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Politique Publié le samedi 3 juillet 2010 | Notre Voie

Moralisation de la vie publique : La politique ivoirienne à l`épreuve du Gôpô et de la parole biblique

© Notre Voie Par Emma
1er mai - Les travailleurs présentent leurs doléances au président Laurent Gbagbo
Samedi 1er mai 2010. Abidjan, Palais présidentiel du Plateau. Le président Gbagbo assiste au défilé des travailleurs et à la présentation de leurs doléances
Le 20 juin dernier, le président Laurent Gbagbo a annoncé à la télévision, par la voix de son porte-parole, M. Gervais Coulibaly, la saisine du procureur de la République aux fins d'enquêter sur des accusations gravissimes mettant en cause la responsabilité du ministre de l'Intérieur, M. Désiré Tagro.

Ces accusations portent sur l'organisation du concours d'entrée à l’Ecole nationale de police sessions 2007, 2008 et 2009 ; la gestion des fonds destinés à l'organisation du Hadj éditions 2007, 2008, 2009 ; la gestion des 100 milliards de francs CFA d'indemnisation des victimes des déchets toxiques de Trafigura et sur une commission de dix milliards qui aurait été versée par la société SAGEM SECURITE. Depuis cette date, la politique ivoirienne semble engagée dans l'épreuve du Gôpô.

Le Gôpô est une épreuve de vérité chez les Bété, peuple du centre-ouest de la Côte d’Ivoire appartenant au groupe ethnique krou. Le Gôpô consiste à découvrir la véracité d'une accusation de sorcellerie. Pour l'essentiel, il consiste à recueillir et à mettre dans les yeux de l’accusé la sève d'un arbre appelé Gôpôhi. L'innocence de l'accusé est prouvée par l’écoulement de la sève accompagnée de larmes. L’accusé est coupable quand, manifestement ses paupières se referment comme engluées dans une colle forte et que l’accusé perd à jamais la vue.

En politique, on peut considérer comme étant de la sorcellerie tous ces actes ignobles nuisant à l'intérêt général, au nombre desquels il faut compter le népotisme, la gabegie et toutes les formes de corruption. Enquêter sur la gestion des affaires publiques peut donc être comparé à un véritable Gôpô. Face à toutes ces accusations contre le ministre de l'Intérieur, les immaculées conceptions du Rhdp se sont empressées de demander une enquête parlementaire, en plus de l'enquête judiciaire.

Pour le professeur Mamadou Koulibaly qui a porté haut et fort la voix d'une partie de ces accusations, il importe, d'une part, de dénoncer et de sanctionner les brebis galeuses de la bergerie Fpi, pour lui redonner une certaine crédibilité devant une partie non moins considérable du peuple qui crie à la trahison et, d'autre part, de redonner à la politique son sens éthique de servir l'intérêt général.

Pour le Rhdp (coalition de l'opposition), dont la demande est malgré tout légitime, l'occasion toute belle est trouvée de montrer au peuple qu'il y a de la paille dans les yeux de son adversaire Fpi.

Mais la démarche des députés Rhdp comporte des inconvénients. Elle ouvre de fait la boîte de pandore. Certes, la politique est loin de se confondre avec une homélie, mais celle-ci pourrait tout de même sagement inspirer les exigences et les actions de l'homme politique. Tout semble se passer comme si le Rhdp n'avait pas auparavant médité cette parole scripturaire :

“Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère et n'aperçois- tu pas la poutre qui est dans ton œil ? Ou comment peux-tu dire à ton frère : Laisse-moi ôter une paille de ton œil, toi qui as une poutre dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton œil, et alors tu verras comment ôter la paille de l'œil de ton frère”. (Matthieu 7 ; 3-5). Et, encore une nouvelle fois, c'est le Fpi qui semble l'avoir compris.

Le parti au pouvoir envisage à juste raison d'ôter la poutre de l'œil du Rhdp. Il a donc demandé qu'une enquête parlementaire soit également faite sur les trafics de diamant, d'or et de cacao en zone rebelle, ainsi que sur la téléphonie cellulaire et le foncier urbain à Abidjan. Cette demande également légitime des députés du Fpi devrait être accueillie avec acclamations par le Pdci. Du coup, cette épreuve généralisée du Gôpô serait l'occasion idéale pour tous les partis gouvernant ayant des candidats à l'élection présidentielle de faire la preuve de leur bonne moralité, de susciter la confiance des futurs électeurs et même de déterminer leur choix, pourvu que ces différentes enquêtes soient sérieusement et rigoureusement menées dans un esprit de transparence et de justice.

Mais la moralisation de la vie publique, en prenant un tel tournant, peut donner des frayeurs. Car il se pourrait que chaque accusateur, prenant conscience de son péché, refuse de jeter la pierre à l'accusé, à l'instar des Scribes et pharisiens renonçant à jeter la pierre à la femme adultère: “Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle. (..) Quand ils entendirent cela, accusés par leur conscience, ils se retirèrent un à un, depuis les plus âgés jusqu'aux derniers (…)” (Jean 8, 7-9).

Toutes celles et tous ceux qui, dans un camp comme dans l'autre, ont réclamé le Gôpô parlementaire peuvent-ils aller jusqu'au bout ? Attendons de voir.

Une contribution de Zeka Togui Copaci_infomail
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