Jean Kambiré dit Bosco est président des jeunes patriotes et de la JFPI, et directeur local de campagne du candidat Laurent Gbagbo à Kétesso, un gros bourg d’environ quatre mille âmes dans la sous-préfecture de Bianouan. Dans cet entretien, il révèle une vaste fraude sur la liste électorale dans ledit village. «J’ai une liste de 367 Burkinabé reconnus comme tels dans le village inscrits sur la liste électorale, dénonce-t-il. Notre Voie : Il nous est revenu que de nombreux étrangers se sont fait enrôler à Kétesso. Aujourd’hui, avec l’affichage des listes, peut-on affirmer que des fraudeurs sont passés par les mailles du filet ? Jean Kambiré : Ce que vous dites n’est pas faux. Ici à Kétesso, nous avons constaté, pendant l’enrôlement, que des étrangers, notamment des Burkinabé, se faisaient enrôler. Nous avons interpellé, en son temps, le président local de la Commission électorale indépendante (CEI). Celui-ci a fait croire aux villageois que les appareils peuvent détecter les fraudeurs. Nous avons donc fait confiance aux appareils. Au fil du temps, nous avons constaté que des étrangers s’enrôlaient. Le chef de centre, que j’ai interpellé, m’a répondu, encore une fois, que la machine va détecter les faussaires. Il m’a même dit que je n’y pouvais rien, si je n’ai pas d’appui. J’ai dressé une liste de 367 Burkinabé qui figurent sur la liste électorale définitive. J’ai relevé les noms et prénoms, et le numéro matricule de chacun d’eux. Beaucoup parmi eux ont gardé le nom de famille et changé le ou les prénoms. Je souhaite profiter de votre canal pour attirer l’attention de l’Etat, du chef du gouvernement et du ministre de la justice, et même de la gendarmerie afin qu’ils prennent leurs responsabilités face à cette situation. Je suis plaignant. Je souhaite que les gens nous expliquent comment ils se sont retrouvés sur la liste. N.V. : Qu’est-ce qui vous fait dire que ce sont des Burkinabé et non des Ivoiriens ? Ils pourraient aussi porter plainte contre vous. J.K. : A Kétesso, on se connaît tous. On sait l’origine de tout un chacun. Mon père est un Lobi du Burkina et ma mère est Agni. J’ai choisi le pays de ma mère, tout en restant fier de mes origines. Prenez, par exemple, le cas d’un certain Traoré Yacou, Burkinabé. Il détenait une carte consulaire du Burkina Faso. A notre grande surprise, il réapparaît sur la liste électorale sous l’identité de Traoré Moktar, Ivoirien. Comment a-t-il fait ? Où a-t-il eu les papiers nécessaires pour changer d’identité et de nationalité ? Ce n’est pas tout. Il y a aussi le cas de Koné Foussény, un jumeau de nationalité burkinabé. Il a même été interpellé par la gendarmerie. Il a le numéro matricule V 0101793955, né le 01 / 01 / 1969 à Bingerville. Son père s’appelle Koné Seydou, Burkinabé, et sa mère Coulibaly Minata, également Burkinabé. Bizarrement, son frère cadet Koné Yacouba, de même père et de même mère que lui, a une autre mère qui s’appelle Soulama Karidja. Ces deux frères sont connus à Kétesso comme étant les enfants d’un même homme et d’une même femme. De nombreux Lobi du Burkina se font aussi passer pour des Lobi de Bouna, quand ils veulent frauder. Au Burkina, on a Kambiré Poda. En Côte d’Ivoire, vous entendrez Kambiré Pouda. Il y a toujours une petite différence entre les noms. Un autre cas patent de fraude : Momo Daniel, un Lobi dont le père s’appelle Momo Gnindja. Il a pour sœur Kambou Hérie Solange. Les deux sont du même père, Momo Gnindja. Curieusement, Kambou Hérie Solange s’est trouvé un autre père du nom de Kambou Tiéfilè, qui, lui, est Ivoirien.
Quand je dénonce toutes ces irrégularités, des parents burkinabé me demandent pourquoi je traque mes propres frères. Les gens ne font pas du faux pour voter forcément, mais pour avoir des papiers ivoiriens et se prévaloir des mêmes titres et droits. Je ne peux pas vendre le pays de ma mère. Moi, je n’ai pas encouragé mes demi-frères à frauder sur la nationalité ; pourquoi je le ferais pour d’autres ? Demain, certains d’entre eux arracheront des terres à leurs propriétaires. D’autres disent qu’ils sont militants du RDR. Je leur ai répondu que le RDR n’est pas un parti politique burkinabé. Je leur ai toujours dit que je ne suis pas d’accord qu’on fraude sur la nationalité sous le parapluie d’un parti politique, que ce soit le FPI, le PDCI, le RDR ou tout autre.
Entretien réalisé par Sam K.D.
Quand je dénonce toutes ces irrégularités, des parents burkinabé me demandent pourquoi je traque mes propres frères. Les gens ne font pas du faux pour voter forcément, mais pour avoir des papiers ivoiriens et se prévaloir des mêmes titres et droits. Je ne peux pas vendre le pays de ma mère. Moi, je n’ai pas encouragé mes demi-frères à frauder sur la nationalité ; pourquoi je le ferais pour d’autres ? Demain, certains d’entre eux arracheront des terres à leurs propriétaires. D’autres disent qu’ils sont militants du RDR. Je leur ai répondu que le RDR n’est pas un parti politique burkinabé. Je leur ai toujours dit que je ne suis pas d’accord qu’on fraude sur la nationalité sous le parapluie d’un parti politique, que ce soit le FPI, le PDCI, le RDR ou tout autre.
Entretien réalisé par Sam K.D.