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Société Publié le mardi 11 mai 2010 | Nord-Sud

Vie de ménage : Au cœur de la solitude des femmes riches

Elles sont belles, séduisantes et pleines aux as. Mais aucun homme n’ose les draguer pour longtemps, encore moins les approcher. Pourquoi tant de distances envers les femmes nanties? Comment ces femmes vivent-elles le boycottage des hommes ? Quelles sont les solutions de rechange ? Les réponses dans cette enquête !

Elles ne sont ni lesbiennes, ni sœurs catholiques. Ce sont des femmes en bonne santé matérielle et physique. Elles fréquentent vos quartiers, mosquées, églises et entreprises. Aux volants de grosses cylindrées, de petites voitures ou même en taxis compteurs, elles se déplacent de leur domicile, bien habillées et parfumées, à leur lieu de travail pour participer au progrès économique de la Côte d’Ivoire, comme tout bon citoyen. Le hic, c’est que malgré l’aisance qui se dégage de leur style de vie, elles ne sont pas heureuses. Ces femmes ont une situation sociale stable mais aucun prétendant ne les aborde. Quand elles sont courtisées, c’est juste pour leur argent. Constance Yaï, consultante en parité et droits humains, fait le constat. « A l’observation, ils sont nombreux, les hommes qui courtisent les femmes aisées pour profiter de bons moments avec elles. Ils en sont fiers. Les autres vont jusqu’à les épouser pour s’emparer de leurs biens». Dans ce constat, la spécialiste inclut les jeunes femmes qui émergent. «Etant jeunes, elles sont beaucoup plus sollicitées que leurs aînées. Mais dans le fond, le problème reste le même. Leur statut social et leur aisance financière donnent des frayeurs à leurs courtisans ». C’est justement dans cette dernière tranche que se situe Patricia Koffi, 35 ans, cadre moyen supérieur de l’administration ivoirienne. Elle est retournée dans la maison familiale du Plateau-Dokui, abandonnant, ainsi, son appartement de la Riviéra-Golf, avec le secret espoir de voir un homme l’approcher. Du haut des 8 cm de sa paire de chaussure italienne, elle se dirige vers sa Toyota Rav 4, avec une démarche altière, ce samedi 8 mai. « J’ai choisi de revenir à la maison parce que je me sens seule chez moi. J’attends de me marier pour avoir des enfants. Depuis, aucun homme libre et sincère ne se présente à moi. Ceux qui n’osent pas m’approcher me soupçonnent d’être la maîtresse d’un refondateur. J’entends ces propos dans mon entourage », relate la jeune cadre. Patricia n’est pas isolée dans ce cas. Clémentine Assi est plus que tourmentée. Agée de 51 ans, et cadre de banque, elle est divorcée et vit à la Riviéra-Palmeraie avec ses deux gosses. Elle se confie : « mon âge avance et je n’ai pas encore quelqu’un avec qui construire à nouveau ma vie. C’est inquiétant. Je me sens seule quand je rentre les soirs. La sécurité que procure la présence d’un homme me manque vivement». Si elle accepte de parler, certaines préfèrent garder le silence et mourir à petit feu. Jeanine Gueu, 31 ans et propriétaire de salon de coiffure, bien que ne possédant ni salaire colossal, ni voiture, brise le silence. « Les hommes ne se fatiguent plus pour nous draguer parce que nos sœurs ont envahi les trottoirs ». Une situation qui n’est pas sans préjudice psychologique. C’est ce que dit Sylvie Tenenbaum, psychothérapeute qui reçoit depuis plus de dix ans, des femmes en souffrance avec leur célibat. « Elles se torturent l’esprit pour comprendre ce qu’elles appellent « l’échec » de leur vie affective. Mais il suffit d’écouter leurs a priori sur les hommes, d’observer leurs comportements et leurs choix de partenaires, pour comprendre que la peur est à l’origine de leurs attitudes et de leurs errements », fait remarquer la spécialiste.

