Lomé, Marcoussis, Dakar, Accra, Pretoria, Ouaga, etc. Que de chemins parcourus pour la recherche de la paix. Nous l’avions, cette paix. Nous avions toujours vécu avec et par elle. Mais, comme des enfants gâtés, prodigues et inconscients, nous avons choisi de dilaper l’héritage du père qui fut la marque de notre noblesse et de notre agir ‘’ivoirien’’ . Aujourd’hui, la route de notre paix semble passer par Dakar, après une escale peu frucutueuse à Ouaga. Réflexions autour d’un nomadisme diplomatique affligeant.
« Je suis très fier. Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier, pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que, dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidon dans tout ce qu’on faisait. (…) Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus. Nous avons signé l’Accord de Ouagadougou le 4 mars 2007. Entre le 4 mars 2007 et aujourd’hui, il y a un an. Chers amis, regardez vous-mêmes, faites le point. Avant, on parlait de guerre ; aujourd’hui, on parle d’élections. C’est un progrès immense (…). Je suis fier de l’Accord de Ouagadougou que nous avons signé ». In Jeune Afrique, avril 2008.
Celui qui tient ces propos s’appelle Laurent Gbagbo. Chef de l’Etat de Côte d’Ivoire, un Etat dit souverain. Cela fait trois ans qu’il mystifie les mystifiables d’entre les Ivoiriens avec sa fameuse recette baptisée ‘‘dialogue direct’’.
Le dialogue, c’est ce qui se passe (ou est supposé se passer) entre lui et son élève Soro Guillaume qui s’est rebellé contre lui. Ce dernier détient encore en otage près des deux tiers du pays qu’il contrôle et gère avec une bande de hussards dénommée Forces armées des forces nouvelles (Fafn) ; tandis que le maître, lui, gère le tiers qu’il se plaît à dénommer ‘‘la Côte d’Ivoire utile’’. ‘‘Le direct’’ de ce ‘‘dialogue’’, c’est la médiation d’un troisième personnage dénommé ‘‘facilitateur’’. Curieux ‘‘dialogue direct’’ donc qui passe par le biais d’une autre personne. Autrement dit, d’Abidjan à Bouaké, le chemin le plus court et le plus direct passe par Ouaga !
Et il s’en est trouvé, des Ivoiriens, pour saluer une telle arnaque et voir en cette grossière duperie, une illustration du ‘‘génie politique de M. Ggagbo’’. Un Conseil des ministres a même trouvé la curieuse idée de proposer ce fameux ‘‘dialogue direct’’ (par l’intermédiaire d’un tiers) comme une recette géniale ‘‘made in Gbagbo’’, à exporter aux peuples en crise. Stupéfiante Côte d’Ivoire !
Trois ans après les chants d’amours retrouvées, trois ans après les embrassades émouvantes, trois ans après les journées et soirées festives entre rebelles du nord et royalistes régnants du sud, on est encore au même stade. Et pourtant M. Gbagbo avait dit, en avril 2008 : « Ce pourquoi je suis content aujourd’hui, c’est que sur TOUS les problèmes, il n’y a plus de désaccords (…) c’est très différent de la situation antérieure. Nous sommes d’accord sur tous les principes ». In Jeune Afrique, avril 2008.
Inutile de faire le bilan de l’Apo, car il y en a pas ; et si d’aventure on devait lui en trouver, ce ne serait que le désolant constat suivant : le statut quo. Une situation qui permet à M. Gbagbo et ses refondateurs, à M. Soro et ses combattants, M. Blaise Compaoré et ses soutiens, de piller tranquillement les richesses de notre pays. Elle est belle, la Côte d’Ivoire ! Aussi monstrueusement belle que l’indécente balade lagunaire de ceux qui prennent le large par un matin ensoleillé quand le peuple de ce pays bat les pavés, fornique avec la misère, dans le silence résigné de ceux qui ne croient plus en rien ; rien d’autres que les paroles apaisantes des pasteurs et des prêtes, et la promesse d’un paradis biblique…après la mort ! La mort comme délivrance, le silence de la résignation comme réponse au désespoir…
Gbagbo, Soro, Compaoré. Non, il n’y a jamais eu de dialogue direct ; parce qu’il ne peut y avoir de dialogue direct avec un médiateur : on ne peut parler directement à une personne par l’intermédiaire d’une autre. Ce serait un non sens. Le ‘‘dialogue direct’’ est donc un grossier mensonge républicain comme on en sert souvent, dans ce pays, à un peuple ‘‘niqué’’ et désabusé jusqu’à l’abus. Soro et Gbagbo ne se sont, en réalité, jamais parlé sérieusement. Simple question de bon sens.
