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Société Publié le lundi 22 mars 2010 | L’expression

La vie après le travailLa retraite, un autre temps de souffrance

Après les difficultés du parcours professionnels les travailleurs sont appelés malheureusement à faire face d’autres souffrances, pour avoir accès à ce qui leur dû.

Devant sa maison de retraité dans la cité balnéaire de Port-Bouët. Djédou Maxime est toujours étendu sur une natte décousue et rongée à moitié. Espérant être libéré d’un moment à l’autre par la maladie. Mais cet espoir semble prendre l’allure d’une illusion. Septuagénaire ce retraité a passé sa carrière à l’ancienne Air Afrique. Aujourd’hui confronté à de nombreux problèmes, sociaux. A longueur de journée, Djédjou ne cesse de revivre ses moments gais lorsqu’il était en fonction pour noyer le spleen.
Une retraite mal préparée ? Victime d’un mauvais traitement de la caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps) ? Ils sont nombreux, des anciens cadres et employés à se retrouver dans cette précarité sociale. Comme cet ancien agent du privé, c’est une multitude de retraités qui vivent une situation peu décente. Il manière générale les cas de santé et de dettes constituent le lot quotidien de ces anciens travailleurs. Tout comme D. Maxime, Lohourou Fulbert, un instituteur à la retraite à Koumassi Sogefiha n’est plus loin d’être mis à la porte par le propriétaire. A preuve avec une petite pension mensuelle, il ne peut couvrir ses besoins « Je dois payer mon loyer. Assurer la popote et la scolarité de mes enfants et autres charges. Et tout cela à partir de cette maigre pension. Or la cherté de la vie en Côte d’Ivoire devient intenable de jour en jour. Mais l’Etat ne tient pas compte de cela pour revoir à la hausse la pension des retraités », explique Lohourou Fulbert. Les seniors, anciens du privé comme du public, se disent insatisfaits de leur sort. Que de plaintes partout ! Et pour des raisons diverses. Mais les principales raisons sont celles liées à la modicité de la pension pour certains et pour d’autres à l’irrégularité de cette paie (pour ceux du secteur privé). La pension principale source de revenus du retraité est une allocation pécuniaire versée par la Cnps, ou l’Etat. Elle est personnelle, viagère, incessible et insaisissable. Pour la condition d’âge de la retraite, la limite varie selon la catégorie du fonctionnaire. Elle est fixée à 57 ans pour la majorité des emplois. 60 ans pour la catégorie A4 à A7, 65 ans pour les professeurs d’université et les magistrats avec une condition de durée d’au moins 30 ans de service effectif. Dans toutes les communes d’Abidjan, l’on retrouve des retraités. Ils occupent des endroits ciblés. Ce sont surtout les espaces ouverts comme les jardins publics.
Des endroits souvent animés de débats politiques. A Koumassi, l’on les retrouve regroupés à Inch Allah ou au petit stade de la Sogefiha. A Port-Bouet, ils passent leur temps devant la Coopérative d’épargne et de crédit (Coopec) ou ils sillonnent les locaux du centre pilote. A Yopougon, l’on les voit nombreux dans les « parlements » dont ils assurent presque la permanence. Pour la journée et vaincre le spleen, chaque retraité a sa démarche : « Je passe ma journée en suivant une chronologie », affirme Touré Karamoko, un ex-policier résidant aux deux Plateaux. Après son petit déjeuner, il va faire sa revue de presse dans les points de vente de journaux. A 10 h, il se rend chez ses amis qui ne sont plus en fonction comme lui. Ensemble, ils font une lecture de l’actualité. Il prend congé d’eux lorsque midi est proche, pour déjeuner et faire sa sieste. A partir de 16 h, il va chercher ses filles à l’école. Avec elles, ils partent à la rencontre de son épouse au marché. Une vendeuse de denrées alimentaires. Ensemble, ils rentrent à 18 h à la maison. Avec cette démarche quotidienne, T. K. ne se sent pas inactif. Lorsqu’il ne se rend pas chez ses amis, c’est la lecture. Et souvent une petite sieste pour reposer l’organisme : « J’aime occuper mon temps par la culture. Je flâne moins. Comme pendant le service, j’ai toujours été hors de la famille, maintenant, j’ai décidé d’être toujours à côté d’elle » explique t-il. A la différence de ce retraité, d’autres ont préféré le petit commerce.

