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Économie Publié le samedi 3 avril 2010 | Notre Vision

Faillite de la Société Ivoirienne de Raffinage - Où sont passés les 235 milliards?

Suite aux investigations de votre journal « Notre Vision » aux Etats-Unis, il ressort que contrairement à 125 milliards de la SIR qui se sont évaporés, il a plutôt été découvert un large préjudice fi-nancier de 235 milliards. On se rappelle, la Société ivoirienne de raffinage (SIR) dont les installations devaient fermer le 26 janvier dernier, a finalement pu être sauvée grâce à un prêt d’un consortium de banques privées qui ont accepté d’injecter un peu plus de 36 milliards de FCFA dans la trésorerie de ce fleuron de l’industrie ivoirienne. Afin de lui permettre de prendre un second souffle pour poursuivre ses activités. Notre enquête.


Au-delà, de ce sauvetage qui a certainement été accueilli avec beaucoup de soulagement aussi bien par la population que par les principaux acteurs de l’industrie pétrolière opérants en Côte d’Ivoire et dans la sous région fortement tributaires de la raffinerie ivoirienne, des réponses à des questions sur la vraie nature du mal qui a fortement éprouvé la Société Ivoirienne de Raffinage n’ont jamais été apportées par tous ceux qui ont été directement ou indirectement mêlés à la gestion de cette société d’Etat. Et pourtant, des indiscrétions font état de placements secrets de plus de 200 milliards de FCFA dans des fonds spéculatifs aux Etats-Unis.
Plusieurs indices, en dehors des raisons liées au contexte international qui n’a connu aucune avancée significative quant aux marges de raffinage, constituent les causes endogènes de cette crise consécutive à des spéculations politico financières à la base de la faillite à laquelle la SIR vient pour l’instant d’échapper. Et pour cause ;
Malgré les nombreuses difficultés au plan financier notamment, caractérisées par un compte d’exploitation déficitaire (-50 milliards de FCFA) et l’énorme déficit de trésorerie de plus de 36 milliards (sans les intérêts) crée par le blocage des prix ex raffinerie depuis 1998 dans un contexte d’évolution haussière du prix du baril du brut et du taux du dollar, les responsables politiques ivoiriens en charge du dossier de la SIR, ne se sont pas véritablement préoccupés de la dégradation de la situation financière de la société. Résultat, elle s’est retrouvée débitrice de l’ordre de 200 milliards de FCFA que le trésor public ivoirien a été incapable de rembourser alors que l’Etat est à travers la PETROCI, l’actionnaire majoritaire.
Dans la même veine, la Banque Mondiale dans un rapport d’audit externe commandé à un cabinet privé a signalé en 2008, un écart de 9 millions de dollars US soit 5 milliards de FCFA entre les comptes tenus par la SIR et les résultats de l’entreprise tels qu’ils apparaissent dans les comptes de l’Etat ivoirien. A telle enseigne que ce cabinet, auteur de ce rapport a conclu à une évaporation bizarre des bénéfices de la SIR.
Au cours de cette même période, la production secondaire en Côte d’Ivoire s’était contractée de 3,8% après un accroissement de 1,3% en 2007. Cette réduction s’expliquait selon les responsables de la SIR, principalement par les contre performances du secteur minier et pétrolier, exacerbés cependant par de mauvais choix stratégiques opérés par des responsables de l’Etat à un certain niveau. Le président du Conseil d’Administration de la SIR Laurent Ottro Zirignon Laurent, pivot de l’entourage du Président Gbagbo à qui il se réfère pour tout ce qui touche aux hydrocarbures, l’a amené à ne pas envisager l’augmentation du prix du carburant à la pompe pour des raisons politiques.
Or, au même moment, au plus fort de cette crise de trésorerie que connaissait la SIR, son Directeur Général Joël Dervain tirait sur la sonnette d’alarme pour attirer l’attention sur le péril que courrait l’entreprise. A-t-il été entendu ? La suite de l’évolution de la situation financière indique que l’appel qu’il avait lancé est tombé dans des oreilles de sourds. Attitude faite à souhait ?
Les ministres Léon Emmanuel Monnet et Charles Koffi Diby respectivement chargés de la tutelle technique et financière ont, à leur corps défendant, suivi les instructions du Chef de l’Etat ivoirien, lui-même conseillé et berné par Aubert Zohoré, son conseiller spécial chargé des questions économiques.
Comme le reconnait, Joël Dervain Directeur Général de la SIR dans un entretien qu’il a accordé cette année au quotidien gouvernemental « Fraternité matin », son ministre de tutelle comme seule solution, lui a suggéré de retourner vers les banques privées dont l’entreprise était largement débitrice, pour négocier de nouvelles lignes de crédit pour assurer sa livraison de brut.
