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Politique Publié le jeudi 3 juin 2010 | Le Nouveau Réveil

Toutes les médiations que le régime Gbagbo a tuées

Si la crise militaro-politique déclenchée en septembre 2002 perdure jusqu'aujourd'hui et peut-être perdurera encore, ce n'est pas faute d'interventions de la communauté internationale et de toutes les bonnes volontés pour y mettre fin. Des médiations et des négociations, il y en a eues. Mais elles ont jusque-là toutes été vidées de leurs contenus, tournées en dérision avant d'être jetées à la trappe. Pour la simple et bonne raison qu'elles ne vont pas dans le sens voulu par le chef de l'exécutif ivoirien. Elles ne lui donnent pas la maîtrise totale et le contrôle sans partage de la scène politique et du processus devant ramener la paix.
Quelques jours seulement après le déclenchement de la crise, la CEDEAO a crée le 30 septembre un groupe de contact qui se rend en Côte d'Ivoire. La première médiation de la CEDEAO commencée le 04 octobre 2002 a échoué parce que le Président Gbagbo était dans une logique de ne pas discuter avec des hommes en armes. Le 23 octobre, le Président togolais Gnassingbé Eyadéma est désigné par la CEDEAO coordinateur de la médiation. Les premières négociations directes entre la délégation du gouvernement conduite par Fologo et celle des rebelles du Mouvement Patriotique de Côte d'Ivoire (MPCI), conduite par Guillaume Soro ne donneront rien. Du côté du gouvernement, on n'accepte pas l'idée même de la présence des rebelles à Abidjan, au cœur du pouvoir. Le 3 décembre 2002, rencontre à Bamako des Présidents Laurent Gbagbo et Blaise Compaoré. Le 13 janvier 2003, Le représentant du gouvernement et les chefs du MPIGO et du MJP signent un accord de cessation des hostilités à Lomé. Du 15 au 24 janvier 2003 a lieu la table ronde à Linas-Marcoussis près de Paris. Qui donna l'Accord de Linas Marcoussis que Gbagbo accepta le 25 janvier en nommant depuis Paris, Seydou Diarra comme Premier Ministre. Mais ses partisans organisent en Côte d'Ivoire une série de manifestations anti-françaises pour dénoncer les accords signés à Marcoussis. Les manifestations dégénèrent en émeutes anti-françaises. Laurent Gbagbo de retour à Abidjan dira que l'Accord de Linas Marcoussis est un mauvais accord. Le 2 mai 2003, Mamadou Koulibaly, le président de l'Assemblée nationale, très proche de Laurent Gbagbo demande aux députés de ne pas légiférer avant le désarmement complet des rebelles. Seydou Diarra aura face à lui le FPI et e camp de Gbagbo qui l'empêcheront de travailler jusqu'à son éviction.
Le 25 mars 2004, manifestation à l'appel des " Marcoussistes " (PDCI, UDPCI, RDR, Forces Nouvelles…) pour l'application des accords de Marcoussis. Manifestation interdite par Laurent Gbagbo et durement réprimée (37 morts selon le gouvernement, entre 350 et 500 morts selon l'opposition, plus de 120 selon l'ONU). Les 29 et 30 juillet 2004, après les premiers sommets qui piétinaient faute de volonté politique de l'exécutif ivoirien, l'Accord d'Accra III, conclu entre tous les protagonistes de la crise ivoirienne et destiné à relancer le processus de paix en panne depuis 22 mois dans ce pays est signé. L'accord précise que le début du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) doit commencer au plus tard le 15 octobre. Mais rien ne sera fait comme il se doit. Par la faute de l'exécutif qui ne l'entendait pas de cette oreille. John Kuffuor, le Président Ghanéen, médiateur mandaté par la CEDEAO et l'UA apprendra à ses dépends que le pouvoir n'avait que faire des accords qu'il signe lui-même. Le 4 novembre, l'aviation des forces loyalistes bombarde Bouaké et Korhogo (85 morts et une centaine de blessés, selon les FN). Guillaume Soro, SG du MPCI, déclare que ces bombardements rendent "caducs les accords de paix". De nombreuses manifestations violentes de "Jeunes patriotes" pro-Gbagbo se déroulent à Abidjan.
Le 14 novembre 2004. Début de la médiation de Thabo Mbeki (Président de l'Afrique du Sud). Le sommet extraordinaire de l'Union Africaine (auquel ne participait pas Laurent Gbagbo) soutient le projet français de résolution devant être examiné le lendemain par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Nouvelle rencontre en Afrique du Sud entre M. Thabo Mbeki et des dirigeants de l'opposition ivoirienne. Une nouvelle coupure d'électricité, effectuée depuis Abidjan, touche tout le nord de la Côte d'Ivoire. Du 2 au 6 décembre 2004, Deuxième mission de médiation et de paix du Président Sud-africain Thabo Mbeki en Côte d'Ivoire qui se traduit par un accord de l'ensemble des parties sur un plan de sortie de crise comportant quatre propositions susceptibles d'accélérer la mise en œuvre des accords d'Accra et de Marcoussis. Mais une fois encore, le pouvoir Gbagbo mettra toutes les embûches au respect de cet accord jusqu'à ce que Mbeki qui n'arrive plus à faire plier les seuls opposants aux désidératas de Gbagbo, jette lui aussi l'éponge. Le 31 janvier 2005, Albert Tévoédjrè, représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la Côte d'Ivoire, quitte Abidjan au terme d'une mission de deux ans dans ce pays. Il est remplacé par Studdmann qui sera lui aussi remplacé par Pierre Schorie, qui lui-même sera remplacé par Choi Yong Guy.
Après avoir poussé à la porte les médiateurs Eyadema, Kuffuor et Mbeki, après avoir déchiré tous les accords, le régime ivoirien se lance dans sa propre solution. Le Chef de l'Etat lance le 31 décembre 2006 l'idée d'un dialogue direct avec ses ennemis des Forces Nouvelles. Le 22 Janvier, à Ouagadougou, sous l'arbitrage de Blaise Compaoré, les négociations entre le régime Gbagbo et les Forces Nouvelles commencent. Un accord dit Accord Politique de Ouagadougou (APO) est signé le 04 Mars 2007. Le 07 mars 2007, Soro Guillaume est nommé Premier Ministre au nom de cet accord. Cet accord devait amener la Côte d'Ivoire à des élections propres et ouvertes dans 10 mois. Mais 38 mois après, il est en passe d'être lui aussi jeté à la trappe.
Eddy PEHE



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