il y a tellement d`amalgames. Le Dg de Forexi a été embauché il y a un peu plus d`un an par le Conseil d`Administration de Forexi. Nous, nous n`avons fait qu`entériner. Voilà, mes collaborateurs sont là. On nous a informés que, comme l`autre Dg était poursuivi dans le cadre de l`enquête sur la filière, alors ils ont trouvé un autre Dg. Et ce Dg, est effectivement venu, nous, nous avons reçu un courrier au moment où il partait, où il a dit que comme nous n`avons pas pu relever Forexi et que si lui, il avait accepté d`être Dg, c`est parce qu`il avait pensé qu`on était prêt à mettre suffisamment de ressources pour que la société puisse repartir. Mais étant donné qu`il n`y a pas de ressources, il préfère aller se chercher ailleurs. Il est libre de partir. Mais c`est lui qui peut mieux vous expliquer pourquoi il est parti.
Entretien réalisé par Assalé Tiémoko
Collaboration : François Bécanty