Le vagabondage diplomatique
« Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier, pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que, dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidon dans tout ce qu’on faisait. (…) Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus ».
Cette réflexion signifie que désormais, la Côte d’Ivoire prendra elle-même en charge la conduite de son destin, en puisant, dans ses propres ressorts et ressources, les moyens de résolution de la contradiction majeure qui la ruine. L’homme (Gbagbo) qui a tenu ces propos en sait-il les réelles implications ? J’en doute et, comme moi, de nombreux Ivoiriens ― la presque totalité même des Ivoiriens.
Trois ans après la signature du ‘‘génial’’ Apo, M. Gbagbo en est encore à parcourir le monde pour résoudre le problème ivoirien ! Il en est encore à espérer de l’Uemoa, de la Cedeao, de l’Ua, etc. Bientôt, il ira quémander le soutien de l’Onu, après avoir échoué dans sa tentative d’impliquer la France, par Sarkozy (via Kouchner) dans la résolution de notre crise…
Il y a de cela trois ans (soit en 2007), j’avais écrit ceci, concernant M. Gbagbo et ses refondateurs : « Jusqu’où nous mèneront les refondateurs ? Le temps n’est pas loin où nous les verrons célébrer d’autres notes touchantes avec les présidents Bongo, Wade, et même Jacques Chirac qu’ils présenteront comme étant de grands amis à eux ! Tout comme le président Blaise Compaoré l’est devenu, aujourd’hui à leurs yeux ! Et c’est cela qu’ils appellent faire de la politique. Trahir sa ligne doctrinale, c’est ‘‘faire de la politique’’ (…). Vilipender hier, louer aujourd’hui pour (encore) vilipender demain, c’est ‘‘faire de la politique’’. In le Nouveau Réveil, avril 2008.
Bien avant, j’ai écrit, en 2005 : « On peut même prendre le risque de parier que si, demain, le Pdci revenait au pouvoir, le Fpi n’hésiterait pas à s’allier avec Ouattara et à certaines figures de la rébellion pour aller à la reconquête du pouvoir d’Etat, sans aucune mémoire du passé ! ».
Le voilà donc revenu Wade, comme hier, Compaoré. Le voilà revenu, lui que l’on nous avait brandi comme étant un des ennemis de la Côte d’Ivoire et de M. Gbagbo-le-messie-venu-libérer-l’Afrique. Wade le garde-chiourme de la France chiraquienne et de l’impérialisme français ! Entre-temps, le fils Bongo a déjà été invité à Yamoussoukro pour recéler l’alliance avec le Gabon, et réhabiliter le nom et l’esprit déshonorés du père Bongo que notre Gbagbo n’avait pas hésité à offenser : « C’est un rigolo ― Bongo bien sûr)…
Quel sens donner à ce vagabondage diplomatique, ces fuites (répétées) en avant ? Que signifie ce nomadisme dans la recherche d’alliés, cette louche mendicité qui offense la Côte d’Ivoire ?
Qu’on ne s’y méprenne point : M. Ggagbo ne croit ni à Blaise Compaoré, ni au fils Bongo, moins encore à Wade, quant à leurs capacités de résoudre la crise ivoirienne. Non, il n’y croit pas. Mais alors, pourquoi cherche-t-il tant à impliquer dans la résolution de NOTRE problème, l’illustre président Sénégalais ? Ce dernier s’est montré incapable de résoudre la crise casamançaise qui signe l’échec de la diplomatie sénégalaise depuis des décennies. Pourquoi donc M. Gbagbo s’acharne-t-il à faire intervenir une autre personne (Abdoulaye Wade) dans la résolution de notre crise ?
Nul n’est besoin d’être un génie pour répondre à cette cruciale question qui ne demande qu’une seule réponse : tout cela représente autant de temps de gagné par M. Gbagbo qui n’a pas du tout envie de quitter le pouvoir par les urnes.