Victimes de l’émancipation

Ce que confirment les religieux à qui ces femmes se confient à longueur de journée. « De nombreuses femmes aisées nous confient leur malaise. Les hommes ne les draguent pas. Quand ils les fréquentent, c’est juste pour dépenser leur argent et ils les lâchent après », révèle l’imam Cheick Abdoul Kader, aumônier de la gendarmerie. Même son de cloche chez le pasteur Kpessou Hypolite Isaac, membre de la Mission vie nouvelle de Treichville : « nous recevons fréquemment des femmes solitaires en quête de l’âme sœur au cours d’un programme de l’église appelé « entretien ». Elles sont nombreuses à venir mais les femmes qui ont une bonne situation sociale ne battent pas le record. Cependant, quand ces dernières viennent à nous, c’est après plusieurs tentatives ailleurs. En général, elles souffrent de solitude. Elles ressentent le besoin de se stabiliser. Parce que l’argent ne peut pas tout faire ». Et l’imam de poursuivre : « des femmes souffrent sincèrement. Les hommes abusent d’elles et s’en vont. Ils ont peur de les marier. Elles sont victimes de l’égalité des sexes. La société leur demande d’étudier pour travailler demain. Ce travail est considéré comme leur premier mari, mais il ne suffit pas à les combler ».
Comme quoi, toutes les femmes qui travaillent, n’arrivent pas à mettre les hommes à leurs pieds comme le prétend la boutade. Comment expliquer cette mise en quarantaine des femmes ? Des hommes acceptent d’en donner les raisons. Ange Angaman, 48 ans, célibataire et chef mécanicien à Abobo Plaque, n’est pas gêné de courtiser une femme aisée. Seulement, il les trouve inaccessibles. « Il faut être dans leur milieu pour avoir accès à elles. Et, ce n’est pas toujours évident pour nous autres. En plus, sans une instruction à la hauteur de la leur, il n’est pas assuré qu’elles nous acceptent. Nous risquons de nous faire humilier ». Simple a priori ? Pas si sûr ! Mathurin G, 37 ans, en a déjà fait les frais, bien qu’il soit avocat à la Cour. Lui qui s’est laissé chavirer par la beauté d’une femme de haut standing. C’est une femme riche et célèbre dont il ne veut pas dévoiler l’identité. « Elle ne me respectait pas. La relation a donc été éphémère ». Ives Kouamé, 42 ans, commercial au Plateau, se toque plutôt des femmes fortunées. Et, il rêve terminer sa vie dans leurs bras. Il trouve exagéré de leur jeter la pierre. « Elles ont déjà de l’argent. Quand elles aiment, elles sont sincères et sont à tes petits soins. Avec elles, le vrai amour se vit, sans stress». Selon l’imam, l’une des raisons fondamentales du rejet de ces femmes est leur propre orgueil. « Elles cherchent à dominer les hommes alors que ceux-ci en ont horreur ». Le pasteur ne dit pas autre chose. «Quand les femmes roulent carrosse, cela a forcément une influence sur les hommes. Très souvent elles sont difficiles à vivre. Ce qui fait dire à certains que la situation des femmes qui ont entre 30 et 40 ans et qui ne sont pas encore mariées, est suspecte. En réalité, c’est le manque d’humilité qui explique cet état des faits. La majorité des femmes aisées sont arrogantes. Cette attitude fait fuir les hommes. Il se trouve que de jeunes femmes nanties et intègres soient dans la solitude », poursuit-il. Rachel Gogoua, présidente de l’Organisation nationale de l’enfance, la femme et la famille (Onef), dit ne pas s’être particulièrement intéressée à cette question. Cependant, elle pense que, « du fait de leur statut, les hommes ont peut-être peur d’approcher les femmes riches. Leur statut repousse les gens sans que cela soit forcement de leur faute. Il arrive que le statut crée une étoffe autour de la femme. Lorsque les femmes occupent certaines positions, elles créent le fossé entre elles et les autres. Il y a des femmes avec qui nous étions, hier, qui ont coupé le pont parce qu’elles ont changé de statut. Elles créent les conditions pour éloigner les hommes d’elles », témoigne la combattante pour le respect des droits de la femme. Constance Yaï a une vision contraire plus radicale. Pour elle, « lorsque les hommes sont en face d’une femme dans le regard de laquelle ils se savent découverts, ils reculent très vite. Ce genre d’hommes, du fait de leur porte-feuille, se sentent très à l’aise avec les femmes qu’ils peuvent impressionner. Tant que bon nombre d’hommes vont se donner pour projet d’éblouir, puis de soumettre les femmes, ils iront difficilement vers un certain type de femmes ». Entendez par-là, les femmes nanties. Certainement désabusée par la situation, A. D., promotrice d’un téléfilm prisé, la cinquantaine et pas moins nantie, a lâché qu’elle ne veut plus d’homme dans sa vie. « Je ne suis plus un cœur à prendre. Je préfère rester seule dans mon lit puisque je suis maintenant habituée », s’était-elle vidée, au cours d’une émission - radio, il y a peu.
Il ressort des témoignages que ce ne sont pas tous les hommes qui s’intéressent sincèrement aux femmes aisées. Si la majorité d’entre elles se recroqueville dans une attitude dé?faitiste, ce n’est pas le cas pour d’autres. Les plus téméraires ont trouvé le palliatif : la prise d’initiative. Et, la méthode commence à avoir pignon sur rue. Elles s’adressent aux amis, de sorte que par personnes interposées, elles se trouvent l’oiseau rare. Le procédé a eu un écho favorable pour la désormais Mme S. C. qui vit à Biétry. Agée de 45 ans, la sous-directrice marketing dans une structure de la place a rencontré M. H. S., par le biais de sa cousine en 2004.

Les garçonnières : le nouveau remède !

