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Art et Culture Publié le samedi 10 juillet 2010 | L’intelligent d’Abidjan

Les Samedis de Biton : Hier était la censure

Je viens de lire, presque, d’un trait le livre, les nouvelles de Mesmin Komoé, le syndicaliste du primaire.

J’ai beaucoup apprécié son style, fait de simplicité et de clarté comme tous les grands classiques.

Avec ce livre, publié à Frat mat éditions, il fait partie désormais des écrivains de ce pays. Avec beaucoup de patience et de choix, car il faut qu’il se décide pour l’écriture ou le syndicalisme, il comptera parmi les grands auteurs de ce pays. La littérature est jalouse et exigeante et ne supporte pas une autre rivale. Son livre aurait eu plus de succès avec une couverture en photo d’une femme qu’un dessin. Ce genre de maquette est dépassé depuis fort longtemps en littérature pour un large public. Le titre « Reine de la rue princesse »serait mieux adapté à une photo numérisée d’une belle jeune fille. La nouvelle qui m’a donné envie d’écrire cette chronique est intitulée : « Pardonnez-moi mon père, car j’ai péché. » Après l’avoir lu, je me suis replongé dans les années 87 à la sortie de mon livre :

« Ah, les femmes. » Pour la première fois, un auteur de ce pays osait porter à nu le comportement des prêtres, étant moi-même un militant catholique. Ma nouvelle : « L’abbé Jean-Baptiste » a connu beaucoup de succès et a été même porté à l’écran par Ndiya, cinéaste. A sa sortie, le livre a été interdit dans certaines librairies catholiques. Des clients ou des lecteurs se sont pris aux responsables de ces librairies, les traitant de tous les noms et dénigrant l’Eglise. Dieu merci, à l’époque on n’était pas encore à l’époque du printemps de la presse. Imaginons la presse people s’emparant de cette histoire. On m’aurait excommunié. Dans deux autres livres, des nouvelles encore, j’ai décris la vie et la situation de nos guides religieux. Mesmin, en début des années 70, n’aurait pas réussi à faire publier sa nouvelle qui est une critique acerbe et ironique envers des hommes en soutane. L’écrivain ne fait que critiquer des brebis galeuses pas tout le troupeau. Porter une critique contre une corporation ne veut pas dire qu’on la déteste. Au contraire, qui aime bien châtie bien. Mesmin Komoé a fait une œuvre de bienfaisance, car elle permet à chacun de se voir dans un miroir et de nettoyer son visage de certaines salissures . Certains fanatiques lui en voudront comme j’ai eu à subir leurs foudres de mes quatre écrits sur ma religion. Heureusement qu’un vent de démocratie a soufflé sur l’Afrique qui nous permet d’écrire ce qu’on ressent, de dire nos vérités dans un langage accessible à tout le peuple, même si chaque page a souvent ses codes secrets. Nous ne sommes plus à l’époque où on se cachait pour lire certains journaux venant de l’extérieur. Nous ne sommes plus à l’époque des tracts qu’on distribuait clandestinement ou qu’on jetait à minuit dans les rues. Ce n’est plus l’époque de la censure. On jetait en prison des citoyens qui osaient porter des critiques élémentaires contre le gouvernement. On ne publiait aucun article critique. Ne parlons pas des livres. Interdictions absolue de les vendre dans le pays. Que de manuscrits qui ont été refusés pour avoir dénoncé les travers des puissants. A l’époque, s’attaquer à l’Eglise était inimaginable. C’était se montrer païen. Aujourd’hui, quand je lis la presse qui s’attaque à nos prêtres et même à nos évêques, je me sens humilié. Mais je comprends rapidement que c’est le monde qui a changé et que l’Afrique est en train de combler son retard en matière de parole. Les vieux et non les vieillards, car il y a une différence, être vieillard est une question de connaissance, les sages n’imposent plus leur loi. On peut les regarder dans les yeux et non baisser la tête. Les enfants ont pris le pouvoir pour ne pas dire les blakoros, comme le romancier Ahmadou Koné. Certaines phrases de ce livre, de cette nouvelle, heurtent ma sensibilité de catho comme ceux qui vont les lire, même si j’ai eu à faire pire, mais je ne pense pas que l’auteur l’a fait dans une mauvaise intention. Il veut « purifier » l’église et permettre à nos prélats de faire attention à tous leurs gestes et comportements. Après avoir passé des années à sermonner les fidèles, il était temps que les fidèles se retournent contre eux pour montrer les dos de certains. Les histoires comme celles de Mesmin, on les entend chaque jour. Il est inutile d’en faire un procès, car nous ne sommes qu’au début d’une longue série d’écrits sur les hommes de Dieu. Je ne veux pas voir mon église désacralisée. Mais chaque fidèle, notamment les femmes, doivent revoir leur copie. Disons certaines femmes. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.

PS : Fait étrange. Depuis le début de la Coupe du monde en Afrique du Sud, une pieuvre prédit sans se tromper tous les résultats des matches à venir. Paul, le poulpe, se livre à ses activités divinatoires dans un bassin au fond de son aquarium en Allemagne. On met de la nourriture dans des urnes portant le drapeau de chaque pays. A chaque fois, il rentre dans celui du pays qui doit gagner. Il avait tout prédit pour l’Euro 2008. Pour le moment, il ne s’est pas encore trompé pour le mondial. Entre l’Allemagne et l’Espagne je savais d’avance qui remportera la victoire. C’est ce samedi que Paul désignera le vainqueur de la coupe du monde. Quel mystère !

Par Isaïe Biton Koulibaly
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