Dès lors, les banquiers qui se sont montrés fort réticents compte tenu l’importance de la dette de la SIR (200 milliards) et du contexte marqué par une forte spéculation autour du pétrole brut et du renchérissement régulier des cours, ont réclamé de sérieuses garanties. Ils se doutaient très bien que la situation ne connaîtrait aucune évolution.
Plus de 200 milliards de FCFA placés dans des fonds spéculatifs aux USA.
En réalité, les difficultés que la SIR a connues sont liées à des placements spéculatifs en bourse opéré secrètement par Aubert Zohoré. Ce sont environ 235 milliards de FCFA repartis comme suit qui ont pris une direction autre que celle des caisses de la SIR auxquelles elles étaient normalement destinées. Un gros magot reparti comme suit :
*120 milliards de ristournes de Tva destinés à la SIR non reversés par le Trésor publicdirigé par charles Diby Koffi
*70 milliards de blocage des prix à la pompe économisés par le Trésor public
*5 milliards d’écart entre les comptes tenus par la SIR et ceux du Trésor public qui n’ont jamais été retrouvés.
*36 Milliards de recette encaissés par le Trésor non reversés à la SIR.
Tous ces fonds dont la SIR avait crucialement besoin pour garantir la continuité de son activité eu égard à un contexte international des plus moroses pour les raffineries, ont été placés dans des fonds de pension aux Etats-Unis.
Les deux principaux fonds spéculatifs américains où cet important pécule a été placé par les soins du conseiller Aubert Zohoré sont :
* Fidelity Investisments SAS
* Berkshire Hathaway.
Le premier est leader mondial indépendant de gestion d’actifs pour le compte de tiers. C’est une compagnie privée qui possède également beaucoup d’entreprises telle qu’une SICAV de droit Luxembourgeois, de gestion de portefeuille et de gestion d’assurance vie haut de gamme.
Quant au second, il est d’ailleurs le plus important. Il s’agit d’un fonds de pension américain né de la fusion de sociétés de textiles Hathaway Manufacturing Company et de Berkshire Spining Associates en 1950. Ce holding a été racheté en 1962 par Warren Buffet qui la transformera en une société d’investissement basée à Omaha dans le Nebraska aux Etats-Unis. La société est aujourd’hui codirigée par Warren Buffet et Charlie Munger et Bill Gates à son directoire. Ses actions ordinaires sont cotées à la bourse de New York sous les symboles BRK.A et BRK.B.
D’une part, ces fonds qui appartiennent à la SIR et qui ne lui seront jamais reversés, même après le départ du gouvernement actuel et qui ont été placés malheureusement pour la SIR et le peuple de Côte d’Ivoire, dans ces fonds de pensions américains, dégageront forcement des plus values financières qui seront placées sur des comptes numérotés appartenant aux principaux commanditaires de ces opérations.
D’autre part, la SIR aurait bien pu s’en sortir, si le Trésor public placé sous la tutelle du ministre Charles Diby (meilleur ministre de l’Economie d’Afrique ?) lui reversait les 70 milliards représentant le manque à gagner consécutif au blocage des prix à la pompe qu’il lui doit. Ne serait-ce que ça. Au lieu de la pousser à emprunter encore une fois vers les banques privées pour éviter la faillite. Sans être pessimiste, la SIR se retrouvera à coup sûr dans un autre cercle vicieux qui entraînera indéniablement son agonie. « Si tous ceux qui nous doivent de l’argent nous payaient aujourd’hui, nous aurions les ressources nécessaires pour contribuer à financer les cargaisons, même si ce ne serait que retarder l’échéance. C’est-à-dire que les marges de raffinage ne sont pas redressées. On va continuer de financer à perte c’est-à-dire de mener une activité qui ne génère pas suffisamment de revenus pour pouvoir être à l’équilibre ». Ces propos pleins d’amertume de Joël Dervain, Directeur Général de la SIR qui sonnent comme un cri de cœur à l’endroit des dirigeants politiques ivoiriens responsables de la mauvaise santé financière de l’entreprise qu’il dirige, montrent bien le manque de sérénité dans lequel il est appelé à redresser la situation.
En Décembre dernier, la SIR avait présenté au gouvernement un livre blanc qui proposait des solutions. Parmi elles, le relèvement des prix du carburant à la pompe en faisait parti. Mais il n’a jamais été suivi parce que le gouvernement redoutait les conséquences dramatiques au plan socio politique qu’une telle proposition puisse causer. Hélas ! Milles fois hélas ! Les intérêts personnels ont primé au grand dam de la Côte d’Ivoire.
Nikos de Martinez
(Envoyé spécial aux Etats Unis)
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