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Art et Culture Publié le mardi 23 mars 2010 | Le Nouveau Réveil

Délit non constitué dans " L`affaire "Heat" et "Dagbê" " / Amédée Assi (DP des deux journaux) : “Pourquoi j`ai suspendu la publication de mes deux journaux pornographiques”

Le directeur de publication des journaux " Heat " et " Dagbê " estime que dans l`affaire qui l`a opposé à un groupe de femmes, personne n`est sorti gagnant. "C`est la victoire de la loi ", déclare Amédée Assi.

Le procureur a décidé que le délit pour lequel vous étiez poursuivi par un groupe de femmes n`était pas constitué. Quel enseignement tirez-vous de cette affaire ?
Force a été donnée à la loi. Dans un pays laïc, la seule morale qui vaille est la loi, et la loi est là pour protéger les citoyens. Dans un pays religieux, la loi est la religion. J`ai été heureux qu`au terme de ces péripéties, la loi portant régime juridique de la presse triomphe. Cette loi qui, en son article 11, permet à tout citoyen ivoirien de faire des journaux à caractère pornographique, mieux, qui peuvent attenter aux bonnes mœurs dès l`instant où ils sont vendus sous emballage et ne sont pas vendus à la criée.

La plainte du groupe de femmes visait entre autres à dénoncer la présence dans les rues notamment de Yopougon de vos journaux " Heat " et " Dagbê " vendus, semble-t-il, non seulement à la criée mais à vil prix. Comment avez-vous convaincu le procureur sur cette question ?
Cette question me permet de bien situer les choses. Je suis éditeur des deux journaux qui ne sortent d`ailleurs plus depuis trois ans pour " Heat " et un an pour " Dagbê ", conformément à la loi, je les donnais à l`imprimeur qui les imprimait. Je les faisais emballer, je payais un surcoût de 30 frs pour cela. Une fois que les journaux sont emballés, les journaux sont livrés à Edipresse qui est mon distributeur. Cette entreprise met les journaux en vente à travers son circuit de distribution. La loi lui impose de vendre ce genre de journaux, emballés. C`est ce qu`elle fait. Ma part de responsabilité se limite à livrer des journaux emballés à mon distributeur et c`est ce que je faisais.

Comment expliquez-vous, dans ce cas, la présence de vos journaux, non emballés, dans certaines rues ?
Le journal, une fois vendu à un client, n`est plus contrôlable en ce sens qu`Edipresse ne peut plus surveiller le client qui a fini de lire son journal. Très souvent, les sujets abordés sont intemporels. Ces journaux peuvent intéresser le lecteur par la suite. Celui qui l`a acheté peut estimer qu`il l`a déjà lu et le proposer à la revente. Voici le vrai problème. Il revient à la brigade mondaine de s`attaquer au mal, à savoir qu`elle doit procéder à l`arrestation de ceux qui revendent les journaux dans les rues. Parce que le vrai problème n`est pas le contenu, mais le fait qu`on les retrouve dans les rues. Or ce n`est pas moi qui les mets dans les rues, ni Edipresse. Qui les met dans les rues ? La brigade mondaine devrait contribuer à répondre à cette question.

Les plaignantes estiment avoir remporté une victoire en ce sens que la justice a confirmé le retrait des journaux illégalement vendus, des rues. Quel commentaire faites-vous?
C`est de leur droit de crier victoire. C`est la victoire du droit et de la loi. En ce qui me concerne, en partant à ce procès qu`on a voulu m`intenter, mon intention n`était pas d`obtenir une victoire ou une défaite. Si je veux, dès demain, je remets " Heat " et " Dagbê " sur le marché.

Comptez-vous le faire ?
C`est sans aucune pression que j`ai écrit au ministre de la Communication, au procureur, que pour des raisons personnelles, je suspends la publication des deux journaux. J`ai arrêté, pas parce que j`avais honte. La victoire dont vous parliez tout à l`heure, serait que ces femmes qui me poursuivaient, obtiennent que la loi interdise carrément la vente de journaux pornographiques en Côte d`Ivoire, aussi bien les journaux faits par des Ivoiriens que ceux édités à l`étranger et qui sont vendus en Côte d`Ivoire. Et cela encore serait une victoire minime.

Pourquoi ?
Parce qu`une photo n`a pas le même poids qu`une vidéo. Quand, en plein film d`action ou dans des films brésiliens, on voit des scènes pornographiques, je crois que ce combat-là, elles doivent le mener. Je suis prêt à accompagner toutes les femmes qui mènent le combat de la défense de l`image de la femme.

Quelle leçon tirez-vous de cette affaire ?
J`aimerais dire que " Heat " et " Dagbê ", c`était de l`information. L`information est variée. Elle peut être sportive, culturelle, politique, sexuelle, etc. Dans les pays comme la France, l`Italie, l`Allemagne, vous voyez ce genre de publications. C`est au nom de la liberté d`information. On n`a jamais dit que ces pays sont pervers.

Durant toute cette affaire, ne vous est-il pas arrivé de vous culpabiliser, du moins moralement ?
Votre question m`amène à soulever la problématique du bien-fondé de ces journaux. D`aucuns peuvent effectivement dire que ces journaux poussent les jeunes filles à la dépravation, les gens à faire plus de viol, etc. A première vue et de façon naïve, on pourrait le dire. Mais à y voir de près, ces journaux que je faisais avaient une importance cruciale dans la société où nous sommes. Je puis vous dire qu`il y a des personnes qui se sont mariés du fait de " Heat ", parce que le journal leur a appris à mieux connaître leurs partenaires. On publiait des dossiers intéressants. Les photos, c`était pour agrémenter les textes qui étaient très instructifs. C`est la raison pour laquelle, sur " Heat ", on a marqué " journal d`éducation et d`éveil sexuel ". Il y a des gens qui peuvent dire : est-ce que nos peuples sont préparés à cela ? Je réponds : qu`est-ce qu`on veut ? On ne peut pas être à l`ère du téléphone portable, d`Internet, etc. et vivre dans le passé.
Entretien réalisé par P. Bengassou











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