Comme on le comprend : il n’a aucune chance de remporter cette présidentielle ; et il n’a aucunement l’envie de quitter le palais doré et le siège royal. Et pourtant, et pourtant, il faudrait bien qu’il parte, pour l’avenir de ce pays. Il faudrait bien qu’il quitte ce palais, pour la paix en Côte d’Ivoire. Il faudrait qu’il parte, pour que nous retrouvions le chemin qui mène à la normalisation de notre vie politique et à la normalit, dans nos agirs quotidiens. Il faudrait qu’il parte. Et il partira : les règnes mauvais ont toujours été longs et pénibles, mais ils finissent toujours.
tiburce_koffi@yahoo.fr
Tél: (00225) 0211-1011
« Je suis très fier. Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier, pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que, dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidon dans tout ce qu’on faisait. (…) Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus. Nous avons signé l’Accord de Ouagadougou le 4 mars 2007. Entre le 4 mars 2007 et aujourd’hui, il y a un an. Chers amis, regardez vous-mêmes, faites le point. Avant, on parlait de guerre ; aujourd’hui, on parle d’élections. C’est un progrès immense (…). Je suis fier de l’Accord de Ouagadougou que nous avons signé ». In Jeune Afrique, avril 2008.
Celui qui tient ces propos s’appelle Laurent Gbagbo. Chef de l’Etat de Côte d’Ivoire, un Etat dit souverain. Cela fait trois ans qu’il mystifie les mystifiables d’entre les Ivoiriens avec sa fameuse recette baptisée ‘‘dialogue direct’’.
Le dialogue, c’est ce qui se passe (ou est supposé se passer) entre lui et son élève Soro Guillaume qui s’est rebellé contre lui. Ce dernier détient encore en otage près des deux tiers du pays qu’il contrôle et gère avec une bande de hussards dénommée Forces armées des forces nouvelles (Fafn) ; tandis que le maître, lui, gère le tiers qu’il se plaît à dénommer ‘‘la Côte d’Ivoire utile’’. ‘‘Le direct’’ de ce ‘‘dialogue’’, c’est la médiation d’un troisième personnage dénommé ‘‘facilitateur’’. Curieux ‘‘dialogue direct’’ donc qui passe par le biais d’une autre personne. Autrement dit, d’Abidjan à Bouaké, le chemin le plus court et le plus direct passe par Ouaga !
Et il s’en est trouvé, des Ivoiriens, pour saluer une telle arnaque et voir en cette grossière duperie, une illustration du ‘‘génie politique de M. Ggagbo’’. Un Conseil des ministres a même trouvé la curieuse idée de proposer ce fameux ‘‘dialogue direct’’ (par l’intermédiaire d’un tiers) comme une recette géniale ‘‘made in Gbagbo’’, à exporter aux peuples en crise. Stupéfiante Côte d’Ivoire !
Trois ans après les chants d’amours retrouvées, trois ans après les embrassades émouvantes, trois ans après les journées et soirées festives entre rebelles du nord et royalistes régnants du sud, on est encore au même stade. Et pourtant M. Gbagbo avait dit, en avril 2008 : « Ce pourquoi je suis content aujourd’hui, c’est que sur TOUS les problèmes, il n’y a plus de désaccords (…) c’est très différent de la situation antérieure. Nous sommes d’accord sur tous les principes ». In Jeune Afrique, avril 2008.
Inutile de faire le bilan de l’Apo, car il y en a pas ; et si d’aventure on devait lui en trouver, ce ne serait que le désolant constat suivant : le statut quo. Une situation qui permet à M. Gbagbo et ses refondateurs, à M. Soro et ses combattants, M. Blaise Compaoré et ses soutiens, de piller tranquillement les richesses de notre pays. Elle est belle, la Côte d’Ivoire ! Aussi monstrueusement belle que l’indécente balade lagunaire de ceux qui prennent le large par un matin ensoleillé quand le peuple de ce pays bat les pavés, fornique avec la misère, dans le silence résigné de ceux qui ne croient plus en rien ; rien d’autres que les paroles apaisantes des pasteurs et des prêtes, et la promesse d’un paradis biblique…après la mort ! La mort comme délivrance, le silence de la résignation comme réponse au désespoir…
Gbagbo, Soro, Compaoré. Non, il n’y a jamais eu de dialogue direct ; parce qu’il ne peut y avoir de dialogue direct avec un médiateur : on ne peut parler directement à une personne par l’intermédiaire d’une autre. Ce serait un non sens. Le ‘‘dialogue direct’’ est donc un grossier mensonge républicain comme on en sert souvent, dans ce pays, à un peuple ‘‘niqué’’ et désabusé jusqu’à l’abus. Soro et Gbagbo ne se sont, en réalité, jamais parlé sérieusement. Simple question de bon sens.
Le vagabondage diplomatique
« Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier, pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que, dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidon dans tout ce qu’on faisait. (…) Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus ».
