Franck Djéni (Porte-parole d’ADO): "A compter du 30 mai, Ouaga sera caduc"

Porte-parole d’ADO, Franck Djéni n’est pas du tout tendre avec le clan présidentiel qu’il tient pour responsable du blocage du processus de paix. En outre, le fils du Fama Djeni Kobina appelle le peuple à prendre son destin en main.

Le Patriote: Le RDR a organisé des manifestations commémoratives des évènements douloureux de mars 2004. Quels sentiments vous habitent-ils?

D.F.: J’aimerais profiter de cette tribune pour féliciter le secrétariat du RDR chargé de la Solidarité et la direction centrale de campagne chargée de la jeunesse pour cette initiative. C’est important d’honorer la mémoire des martyrs, victime de la folie meurtrière de la refondation. Le combat pour l’avènement de la démocratie et la défense des libertés publiques sera mené jusqu’à son terme par devoir de mémoire et de reconnaissance envers ces combattants de la liberté. Comment comprendre qu’alors même que le droit à la vie, la liberté d’association et de manifestation sont garanties par la Constitution, des marcheurs aux mains nues sont abattus comme des bêtes de somme par les FDS ?
Mieux, les auteurs de ces crimes sont publiquement félicités par leurs supérieurs hiérarchiques après leur basse besogne et les victimes sont présentées comme des fauteurs de troubles que l’on doit tirer comme des lapins. Le FPI est un tsunami d’incompétences, d’inconscience et d’irresponsabilité qui risque de plonger la Côte d’Ivoire dans le chaos, si le peuple ne prend pas ses responsabilités dans les deux mois à venir. Rien ne peut expliquer une telle boucherie. Il faut mettre fin au culte de l’impunité.

L.P.: Tsunami d’incompétences, d’inconscience et d’irresponsabilité, dites-vous. La refondation compte tout de même en son sein des gens de bon sens.

D.F.: La refondation a plongé ce pays au plan des droits de l’homme et la défense des libertés publiques. Cette vague destructive qu’ils ont créée du fait du caractère illégitime et minoritaire de leur pouvoir, conduit inéluctablement le pays dans l’abîme. Lorsqu’on analyse les déclarations des hagiographes de la refondation, notamment au sujet de la «désinfection» de la liste électorale provisoire, le désarmement des FN et la réunification du territoire comme préalable à la tenue de l’élection présidentielle, on se rend compte que le naufrage est collectif. La métaphore utilisée par le Pr Yacouba Konaté à propos de cet homme convaincu qu’il faisait lever le soleil, illustre parfaitement l’état d’esprit des refondateurs. Ces gens croient détenir des titres fonciers sur le droit de vie et sur la nationalité des Ivoiriens. On se croirait à l’âge de la pierre taillée, c’est totalement surréaliste. Le Pr Mamadou Koulibaly a eu un temps soit peu des éclairs, mais il ne va jamais au bout de sa logique ; mieux, il est intellectuellement malhonnête. Voici un monsieur qui a donné dans un mutisme troublant lors de ces scènes de sauvagerie, dignes d’un western, qui ont entraîné la mort de 15 manifestants du RHDP. L’audit de la liste électorale provisoire, le scandale des déchets toxiques, le bradage du terminal à containers du port d’Abidjan, etc. Non, il est trop occupé à mener son combat absurde et anachronique contre la France. Dans ce pays, les droits et libertés publiques sont bafouées depuis dix ans comme l’a démontré le Ministre Joël N’guessan. Le Pr Mamadou Koulibaly répondant à Venance Konan dans des masturbations verbales dont il a le secret, prétend qu’il sera auprès de son peuple chaque fois qu’il y aurait de nouvelles libertés à conquérir sur l’occident. Il prend véritablement les Ivoiriens pour des imbéciles. La refondation est une escroquerie morale et intellectuelle. Mamadou Koulibaly le sait parfaitement. Alors, qu’il se contente d’apprécier les mouvements sur son compte bancaire en tant que président d’institution en l’honneur de son courage et son engagement anticolonialiste et qu’il arrête d’infantiliser le peuple. Je ne m’étendrai même pas sur la dernière sortie du Pr Ouraga Obou. Sachez simplement qu’il est le symbole de la démission des intellectuels, le symbole de ce tsunami, d’inconscience et d’irresponsabilité

L.P.: Vous semblez pessimiste quant à l’avenir de notre pays pour mener le processus électoral à son terme.

D.F.: Non, plutôt réaliste. C’est vrai que l’opposition joue son rôle historique. Le Premier ministre s’est énormément impliqué dans ce processus. Mais c’est insuffisant. J’invite le peuple dans toutes ses composantes à s’approprier le processus électoral afin de contribuer à la renaissance de ce pays, sinon voilà ce qui va se passer. Lorsqu’on aura franchi le rubicond, le chef de l’Etat va limoger le Premier ministre, dissoudre la CEI, demander à la Sagem d’aller vendre des saucisses en Allemagne, donner les pleins pouvoirs au ministère de l’intérieur et à l’Ins d’organiser l’élection présidentielle dans 40% du territoire. La partition du pays sera consacrée. La Côte d’Ivoire va rentrer en belligérance. Et tout ce que la société a produit de rebut, rassemblé au sein des patriotes alimentaires, va prendre notre radio, notre télévision en otage pour donner dans un nationalisme primaire. La guerre va reprendre. Ce sera le retour à la case départ. Alors, question au peuple : est-il nécessaire que le pays donne dans le chaos pour préserver les intérêts du clan présidentiel? Voilà toute la problématique qui doit gouverner l’action de la jeunesse dans les jours à venir.

