C’était chaud, hier, au quartier Cimetière, derrière l’abattoir de Port-Bouët. De 7h à 12h, la population a affronté les policiers qui venaient les déguerpir afin de faire démolir leurs habitations, sur la demande de Mme Kouadio Amenan. Bilan : plusieurs blessés.
Il court comme un dératé. Mais, les flics finissent par le rattraper et le rouent de coups de matraque, de cordon et de semelles saillantes de leurs chaussures. Le jeune saigne abondamment de la tête lorsque les policiers le laissent enfin. Son débardeur blanc est tout rouge de sang. Il est conduit dare-dare à l’hôpital de Port-Bouët. Un autre jeune qui se fait prendre dans la masse subit le même sort. On le conduit aussi à l’hôpital. Mais la foule ne recule pas. « On veut nos maisons ; on veut nos maisons ». Certains lancent des pierres aux agents de sécurité. Et à chaque fois que ceux-ci mettent la main sur un, c’est tout ensanglanté qu’ils le laissent partir. Ce sont des centaines de personnes, en majorité des jeunes, avec des signes de va-t-en-guerre sur le visage : huile de moteur, kaolin. Ils font face à des policiers revêches, armés pour la circonstance de Kalachnikov, lance-grenades, matraques, casques de protection. Depuis 7h, les hostilités ont été lancées, lorsqu’un cargo de la police est arrivé sur le lieu pour déguerpir des habitants du ‘‘quartier cimetière’’, encore appelé « nouveau quartier ». Ils ont reçu l’ordre de Mme Kouadio Amenan Isabelle, à qui appartient la Cité Ori, située dans ce quartier, en bordure de lagune. Selon les manifestants, Mme Kouadio Amenan, qui dispose de 30 hectares de terrain, délimité par une clôture, veut y ajouter un périmètre de plus de 10.000 mètres carrés, qui ne lui appartient pas. Ce matin donc, la police a reçu instruction de déloger les populations habitant cette zone pour permettre aux bulldozers de venir la raser. Il s’agit de plus de 20.000 âmes. Ayant reçu l’information avant l’arrivée des policiers, les jeunes se sont préparés pour les affronter. Ils ont barricadé la voie principale qui mène dans ce quartier, avec des tables et des pneus brûlés. Mal leur en prit. Voyant leur mobilisation comme une résistance, la police a brandi le lance-grenades et des grenades lacrymogènes ont plu sur la zone. Les premiers à subir les conséquences de cette action ont été les tout-petits de l’école primaire Bad, qui étaient au cours. L’école était au cœur des manifestations. Plusieurs enfants qui ont respiré le gaz, ont été transportés presque inanimés mais hors de danger. Ensuite, des tirs de dissuasion ont fusé dans l’air. Un huissier de justice qui travaille pour le compte de Mme Kouadio Amenan accompagnait les policiers. Il a essayé de discuter avec la population, en vain. Les policiers, à leur tour, ont essayé d’avoir accès au lieu concerné par le déguerpissement. La population leur a barré le passage. L’imam de la mosquée de Port-Bouët, Traoré Yacouba, a tenté de calmer les ardeurs des riverains, prêts à mourir pour défendre leurs domiciles. Rien n’y fit. Le ministère de la Construction puis la gendarmerie de Port-Bouët ont délégué des agents sur le lieu pour discuter et comprendre ce qui se passe. Dans cette confusion, des propriétaires de maison concernés par cette affaire essayent de donner des explications. Parmi eux, Dicko Issa à qui appartient le lot N°04/367. « Depuis 1966, mon père a construit sa maison ici, et aujourd’hui j’habite cette maison. Mme Kouadio Amenan est arrivée ici en 1998. Elle nous a dit que le terrain lui appartient. Nous ne saurions l’accepter. Elle a sa cité qu’elle a délimitée avec la clôture, tout ce qui est derrière la clôture ne lui appartient pas », explique-t-il. Les habitations qui se trouvent derrière la clôture de la cité de Mme Kouadio Amenan, abritent en majorité des travailleurs de l’abattoir de Port-Bouët. Cependant, les propriétaires de lots précisent qu’à la suite de discussions avec l’huissier de justice venu sur le terrain, il leur a été dit que seule une demi-dizaine de maisons sont concernées et non tout le quartier situé derrière la clôture où vivent environ 20.000 habitants. Mais, même pour cinq maisons, les habitants sont prêts à s’opposer à Mme Kouadio Amenan. Celle-ci a amené l’affaire à la justice. Toutes nos tentatives pour la joindre sont restées vaines.