Elle raconte son histoire : «ma cousine vit à Paris. Je lui ai raconté mes ennuis, elle n’a pas hésité à en parler à H., son ami d’enfance. Par coïncidence, il était à la recherche d’une bonne femme après moult déceptions amoureuses. Avec moi, la relation marche ». Signalons que notre sous-directrice a accepté de changer de religion pour suivre celle que pratique son homme. Aujourd’hui elle a eu deux enfants de cette union. Que ne ferait-on pas pour être heureuse ? Avant cette vie à deux, C. se rappelle combien elle était marginalisée sur son lieu de travail. Certains collègues n’hésitaient pas à faire la moue quand elle leur intimait un ordre pour la bonne marche de l’entreprise. Rachel Gogoua livre un autre secret des femmes : «elles organisent d’autres méthodes pour amener les hommes à elles. Par exemple, il me revient que des femmes riches ont des garçonnières. Les garçonnières sont des studios où elles emmènent les hommes à leurs propres frais. Elles sont obligées d’acheter les hommes pour se satisfaire». En 2002, l’Organisation mondiale de la santé a convoqué un groupe régional de différents experts pour établir des définitions de travail. Il est ressorti de ces assises, différentes façons d’appréhender la sexualité et les droits sexuels. Ainsi, les droits sexuels englobent les droits de l’Homme qui sont déjà reconnus dans les législations nationales, dans les documents internationaux relatifs aux droits de l’Homme et dans d’autres documents unanimement reconnus. Si on peut considérer les « garçonnières » comme faisant partie d’un droit sexuel fondamental pour les femmes, on est aussi en droit de se poser la question suivante : est-ce que les « garçonnières » règlent le problème de ces femmes, dont la plupart aspirent au mariage ? « Certaines ont réussi à se marier par ce biais. Mais il y a des histoires terribles, selon lesquelles, les hommes ont été obligés de fuir », révèle Rachel Gogoua. 5 femmes, bien placées, que nous avons interrogées à Cocody et Yopougon, et qui ont requis l’anonymat, préfèrent exprimer directement leur désir de fonder un foyer aux hommes. C’est ce que d’ailleurs semble approuver l’imam. Il rappelle que Khadîdja, la première épouse du prophète Mohammad (paix, salut et bénédictions sur lui), a elle-même pris les devants pour son mariage. « Elle est partie à la rencontre du prophète et lui a proposé d’être son épouse. Cette femme était une commerçante pour qui le prophète travaillait à l’époque, alors qu’il avait 25 ans. K., elle, en avait 15 ans de plus », se souvient l’aumônier de la gendarmerie. Même si l’imam Cheick Abdoul Kader ne s’oppose pas à ce qu’une femme drague un homme, il pense que les fiançailles devraient se faire à la base. « Il est préférable pour une femme de se fiancer plus tôt que d’attendre la fin de ses études pour courir après les hommes ». Pour Constance Yaï, toutes les relations conjugales sont à mettre à l’initiative des femmes. « En général, les hommes croient avoir choisi la relation dans laquelle ils se trouvent. Alors qu’en fait, c’est par la volonté de la femme que la relation évolue dans un sens comme dans l’autre. Contrairement aux idées reçues, la femme n’est pas si passive que cela. Dans le cadre de la relation amoureuse, les hommes et les femmes n’ont pas la même approche. Souvent, la femme exprime ses sentiments de manière plus civilisée : par des gestes rassurants, par le regard ou par le sourire, mais pas de manière agressive et brutale. Toutefois, des exceptions existent», analyse-t-elle. Le pasteur est des plus intransigeants sur la question des initiatives féminines en matière de drague. « Il se trouve que de jeunes femmes nanties et intègres sont dans la solitude. Ce n’est pas une raison pour draguer un homme. Mais l’union entre une femme belle, aisée et un homme pauvre n’est pas interdite, quand le mariage se déroule selon la parole ». A titre d’exemple, il cite l’époque où il n’était pas encore pasteur. Et dans l’église qu’il fréquentait, il y avait un couple de fiancés peu ordinaires. « La jeune fille était une intellectuelle issue d’une famille pleine aux as. Et le jeune homme, lui, était pauvre. Des membres de l’église ont méchamment critiqué leurs fiançailles. On racontait même qu’il n’y avait pas d’avenir entre eux. Contre vents et marées, ils se sont mariés et vivent encore ensemble aujourd’hui ». L’homme de Dieu termine ses propos sur une note d’espoir. « Je pense qu’il ne faut pas désespérer. Ces femmes riches et même les moins nanties, en quête d’homme doivent se confier à Dieu. Dès l’instant que c’est dans la maison de Dieu, tout est possible ». Il est soutenu par l’imam Kader qui recommande vivement les hommes de foi aux femmes en quête de l’âme sœur. « Je demande à ces femmes d’aller vers les hommes qui ont la foi en Dieu. Un vrai croyant ne peut pas rejeter une femme pour sa situation sociale ou même l’escroquer. En retour, elles doivent être courtoises». Il supplie les hommes d’éviter le complexe d’infériorité face à la richesse des femmes. « Vous pouvez les aborder. Mais restez lucides. Ne foncez pas pour leur richesse. Mais allez-y pour déclarer une flamme sincère ». Advienne que pourra !

Nesmon De Laure
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