L.P.: Ce scénario ne vous semble-t-il pas improbable du moment où le pays a investi des centaines de milliards dans la mise en œuvre du processus électoral sous la supervision de l’ONU?

D.F.: Que les Ivoiriens arrêtent d’être candides et de croire que nous vivons dans une République. Nous sommes dans le Gbagboland. L’ONU a une mission de certification du processus. Elle ne mènera pas la bataille pour la tenue des élections dans deux mois à la place du peuple ivoirien. Il faut que chacun accepte de porter sa croix, à l’instar du Seigneur Tout Puissant, pour sauver ce pays. Les refondateurs utilisent ce que l’on appelle en communication, la théorie de l’absurde. Ce qu’ils disent est tellement aberrant que d’aucuns vous diront que c’est impossible à faire. Mais si le peuple n’y prend garde, la guerre va reprendre. J’en veux pour preuve, une déclaration publique du chef de l’Etat: «je n’irai pas aux élections comme un mouton», cela veut dire en français qu’en l’état actuel de la liste provisoire certifiée de 5.384.00 personnes, le FPI reconnait qu’il est minoritaire et mettra tout en œuvre pour se soustraire du verdict des urnes. Affi N’Guessan déclarait que «la mort vaut mieux que la perte du pouvoir». Un certain responsable du FPI chargé des questions électorales déclarait publiquement lors d’un meeting : «on gagne ou on gagne, la mort vaut mieux que la honte ». Est-ce que ce genre de propos n’est pas suffisamment parlant ? C’est trop facile de parler de mort d’hommes lorsqu’on ne s’est jamais trouvé sur le théâtre des affrontements meurtriers avec sa famille. Cette tendance des socialistes tropicaux à postuler abusivement une équivalence entre leur destin et celui du peuple est inacceptable.
J’en profite pour demander aux FDS de faire preuve de maturité. Mon général, arrêtez de faire tuer des manifestants aux mains nues. Ce combat nous le faisons dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire. Car, en cas de guerre, ce sont vos hommes, des Ivoiriens, pour certains, pères de famille qui seront en première ligne. Nous ne voulons plus de martyrs, plus de morts dans ce pays.
Le président ADO l’a dit récemment: il n’y aura pas de chasse aux sorcières après son élection à la magistrature suprême. Alors, que M. Affi nous dise de quoi ils ont peur. Qu’ont-ils à se reprocher pour penser trouver un refuge dans la guerre? Voici une autre problématique qui gouvernera l’action de la jeunesse. J’aimerais rassurer les Ivoiriens, sur la détermination du RDR à aller aux élections en chantant, car la qualité de notre candidat est reconnue. Il serait brillant et travailleur, selon les propres aveux du candidat de la minorité présidentielle.

L.P.: Que proposez-vous concrètement pour booster le processus électoral et parvenir à ces élections tant souhaitées dans un délai de deux mois?

D.F.: Nous n’avons pas de propositions miracles à faire dans ce sens. Le travail a été accompli à 95%, aux dires de l’ancien président de la CEI. Que Youssouf Bakayoko se mette au travail. Il y a un temps pour le dialogue, un temps pour le consensus, un temps pour la diplomatie et un temps pour l’action. A compter du 30 mai, l’APO sera caduc et le peuple usera de tous les moyens légaux et républicains pour affirmer sa souveraineté en tant que vrai détenteur du pouvoir. Nous demanderons à l’ONU de nommer à l’instar de ce qui s’est fait au Kosovo, une personnalité de renommée, chargée d’organiser l’élection présidentielle.

L.P.: Blé Goudé Charles a traité la porte-parole des FN, d’être militante déguisée du RDR. Vos commentaires

D.F.: La réponse de Mme Affoussy Bamba à Blé a été assez cinglante. Il n’y pas grand chose à ajouter. Par contre, ce délit de patronyme dont s’est rendu coupable Blé Goudé devrait donner à réfléchir à Issa Malick, Coulibaly Gervais et autres nordistes de service. Tous ces gens qui ont accepté de vendre leur âme pour boire à la soupe présidentielle, sont à l’instar de Blé Goudé, des moutons de sacrifice. Les refondateurs leur ont demandé de faire juste beaucoup de bruits pour mériter leur pitance quotidienne.

J’invite tous les Ivoiriens, quelle que soit leur obédience politique à un meeting à GAGNOA très bientôt, ville tristement symbole. Nous irons rendre témoignage à la vérité. On ne peut plus accepter le mensonge et l’intoxication véhiculés par une majorité fictive, dans le seul but de préserver les intérêts du clan au détriment de celui du peuple.

Interview réalisée par Edgar Kouassi