Lutter contre l’ennui…
C’est le cas de Koffi Ernest. Ce senior est à longueur de journée couché dans son hamac près d’un tablier. Il vend de la cigarette, du savon, de la friandise et des condiments de sauce. La clientèle de K. E est constante parce qu’il est cordial et aime faire des prêts : « Les femmes et les jeunes de mon entourage ne peuvent pas me laisser pour aller chez les Mauritaniens parce que je les arrange», affirme-t-il. Certains par contre, passent la journée à jouer au Ludo ou au damier. Mais la plupart des retraités convergent vers le Plateau. Le constat est général. Les anciens travailleurs aiment le gain facile. Ainsi on les voit, nombreux sur les aires des jeux de hasard ou les endroits de pari. Comme la pétanque ou le Pmu. A cet effet, au Plateau ils ont la possibilité de s’épanouir toute la journée à travers des échanges avec des amis ou des connaissances qui sont en fonction. Il y a aussi la Sorbonne où on parle et fait la politique. Pour gérer leurs revenus, les retraités ont recours à diverses méthodes. Des techniques de gestion appropriée. A l’exemple des cotisations tournantes. D’autres, font garder leur argent par des Nigérians (Anangotchè ou Aladji) qui font les tours des commerçants. Avec eux, l’on peut retirer son argent à tout moment. L’avantage avec des Anangotchè, selon un habitué, est ‘’qu’en cas d’urgence, ce dernier peut vous faire des prêts ». «Ma vraie banque et mes vrais emprunteurs sont ces mêmes personnes. Sans elles, je n’aurais pas la tête tranquille en ce moment. Chaque fois que je les sollicite, elles me viennent en aide», révèle Elvis D. Il précise qu’à force d’être familiarisé à elles, il ne sent pas véritablement le poids de sa retraite. Si cette pratique fait de temps en temps sourire certains souscripteurs, elle ne les met pas toujours à l’abri des surprises désagréables. Plusieurs souscripteurs révèlent que des Anangotchè ont disparu avec leur argent. Mais d’autres, certainement plus prudents coupent court. Ils préfèrent verser leurs fonds aux mains de leurs épouses pour s’occuper des charges de la famille : « C’est ma femme qui est chargée de gérer mes biens. Je lui donne tout ce que je gagne dans ma période de retraite pour le gérer.
Et ça marche », confie un autre. Pour ceux qui font confiance à leurs épouses, cela a permis de faire du commerce pour soutenir la famille. Que de difficultés sociales. Pourtant des anciens travailleurs ont préparé ce temps définitif de repos.

…..ou préparer ce temps de repos



Gabriel K. s’est investi dans la culture de l’hévéa et du palmier à huile à Bangolo. Un investissement commencé pendant qu’il était en fonction. Avec sa vingtaine d’hectares Gabriel est à l’abri des vices de la retraite. Et, il n’a pas à se plaindre. Il dit heureux. Mieux il précise qu’avec ses plantations il gagner plus que son salaire de fonctionnaire : «Je viens chercher cette petite pension pour ne pas qu’elle reste aux mains des gens. Sinon contrairement à mes amis retraités, je n’accorde pas grand-chose aux miettes qu’on me donne comme pension. Aujourd’hui, je suis un paysan au sens propre», se vante G.K devant la Caisse générale de retraite des agents de l’Etat (Cgrae) au Plateau. Ici une multitude de séniors déambulent dans la cour pour des problèmes de papiers. Tout comme Gabriel, Boli Florence, a réalise dans l’élevage. Aujourd’hui elle ne vit que des fruits de sa ferme. Elle révèle que ses ventes sont régulières. Toutes choses qui une opératrice économique. Des retraités moins heureux, accusent leur tutelle et leurs employeurs d’être à la base de leurs souffrances. Pour certains les employeurs animés d’une mauvaise fois ne versent pas toujours les prélèvements à la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps). «Une foi à la retraite, la constitution des dossiers pour avoir accès à ce que vous avez cotisé relève d’un parcours du combattant. Et si vous parvenez à constituer les dossiers, c’est encore la croix et la bannière pour avoir accès à votre dû. Mais nous avons appris que c’est pour les intérêts que cette caisse nous fait très souvent tourner en bourrique avant de nous remettre notre dû», explique un sénior sous le sceau de l’anonymat.
Nos tentatives pour avoir la réplique du côté de la Cnps ont été vaines. Mais selon une source proche de son service de communication, le taux de prélèvement imputé au travailleur est 18%. «Bien avant le paiement de la pension, le retraité doit déposer ses dossiers. Et la constitution de ces dossiers de pension commence par le ministère de tutelle de l’intéressé. Une fois les dossiers constitués, ils sont acheminés vers la Cgrae qui les étudie. Une fois le dossier admis, le concerné perçoit sa paie après 45 jours. Pour la paie, la Cgrae n’a aucune possibilité de la retarder étant donné qu’elle est à la fin du processus de mise en paiement. Cette source indique que les retraités qu’elle gère sont au nombre de 42.718. Même si beaucoup se plaignent, les retraités sous la tutelle de la Cgrae sont les mieux traités. Cela par la régularité de leur paie », soutient la source. Cependant la Cgrae se heurte au problème crucial d’un déficit. Un déficit structurel. Pour pallier ce problème, le gouvernement prend des mesures pour sauver la caisse. Les études menées font ressortir un déficit de 47 milliards Fcfa, mettant en évidence de grands déséquilibres auxquels la caisse va être confrontée dans les années à venir. D’où l’urgence de prendre des mesures pour sauver cette institution. Le déficit structurel à corriger se traduit en un manque à gagner du fait que les dépenses des pensions sont supérieures aux cotisations du contribuable. C’est le lieu d’attirer l’attention des autorités sur la nécessaire mise en place de structures spécialisées pour l’encadrement, le soutien et le suivi des retraités.


S.B


Légende : La retraite est un autre temps difficultés pour ceux qui ne l’ont pas préparé.

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