Pourquoi avez-vous décidez d'engager une lutte contre les dérives verbales ?
Il y a des mots comme nettoyer, désinfecter qui ne sont pas bien à entendre parce que cela renvoie à des déchets. A des personnes qu'on assimile à des cafards, des insectes. A quelque chose d'infecte d'où le mot désinfecter. Cela rappelle l'époque du nazisme où les Juifs étaient traités comme des pestiférés, des gens qui ont la gale et qu'il faut éliminer. Pour parler d'une liste électorale, employer des termes qui renvoient à cette époque, ce n'est pas conforme à ma façon de traiter l'être humain quelle que soit sa faute. Une personne qui a fraudé, si cela est avéré, il suffit de l'écarter de la liste tout simplement. Il suffit de dire retirer les fraudeurs de la liste électorale. Je n'aime pas également qu'on assimile les fraudeurs aux étrangers. On dit qu'il faut retirer les étrangers de la liste. C'est une lapalissade. Mais dire plutôt qu'il faut retirer les fraudeurs de la liste. Parce que tous les étrangers ne sont pas des fraudeurs. De même que tous les fraudeurs ne sont pas des étrangers. Il y a des Ivoiriens qui fraudent. Pas peut-être sur la nationalité, mais dans beaucoup d'autres domaines. Notamment aux concours de police, de l'Ena, d'enseignement. Et aussi dans l'état civil. Nous avons tous des amis qui ont eu à utiliser les pièces d'un parent. L'on doit mettre fin à ces choses qui n'honorent pas notre pays. N'oublions pas que nous sommes regardés à travers le monde. Ce n'est pas conforme à l'image d'hospitalité, de tolérance et de paix que la Côte d'ivoire a toujours véhiculée. Le droit n'est pas incompatible avec la tolérance. Attention à ces mots qui ne doivent pas nous replonger huit ans en arrière et qui portent en eux les germes de la crise.
N'est-ce pas votre origine libanaise qui guide votre position ?
Je me considère Ivoirien tout court. Je ne suis pas un produit importé. Je suis né ici, j'ai grandi ici. Je ne me considère pas comme un naturalisé mais comme un Ivoirien à part entière. Ce n'est donc pas lié à mon origine libanaise que je considère comme ivoirienne. Les premiers membres de ma communauté sont arrivés ici en 1893. Il y a cent dix-sept ans. C'est seulement que ces propos heurtent ma conscience, mon éducation et s'opposent à l'idée d'intégration, de tolérance que j'essaie de promouvoir. On peut être intransigeant sur la fraude à la nationalité, respecter le droit sans tomber dans la peur de l'étranger.
Arrivez-vous à exprimer votre position devant les proches du chef de l'Etat ?
Oui, ça arrive. Maintenant, que le message passe, cela est une autre question. En tout état de cause, je dis ce que je pense et je pense ce que je dis. N'en déplaise à certains. Je veux que les Ivoiriens soient unis. Si nous le sommes, il y a des termes que nous ne devons pas employer. Il ne faut pas exacerber ces tensions car nous ne sommes pas encore sortis de la crise.
Est-ce par courtoisie que vous ne dénoncez pas le terme « cancer » qu'a employé le ministre Hamed Bakayoko pour parler de Laurent Gbagbo ?
J'ai été également heurté dans mes convictions d'entendre cela. Je crois que ce sont des mots qu'il ne faut pas employer. Un jeune de la majorité présidentielle a employé le même mot pour parler d'Alassane Ouattara. Que ce soit ce jeune ou Hamed Bakayoko, qui représentent la classe politique future, ce sont des choses qu'il ne faut pas dire. Personne n'est le cancer de la Côte d'Ivoire. J'ai également entendu un membre influent du camp présidentiel dire que Bédié est le poison du pays ; les bras m'en tombent.
Propos recueillis par M. Dossa
Il y a des mots comme nettoyer, désinfecter qui ne sont pas bien à entendre parce que cela renvoie à des déchets. A des personnes qu'on assimile à des cafards, des insectes. A quelque chose d'infecte d'où le mot désinfecter. Cela rappelle l'époque du nazisme où les Juifs étaient traités comme des pestiférés, des gens qui ont la gale et qu'il faut éliminer. Pour parler d'une liste électorale, employer des termes qui renvoient à cette époque, ce n'est pas conforme à ma façon de traiter l'être humain quelle que soit sa faute. Une personne qui a fraudé, si cela est avéré, il suffit de l'écarter de la liste tout simplement. Il suffit de dire retirer les fraudeurs de la liste électorale. Je n'aime pas également qu'on assimile les fraudeurs aux étrangers. On dit qu'il faut retirer les étrangers de la liste. C'est une lapalissade. Mais dire plutôt qu'il faut retirer les fraudeurs de la liste. Parce que tous les étrangers ne sont pas des fraudeurs. De même que tous les fraudeurs ne sont pas des étrangers. Il y a des Ivoiriens qui fraudent. Pas peut-être sur la nationalité, mais dans beaucoup d'autres domaines. Notamment aux concours de police, de l'Ena, d'enseignement. Et aussi dans l'état civil. Nous avons tous des amis qui ont eu à utiliser les pièces d'un parent. L'on doit mettre fin à ces choses qui n'honorent pas notre pays. N'oublions pas que nous sommes regardés à travers le monde. Ce n'est pas conforme à l'image d'hospitalité, de tolérance et de paix que la Côte d'ivoire a toujours véhiculée. Le droit n'est pas incompatible avec la tolérance. Attention à ces mots qui ne doivent pas nous replonger huit ans en arrière et qui portent en eux les germes de la crise.
N'est-ce pas votre origine libanaise qui guide votre position ?
Je me considère Ivoirien tout court. Je ne suis pas un produit importé. Je suis né ici, j'ai grandi ici. Je ne me considère pas comme un naturalisé mais comme un Ivoirien à part entière. Ce n'est donc pas lié à mon origine libanaise que je considère comme ivoirienne. Les premiers membres de ma communauté sont arrivés ici en 1893. Il y a cent dix-sept ans. C'est seulement que ces propos heurtent ma conscience, mon éducation et s'opposent à l'idée d'intégration, de tolérance que j'essaie de promouvoir. On peut être intransigeant sur la fraude à la nationalité, respecter le droit sans tomber dans la peur de l'étranger.
Arrivez-vous à exprimer votre position devant les proches du chef de l'Etat ?
Oui, ça arrive. Maintenant, que le message passe, cela est une autre question. En tout état de cause, je dis ce que je pense et je pense ce que je dis. N'en déplaise à certains. Je veux que les Ivoiriens soient unis. Si nous le sommes, il y a des termes que nous ne devons pas employer. Il ne faut pas exacerber ces tensions car nous ne sommes pas encore sortis de la crise.
Est-ce par courtoisie que vous ne dénoncez pas le terme « cancer » qu'a employé le ministre Hamed Bakayoko pour parler de Laurent Gbagbo ?
J'ai été également heurté dans mes convictions d'entendre cela. Je crois que ce sont des mots qu'il ne faut pas employer. Un jeune de la majorité présidentielle a employé le même mot pour parler d'Alassane Ouattara. Que ce soit ce jeune ou Hamed Bakayoko, qui représentent la classe politique future, ce sont des choses qu'il ne faut pas dire. Personne n'est le cancer de la Côte d'Ivoire. J'ai également entendu un membre influent du camp présidentiel dire que Bédié est le poison du pays ; les bras m'en tombent.
Propos recueillis par M. Dossa