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Politique Publié le mardi 31 août 2010 | L’expression

Entretien - Amadou Diallo Ddc d’ADO à Divo: "Ce qui s’est passé est inacceptable"

© L’expression Par Emma
Procès en radiation - Le traitement du contentieux électoral au tribunal d’Abidjan-Plateau
Jeudi 26 août 2010. Abidjan. Palais de justice du Plateau. Les Ddc de Laurent Gbagbo d’Abobo et d’Adjamé déboutés à l’examen de leurs requêtes de radiation sur la liste électorale provisoire
Dans le cadre des investigations que nous avons menées à Divo pour comprendre le fort taux de radiation dans le Djiboua, nous avons interrogé le Directeur départemental de campagne d’ADO. Entretien.


Que s’est-il passé pour qu’on radie plus de 2.000 pétitionnaires ici?

En ce qui concerne les radiations, les responsables du Fpi ont attendu le quatorzième et dernier jour pour ne pas se présenter eux-mêmes. Ils ont dépêché un huissier, Me Sétémoin Bruno. Il s’est présenté à la Cei à 13h 26 selon le rapport de la Cei (il le présente). Il s’est déclaré porteur de onze volumes de liste intitulés « Fraudeurs sur la liste électorale à radier ». Et les commissaires lui ont rétorqué qu’il n’y avait pas de problème. Ils lui ont donné à asseoir et lui ont dit que ce ne sont pas des listes qu’ils reçoivent, mais celui qui demande la radiation d’un tiers remplit un formulaire au nom de la personne. Ils lui ont donc offert une table, une chaise et une pile de formulaires afin qu’il les remplisse sur place. L’huissier refuse sous prétexte qu’il a été mandaté par le député Akpallé Jacob et le maire Assé Badja Camille pour déposer des listes mais pas pour venir remplir des fiches. Les commissaires ont dit que vu qu’ils ne reçoivent pas des listes mais des formulaires remplis, ils lui ont demandé d’aller voir ses mandataires afin qu’ils viennent avec plusieurs personnes pour les aider à remplir les formulaires. Et cela a fait l’objet d’une séance de travail entre l’huissier de justice et les commissaires présents dont ceux du Fpi. Après la rencontre, il a déclaré avoir pris acte. Et il s’est retiré pour ne plus revenir. Quelques jours après, nous apprenons qu’ils étaient en train de se soumettre aux formalités comme l’exige le mode opératoire, mais au domicile du député Gnékpa Akpalé Jacob. Muni des numéros de formulaire des requérants, des pétitionnaires, ils ont tiré les fiches d’inscription des différentes personnes et ils y agrafent un formulaire de réclamation rempli. C’est ainsi qu’ils ont rempli des milliers de fiches.

Qu’ont-ils fait par la suite avec ces dossiers qui ne sont apparemment pas été retournés à la Cei pour être visés par les commissaires?

Ils sont allés directement au tribunal puisque la Cei ne recevait plus de réclamation. Et le président du tribunal les juge recevable ; il les accepte. Or le mode opératoire est clair là-dessus. Il dit bien que la condition de recevabilité au tribunal exige que la première formalité soit accomplie à la Cei. C’est même le préalable.


Avez-vous entrepris des actions sur le terrain pour attirer l’attention des autorités politiques, administratives et judiciaires afin d’aplanir les incompréhensions?

Absolument. Nous, responsables du Rdr à Divo, ayant vu ce qui se profilait à l’horizon, avons entrepris des démarches pour anticiper parce que c’est le non respect du mode opératoire qui a entrainé des violences en février. Nous avons initié des rencontres avec la préfecture, le commissaire du district, le commandant de compagnie et nous avons demandé à être reçus par le président du tribunal. A toutes ces autorités citées plus haut, nous avons exprimé nos préoccupations quant à ce qui se préparait. Nous observions qu’on commettait les mêmes erreurs de février. Nous souhaitions que les gens tiennent compte du mode opératoire pour éviter les problèmes. A la préfecture, partout où nous sommes passés, ils nous ont écoutés. Ils nous ont dit qu’ils ont pris bonne note. Quand nous avons cherché à rencontrer le président du tribunal, à notre grande surprise, nous constatons qu’il a fait appel aux responsables du Fpi, aux journalistes, à un représentant d’organisation de défense des droits de l’Homme. Mais je souligne qu’il n’a invité ni le Pdci, ni le Pit, encore moins l’Udpci et le Mfa. C’est le Rdr qui s’est retrouvé en face du Fpi. Nous avons accepté de discuter en lui faisant part de nos griefs. Nous avons pris le soin de rédiger une motion d’information dont nous lui avons remis copie. Il dit que la Cei est obligée de recevoir les requérants. Dès lors que la Cei refuse de recevoir les demandeurs, il estime que le tribunal saisi est en droit de statuer.

