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Politique Publié le samedi 3 juillet 2010 | Le Patriote

Interview / Koné Ousmane (Président du Groupe Parlementaire Solidarité) : “L’enquête parlementaire est une nécessité de bonne gouvernance”

L’affaire Tagro fait beaucoup de bruit. L’Assemblée nationale s’en est saisie à l’effet de mener une enquête parlementaire. L’un des initiateurs de cette procédure enclenchée le 29 juin dernier, le président du groupe parlementaire Solidarité, Koné Ousmane fait ici des précisions. « L’enquête parlementaire est une nécessité de bonne gouvernance », précise-t-il.

Le Patriote : Le 29 juin dernier, les députés ont enclenché une procédure de mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur l’affaire Tagro. Est-ce une action politique ou une nécessité de bonne gouvernance ?

Koné Ousmane : Notre action en faveur d’une enquête parlementaire sur l’affaire dite Tagro, est une nécessité de bonne gouvernance comme cela est de coutume dans tout pays démocratique. Ça n’a rien de politicien. Le pays est devenu presque ingouvernable. Rien ne se fait correctement et naturellement cela a des incidences fâcheuses sur la vie de la Nation. La corruption a pris une proportion plus qu’inquiétante. Si nous ne réagissons pas actuellement, la Côte d’Ivoire risque de devenir pire que des pays – je ne citerai pas de nom – qui sont gangrenés par la corruption devenu un fléau national.

LP : Il est de notoriété publique qu’il y a la corruption au concours d’entrée à l’école de Police.

Selon vous, quelles sont les conséquences de telles pratiques sur la société ivoirienne ?

KO : Les conséquences sont nombreuses et catastrophiques pour la bonne marche de la nation.

Voyez-vous, des personnes sans aucune enquête de moralité, encore moins sans aucune vérification de niveau intellectuel réel requise, sont parachutés dans ces écoles pour en ressortir comme des agents de l’Etat ou des policiers sensés assurer la sécurité. Dans ces cas, on n’est pas surpris de voir autant de bavures et de déviations de la part de nos policiers. Ainsi, la police tend à devenir une milice privée au service de ceux qui ont favorisé l’entrée à l’école de police dans les conditions lugubres. Avec une telle pratique, à la longue le régime qui a favorisé cela s’installe dans une dérive totalitaire. Car il sait qu’il sera soutenu par des personnes dont il a favorisé de manière injuste la promotion sociale. C’est tellement grave qu’il n’ y a pas de mots assez forts pour qualifier la situation qui profile à l’horizon. C’est un comportement anti-républicain. C’est à cela que nous députés, représentants du peuple, voulons nous attaquer une fois. Vous avez vu récemment, quand le maire du Plateau a voulu déguerpir la Sorbonne, les jeunes patriotes qui s’y trouvent se sont opposés, au grand dam de la police qui a avait été réquisitionnée à cet effet. Ce sont là quelques unes des conséquences des recrutements bizarres à l’Ecole de Police. La chaîne de commandement se trouve cassée et la hiérarchie bafouée. C’est très grave pour la sécurité des Ivoiriens. Si un groupe d’ethnie ou un parti politique quelconque s’accapare plus de la moitié des effectifs de la police, cette police n’est plus une police nationale. Tagro étant un juriste devrait tirer toutes les conséquences de cette affaire en démissionnant. Il doit faire en sorte que toute la lumière soit faite sur cette affaire, c’est important pour lui-même et sa carrière politique.

LP : Sur l’affaire Tagro, les Ivoiriens trouvent que les députés ont fait preuve de courage. Cependant, d’autres ne comprennent pas votre silence sur les scandales du café cacao, des déchets toxiques et des emplois fictifs au palais. Qu’en pensez-vous ?

KO : Les scandales que vous venez d’évoquer, tous les Ivoiriens en parlent. Toutefois, je voudrais dire que nous n’avons été silencieux sur les grandes préoccupations de la Nation. Nous avons effectivement enquêté sur plusieurs scandales. Notamment les déchets toxiques, la guerre et ses conséquences, sur ce qui se passe en zones CNO. C’est dire que ce n’est pas seulement maintenant que l’Assemblée nationale s’est saisie de ce genre de sujets. Des enquêtes ont été faites et les résultats existent.

LP : Pourquoi n’y a-t-il pas eu alors de suite à ces enquêtes ?

KO : Ce n’est pas à nous députés de donner une suite judiciaire ou administrative à des enquêtes que nous menons. Nous prenons seulement à témoin le peuple et l’histoire, et les pouvoirs étant séparés, chacun doit faire son travail.

LP : L’enquête sur l’affaire Tagro ne va-t-elle pas connaître le même sort ?

KO : Je ne le pense pas, car cette affaire a mobilisé toute la nation et les conséquences sont très graves pour la survie même des institutions. Comme je le disais, nous sommes mandataires du peuple ivoirien. Nous devons lui faire connaître les réalités de la nation, la vérité sur des dossiers. C’est au pouvoir judiciaire ou exécutif d’engager la suite des actions. Le peuple nous observe et sait qui aura failli à sa tâche. Alors au moment venu, il sanctionnera ceux qui auront failli à leur tâche. Les Ivoiriens ne sont pas atteints cécité politique, je pense qu’ils ne voteront pas des gens qui les traînent dans la boue, dans la misère et qui instaurent une injustice entre les fils et filles de la Côte d’Ivoire. C’est le peuple ivoirien de décider au moment opportun.

LP : Pourquoi Gbagbo a-t-il engagé une action judiciaire contre Tagro, l’un de ses plus proches collaborateurs ?