Cette réflexion signifie que désormais, la Côte d’Ivoire prendra elle-même en charge la conduite de son destin, en puisant, dans ses propres ressorts et ressources, les moyens de résolution de la contradiction majeure qui la ruine. L’homme (Gbagbo) qui a tenu ces propos en sait-il les réelles implications ? J’en doute et, comme moi, de nombreux Ivoiriens ― la presque totalité même des Ivoiriens.
Trois ans après la signature du ‘‘génial’’ Apo, M. Gbagbo en est encore à parcourir le monde pour résoudre le problème ivoirien ! Il en est encore à espérer de l’Uemoa, de la Cedeao, de l’Ua, etc. Bientôt, il ira quémander le soutien de l’Onu, après avoir échoué dans sa tentative d’impliquer la France, par Sarkozy (via Kouchner) dans la résolution de notre crise…
Il y a de cela trois ans (soit en 2007), j’avais écrit ceci, concernant M. Gbagbo et ses refondateurs : « Jusqu’où nous mèneront les refondateurs ? Le temps n’est pas loin où nous les verrons célébrer d’autres notes touchantes avec les présidents Bongo, Wade, et même Jacques Chirac qu’ils présenteront comme étant de grands amis à eux ! Tout comme le président Blaise Compaoré l’est devenu, aujourd’hui à leurs yeux ! Et c’est cela qu’ils appellent faire de la politique. Trahir sa ligne doctrinale, c’est ‘‘faire de la politique’’ (…). Vilipender hier, louer aujourd’hui pour (encore) vilipender demain, c’est ‘‘faire de la politique’’. In le Nouveau Réveil, avril 2008.
Bien avant, j’ai écrit, en 2005 : « On peut même prendre le risque de parier que si, demain, le Pdci revenait au pouvoir, le Fpi n’hésiterait pas à s’allier avec Ouattara et à certaines figures de la rébellion pour aller à la reconquête du pouvoir d’Etat, sans aucune mémoire du passé ! ».
Le voilà donc revenu Wade, comme hier, Compaoré. Le voilà revenu, lui que l’on nous avait brandi comme étant un des ennemis de la Côte d’Ivoire et de M. Gbagbo-le-messie-venu-libérer-l’Afrique. Wade le garde-chiourme de la France chiraquienne et de l’impérialisme français ! Entre-temps, le fils Bongo a déjà été invité à Yamoussoukro pour recéler l’alliance avec le Gabon, et réhabiliter le nom et l’esprit déshonorés du père Bongo que notre Gbagbo n’avait pas hésité à offenser : « C’est un rigolo ― Bongo bien sûr)…
Quel sens donner à ce vagabondage diplomatique, ces fuites (répétées) en avant ? Que signifie ce nomadisme dans la recherche d’alliés, cette louche mendicité qui offense la Côte d’Ivoire ?
Qu’on ne s’y méprenne point : M. Ggagbo ne croit ni à Blaise Compaoré, ni au fils Bongo, moins encore à Wade, quant à leurs capacités de résoudre la crise ivoirienne. Non, il n’y croit pas. Mais alors, pourquoi cherche-t-il tant à impliquer dans la résolution de NOTRE problème, l’illustre président Sénégalais ? Ce dernier s’est montré incapable de résoudre la crise casamançaise qui signe l’échec de la diplomatie sénégalaise depuis des décennies. Pourquoi donc M. Gbagbo s’acharne-t-il à faire intervenir une autre personne (Abdoulaye Wade) dans la résolution de notre crise ?
Nul n’est besoin d’être un génie pour répondre à cette cruciale question qui ne demande qu’une seule réponse : tout cela représente autant de temps de gagné par M. Gbagbo qui n’a pas du tout envie de quitter le pouvoir par les urnes.
Comme on le comprend : il n’a aucune chance de remporter cette présidentielle ; et il n’a aucunement l’envie de quitter le palais doré et le siège royal. Et pourtant, et pourtant, il faudrait bien qu’il parte, pour l’avenir de ce pays. Il faudrait bien qu’il quitte ce palais, pour la paix en Côte d’Ivoire. Il faudrait qu’il parte, pour que nous retrouvions le chemin qui mène à la normalisation de notre vie politique et à la normalit, dans nos agirs quotidiens. Il faudrait qu’il parte. Et il partira : les règnes mauvais ont toujours été longs et pénibles, mais ils finissent toujours.
tiburce_koffi@yahoo.fr
Tél: (00225) 0211-1011