Ce qui n’est pas faux. Car une fois que le tribunal est saisi, il doit rendre sa décision.
Nous lui avons rappelé que la Cei dans le mode opératoire ne reçoit pas des listes mais des formulaires dûment remplis. Par la suite, la Cei statue sur les dossiers avant d’inscrire sa décision. Et si elle se déclare incompétente, vous partez au tribunal. Mais ici, cela n’a pas été le cas. Si les commissaires n’ont pas siégé comment veut-il qu’ils portent leurs observations ?

Qu’a-t-il fait pour se justifier et vous convaincre de la recevabilité des demandes?
Il a sorti le texte de loi que j’ai ici (il le fait sortir). Il nous lit l’article 15 en se gardant de lire l’article 16 qui dit le contraire.

Que dit l’article 16?
L’article 16 dit dans son alinéa 3 que « la réclamation devant la Cei est préalable à tout recours devant les juridictions compétentes ». Depuis ce jour, nous avons compris qu’il avait déjà une idée arrêtée et que les arguments qu’il avait développés en février tiennent toujours. Il demeure donc sur cette même ligne. Et quel que soit ce qu’on va apporter comme argumentation, ça serait peine perdue. Il a décidé donc d’être au service du Fpi puisque ce sont eux qui demandent les radiations. Il nous a reçus un mercredi et dès le lendemain nous avons constaté qu’il a plaqué la liste de février qui a entrainé les violences. Sur cette liste, j’ai trois enfants pour lesquels j’a eu à produire des documents prouvant qu’ils ne sont pas des fraudeurs. A ma grande surprise, leurs noms figurent toujours sur cette liste. Il a prononcé leur radiation, puis il a affiché 699 noms dont-il a annoncé la radiation avec les mêmes argumentaires, et enfin 701 noms dont il a prononcé la radiation. Personne n’était présent puisque les mis en cause n’ont pas été avertis de quelque manière que ce soit. Nous avons appris par exemple qu’à Gagnoa, on lisait les noms à la radio locale. Au moins, ils ont essayé d’informer. Ici, la liste a été affichée moins de 48 h avant pour 600 et 700 personnes. Il y en a qui sont très loin de Divo. Certains sont à 50 km voire 100 km d’ici. Il n’y avait donc personne à l’audience pour porter la contradiction. Qui sont ces demandeurs en radiation ? Ce sont les deux députés et le maire.

Pourquoi personne ne s’est rendu à l’audience, même en étant en ville?
S’ils n’ont pas respecté le mode opératoire, pourquoi nous nous sentirons obligés d’aller répondre. A ce que je sache, ils ne sont pas au-dessus de la loi.


Puisque la décision du juge est irrévocable. Qu’allez-vous faire?
Je ne sais pas si les gens ont eu une bonne idée de mettre dans le décret que la décision du juge est sans recours. Mais, comment avec une telle légèreté quelqu’un se lève pour dire que tel ou tel parce qu’il s’appelle Diallo, n’est pas ivoirien. Qui peut accepter ça? Personne.


Que décidez-vous après ces radiations, puisque vous ne participerez pas au vote selon la décision du juge?

Nous allons aussi intenter une action contre eux, même si c’est après les élections. Nous attendons d’abord de voir. Nous pensons que le Droit n’a pas été dit. A notre avis, si la Cei accepte de radier les pétitionnaires alors que c’est elle qui est mise en cause dans l’arrêt du président du tribunal, ça veut dire qu’elle reconnait qu’elle est en faute.


Les gens qui ne se sont pas présentés sont-ils en faute?

J’estime que nous ne sommes pas en faute.

Quel message à vos militants radiés de la liste?

C’est un message de calme, de patience. Nous allons prendre le temps nécessaire pour les repérer. Ils vont déposer leurs pièces afin qu’on les rétablisse dans leur citoyenneté. Je suis un fonctionnaire de l’Etat. J’ai fait mon service militaire. Mon n° matricule est le 2163 0024 de la classe 65 1B. J’ai accompli mon service militaire à l’école des cadres des services civiques à Bouaké. Et, j’ai travaillé comme instituteur pendant 30 ans. J’ai fini ma carrière comme conseiller d’éducation. Aujourd’hui, je suis à la retraite. Après de bons et loyaux services, j’ai été décoré comme chevalier du mérite de l’éducation par Balla Kéita, j’ai été décoré comme chevalier du mérite de la culture par Dion Sadia, ensuite sur le plan sportif, j’ai été décoré par Fologo comme chevalier du mérite à Gagnoa. J’ai mérité de la nation, j’ai servi honnêtement. Ils prennent les noms de mes enfants qu’ils déclarent fraudeurs, des étrangers. Est-ce que vous pensez qu’on peut rester sans réaction? Le cas de mes enfants est pareil à celui de milliers de personnes dans le pays et particulièrement à Divo. Sur la liste des radiés, il y a les noms d’enseignants, d’instituteurs en service, des gens qui votent depuis des années. C’est inacceptable.



Réalisée par Gnahoré David


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