Raphaël Tanoh
Il court comme un dératé. Mais, les flics finissent par le rattraper et le rouent de coups de matraque, de cordon et de semelles saillantes de leurs chaussures. Le jeune saigne abondamment de la tête lorsque les policiers le laissent enfin. Son débardeur blanc est tout rouge de sang. Il est conduit dare-dare à l’hôpital de Port-Bouët. Un autre jeune qui se fait prendre dans la masse subit le même sort. On le conduit aussi à l’hôpital. Mais la foule ne recule pas. « On veut nos maisons ; on veut nos maisons ». Certains lancent des pierres aux agents de sécurité. Et à chaque fois que ceux-ci mettent la main sur un, c’est tout ensanglanté qu’ils le laissent partir. Ce sont des centaines de personnes, en majorité des jeunes, avec des signes de va-t-en-guerre sur le visage : huile de moteur, kaolin. Ils font face à des policiers revêches, armés pour la circonstance de Kalachnikov, lance-grenades, matraques, casques de protection. Depuis 7h, les hostilités ont été lancées, lorsqu’un cargo de la police est arrivé sur le lieu pour déguerpir des habitants du ‘‘quartier cimetière’’, encore appelé « nouveau quartier ». Ils ont reçu l’ordre de Mme Kouadio Amenan Isabelle, à qui appartient la Cité Ori, située dans ce quartier, en bordure de lagune. Selon les manifestants, Mme Kouadio Amenan, qui dispose de 30 hectares de terrain, délimité par une clôture, veut y ajouter un périmètre de plus de 10.000 mètres carrés, qui ne lui appartient pas. Ce matin donc, la police a reçu instruction de déloger les populations habitant cette zone pour permettre aux bulldozers de venir la raser. Il s’agit de plus de 20.000 âmes. Ayant reçu l’information avant l’arrivée des policiers, les jeunes se sont préparés pour les affronter. Ils ont barricadé la voie principale qui mène dans ce quartier, avec des tables et des pneus brûlés. Mal leur en prit. Voyant leur mobilisation comme une résistance, la police a brandi le lance-grenades et des grenades lacrymogènes ont plu sur la zone. Les premiers à subir les conséquences de cette action ont été les tout-petits de l’école primaire Bad, qui étaient au cours. L’école était au cœur des manifestations. Plusieurs enfants qui ont respiré le gaz, ont été transportés presque inanimés mais hors de danger. Ensuite, des tirs de dissuasion ont fusé dans l’air. Un huissier de justice qui travaille pour le compte de Mme Kouadio Amenan accompagnait les policiers. Il a essayé de discuter avec la population, en vain. Les policiers, à leur tour, ont essayé d’avoir accès au lieu concerné par le déguerpissement. La population leur a barré le passage. L’imam de la mosquée de Port-Bouët, Traoré Yacouba, a tenté de calmer les ardeurs des riverains, prêts à mourir pour défendre leurs domiciles. Rien n’y fit. Le ministère de la Construction puis la gendarmerie de Port-Bouët ont délégué des agents sur le lieu pour discuter et comprendre ce qui se passe. Dans cette confusion, des propriétaires de maison concernés par cette affaire essayent de donner des explications. Parmi eux, Dicko Issa à qui appartient le lot N°04/367. « Depuis 1966, mon père a construit sa maison ici, et aujourd’hui j’habite cette maison. Mme Kouadio Amenan est arrivée ici en 1998. Elle nous a dit que le terrain lui appartient. Nous ne saurions l’accepter. Elle a sa cité qu’elle a délimitée avec la clôture, tout ce qui est derrière la clôture ne lui appartient pas », explique-t-il. Les habitations qui se trouvent derrière la clôture de la cité de Mme Kouadio Amenan, abritent en majorité des travailleurs de l’abattoir de Port-Bouët. Cependant, les propriétaires de lots précisent qu’à la suite de discussions avec l’huissier de justice venu sur le terrain, il leur a été dit que seule une demi-dizaine de maisons sont concernées et non tout le quartier situé derrière la clôture où vivent environ 20.000 habitants. Mais, même pour cinq maisons, les habitants sont prêts à s’opposer à Mme Kouadio Amenan. Celle-ci a amené l’affaire à la justice. Toutes nos tentatives pour la joindre sont restées vaines.
Raphaël Tanoh