KO : Le Président Gbagbo est conscient de la gravité des problèmes soulevés par Mamadou Koulibaly. Il ne pouvait pas rester dans un silence perpétuel d’autant plus que cette affaire a été évoquée par l’un de ses collaborateurs également, membre de son régime. Je dirais même l’idéologue du parti au pouvoir, en l’occurrence Mamadou Koulibaly.

LP : N’est-ce pas une opération cosmétique pour redorer le blason de son régime ?

KO : cela va de soi. Mais une chose est de tenter de se blanchir et une autre est de pouvoir le réussir. Moi j’ai toujours dit, et j’en suis convaincu, que le temps joue contre Laurent Gbagbo et son régime. Car faire tous ces procès et tirer toutes les conséquences et aller aux élections, je pense que ce serait une tâche très fastidieuse pour le FPI. Les refondateurs doivent saluer la sortie de Mamadou Koulibaly car lui au moins a eu le courage de dénoncer les déviations de ses camarades du régime.

LP : D’aucuns pensent que tout cela s’inscrit dans une stratégie de diversion du FPI pour ne pas aller aux élections. Qu’en pensez-vous?

KO : Je ne pense pas que cela soit l’idée du Président Koulibaly. Peut-être des individus du régime veulent en profiter pour assouvir des desseins inavoués.

LP : Comment prenez-vous que le groupe parlementaire FPI ait décidé d’étendre les enquêtes parlementaires sur la zone CNO et sur les ministères que les cadres de l’opposition on déjà géré ou continuent de gérer ?

KO : Là je suis convaincu qu’il y a une tentative de noyer le poisson, une diversion pour détourner l’opinion de la problématique importante soulevée par Mamadou Koulibaly. On ne saurait confondre la zone CNO à l’époque, qui n’était pas sous le contrôle du gouvernement central, à la situation d’un ministre agissant dans la zone contrôlée par l’Etat.

LP : Est-ce alors une action d’équilibre de la terreur ?

KO : Terreur par rapport à quoi et qui ? Ce sont de petits jeux. Un problème réel est posé par une personnalité de haut rang et qui implique un ministre de la République, au nom des principes de la bonne gouvernance et de l’état de droit, nous devons y voir clair. Il n’ y a pas là une tentative de terroriser qui que ce soit. Le FPI voulant coûte que coûte créer cet équilibre démontre que Koulibaly n’a dit que la vérité. C’est la preuve que le FPI est coupable. Le pouvoir judiciaire doit faire son travail, le parlement doit faire le sien.

LP : Monsieur le député, vous êtes un élu du peuple. Depuis cinq ans, la Côte d’Ivoire court derrière les élections. Pensez-vous que cette année, elles auront lieu ?
KO : Les élections auront lieu effectivement cette année 2010.

LP : Qu’est ce qui fonde votre assurance ?

KO : Nous le disons parce qu’il y a une fin à chaque chose. Donc Gbagbo a beau manœuvrer, il finira par accepter cette évidence : la nécessité des élections. Par rapport à la souffrance des Ivoiriens, avec impatience, par rapport à la communauté internationale, par rapport à la détermination de la classe politique, je suis convaincu que les élections auront lieu cette année.

L.P : Dans le processus du contentieux sur la liste électorale, tous les présumés fraudeurs de la nationalité sont du Nord, quels commentaires en faites vous ?

K.O : Ce sont les alibis que le FPI avance pour retarder l’échéance électorale. Parce qu’il s’appelle, Traoré, Koné, Coulibaly tel n’est pas Ivoirien. En réalité, le FPI a peur du Nord. Ils se disent que la Force du Nord va leur faire perdre les élections. Le premier président Félix Houphouët-Boigny a géré la Côte d’Ivoire dans la tranquillité, parce qu’il a considéré tous les Ivoiriens du Nord au Sud, d’Est à l’Ouest comme des Ivoiriens pleins et entiers. Il savait faire la part des choses. Il n’y avait pas de différence entre les Ivoiriens de sa région natale et ceux des autres régions.

L.P. : Que pensez-vous de la coalition présidentielle mise en place par Gbagbo ?

K.O : La majorité présidentielle est un terme de campagne sans contenu véritable. C’est pour faire du sensationnel et faire croire qu’on a effectivement la majorité des citoyens derrière soi. La majorité présidentielle n’est pas la majorité des Ivoiriens.

L.P. : Gbagbo a cependant réussi à faire basculer de hauts cadres du Nord de son côté…

K.O : Ce sont des cadres qui savent pourquoi, ils ont basculé à la veille des élections dans le camp de Gbagbo. Quand on est au pouvoir, on a plusieurs moyens de pressions avec l’appareil de l’Etat. Mais ce dont je suis sûr, c’est que ces cadres ne peuvent pas changer la donne en si peu de temps. Peut-être qu’ils pourraient le faire à longs termes. Ces cadres ne peuvent donc rien apporter à Gbagbo, qui puisse le mettre à l’abri d’une véritable défaite. Les Ivoiriens sont matures. Avec tout ce qui se passe depuis 2000, ils auront le bon choix à faire pour la prospérité de toute la nation. Pour terminer, je demande à la CEI qui est le maître d’ouvrage du processus électoral de fixer la date des élections. Que l’Administration donne aux Ivoiriens leur pièce. Cela fait 10 ans que les Ivoiriens n’ont pas de pièce, c’est ridicule, une telle situation ne nous honore pas. Nous sommes marginalisés dans toute la sous région. Il n’y a pas un Ivoirien plus qu’un autre. Nous sommes tous des Ivoiriens. Des manipulations doivent cesser pour qu’enfin la Côte d’Ivoire retrouve le chemin de la paix et du développement.

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